Texte intégral
Q- La CFE-CGC a finalement voté l'accord sur l'Unedic. J'imagine que pour vous, c'est un soulagement ?
R- C'est une bonne nouvelle, mais ce n'est pas une surprise pour la CFDT. La CFE-CGC participe à cette majorité de gestion depuis pas mal de temps et ce n'est qu'une continuation de son engagement. Mais cette signature de trois organisations syndicales ne doit pas nous empêcher de nous poser la bonne question aujourd'hui : c'est celle de la remise à plat du système...
Q- J'allais vous la poser ! Parce que tout de même, après ces atermoiements, le paritarisme ne sort pas grandi !
R- Le paritarisme est en grande difficulté dans notre pays, pour deux raisons : les syndicats doivent se poser la question de leur utilité, de leur capacité à amener des résultats et à réformer un système d'assurance chômage qui, aujourd'hui, n'est plus vraiment adapté à la situation de l'emploi. Ce système a été créé au début des années 60, en 1959 exactement, à une période où il n'y avait pratiquement pas de chômeurs. Aujourd'hui, nous avons un système d'emploi de plus en plus précarisé, on vient de le voir avec les saisonniers. On a un marché de l'emploi où les entreprises utilisent de plus en plus les CDD. Il faut donc que l'on adapte absolument ce système à la réalité du marché de l'emploi...
Q- Comment l'adapte-t-on ? Que préconisez-vous ?
R- En s'engageant, en signant. Trois organisations syndicales viennent de décider de faire une remise à plat totale du système. Et quand on dit une remise à plat totale du système, c'est regarder d'une part quelle est la vraie réalité des contrats de travail aujourd'hui, d'autre part quel est le comportement des entreprises, est-ce qu'elles ne sur-utilisent pas ce système justement pour mettre plus de flexibilité, et comment on l'adapte. Et j'espère que lorsque nous allons faire, puisque nous allons le faire dans les dix-huit mois qui viennent, nous aurons un peu plus d'organisations syndicales, cette fois-ci, pour s'engager.
Q- D. de Villepin veut inverser la spirale de la dette française. J'imagine que vous ne pouvez être que d'accord avec l'objectif. Il y aurait bien une méthode : réduire le nombre de fonctionnaires...
R- Voilà, on ne parle que d'une méthode : réduire le nombre de fonctionnaires ! On ne parle pas de comment on produit plus de moyens pour l'Etat français. Parce que si l'on a une vraie difficulté au niveau de la dette, c'est que l'on a un vrai problème de productivité de l'économie française, pour amener des ressources...
Q- Les dépenses publiques représentent 53,5 % du PIB, c'est pratiquement un record.
R- Il y a deux choses : augmenter le PIB mais, en même temps, le Gouvernement français est un peu hypocrite d'avoir ce discours, parce qu'il ne faut pas oublier que ces trois dernières années, il s'est privé de recettes importantes en baissant les impôts. Connaissez-vous beaucoup de personnes, qui ont des difficultés financières chez elles, et qui volontairement baissent leurs revenus ? Non, ce n'est pas possible. On a donc là un vrai problème sur les recettes de l'Etat.
Q- Faut-il augmenter les impôts ?
R- Non, je ne dis pas qu'il faut augmenter les impôts, mais il ne fallait pas les baisser. La CFDT a toujours dit que cette mesure était mauvaise. En plus, elle favorise les plus hauts revenus au détriment des plus faibles, parce que on est en train de transférer les dépenses de l'Etat sur les ménages, particulièrement les plus faibles. On va donc endetter les ménages. Deuxième chose : avant de parler de la suppression de fonctionnaires, il faut savoir un petit peu ce que l'on veut faire pour l'Etat. Quel est le projet du Gouvernement sur l'avenir de l'Etat français ? Quelles sont ses missions, pour l'éducation, pour l'emploi, pour la recherche, pour la sécurité, la justice ? Et c'est en fonction de ces objectifs que l'on décidera ensuite du nombre de fonctionnaires. Mais ne mettons pas la charrue avant les b?ufs !
Q- Il y a des négociations qui vont débuter sur les hausses salariales dans la fonction publique. On a lu que C. Jacob pourrait proposer 0,5 % d'augmentation. Cela vous paraît-il une base satisfaisante ?
R- Non, honnêtement, si le ministre ne vient qu'avec cette proposition-là, les négociations ne vont pas durer longtemps ! 0,5 %, on ne connaît pas d'entreprise, on ne connaît pas de secteur professionnel, où les syndicats accepteraient une augmentation qui n'est même pas le tiers de l'inflation. Mais puisque vous me parlez de la dette, puisque vous me parlez de la réforme de l'Etat, peut-on aussi avoir une réflexion sur la qualification, les carrières des fonctionnaires, en fonction des objectifs de l'Etat ? C'est-à-dire qu'en plus de cette négociation sur les salaires qui est importante, nous voulons une négociation sur le déroulement des carrières professionnelles, pour que les fonctionnaires soient peut-être plus mobiles, qu'ils aient une meilleure formation, pour pouvoir évoluer pendant leur carrière en fonction des besoins des usagers.
