Texte intégral
Nous avons, mes chers camarades, un travail difficile à faire à travers ces Etats Généraux : il faut à la fois être à l'écoute des autres mouvements politiques, des mouvements syndicaux, des mouvements associatifs, bref de l'opinion. Il faut énoncer des orientations [sans] aller trop loin car les militants et les militantes vont être appelés à se prononcer au mois de juin.
Les ateliers fonctionnent et nous essayons de populariser un certain nombre de thèmes qui seront le socle de ce projet dont vous serez saisi à la fin du mois de mai et sur lequel les militants et les militantes du PS auront le temps de débattre au mois du juin au sein de leur fédération, dans leurs sections.
[...] Nous ne pouvions pas [imaginer] qu'après la crise du CPE, il y aurait cette crise de régime, cette crise de la démocratie, cette période extrêmement glauque dans laquelle nous vivons. [Cette crise] n'est bonne ni pour notre pays, ni pour la République, ni pour aucune formation politique, contrairement à ce que nous entendons parfois. « Ca profiterait aux socialistes. » En général, ce genre de situation glauque ne profite à personne. Nous savons qui paie le prix : c'est la démocratie. Quant aux bénéficiaires - s'il doit y en avoir - nous savons où ils sont. Ils font partie de ceux qui dénigrent la démocratie, [notamment idéologiquement] : je pense à l'extrême droite mais aussi à ceux qui en font peu de cas par leur comportement. Je dirais deux mots des attitudes du Premier Ministre et du Ministre de l'Intérieur.
Le Premier Ministre d'abord. Ce qu'il a dit hier peut paraître anodin en traitant les journalistes de « fonctionnaires », en leur expliquant qu'ils s'accrochent comme « des moules à leurs rochers ». Quand on y réfléchit un peu, ce n'est pas rien cette arrogance, ce mépris dans la situation où il est. Que lui, Premier ministre, chef de l'administration et haut fonctionnaire de son état considère que le mot « fonctionnaire » n'est pas gratifiant. C'est quand même ahurissant ! Lui qui fait de l'administration l'usage que nous savons ! Ensuite, il traite les journalistes de « moules sur leurs rochers ». Mais qui dans ce pays est la vraie bernique ?
Après le CPE, on ne bouge pas. Malgré l'affaire en cours, on ne bouge pas. Pas plus qu'on avait bougé l'année dernière, pas plus qu'on avait bougé l'année d'avant. Mépris de la démocratie, sur laquelle repose le [principe] de la responsabilité politique. La responsabilité politique n'est pas respectée ni par le Premier ministre, ni par le Président de la République, ni par le ministre de l'intérieur [...] Voilà un ministre de l'Intérieur, numéro deux du gouvernement en charge de la sécurité du pays, n'est-il pas censé être le mieux informé des citoyens de ce pays ? Il a porté plainte mais contre qui ? Contre le numéro un du gouvernement au motif qu'il cherche la vérité. Or il suffit de lire les articles, les uns après les autres, pour être absolument convaincu que dès l'été 2004 il savait tout et qu'il a attendu jusqu'en janvier 2006 pour être saisi d'une envie subite de vérité [...]
Ce n'est pas tellement le fond de cette affaire, mais ce sont les comportements : tout est manipulé, et lui aussi nous manipule. Et ça ne lui suffit pas, le voici maintenant avec sa casquette de président de l'UMP, [qui] ne doit pas démissionner pour ne pas provoquer une crise de régime. Mais le président de l'UMP saute sur une estrade pour expliquer ce que sera la France d'après et là c'est ahurissant : « je veux une construire une France où chacun retrouve l'envie d'entreprendre, de créer, d'inventer, où la réussite des uns ne sera pas suspectée par les autres ». Mais qu'est ce qu'il fait depuis 4 ans ? Où est-il ? N'est-il pas au gouvernement ? « Je veux construire une France où chacun se sentira libre de travailler plus pour gagner plus, libre de disposer du fruit de ses efforts, libre de penser, libre d'écrire, libre de parler, libre de prier ». C'est le numéro 2 du gouvernement, président de l'UMP, qui fait ce discours aujourd'hui [...] Je pensai que c'était pas possible d'être à la fenêtre, et de se regarder passer dans la rue, grâce à Sarkozy, c'est devenu possible !
