Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
C'est avec grand plaisir que je participe à la session de clôture de l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture, et je remercie le Président GUYAU pour son invitation.
Permettez-moi de souligner les résultats positifs de nos échanges depuis un an. Le dialogue suivi avec votre institution a permis de mettre en oeuvre les indispensables évolutions, notamment dans le cadre de la nouvelle Politique Agriculture Commune entrée en application en 2005 ou l'évolution de la programmation du développement rural.
Je veux saluer les efforts des chambres d'agriculture pour apporter un soutien pédagogique aux exploitants. C'est une coopération bénéfique pour l'avenir de notre agriculture, que je souhaite prolonger. Celle-ci évolue constamment, et je me félicite que nous ayons su fixer des lignes directrices, en particulier avec la loi d'orientation agricole à laquelle vous avez été étroitement associés.
Monsieur le Président, comme en décembre, lors de votre Université à Tours, ces derniers jours de juin ont pour actualité les négociations internationales. Et je commencerai par là avant de répondre très concrètement à vos interrogations sur la conjoncture économique et sociale, ainsi que l'actualité des chambres d'agriculture.
[ Le contexte international, d'abord. Vous m'interrogez sur la stratégie de notre pays : nous voulons un accord qui réponde à l'objectif du cycle de développement, mais pas à n'importe quel prix. Plutôt un bon accord plus tard, qu'un mauvais accord maintenant. ]
Une session de négociation au niveau des Ministres, à laquelle je me rendrai, se tiendra du 29 juin au 2 juillet à Genève. La France sera particulièrement ferme : il n'y a pas lieu que l'Union européenne fasse de nouveaux pas sur l'agriculture. Nous ne nous satisferions pas d'un accord bâclé motivé par le seul désir de conclure avant les échéances du calendrier politique américain.
En matière agricole, l'Union européenne a fait ce qu'on attendait d'elle dans le cycle de Doha, peut-être même plus. L'offre européenne du 28 octobre 2005 représente l'effort maximal que nous pouvons consentir. Avec les concessions déjà accordées, la Commission est aux limites de son mandat.
C'est pourquoi j'appelle le négociateur communautaire à la plus grande vigilance et fermeté. Un accord cet été engagerait l'Union pour la suite des négociations. A cet égard, je me félicite que le Conseil puisse se réunir formellement, comme c'est l'usage, durant la session de Genève, aussi souvent que nécessaire. J'y participerai avec ma collègue Christine Lagarde, afin de porter les positions françaises tout au long de cette phase capitale.
Sur l'accès au marché, je vois mal comment l'Union pourrait aller au-delà de son offre d'octobre 2005, sans remettre en cause le niveau de préférence communautaire nécessaire à la stabilité de la PAC.
Nous resterons vigilants tant sur le respect des conditions de cette offre que sur les avancées nécessaires de nos partenaires internationaux. C'est la condition de son maintien. Force est de constater que l'Europe, seule, a contribué à l'avancée du cycle de DOHA. Le temps est venu pour nos partenaires de faire mouvement à leur tour, sauf à prendre le risque d'un échec. La proximité des échéances et le nombre de sujets de divergence entre les membres de l'OMC rend ce risque crédible. Je n'exclus aucun scénario.
Nos lignes rouges sont fixées et connues : la pérennité de la PAC réformée et la préférence européenne. Telle est la position que notre pays défendra, en liaison étroite avec l'ensemble de nos partenaires européens du G14 élargi.
[ Au niveau communautaire, nous respecterons nos engagements. Ils constituent un atout de poids dans la négociation internationale, l'Europe manifestant ainsi que, pour sa part, elle a avancé. ]
En revanche, nous continuerons à faire preuve de pragmatisme dans la mise en oeuvre de la PAC réformée. Je tiens personnellement à vous remercier pour votre collaboration au cours de ces derniers mois, notamment pour votre participation à l'immense effort d'explication et d'accompagnement individuel des agriculteurs : plus de 1300 réunions se sont tenues rassemblant près de 126 000 exploitants. Cet effort de pédagogie a été essentiel.
. [ Sur les DPU, plus de 97% des dossiers ont été retournés et 245 000 clauses instruites. ]
Ensemble, nous avons revu les DPU avec l'introduction des clauses, qui restent complexes en raison des choix initiaux. Ensemble également, nous avons étudié toutes les situations pouvant être corrigées ou rattrapées dans le cadre des programmes obligatoires et spécifiques.