Q- La CGT va organiser une journée de mobilisation, le 31 janvier prochain, sur l'emploi et les salaires. Elle n'appelle pas à la grève, mais à une mobilisation. Allez-vous vous y associer ?
R- Pour le moment, la CGT ne nous en a pas parlé, elle est seule sur cette démarche...
Q- Et sur la démarche, une mobilisation sans grève, que cela vous inspire-t-il ?
R- Une mobilisation sans grève, c'est ce que l'on a fait le 4 octobre, c'est ce que l'on a fait un peu avant au mois de mars. La CFDT est pour faire des mobilisations qui amènent des résultats concrets. Donc avant de décider les moyens de notre action, décidons des objectifs. Et il me semble que la difficulté que nous avons entre organisations syndicales, c'est de donner des objectifs communs. Donc ce n'est pas la mobilisation en soi qui nous intéresse, ce sont les objectifs que l'on se donne et les moyens pour les obtenir. Et pour le moment, on n'en est pas encore à ce débat avec la CGT.
Q- Il y a la méthode aussi, qui est intéressante : une mobilisation sans arrêt de travail...
R- Ce n'est quand même pas nouveau de faire une mobilisation sans arrêt de travail ! C'est tous les jours que l'action syndicale, dans les entreprises, fait des mobilisations sur ce sujet-là...
Q- Mais la CGT ne nous a pas habitué à cela quand même...
R- Eh bien, cela veut dire que la CGT a tiré les leçons des derniers mouvements dans les services publics, qui ont été des échecs, parce que justement, la CGT était en décalage avec ce que voulaient les agents des services publics à ce moment-là. C'est une bonne chose. Mais nous sommes prêts à débattre avec la CGT des objectifs : que cherche-t-on et quelles sont les meilleures façons pour atteindre ces objectifs, sur l'emploi, sur le pouvoir d'achat ? C'est le débat qui existe depuis le 4 octobre, où l'on n'a pas réussi à déboucher d'une façon très concrète sur nos objectifs. Il est donc important que l'on reprenne ce débat-là, avant de décider le type de mobilisation.(Source: premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 17 janvier 2006)
R- C'est une bonne nouvelle, mais ce n'est pas une surprise pour la CFDT. La CFE-CGC participe à cette majorité de gestion depuis pas mal de temps et ce n'est qu'une continuation de son engagement. Mais cette signature de trois organisations syndicales ne doit pas nous empêcher de nous poser la bonne question aujourd'hui : c'est celle de la remise à plat du système...
Q- J'allais vous la poser ! Parce que tout de même, après ces atermoiements, le paritarisme ne sort pas grandi !
R- Le paritarisme est en grande difficulté dans notre pays, pour deux raisons : les syndicats doivent se poser la question de leur utilité, de leur capacité à amener des résultats et à réformer un système d'assurance chômage qui, aujourd'hui, n'est plus vraiment adapté à la situation de l'emploi. Ce système a été créé au début des années 60, en 1959 exactement, à une période où il n'y avait pratiquement pas de chômeurs. Aujourd'hui, nous avons un système d'emploi de plus en plus précarisé, on vient de le voir avec les saisonniers. On a un marché de l'emploi où les entreprises utilisent de plus en plus les CDD. Il faut donc que l'on adapte absolument ce système à la réalité du marché de l'emploi...
Q- Comment l'adapte-t-on ? Que préconisez-vous ?
R- En s'engageant, en signant. Trois organisations syndicales viennent de décider de faire une remise à plat totale du système. Et quand on dit une remise à plat totale du système, c'est regarder d'une part quelle est la vraie réalité des contrats de travail aujourd'hui, d'autre part quel est le comportement des entreprises, est-ce qu'elles ne sur-utilisent pas ce système justement pour mettre plus de flexibilité, et comment on l'adapte. Et j'espère que lorsque nous allons faire, puisque nous allons le faire dans les dix-huit mois qui viennent, nous aurons un peu plus d'organisations syndicales, cette fois-ci, pour s'engager.
Q- D. de Villepin veut inverser la spirale de la dette française. J'imagine que vous ne pouvez être que d'accord avec l'objectif. Il y aurait bien une méthode : réduire le nombre de fonctionnaires...
R- Voilà, on ne parle que d'une méthode : réduire le nombre de fonctionnaires ! On ne parle pas de comment on produit plus de moyens pour l'Etat français. Parce que si l'on a une vraie difficulté au niveau de la dette, c'est que l'on a un vrai problème de productivité de l'économie française, pour amener des ressources...
