Déclaration de M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, sur la création de la prime pour l'emploi, dispositif gouvernemental destiné à encourager l'emploi et à améliorer la rémunération du travail pour les revenus les plus faibles et remplaçant le projet de réduction de CSG et CRDS sur les revenus du travail, censuré par le Conseil Constitutionnel, Paris, le 16 janvier 2001.

Prononcé le

Intervenant(s) : 
  • Laurent Fabius - Ministre de l'économie, des finances et de l'industrie

Circonstance : Présentation du projet de prime pour l'emploi à Paris, le 16 janvier 2001

Texte intégral

Mesdames et Messieurs,
Je suis heureux de vous présenter, avec Elisabeth Guigou et Florence Parly, au nom du Gouvernement, le projet de Prime pour l'Emploi.
Il y a quatre semaines aujourd'hui, le Conseil constitutionnel, saisi par des parlementaires de l'opposition, a censuré l'article 3 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, qui prévoyait une réduction de CSG et de CRDS sur les revenus du travail.
Devant cette décision, le Gouvernement a réaffirmé sa volonté et tiré une conclusion. La volonté, c'est celle de maintenir l'objectif d'améliorer l'encouragement au travail, la rémunération du travail pour les plus faibles revenus. La conclusion, c'est que cette décision du Conseil constitutionnel s'impose à tous et qu'il fallait donc en tenir compte dans la mise au point d'un autre dispositif à l'intérieur de la même enveloppe financière.
Après avoir examiné de façon approfondie plusieurs options, le Gouvernement, comme l'a annoncé le Premier ministre, s'est déterminé pour une Prime pour l'Emploi.
Ce choix est fidèle à notre objectif : encourager l'emploi pour les rémunération les plus faibles. Tout l'emploi, puisque la prime pourra aussi bien concerner des salariés que des commerçants, des artisans, des agriculteurs ou des travailleurs indépendants. Rémunération du travail et de l'emploi, car la prime sera accordée en proportion des revenus du travail. Son montant progressera jusqu'à l'équivalent du SMIC, puis redescendra jusqu'à l'équivalent d'1,4 fois le SMIC, comme l'avait déjà souhaité le Parlement à propos de la mesure précédente.
C'est donc au niveau du SMIC que le montant de la prime sera le plus élevé. Deux exemples concrets : pour un smicard célibataire sans enfant la prime sera de 1500 F en 2001, 3000 F en 2002 et de 4500 F en 2003. Pour un couple de smicards avec 2 enfants, la prime devrait être de 3400 F en 2001, 6400 F en 2002, 9400 F en 2003.
La Prime pour l'Emploi respecte les conditions précisées par le Conseil constitutionnel.
En premier lieu, elle sera réservée aux foyers dont le total des revenus ne dépasse pas un certain montant. Ce niveau " d'éligbilité " sera augmenté à raison des enfants à charge, les besoins d'un foyer étant plus élevés dans ce cas.
La prime elle-même sera augmentée en fonction des enfants à charge, pour les mêmes raisons. Cette majoration sera plus forte pour le premier enfant d'un parent isolé. La prime sera également majorée dans le cas où, dans un couple, un seul conjoint travaille. Il faut en effet trouver un équilibre entre l'objectif de favoriser l'emploi et la nécessité de tenir compte des conditions et du niveau de vie des foyers où une seule personne travaille.
Ces différentes caractéristiques conduisent à passer par la déclaration de revenus. Il n'a pas été jugé opportun en effet d'organiser une transmission de ces informations à l'employeur. C'est l'administration fiscale et le Trésor public qui calculeront puis verseront la Prime pour l'Emploi, restituant des charges que le travailleur a supportées, et il y en a de toutes sortes : l'impôt sur le revenu, la CSG et la CRDS, voire les cotisations sociales.
Sans complexité administrative ni démarches supplémentaires, la première Prime pour l'Emploi sera versée en septembre 2001. Chacun comprend les raisons de ce délai Pour son premier versement, la prime se rapportera aux revenus et au travail de l'année 2000.
Les modifications auxquelles nous avons été juridiquement conduits élargissent le nombre de bénéficiaires et majorent l'aide pour les personnes à charge. Elles entraînent donc une certaine réduction du montant maximal de la première Prime, qui sera, au niveau d'un SMIC, de 1 500 F en 2001. Au même niveau de salaire, la Prime pour un parent isolé avec un enfant sera, elle, de 1 900 F et pour un foyer avec deux enfants et un seul salaire au SMIC, de 2 400 F. Ce montant se rapporte aux revenus de 2000.
Pour 2002, sur la base des revenus et du travail de 2001, la Prime sera de 3 000 F au niveau d'un SMIC. Une année plus tard, elle sera de 4 500 F. Pour une famille avec deux enfants où chaque conjoint gagne le SMIC, cette somme sera alors de 9 400 F.
Cette réforme fait partie d'une approche d'ensemble destinée à encourager le travail. Déjà, la réforme de la taxe d'habitation, celle des allocations logement, la possibilité ouverte du cumul salaire-RMI pendant une période, allait en ce sens. La Prime pour l'Emploi complétera ce dispositif destiné, je le répète, non seulement à ne pas pénaliser l'activité, mais à l'encourager.
Nous souhaitons que la Prime pour l'Emploi procure un réel encouragement et supplément de bien-être à nos concitoyens. Attachés à l'efficacité de cette mesure, nous mettrons en place un suivi de ses effets.
Au total, la Prime pour l'Emploi, tenant compte des données juridiques et financières qui sont les nôtres, apportera dès 2001 un plus significatif pour l'emploi et les revenus à près de 10 millions de personnes.
De nombreux débats ont eu lieu à ce sujet. Il est clair que nous n'avons nullement l'intention de payer les travailleurs à la place des entreprises. D'une part, la Prime pour l'Emploi ne passera pas par l'employeur, elle ne créera pas de " tuyauterie " complexe. D'autre part, le statut du SMIC n'est en rien mis en cause. Il est normal et sain que celui-ci continue de jouer son rôle.
Un projet de loi comportant un seul article créant la Prime pour l'Emploi sera soumis dès cette semaine au Conseil d'Etat. Il sera présenté au Conseil des Ministres avant la fin janvier et examiné par le Parlement aussitôt.
Près de dix millions de personnes bénéficieront ainsi de cette mesure positive socialement et économiquement.

(Source http://www.finances.gouv.fr, le 17 janvier 2001)