Il reste à régler la question des DPU dormants, contre lesquels nous devons lutter. J'ai fait de ce dossier une question permanente posée à la Commission pour que la ferme France ne perde pas 1euros. Nous rappelons régulièrement à la Commissaire et à ses services l'importance de trouver une solution quand nous aurons estimé, en septembre, l'enveloppe des DPU dormants.
Une marge d'action permettra aussi de régler des situations locales avec la mise en place en 2007 des réserves départementales.
S'agissant du prélèvement pour la réserve, le taux en sera fixé une fois connu les besoins, là encore après instruction des dossiers. Il ne dépassera pas 3 % et permettra de répondre aux choix faits ensemble pour la réserve.
Sur la date de versement des aides PAC, j'ai demandé à la Commission européenne une dérogation pour pouvoir verser un acompte dès la mi-octobre.
. [ Quant à la conditionnalité 2006, les difficultés tant redoutées ont pu être aplanies grâce aux assouplissements trouvés ensemble. ]
Le même esprit de dialogue et de pédagogie prévaut pour les travaux de préparation à la conditionnalité 2007.
. [ S'agissant de 2008, Monsieur le Président, c'est un rendez-vous qui s'inscrit comme une étape de réflexion et non comme le prétexte à la révision des équilibres financiers. Le cadre est fixé jusqu'en 2013 conformément au double accord de 2002 et 2003, toujours réaffirmé depuis. Nous devons nous préparer à cette discussion et je reçois votre proposition pour expertiser les évolutions possibles. Mais, en tout état de cause, ma position est claire : nous devons d'abord aller au terme de la réforme actuelle de la PAC et la réussir. ]
Dans ce cadre, nous pouvons être force de proposition et c'est bien le but du mémorandum que j'ai défendu à l'occasion du Conseil du 20 mars dernier avec 12 de mes collègues. Il s'agit de défendre la PAC contre les attaques dont elle est l'objet, de la compléter sur le volet gestion des crises et de la simplifier.
Et, au niveau national, nous avons avancé :
> sur la gestion des crises, l'assurance-récolte, par exemple, est un succès : 60 000 contrats ont été signés et une enveloppe significative de 30 Meuros accompagne la montée en puissance de ce dispositif en 2006.
> s'agissant de la simplification, j'ai engagé une démarche complète (appel à idées, internet, courrier, organisation du Ministère), pour « gagner le combat de la sur-administration » :
- en février 2006, dix mesures de simplification d'application immédiate ont été annoncées ;
- puis, le 19 mai, j'ai présenté 25 nouvelles mesures de simplification ;
- enfin, avec « TéléPAC », la déclaration des aides surface de la PAC ne nécessite plus de papier. Le recours à cette télé-procédure a plus que triplé par rapport à l'an passé, certains départements ayant plus de 20% de « télé-déclarants ».
Le développement des téléprocédures requiert, comme vous le souhaitez Monsieur le Président, un partenariat étroit avec votre institution. Nous avons des marges de progrès significatives pour une utilisation plus performante de ces systèmes d'information ; je souhaite que soit défini, avec vous, dès septembre un plan d'actions et de communication. Nous examinerons alors les modalités permettant un traitement collectif des envois de dossiers.
Nous disposerons à cette date d'un téléservice permettant à chaque agriculteur de consulter et vérifier les informations détenues par le Ministère de l'Agriculture.
[ S'agissant de la conjoncture, le premier objectif est de passer le cap des crises récurrentes, notamment pour la viticulture. ]
L'Etat s'est mobilisé : 100 Meuros en 2005 puis 90 Meuros de nouveau en 2006 pour des mesures de soutien à la trésorerie, à la procédure AGRIDIFF, à l'exportation et aux prêts de consolidation... Les aides sont disponibles dans les départements prêtes à être versées, après étude des dossiers par les directions de l'agriculture et de la forêt.
Mais il faut « dégager le marché » pour reprendre votre expression, Monsieur le Président. C'est pourquoi l'attribution de ces aides est conditionnée à une participation à la distillation de crise récemment ouverte. C'est un élément non négociable, nécessaire pour repartir sur des bases saines. La responsabilité de tous les bassins est engagée.
Au-delà, pour « ajuster durablement l'offre », je défends deux évolutions complémentaires :
. plus de rigueur pour la gestion des vins d'appellation d'origine contrôlée : c'est le sens de la réforme de l'INAO. Notre dispositif sera organisé autour du principe d'une séparation nette entre les organismes chargés de la défense et de la gestion des AOC et ceux à qui sera confiée la responsabilité du contrôle des cahiers des charges ;
. parallèlement, je souhaite ouvrir des espaces de liberté et alléger la réglementation pour les vins plus standardisés. C'est tout l'enjeu des récentes décisions d'ouverture sur les pratiques oenologiques (copeaux).
