Déclaration de M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes, sur le projet de loi pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié, Paris le 25 avril 2006.

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Circonstance : Réunion du Conseil supérieur de la participation à Paris le 25 avril 2006

Texte intégral

Je me réjouis de cette nouvelle réunion du Conseil supérieur de la participation, quelques semaines seulement après son installation. L'actualité de notre conseil est particulièrement dense puisque le projet de loi pour le « développement de la participation et de l'actionnariat salarié » doit être envoyé d'ici une dizaine de jours au Conseil d'Etat. Conformément à mon engagement, j'ai souhaité que nous échangions une nouvelle fois avant cette échéance, afin d'arrêter, avec le Premier ministre, les dernières orientations du texte.
Je remercie vivement chacun d'entre vous pour le travail effectué depuis notre précédente rencontre, et je remercie M. Franck Borotra pour la qualité de sa synthèse. Ses efforts pour recueillir les avis des uns et des autres et conduire la concertation ont été tout à fait remarquables.
De la synthèse qu'il vient de nous présenter, je retiens trois grands axes :
1. Tout d'abord, beaucoup d'entre vous ont souhaité que les grands principes qui sous-tendent ce texte soient davantage soulignés, afin que le texte puisse être immédiatement compris de tous.
A partir de l'avant-projet, je vais donc proposer au Premier ministre dans les prochains jours un nouveau texte avec un exposé des motifs entièrement revu. Il m'apparaît nécessaire :
De mieux souligner les nouveautés importantes du texte, et mieux faire la part entre ces innovations, les mesures de simplification des dispositifs, et enfin les mesures strictement techniques ;
De fortement rappeler la différence entre ce qui relève de la participation et ce qui relève de la politique salariale ; il me semble bon qu'un tel texte soit l'occasion de redonner les grands repères ;
De mieux souligner la nécessité d'un bon équilibre entre les trois « piliers » de la participation : la participation aux décisions, la participation financière et l'actionnariat salarié.
2. S'agissant de l'équilibre entre ces trois « piliers », vous avez en grande majorité estimé que le texte manquait d'ambition en matière de participation des salariés actionnaires aux décisions.
Comme vous le savez, cette participation pourrait être renforcée en précisant par décret certaines modalités d'application de la loi de modernisation sociale.
Toutefois, force est de constater que la loi peut être appliquée sans décret et que pourtant elle ne l'est pas. L'une des raisons est la lourdeur des contraintes posées par le texte initial, notamment la nécessité de convoquer une assemblée générale extraordinaire pour désigner les représentants des salariés actionnaires.
Aussi le Premier ministre est-il d'accord pour inscrire dans ce projet des dispositions visant à renforcer l'applicabilité du texte de 2002. Les critères resteraient inchangés : au delà de 3% du capital, les salariés actionnaires auraient droit à un poste au conseil d'administration ; toutefois, les représentants des salariés actionnaires au CA seraient désignés dès les assemblées générales ordinaires consécutives à la promulgation de la loi. Celle-ci serait naturellement applicable directement, sans décret.
Ces dispositions s'appliqueront aux entreprises d'une certaine taille - les cotées ou celles de plus de 250 salariés ; je suis preneur de votre avis à ce sujet.- afin de ne pas dissuader les entreprises plus petites d'ouvrir leur capital aux salariés.
3. La plupart d'entre vous n'a considéré comme opportun ni la réduction à trois ans de la durée de blocage, ni la négociation de nouveaux cas de déblocage au niveau de l'entreprise ou de la branche
Je partage votre préoccupation de ne pas bouleverser les dispositifs existants ; il convient de trouver une solution respectant deux impératifs :
- ne pas remettre en cause la « philosophie » de la participation, qui doit permettre au salarié de se constituer un « capital » ;
- faire en sorte que le cadre ne soit trop rigide, sans quoi les salariés transfèrent à la première occasion venue leur épargne vers des supports plus souples (3,5 Mds euros des 7 Mds euros du déblocage dit « Sarkozy » sont allés vers l'assurance-vie) ;
Deux solutions ont été évoquées avec vous :
