Déclaration de M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères, sur les questions prioritaires examinées au Conseil européen des 23 et 24 mars 2006 concernant la politique économique, la sécurité d'approvisionnement énergétique et la recherche innovation, Paris le 21 mars 2006.

Prononcé le

Circonstance : Déclaration du gouvernement préalable au Conseil européen des 23 et 24 mars 2006 et débat sur cette déclaration à l'Assemblée nationale à Paris le 21 mars 2006

Texte intégral

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Députés,
Dans deux jours, avec Thierry Breton et Catherine Colonna, j'accompagnerai le président de la République à Bruxelles pour participer au Conseil européen de Printemps, consacré aux questions économiques et sociales.
Traditionnellement en effet, ce Conseil européen traite de ce qu'on appelle la "stratégie de Lisbonne" pour la croissance et l'emploi. Si l'objectif de cette stratégie est essentiel, et si la méthode de coordination qu'elle crée entre les Etats membres a eu de nombreux résultats positifs, il faut reconnaître que les citoyens européens ont souvent du mal à comprendre concrètement ce que l'Europe fait pour la croissance et l'emploi. Nous devons donc agir pour que cette stratégie de Lisbonne devienne moins abstraite et qu'elle soit aussi mieux comprise.
Nous avons une obligation, nous devons porter une exigence, bâtir une maison commune européenne au service des citoyens.
Un premier progrès pour la lisibilité de cette stratégie a été l'élaboration par chaque Etat membre d'un "programme national de réforme". Il permet à chacun de s'engager en faveur de la croissance et de l'emploi tout en préservant ses spécificités nationales.
La France a, Monsieur le Président, élaboré son programme national à l'automne dernier, dans lequel nous insistons en particulier sur les nouveaux pôles de compétitivité, sur l'Agence pour la recherche et sur l'Agence pour l'innovation industrielle. Ce sont là trois initiatives nationales de premier ordre ayant des implications européennes évidentes.
Mais au-delà, d'autres progrès sont nécessaires. D'abord pour la France, ce Conseil européen doit aboutir à des résultats concrets et visibles en matière de politique économique européenne. Il doit aussi démontrer que l'Europe peut apporter une véritable dynamique à l'économie de notre pays, il doit surtout démontrer que l'Union est un atout et une force d'entraînement pour la création d'emplois.
Deux secteurs seront abordés :
L'énergie d'abord. Renforcer la sécurité de l'approvisionnement en énergie de l'Europe est devenu un objectif prioritaire. La crise gazière de janvier entre la Russie et l'Ukraine a prouvé l'importance de ce sujet.
D'abord et c'est un premier point, l'Europe peut aider les Etats membres à identifier les capacités de production et de transport énergétiques qui doivent être construites.
Ensuite, développer une politique externe énergétique mieux coordonnée à l'échelle de l'Union, avec une attention particulière pour la Russie, le Caucase, l'Asie centrale et l'Afrique du Nord. Il faut notamment se demander comment l'Europe peut aider nos entreprises à mieux exploiter et acheminer les ressources énergétiques des zones voisines de l'Union européenne.
Enfin, Monsieur le Président, et c'est le sujet essentiel, il importe de s'assurer que la politique énergétique européenne soit compatible avec l'environnement, ce qui implique le développement des sources d'énergie alternatives mais aussi une réflexion sur la place de l'énergie nucléaire sur l'ensemble de ces politiques.
Le deuxième sujet majeur à côté de l'énergie, c'est la recherche et l'innovation.
Tout d'abord, le lancement d'un Institut européen de technologie, pour mettre en réseau les compétences européennes dans la recherche et l'enseignement. Nous avons, très tôt, exprimé notre appui à ce projet, qui contribuera au développement de l'excellence et de l'innovation en Europe.
Deuxième objectif, la poursuite de l'effort européen de financement de la recherche, notamment par la mise en oeuvre d'une initiative du président de la République visant à inciter la Banque européenne d'investissement à consacrer quelque 10 milliards d'euros pour la recherche.
Cela devrait entraîner près de 30 milliards d'euros de ressources supplémentaires destinés aux entreprises européennes, notamment aux petites et moyennes entreprises.
Là encore, la France travaillera pour que le Conseil européen adopte sur le sujet de la recherche des décisions concrètes.
Nous voulons également apporter une réponse concrète à l'inquiétude suscitée dans l'opinion par les récentes délocalisations. L'Europe, si elle veut gagner la confiance des citoyens dans la durée, doit reposer sur deux piliers.
Favoriser l'innovation d'abord mais également accompagner les secteurs fragilisés et les reclassements économiques. C'est pourquoi, dans le cadre des perspectives financières 2007-2013, l'Europe mettra également en oeuvre un fonds pour venir en aide aux Etats membres confrontés aux conséquences des délocalisations.
Ce Conseil européen approuvera également la mise en place de la stratégie de Lisbonne pour la croissance et l'emploi, l'Europe pouvant se doter de moyens financiers pour soutenir les salariés qui subissent les conséquences des restructurations économiques.
Enfin, Monsieur le Président, nous souhaitons que dans le cadre des perspectives financières 2007-2013, l'Union fasse un effort supplémentaire en faveur des bourses Erasmus et Leonardo. Favoriser la mobilité des jeunes étudiants, favoriser la mobilité des jeunes travailleurs européens fait partie intégrante d'une stratégie globale de soutien à l'emploi. C'est aussi l'un des moyens pour créer un sentiment d'appartenance à une conscience européenne sans laquelle il ne saurait y avoir de projets politiques solides.
Nous comptons sur cette décision du Conseil européen, elle apportera une contribution importante à la formation et à l'insertion sur le marché de l'emploi sur l'ensemble de notre continent.
Voilà, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Députés, si nous voulons que les Français retrouvent confiance dans l'Union européenne, il faut aussi que l'Europe fasse naître une confiance renouvelée dans sa capacité à construire.
Cela passe aujourd'hui par des projets concrets inscrits dans un projet collectif porteur de résultats clairement identifiables par les citoyens.
Enfin, pour terminer et puisque vous parlez du CPE, permettez-moi de dire ici que vos amis du SPD allemand, ou vos amis du Labour anglais ont aujourd'hui fait des propositions de contrats à leurs concitoyens qui sont certainement beaucoup plus précaires que ce que vous dites aujourd'hui du CPE qui n'est autre qu'un CDI.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 23 mars 2006