Quant à la réforme de l'Organisation Commune de Marché, les propositions de la Commission seront présentées le 22 juin. Nous en connaissons les grandes lignes et en avons déjà rejeté les éléments inacceptables. Parmi les pistes à suivre, je retiendrai :
- la gestion du marché et l'éventuel remplacement des outils actuels (distillation) par des instruments plus souples et mieux adaptés à chaque Etat membre ;
- la segmentation, notamment suivant deux catégories : les vins à IG et les vins sans IG, ce qui remet en cause la classification actuelle (V.Q.PR.D, vins de table à IG, vins de table).
Vous posez la question d'un véritable plan d'accompagnement de cessation d'activité. Si certains viticulteurs, quelquefois non professionnels, doivent être incités à partir grâce aux dispositifs déjà existants, je crois prioritaire de renforcer notre compétitivité plutôt que de perdre des capacités de production par des abandons massifs.
. [ Monsieur le Président, vous montrez votre préoccupation pour les filières d'avenir, biocarburants et biomasse. Je la partage parce que c'est un puissant ressort pour la confiance et la fierté des agriculteurs. ]
Le plan biocarburants lancé par Jean-Pierre RAFFARIN et renforcé par Dominique de VILLEPIN s'est traduit, depuis un an, par l'octroi de 2,6 Mt d'agréments nouveaux permettant la réalisation de 16 usines nouvelles dans 12 régions de France.
D'ici la fin du mois de juin, un nouvel appel à candidatures sera lancé à hauteur de 1,1 Mt d'agréments délivrés fin 2006. Plus de 2,5 Millions d'ha pourraient être consacrés à des cultures pour la production de biocarburants en 2010.
Et nous allons plus loin : avec Thierry BRETON, nous avons installé, le 7 juin, le groupe de travail piloté par Alain PROST, chargé d'élaborer un plan d'action pour le développement de la filière flex-fuel et d'accroître la visibilité des biocarburants.
S'agissant des garanties apportées à leur développement, la Loi d'orientation agricole a concrétisé le principe d'un accompagnement à travers une défiscalisation modulée en fonction du contexte économique : évolution des cours des matières premières agricoles et des énergies fossiles, ainsi que de la productivité des filières agro-industrielles concernées. Ce dispositif représente un effort pour 2006 de près de 300 Meuros.
Sur le bioéthanol, notre pays est en mesure de satisfaire nos besoins au regard des objectifs fixés. Nous serons donc vigilants dans les négociations commerciales à venir : il ne faudrait pas substituer une dépendance aux énergies fossiles importées à une nouvelle dépendance aux bioénergies importées.
Enfin, vous évoquez les tarifs de rachat d'électricité produite à partir de biomasse. Une revalorisation substantielle de ce tarif, d'au moins 50% pour le biogaz, est prévue. Un arrêté du Ministre de l'Industrie devrait être publié prochainement.
[ Sur le contexte budgétaire, vous en connaissez les contraintes fortes. Un effort substantiel a été fait en 2006 ]
Pour les stages 6 mois, une enveloppe supplémentaire de financement de 1,5 Meuros a été délégué aux Préfets de Région.
Sur le plan bâtiments d'élevage, vous évoquez la file d'attente. Oui, Monsieur le Président, parce que c'est un succès. Et les engagements de l'Etat ont été tenus : 120 Meuros ont été mobilisés auxquels s'ajoutent 91 Meuros, provenant des collectivités locales.
Vous vous interrogez sur la poursuite des Contrats d'agriculture durable. Cette année, le renouvellement des Contrats territoriaux d'exploitation (CTE) herbagers des anciens titulaires d'une PMSEE et des CTE ovins sera prioritaire. Il en est de même pour la conversion à l'agriculture biologique.
Pour honorer les contrats Natura 2000, le Premier Ministre a annoncé 20 Meuros de crédits d'engagement, grâce notamment à des transferts depuis les crédits du Ministère de l'Ecologie. La répartition de ces crédits supplémentaires est en cours.
A partir de 2007, les mesures agro-environnementales, cofinancées par le FEADER, feront partie des priorités de la prochaine programmation, établie sur une base régionale. Ces mesures territorialisées s'ajouteront à la Prime herbagère agroenvironnementale (PHAE), reconduite entièrement sur crédits d'Etat afin de dégager des moyens pour d'autres actions sur le FEADER. Notre engagement sera tenu dès 2007. J'ajoute que le cahier des charges de la PHAE maintenu fera l'objet d'une négociation avec la Commission européenne.