- introduire deux ou trois cas supplémentaires de déblocage, comme la naissance du 2ème enfant, le financement des études supérieures ou la perte d'emploi du conjoint. Je crois que ces cas supplémentaires s'inscrivent parfaitement de la philosophie de la participation, et leur mise en oeuvre a le mérite de la simplicité. J'aimerais donc avoir votre avis ;
- celle d'un mécanisme d'avances, « inspiré » de l'assurance vie : pour faire face à un besoin, le salarié pourrait demander une avance sur ses avoirs, mais - et c'est une différence essentielle avec l'assurance-vie - ceux-ci resteraient bloqués tant que l'avance ne serait remboursée.
Il s'agirait là d'un dispositif nouveau qui donnerait plus de souplesse au dispositif tout en aidant le salarié à se constituer une épargne de long terme ; il serait particulièrement utile dans certaines situations de surendettement car, trop souvent, le commandement de payer de l'huissier arrive avant la décision de la commission de surendettement ;
Plusieurs « curseurs » resteraient néanmoins à régler : l'encadrement éventuel du taux, et le pourcentage maximum des actifs qui pourrait être avancé ;
Sur ce sujet, le Premier ministre et moi sommes ouverts. Il est important que ceux qui le souhaitent nous transmettent dès que possible leur position.
4. Beaucoup ont souligné que le texte serait en deçà de leurs attentes s'il ne se traduisait pas par une progression effective de la participation dans les PME ;
Je partage votre souhait que la participation et l'intéressement profitent au plus grand nombre. Mais je note aussi que les avis sur moyens d'y parvenir divergent : en particulier, l'idée d'abaisser le seuil à partir duquel la participation devient obligatoire ne fait pas consensus.
Je propose donc que l'on s'appuie sur des obligations au niveau des branches, en leur demandant d'ouvrir d'ici 3 ans une négociation sur le sujet. Pour les PME, qui sont souvent très démunies face à la complexité de ces sujets, la branche est le bon niveau de négociation. C'est elle qui saura proposer des « accords sur étagère » à la fois plus élaborés que ce que feraient les PME/TPE par leurs seuls moyens et adaptés à la réalité de leur secteur. Parallèlement, les missions du CSP seraient renforcées afin de suivre l'évolution de ces négociations.
D'ici trois ans, soit peu avant la fin de son mandat, le CSP pourrait faire le bilan et, en cas d'échec, proposer au législateur les actions appropriées.
5. Sur des questions plus techniques, plusieurs suggestions des uns et des autres sont assez consensuelles et me semblent devoir être retenues.
Je vais les proposer au Premier ministre dans les jours qui viennent. Je pense notamment :
- à la possibilité pour les entreprises de racheter les titres détenus par leurs salariés ; c'est une mesure importante pour améliorer la liquidité des titres, et j'y suis très favorable ;
- à dispenser les opérations d'actionnariat salarié des procédures « d'appel public à l'épargne » ; c'est me semble-t-il lever un frein à la multiplication de ces opérations ;
- à renforcer le mécanisme de reprise d'entreprise par les salariés en retenant votre proposition d'une mobilisation, dans le cadre d'un accord d'entreprise, de l'ensemble des dispositifs de l'épargne salariale.
6.Enfin, plusieurs points, qui ne font pas l'objet d'un consensus, vont faire l'objet d'un arbitrage du Premier ministre dans les prochains jours. Je pense notamment :
- à la suppression des comptes courants bloqués ;
- à l'obligation d'adosser les nouveaux accords de participation à des PEE ;
Dès lors que nous serons fixés sur l'ensemble de ces points, la rédaction du projet de loi pourra démarrer. Je ne manquerai pas de vous le communiquer dans les plus brefs délais.
Je voudrais une nouvelle fois vous remercier tous pour la qualité de vos travaux ; la plupart d'entre vous ont à nouveau prouvé leur grande disponibilité, et n'ont pas hésité à « prendre leur plume » pour contribuer sous forme écrite à la réflexion, ce qui s'avère à chaque fois extrêmement précieux.
Nous sommes réunis autour de cette table en raison de l'importance que nous attachons tous à la participation ; cette idée, qui est là pour rapprocher les hommes dans leur travail et leur vie tous les jours, n'a de sens qu'avec l'adhésion de tous. Je me réjouis donc de voir ce travail de concertation aboutir et des opinions partagées naître sur plusieurs points clefs de ce texte.
Mais je vous laisse maintenant la parole.Source http://www.cohesionsociale.gouv.fr, le 27 avril 2006