Tout ça est médiocre, tout ça est méprisant. Derrière ce mépris, derrière cette médiocrité, derrière cette schizophrénie affichée, derrière cette duplicité [il y a le populisme]. On a souvent employé le mot populisme à tort et à travers, il n'y a pas qu'à l'extrême droite qu'il y a du populisme. Il y en a dans ce discours d'une démagogie totale, à la fois par ce qu'il porte en lui même mais aussi par la situation de celui qui le prononce. C'est qu'il commence à faire chaud dans ce pays. Il va falloir qu'on prenne conscience les uns et les autres [dans le PS et à l'extérieur] qu'il faut devenir sérieux, qu'il faut cesser de brandir des hypothèse comme s'il s'agissait de jeux de rôles sans importance [...] On se dispute pour savoir qui sera ou ne sera pas au banquet, sur qui est propriétaire ou non de tel ou tel électorat de Gauche [...] Tout ça n'est pas sérieux car la menace du 21 avril n'a [non seulement] pas disparu, mais elle est double aujourd'hui. Monsieur Sarkozy devrait commencer à y penser sérieusement.
Face à ce genre de situation, face à l'état de la démocratie, on sait que ça commence à devenir sacrément inquiétant [...] Si certains pensent que les marges de manoeuvres sont larges ils se trompent. Elles deviennent de plus en plus étroites et l'urgence devient de plus en plus forte. Je demande à chacune et à chacun, à commencer par moi-même, - et c'est pour la raison pour laquelle nous avons accepté la synthèse au congrès du Mans -, prenne [ses responsabilités]. Je crois que le peuple de gauche mais aussi l'ensemble de ceux qui sont attachés à la démocratie ne nous pardonnerait pas l'irresponsabilité dans une situation d'une telle gravité. Alors d'une manière ou d'une autre, mon cher François, il va falloir que tu réussisses à enfermer dans un même zoo les huit éléphants et les gazelles. François, directeur de zoo... !
[...] Sur le fond, mes chers camarades, je ne vais pas reprendre ce qui a été dit par les rapporteurs. Ils ont fait des propositions dont j'ai bien conscience [...] qu'elles ne vont pas jusqu'au bout [...] Je voudrais insister sur deux choses qui me paraissent d'une actualité brûlante. La première c'est que nous sentons bien - indépendamment des mandats, des institutions - que la démocratie représentative a trouvé des limites aujourd'hui. Le niveau culturel, l'individualisme, l'évolution font que même dans l'esprit de ceux qui ne remettent pas en cause la démocratie représentative, [le terme] représentative ne veut plus dire ce que cela voulait dire il y a vingt ans, trente ans ou cinquante ans [...] Il faut que nous comprenions que sur certains sujets le peuple veut pouvoir reprendre la parole [...] Il faudra aménager ça mais on n'échappera pas à la limitation de la représentativité pour la mettre en adéquation avec l'aspiration démocratique, avec une revendication de démocratie participative [...]
Deuxième idée : la démocratie repose sur quelque chose de fondamental : la responsabilité politique. Le Président de la République, le Premier ministre, le numéro deux ne se croient pas obligés de retourner devant les Français. Je le dis d'autant plus qu'il m'est arrivé, deux fois dans ma vie, de me retirer et de me représenter devant les électeurs sans y être obligé, et de voir s'ils continuaient de m'accorder la légitimité ou pas [...]
Alors on voyait Villepin et Blair côte à côte et on entendait dire qu'ils étaient dans la même situation. Tony Blair a perdu une bataille électorale [...] Est-ce que vous avez vu la droite en 2004, quand ils ont pris une « veste historique » pour les régionales, se poser des questions ? Non. Blair, lui, a remanié totalement son gouvernement pour des élections locales. Ici, on voit de Villepin, censé être dans la même position que le premier ministre britannique, après CPE et après Clearstream. C'est plus de l'information, c'est de la propagande grossière, je le dis comme je le pense. C'est de l'abus de confiance [...]
Je crois que les françaises et les français de gauche comme de droite attendent de nous que on rétablisse le principe de responsabilité politique. Cela passe par le parlement, par d'autres méthodes et parlons-en : le débat doit être ouvert, sans tabou. Les gens ont l'impression qu'on leur marche dessus, qu'on les bafoue, qu'on les piétine, que l'opinion ne compte pas et que y compris, quand il se passe quelque chose de grave dans le pays. Nous savons tous, quelque soient nos fonctions que c'est ce qu'on entend partout : « Mon avis ne compte pas, on se fout bien de ce que je peux penser, de toute façon, là haut ils font ce qu'ils veulent... » On connaît ce discours. Je pense que derrière la stigmatisation et le rejet de la politique, il y a un immense appel de détresse, et c'est à cet appel que nous devons répondre, ce sera notre honneur, et ça devrait être notre fierté.