[ En 2007, notre Ministère participe à l'effort budgétaire de l'ensemble du Gouvernement. Cette mobilisation est une mesure d'équité à l'égard des générations futures, et nous impose en retour de fixer nos priorités. ]
Le Premier Ministre a arrêté une évolution pour le Ministère de l'agriculture et de la pêche, en hausse modérée mais réelle. Elle suit l'augmentation moyenne du budget de l'Etat. Quelques opérations techniques et de périmètre restent à calibrer au cours de l'été : donner un chiffre aujourd'hui n'aurait pas de sens.
Ce projet de budget fixe des priorités : gestion des crises et des aléas, investissements de modernisation, mais aussi maintien des engagements sur le second pilier de la PAC, malgré la baisse des enveloppes communautaires. Monsieur le Président, vous avez évoqué l'installation. Nous poursuivrons l'effort engagé.
[ Vous m'avez alerté sur les retraites. ]
Mon objectif est de poursuivre l'effort en faveur des petites retraites agricoles. J'ai mandaté, à ce titre, trois Députés, Yves CENSI, Marc LE FUR et Daniel GARRIGUE, pour prolonger les mesures déjà adoptées dans le cadre de la loi d'orientation agricole. C'est une question de justice à l'égard d'exploitants agricoles qui au terme d'une vie de labeur doivent pouvoir vivre décemment.
[ Concernant la réforme des offices, les décrets d'application des dispositions de la loi d'orientation d'agricole ont été publiés 1er juin dernier. ]
Dès cette année, l'Agence unique de paiement (AUP) est désormais en place. Votre assemblée continuera à être associée, comme expert, aux conseils de direction des offices et l'un de ses représentants, Monsieur Jean SALMON, sera nommé au Conseil d'Administration de l'AUP.
[ Enfin, je crois que nous pouvons légitimement dresser un parallèle entre la réforme de l'Etat et l'évolution de vos établissements publics. C'est le même souci d'efficacité qui nous guide. ]
Monsieur le Président, vous avez traduit votre engagement dès 2001 dans le projet CAP 2010. Renforcées par les lois de décentralisation, les chambres ont été progressivement restructurées en réseau et dotées de compétences élargies avec la loi sur le développement des territoires ruraux. Cette évolution nécessitait de consolider l'APCA dans ses fonctions d'impulsion et de coordination. Votre Université à Tours a exploré des pistes utiles.
Nous avons pu travailler à cette évolution dans le cadre de l'ordonnance prévue par la loi d'orientation agricole. Pour répondre précisément à votre question sur le calendrier, l'ordonnance a été envoyée au Conseil d'Etat et le texte pourra être présenté au Conseil des Ministres en juillet.
. [ S'agissant de la réforme budgétaire, le Ministère des Finances a engagé une réflexion sur la transposition de la Loi organique relative aux lois de finances (LOLF) aux opérateurs de l'Etat. ]
Je suis favorable au principe d'expérimentations par des chambres d'agriculture volontaires dès 2007. Comptez sur mon appui auprès de mes collègues des Finances.
. [ Vous évoquez une activité stratégique, celle du conseil agricole. ]
Conformément aux règles de la Politique Agricole Commune, la France doit mettre en place un Système de Conseil Agricole (SCA) au 1er janvier 2007, portant au minimum sur le champ de la conditionnalité. Nous disposons d'ores et déjà de conseils agricoles susceptibles de remplir ce rôle. Leur structuration est nécessaire en raison d'une grande diversité nuisant à leur lisibilité par les professionnels.
Mais nous devons aussi être plus ambitieux que le seul conseil sur la conditionnalité. Il faut envisager une offre de conseil global, régulier, de proximité, qui accompagne les mutations des exploitations agricoles. Le système, que nous définirons ensemble, mettra en cohérence l'offre locale proposée.
A ce stade, nous devons approfondir la réflexion engagée en concertation avec les organismes de conseil agricole. Les chambres d'agriculture y tiennent une place importante.
. [ L'un des enjeux de 2007, ce sont les élections aux chambres d'agriculture. ]
Tous les membres, à l'exception de ceux du collège des administrateurs des centres régionaux de la propriété forestière, seront renouvelés. Avec vous, nous avons simplifié ces élections en généralisant le vote par correspondance. Le décret de modification a été validé par le Conseil d'Etat le 13 juin et est en cours de publication au journal officiel.
Je prendrai dans les prochains jours un arrêté qui précisera le calendrier. Les listes des candidatures devront être déposées avant le 2 janvier 2007, la campagne électorale débutant avec leur publication le 8 janvier. Elle s'achèvera le 30 janvier 2007.