Q- Les dépenses publiques représentent 53,5 % du PIB, c'est pratiquement un record.
R- Il y a deux choses : augmenter le PIB mais, en même temps, le Gouvernement français est un peu hypocrite d'avoir ce discours, parce qu'il ne faut pas oublier que ces trois dernières années, il s'est privé de recettes importantes en baissant les impôts. Connaissez-vous beaucoup de personnes, qui ont des difficultés financières chez elles, et qui volontairement baissent leurs revenus ? Non, ce n'est pas possible. On a donc là un vrai problème sur les recettes de l'Etat.
Q- Faut-il augmenter les impôts ?
R- Non, je ne dis pas qu'il faut augmenter les impôts, mais il ne fallait pas les baisser. La CFDT a toujours dit que cette mesure était mauvaise. En plus, elle favorise les plus hauts revenus au détriment des plus faibles, parce que on est en train de transférer les dépenses de l'Etat sur les ménages, particulièrement les plus faibles. On va donc endetter les ménages. Deuxième chose : avant de parler de la suppression de fonctionnaires, il faut savoir un petit peu ce que l'on veut faire pour l'Etat. Quel est le projet du Gouvernement sur l'avenir de l'Etat français ? Quelles sont ses missions, pour l'éducation, pour l'emploi, pour la recherche, pour la sécurité, la justice ? Et c'est en fonction de ces objectifs que l'on décidera ensuite du nombre de fonctionnaires. Mais ne mettons pas la charrue avant les b?ufs !
Q- Il y a des négociations qui vont débuter sur les hausses salariales dans la fonction publique. On a lu que C. Jacob pourrait proposer 0,5 % d'augmentation. Cela vous paraît-il une base satisfaisante ?
R- Non, honnêtement, si le ministre ne vient qu'avec cette proposition-là, les négociations ne vont pas durer longtemps ! 0,5 %, on ne connaît pas d'entreprise, on ne connaît pas de secteur professionnel, où les syndicats accepteraient une augmentation qui n'est même pas le tiers de l'inflation. Mais puisque vous me parlez de la dette, puisque vous me parlez de la réforme de l'Etat, peut-on aussi avoir une réflexion sur la qualification, les carrières des fonctionnaires, en fonction des objectifs de l'Etat ? C'est-à-dire qu'en plus de cette négociation sur les salaires qui est importante, nous voulons une négociation sur le déroulement des carrières professionnelles, pour que les fonctionnaires soient peut-être plus mobiles, qu'ils aient une meilleure formation, pour pouvoir évoluer pendant leur carrière en fonction des besoins des usagers.
Q- La CGT va organiser une journée de mobilisation, le 31 janvier prochain, sur l'emploi et les salaires. Elle n'appelle pas à la grève, mais à une mobilisation. Allez-vous vous y associer ?
R- Pour le moment, la CGT ne nous en a pas parlé, elle est seule sur cette démarche...
Q- Et sur la démarche, une mobilisation sans grève, que cela vous inspire-t-il ?
R- Une mobilisation sans grève, c'est ce que l'on a fait le 4 octobre, c'est ce que l'on a fait un peu avant au mois de mars. La CFDT est pour faire des mobilisations qui amènent des résultats concrets. Donc avant de décider les moyens de notre action, décidons des objectifs. Et il me semble que la difficulté que nous avons entre organisations syndicales, c'est de donner des objectifs communs. Donc ce n'est pas la mobilisation en soi qui nous intéresse, ce sont les objectifs que l'on se donne et les moyens pour les obtenir. Et pour le moment, on n'en est pas encore à ce débat avec la CGT.
Q- Il y a la méthode aussi, qui est intéressante : une mobilisation sans arrêt de travail...
R- Ce n'est quand même pas nouveau de faire une mobilisation sans arrêt de travail ! C'est tous les jours que l'action syndicale, dans les entreprises, fait des mobilisations sur ce sujet-là...
Q- Mais la CGT ne nous a pas habitué à cela quand même...
R- Eh bien, cela veut dire que la CGT a tiré les leçons des derniers mouvements dans les services publics, qui ont été des échecs, parce que justement, la CGT était en décalage avec ce que voulaient les agents des services publics à ce moment-là. C'est une bonne chose. Mais nous sommes prêts à débattre avec la CGT des objectifs : que cherche-t-on et quelles sont les meilleures façons pour atteindre ces objectifs, sur l'emploi, sur le pouvoir d'achat ? C'est le débat qui existe depuis le 4 octobre, où l'on n'a pas réussi à déboucher d'une façon très concrète sur nos objectifs. Il est donc important que l'on reprenne ce débat-là, avant de décider le type de mobilisation.(Source: premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 17 janvier 2006)