Merci
source http://www.lesetatsgeneraux.fr, le 23 mai 2006
Les ateliers fonctionnent et nous essayons de populariser un certain nombre de thèmes qui seront le socle de ce projet dont vous serez saisi à la fin du mois de mai et sur lequel les militants et les militantes du PS auront le temps de débattre au mois du juin au sein de leur fédération, dans leurs sections.
[...] Nous ne pouvions pas [imaginer] qu'après la crise du CPE, il y aurait cette crise de régime, cette crise de la démocratie, cette période extrêmement glauque dans laquelle nous vivons. [Cette crise] n'est bonne ni pour notre pays, ni pour la République, ni pour aucune formation politique, contrairement à ce que nous entendons parfois. « Ca profiterait aux socialistes. » En général, ce genre de situation glauque ne profite à personne. Nous savons qui paie le prix : c'est la démocratie. Quant aux bénéficiaires - s'il doit y en avoir - nous savons où ils sont. Ils font partie de ceux qui dénigrent la démocratie, [notamment idéologiquement] : je pense à l'extrême droite mais aussi à ceux qui en font peu de cas par leur comportement. Je dirais deux mots des attitudes du Premier Ministre et du Ministre de l'Intérieur.
Le Premier Ministre d'abord. Ce qu'il a dit hier peut paraître anodin en traitant les journalistes de « fonctionnaires », en leur expliquant qu'ils s'accrochent comme « des moules à leurs rochers ». Quand on y réfléchit un peu, ce n'est pas rien cette arrogance, ce mépris dans la situation où il est. Que lui, Premier ministre, chef de l'administration et haut fonctionnaire de son état considère que le mot « fonctionnaire » n'est pas gratifiant. C'est quand même ahurissant ! Lui qui fait de l'administration l'usage que nous savons ! Ensuite, il traite les journalistes de « moules sur leurs rochers ». Mais qui dans ce pays est la vraie bernique ?
Après le CPE, on ne bouge pas. Malgré l'affaire en cours, on ne bouge pas. Pas plus qu'on avait bougé l'année dernière, pas plus qu'on avait bougé l'année d'avant. Mépris de la démocratie, sur laquelle repose le [principe] de la responsabilité politique. La responsabilité politique n'est pas respectée ni par le Premier ministre, ni par le Président de la République, ni par le ministre de l'intérieur [...] Voilà un ministre de l'Intérieur, numéro deux du gouvernement en charge de la sécurité du pays, n'est-il pas censé être le mieux informé des citoyens de ce pays ? Il a porté plainte mais contre qui ? Contre le numéro un du gouvernement au motif qu'il cherche la vérité. Or il suffit de lire les articles, les uns après les autres, pour être absolument convaincu que dès l'été 2004 il savait tout et qu'il a attendu jusqu'en janvier 2006 pour être saisi d'une envie subite de vérité [...]
Ce n'est pas tellement le fond de cette affaire, mais ce sont les comportements : tout est manipulé, et lui aussi nous manipule. Et ça ne lui suffit pas, le voici maintenant avec sa casquette de président de l'UMP, [qui] ne doit pas démissionner pour ne pas provoquer une crise de régime. Mais le président de l'UMP saute sur une estrade pour expliquer ce que sera la France d'après et là c'est ahurissant : « je veux une construire une France où chacun retrouve l'envie d'entreprendre, de créer, d'inventer, où la réussite des uns ne sera pas suspectée par les autres ». Mais qu'est ce qu'il fait depuis 4 ans ? Où est-il ? N'est-il pas au gouvernement ? « Je veux construire une France où chacun se sentira libre de travailler plus pour gagner plus, libre de disposer du fruit de ses efforts, libre de penser, libre d'écrire, libre de parler, libre de prier ». C'est le numéro 2 du gouvernement, président de l'UMP, qui fait ce discours aujourd'hui [...] Je pensai que c'était pas possible d'être à la fenêtre, et de se regarder passer dans la rue, grâce à Sarkozy, c'est devenu possible !