[ CONCLUSION ]
Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs,
L'agriculture française et européenne se situe à une époque charnière. Il nous appartient de relever le défi d'un contexte mondial et communautaire en évolution. Une certitude nous guide : l'agriculture est stratégique pour l'indépendance de notre pays et l'emploi ; c'est aussi notre identité qui est en jeu. Nous défendrons notre modèle agricole dans les jours et les mois à venir.
Je vous remercie de votre attention.
Source http://www.agriculture.gouv.fr, le 26 juin 2006
Mesdames, Messieurs,
C'est avec grand plaisir que je participe à la session de clôture de l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture, et je remercie le Président GUYAU pour son invitation.
Permettez-moi de souligner les résultats positifs de nos échanges depuis un an. Le dialogue suivi avec votre institution a permis de mettre en oeuvre les indispensables évolutions, notamment dans le cadre de la nouvelle Politique Agriculture Commune entrée en application en 2005 ou l'évolution de la programmation du développement rural.
Je veux saluer les efforts des chambres d'agriculture pour apporter un soutien pédagogique aux exploitants. C'est une coopération bénéfique pour l'avenir de notre agriculture, que je souhaite prolonger. Celle-ci évolue constamment, et je me félicite que nous ayons su fixer des lignes directrices, en particulier avec la loi d'orientation agricole à laquelle vous avez été étroitement associés.
Monsieur le Président, comme en décembre, lors de votre Université à Tours, ces derniers jours de juin ont pour actualité les négociations internationales. Et je commencerai par là avant de répondre très concrètement à vos interrogations sur la conjoncture économique et sociale, ainsi que l'actualité des chambres d'agriculture.
[ Le contexte international, d'abord. Vous m'interrogez sur la stratégie de notre pays : nous voulons un accord qui réponde à l'objectif du cycle de développement, mais pas à n'importe quel prix. Plutôt un bon accord plus tard, qu'un mauvais accord maintenant. ]
Une session de négociation au niveau des Ministres, à laquelle je me rendrai, se tiendra du 29 juin au 2 juillet à Genève. La France sera particulièrement ferme : il n'y a pas lieu que l'Union européenne fasse de nouveaux pas sur l'agriculture. Nous ne nous satisferions pas d'un accord bâclé motivé par le seul désir de conclure avant les échéances du calendrier politique américain.
En matière agricole, l'Union européenne a fait ce qu'on attendait d'elle dans le cycle de Doha, peut-être même plus. L'offre européenne du 28 octobre 2005 représente l'effort maximal que nous pouvons consentir. Avec les concessions déjà accordées, la Commission est aux limites de son mandat.
C'est pourquoi j'appelle le négociateur communautaire à la plus grande vigilance et fermeté. Un accord cet été engagerait l'Union pour la suite des négociations. A cet égard, je me félicite que le Conseil puisse se réunir formellement, comme c'est l'usage, durant la session de Genève, aussi souvent que nécessaire. J'y participerai avec ma collègue Christine Lagarde, afin de porter les positions françaises tout au long de cette phase capitale.
Sur l'accès au marché, je vois mal comment l'Union pourrait aller au-delà de son offre d'octobre 2005, sans remettre en cause le niveau de préférence communautaire nécessaire à la stabilité de la PAC.
Nous resterons vigilants tant sur le respect des conditions de cette offre que sur les avancées nécessaires de nos partenaires internationaux. C'est la condition de son maintien. Force est de constater que l'Europe, seule, a contribué à l'avancée du cycle de DOHA. Le temps est venu pour nos partenaires de faire mouvement à leur tour, sauf à prendre le risque d'un échec. La proximité des échéances et le nombre de sujets de divergence entre les membres de l'OMC rend ce risque crédible. Je n'exclus aucun scénario.
Nos lignes rouges sont fixées et connues : la pérennité de la PAC réformée et la préférence européenne. Telle est la position que notre pays défendra, en liaison étroite avec l'ensemble de nos partenaires européens du G14 élargi.
[ Au niveau communautaire, nous respecterons nos engagements. Ils constituent un atout de poids dans la négociation internationale, l'Europe manifestant ainsi que, pour sa part, elle a avancé. ]
En revanche, nous continuerons à faire preuve de pragmatisme dans la mise en oeuvre de la PAC réformée. Je tiens personnellement à vous remercier pour votre collaboration au cours de ces derniers mois, notamment pour votre participation à l'immense effort d'explication et d'accompagnement individuel des agriculteurs : plus de 1300 réunions se sont tenues rassemblant près de 126 000 exploitants. Cet effort de pédagogie a été essentiel.
. [ Sur les DPU, plus de 97% des dossiers ont été retournés et 245 000 clauses instruites. ]
Ensemble, nous avons revu les DPU avec l'introduction des clauses, qui restent complexes en raison des choix initiaux. Ensemble également, nous avons étudié toutes les situations pouvant être corrigées ou rattrapées dans le cadre des programmes obligatoires et spécifiques.
Il reste à régler la question des DPU dormants, contre lesquels nous devons lutter. J'ai fait de ce dossier une question permanente posée à la Commission pour que la ferme France ne perde pas 1euros. Nous rappelons régulièrement à la Commissaire et à ses services l'importance de trouver une solution quand nous aurons estimé, en septembre, l'enveloppe des DPU dormants.
Une marge d'action permettra aussi de régler des situations locales avec la mise en place en 2007 des réserves départementales.
S'agissant du prélèvement pour la réserve, le taux en sera fixé une fois connu les besoins, là encore après instruction des dossiers. Il ne dépassera pas 3 % et permettra de répondre aux choix faits ensemble pour la réserve.
Sur la date de versement des aides PAC, j'ai demandé à la Commission européenne une dérogation pour pouvoir verser un acompte dès la mi-octobre.
. [ Quant à la conditionnalité 2006, les difficultés tant redoutées ont pu être aplanies grâce aux assouplissements trouvés ensemble. ]
Le même esprit de dialogue et de pédagogie prévaut pour les travaux de préparation à la conditionnalité 2007.
. [ S'agissant de 2008, Monsieur le Président, c'est un rendez-vous qui s'inscrit comme une étape de réflexion et non comme le prétexte à la révision des équilibres financiers. Le cadre est fixé jusqu'en 2013 conformément au double accord de 2002 et 2003, toujours réaffirmé depuis. Nous devons nous préparer à cette discussion et je reçois votre proposition pour expertiser les évolutions possibles. Mais, en tout état de cause, ma position est claire : nous devons d'abord aller au terme de la réforme actuelle de la PAC et la réussir. ]
Dans ce cadre, nous pouvons être force de proposition et c'est bien le but du mémorandum que j'ai défendu à l'occasion du Conseil du 20 mars dernier avec 12 de mes collègues. Il s'agit de défendre la PAC contre les attaques dont elle est l'objet, de la compléter sur le volet gestion des crises et de la simplifier.
Et, au niveau national, nous avons avancé :
> sur la gestion des crises, l'assurance-récolte, par exemple, est un succès : 60 000 contrats ont été signés et une enveloppe significative de 30 Meuros accompagne la montée en puissance de ce dispositif en 2006.
> s'agissant de la simplification, j'ai engagé une démarche complète (appel à idées, internet, courrier, organisation du Ministère), pour « gagner le combat de la sur-administration » :
- en février 2006, dix mesures de simplification d'application immédiate ont été annoncées ;
- puis, le 19 mai, j'ai présenté 25 nouvelles mesures de simplification ;
- enfin, avec « TéléPAC », la déclaration des aides surface de la PAC ne nécessite plus de papier. Le recours à cette télé-procédure a plus que triplé par rapport à l'an passé, certains départements ayant plus de 20% de « télé-déclarants ».
Le développement des téléprocédures requiert, comme vous le souhaitez Monsieur le Président, un partenariat étroit avec votre institution. Nous avons des marges de progrès significatives pour une utilisation plus performante de ces systèmes d'information ; je souhaite que soit défini, avec vous, dès septembre un plan d'actions et de communication. Nous examinerons alors les modalités permettant un traitement collectif des envois de dossiers.
Nous disposerons à cette date d'un téléservice permettant à chaque agriculteur de consulter et vérifier les informations détenues par le Ministère de l'Agriculture.
[ S'agissant de la conjoncture, le premier objectif est de passer le cap des crises récurrentes, notamment pour la viticulture. ]
L'Etat s'est mobilisé : 100 Meuros en 2005 puis 90 Meuros de nouveau en 2006 pour des mesures de soutien à la trésorerie, à la procédure AGRIDIFF, à l'exportation et aux prêts de consolidation... Les aides sont disponibles dans les départements prêtes à être versées, après étude des dossiers par les directions de l'agriculture et de la forêt.
Mais il faut « dégager le marché » pour reprendre votre expression, Monsieur le Président. C'est pourquoi l'attribution de ces aides est conditionnée à une participation à la distillation de crise récemment ouverte. C'est un élément non négociable, nécessaire pour repartir sur des bases saines. La responsabilité de tous les bassins est engagée.