Tout ça est médiocre, tout ça est méprisant. Derrière ce mépris, derrière cette médiocrité, derrière cette schizophrénie affichée, derrière cette duplicité [il y a le populisme]. On a souvent employé le mot populisme à tort et à travers, il n'y a pas qu'à l'extrême droite qu'il y a du populisme. Il y en a dans ce discours d'une démagogie totale, à la fois par ce qu'il porte en lui même mais aussi par la situation de celui qui le prononce. C'est qu'il commence à faire chaud dans ce pays. Il va falloir qu'on prenne conscience les uns et les autres [dans le PS et à l'extérieur] qu'il faut devenir sérieux, qu'il faut cesser de brandir des hypothèse comme s'il s'agissait de jeux de rôles sans importance [...] On se dispute pour savoir qui sera ou ne sera pas au banquet, sur qui est propriétaire ou non de tel ou tel électorat de Gauche [...] Tout ça n'est pas sérieux car la menace du 21 avril n'a [non seulement] pas disparu, mais elle est double aujourd'hui. Monsieur Sarkozy devrait commencer à y penser sérieusement.
Face à ce genre de situation, face à l'état de la démocratie, on sait que ça commence à devenir sacrément inquiétant [...] Si certains pensent que les marges de manoeuvres sont larges ils se trompent. Elles deviennent de plus en plus étroites et l'urgence devient de plus en plus forte. Je demande à chacune et à chacun, à commencer par moi-même, - et c'est pour la raison pour laquelle nous avons accepté la synthèse au congrès du Mans -, prenne [ses responsabilités]. Je crois que le peuple de gauche mais aussi l'ensemble de ceux qui sont attachés à la démocratie ne nous pardonnerait pas l'irresponsabilité dans une situation d'une telle gravité. Alors d'une manière ou d'une autre, mon cher François, il va falloir que tu réussisses à enfermer dans un même zoo les huit éléphants et les gazelles. François, directeur de zoo... !
[...] Sur le fond, mes chers camarades, je ne vais pas reprendre ce qui a été dit par les rapporteurs. Ils ont fait des propositions dont j'ai bien conscience [...] qu'elles ne vont pas jusqu'au bout [...] Je voudrais insister sur deux choses qui me paraissent d'une actualité brûlante. La première c'est que nous sentons bien - indépendamment des mandats, des institutions - que la démocratie représentative a trouvé des limites aujourd'hui. Le niveau culturel, l'individualisme, l'évolution font que même dans l'esprit de ceux qui ne remettent pas en cause la démocratie représentative, [le terme] représentative ne veut plus dire ce que cela voulait dire il y a vingt ans, trente ans ou cinquante ans [...] Il faut que nous comprenions que sur certains sujets le peuple veut pouvoir reprendre la parole [...] Il faudra aménager ça mais on n'échappera pas à la limitation de la représentativité pour la mettre en adéquation avec l'aspiration démocratique, avec une revendication de démocratie participative [...]
Deuxième idée : la démocratie repose sur quelque chose de fondamental : la responsabilité politique. Le Président de la République, le Premier ministre, le numéro deux ne se croient pas obligés de retourner devant les Français. Je le dis d'autant plus qu'il m'est arrivé, deux fois dans ma vie, de me retirer et de me représenter devant les électeurs sans y être obligé, et de voir s'ils continuaient de m'accorder la légitimité ou pas [...]
Alors on voyait Villepin et Blair côte à côte et on entendait dire qu'ils étaient dans la même situation. Tony Blair a perdu une bataille électorale [...] Est-ce que vous avez vu la droite en 2004, quand ils ont pris une « veste historique » pour les régionales, se poser des questions ? Non. Blair, lui, a remanié totalement son gouvernement pour des élections locales. Ici, on voit de Villepin, censé être dans la même position que le premier ministre britannique, après CPE et après Clearstream. C'est plus de l'information, c'est de la propagande grossière, je le dis comme je le pense. C'est de l'abus de confiance [...]
Je crois que les françaises et les français de gauche comme de droite attendent de nous que on rétablisse le principe de responsabilité politique. Cela passe par le parlement, par d'autres méthodes et parlons-en : le débat doit être ouvert, sans tabou. Les gens ont l'impression qu'on leur marche dessus, qu'on les bafoue, qu'on les piétine, que l'opinion ne compte pas et que y compris, quand il se passe quelque chose de grave dans le pays. Nous savons tous, quelque soient nos fonctions que c'est ce qu'on entend partout : « Mon avis ne compte pas, on se fout bien de ce que je peux penser, de toute façon, là haut ils font ce qu'ils veulent... » On connaît ce discours. Je pense que derrière la stigmatisation et le rejet de la politique, il y a un immense appel de détresse, et c'est à cet appel que nous devons répondre, ce sera notre honneur, et ça devrait être notre fierté.
Merci
source http://www.lesetatsgeneraux.fr, le 23 mai 2006