Au-delà, pour « ajuster durablement l'offre », je défends deux évolutions complémentaires :
. plus de rigueur pour la gestion des vins d'appellation d'origine contrôlée : c'est le sens de la réforme de l'INAO. Notre dispositif sera organisé autour du principe d'une séparation nette entre les organismes chargés de la défense et de la gestion des AOC et ceux à qui sera confiée la responsabilité du contrôle des cahiers des charges ;
. parallèlement, je souhaite ouvrir des espaces de liberté et alléger la réglementation pour les vins plus standardisés. C'est tout l'enjeu des récentes décisions d'ouverture sur les pratiques oenologiques (copeaux).
Quant à la réforme de l'Organisation Commune de Marché, les propositions de la Commission seront présentées le 22 juin. Nous en connaissons les grandes lignes et en avons déjà rejeté les éléments inacceptables. Parmi les pistes à suivre, je retiendrai :
- la gestion du marché et l'éventuel remplacement des outils actuels (distillation) par des instruments plus souples et mieux adaptés à chaque Etat membre ;
- la segmentation, notamment suivant deux catégories : les vins à IG et les vins sans IG, ce qui remet en cause la classification actuelle (V.Q.PR.D, vins de table à IG, vins de table).
Vous posez la question d'un véritable plan d'accompagnement de cessation d'activité. Si certains viticulteurs, quelquefois non professionnels, doivent être incités à partir grâce aux dispositifs déjà existants, je crois prioritaire de renforcer notre compétitivité plutôt que de perdre des capacités de production par des abandons massifs.
. [ Monsieur le Président, vous montrez votre préoccupation pour les filières d'avenir, biocarburants et biomasse. Je la partage parce que c'est un puissant ressort pour la confiance et la fierté des agriculteurs. ]
Le plan biocarburants lancé par Jean-Pierre RAFFARIN et renforcé par Dominique de VILLEPIN s'est traduit, depuis un an, par l'octroi de 2,6 Mt d'agréments nouveaux permettant la réalisation de 16 usines nouvelles dans 12 régions de France.
D'ici la fin du mois de juin, un nouvel appel à candidatures sera lancé à hauteur de 1,1 Mt d'agréments délivrés fin 2006. Plus de 2,5 Millions d'ha pourraient être consacrés à des cultures pour la production de biocarburants en 2010.
Et nous allons plus loin : avec Thierry BRETON, nous avons installé, le 7 juin, le groupe de travail piloté par Alain PROST, chargé d'élaborer un plan d'action pour le développement de la filière flex-fuel et d'accroître la visibilité des biocarburants.
S'agissant des garanties apportées à leur développement, la Loi d'orientation agricole a concrétisé le principe d'un accompagnement à travers une défiscalisation modulée en fonction du contexte économique : évolution des cours des matières premières agricoles et des énergies fossiles, ainsi que de la productivité des filières agro-industrielles concernées. Ce dispositif représente un effort pour 2006 de près de 300 Meuros.
Sur le bioéthanol, notre pays est en mesure de satisfaire nos besoins au regard des objectifs fixés. Nous serons donc vigilants dans les négociations commerciales à venir : il ne faudrait pas substituer une dépendance aux énergies fossiles importées à une nouvelle dépendance aux bioénergies importées.
Enfin, vous évoquez les tarifs de rachat d'électricité produite à partir de biomasse. Une revalorisation substantielle de ce tarif, d'au moins 50% pour le biogaz, est prévue. Un arrêté du Ministre de l'Industrie devrait être publié prochainement.
[ Sur le contexte budgétaire, vous en connaissez les contraintes fortes. Un effort substantiel a été fait en 2006 ]
Pour les stages 6 mois, une enveloppe supplémentaire de financement de 1,5 Meuros a été délégué aux Préfets de Région.
Sur le plan bâtiments d'élevage, vous évoquez la file d'attente. Oui, Monsieur le Président, parce que c'est un succès. Et les engagements de l'Etat ont été tenus : 120 Meuros ont été mobilisés auxquels s'ajoutent 91 Meuros, provenant des collectivités locales.
Vous vous interrogez sur la poursuite des Contrats d'agriculture durable. Cette année, le renouvellement des Contrats territoriaux d'exploitation (CTE) herbagers des anciens titulaires d'une PMSEE et des CTE ovins sera prioritaire. Il en est de même pour la conversion à l'agriculture biologique.
Pour honorer les contrats Natura 2000, le Premier Ministre a annoncé 20 Meuros de crédits d'engagement, grâce notamment à des transferts depuis les crédits du Ministère de l'Ecologie. La répartition de ces crédits supplémentaires est en cours.
A partir de 2007, les mesures agro-environnementales, cofinancées par le FEADER, feront partie des priorités de la prochaine programmation, établie sur une base régionale. Ces mesures territorialisées s'ajouteront à la Prime herbagère agroenvironnementale (PHAE), reconduite entièrement sur crédits d'Etat afin de dégager des moyens pour d'autres actions sur le FEADER. Notre engagement sera tenu dès 2007. J'ajoute que le cahier des charges de la PHAE maintenu fera l'objet d'une négociation avec la Commission européenne.
[ En 2007, notre Ministère participe à l'effort budgétaire de l'ensemble du Gouvernement. Cette mobilisation est une mesure d'équité à l'égard des générations futures, et nous impose en retour de fixer nos priorités. ]
Le Premier Ministre a arrêté une évolution pour le Ministère de l'agriculture et de la pêche, en hausse modérée mais réelle. Elle suit l'augmentation moyenne du budget de l'Etat. Quelques opérations techniques et de périmètre restent à calibrer au cours de l'été : donner un chiffre aujourd'hui n'aurait pas de sens.
Ce projet de budget fixe des priorités : gestion des crises et des aléas, investissements de modernisation, mais aussi maintien des engagements sur le second pilier de la PAC, malgré la baisse des enveloppes communautaires. Monsieur le Président, vous avez évoqué l'installation. Nous poursuivrons l'effort engagé.
[ Vous m'avez alerté sur les retraites. ]
Mon objectif est de poursuivre l'effort en faveur des petites retraites agricoles. J'ai mandaté, à ce titre, trois Députés, Yves CENSI, Marc LE FUR et Daniel GARRIGUE, pour prolonger les mesures déjà adoptées dans le cadre de la loi d'orientation agricole. C'est une question de justice à l'égard d'exploitants agricoles qui au terme d'une vie de labeur doivent pouvoir vivre décemment.
[ Concernant la réforme des offices, les décrets d'application des dispositions de la loi d'orientation d'agricole ont été publiés 1er juin dernier. ]
Dès cette année, l'Agence unique de paiement (AUP) est désormais en place. Votre assemblée continuera à être associée, comme expert, aux conseils de direction des offices et l'un de ses représentants, Monsieur Jean SALMON, sera nommé au Conseil d'Administration de l'AUP.
[ Enfin, je crois que nous pouvons légitimement dresser un parallèle entre la réforme de l'Etat et l'évolution de vos établissements publics. C'est le même souci d'efficacité qui nous guide. ]
Monsieur le Président, vous avez traduit votre engagement dès 2001 dans le projet CAP 2010. Renforcées par les lois de décentralisation, les chambres ont été progressivement restructurées en réseau et dotées de compétences élargies avec la loi sur le développement des territoires ruraux. Cette évolution nécessitait de consolider l'APCA dans ses fonctions d'impulsion et de coordination. Votre Université à Tours a exploré des pistes utiles.
Nous avons pu travailler à cette évolution dans le cadre de l'ordonnance prévue par la loi d'orientation agricole. Pour répondre précisément à votre question sur le calendrier, l'ordonnance a été envoyée au Conseil d'Etat et le texte pourra être présenté au Conseil des Ministres en juillet.
. [ S'agissant de la réforme budgétaire, le Ministère des Finances a engagé une réflexion sur la transposition de la Loi organique relative aux lois de finances (LOLF) aux opérateurs de l'Etat. ]
Je suis favorable au principe d'expérimentations par des chambres d'agriculture volontaires dès 2007. Comptez sur mon appui auprès de mes collègues des Finances.
. [ Vous évoquez une activité stratégique, celle du conseil agricole. ]
Conformément aux règles de la Politique Agricole Commune, la France doit mettre en place un Système de Conseil Agricole (SCA) au 1er janvier 2007, portant au minimum sur le champ de la conditionnalité. Nous disposons d'ores et déjà de conseils agricoles susceptibles de remplir ce rôle. Leur structuration est nécessaire en raison d'une grande diversité nuisant à leur lisibilité par les professionnels.
Mais nous devons aussi être plus ambitieux que le seul conseil sur la conditionnalité. Il faut envisager une offre de conseil global, régulier, de proximité, qui accompagne les mutations des exploitations agricoles. Le système, que nous définirons ensemble, mettra en cohérence l'offre locale proposée.
A ce stade, nous devons approfondir la réflexion engagée en concertation avec les organismes de conseil agricole. Les chambres d'agriculture y tiennent une place importante.
. [ L'un des enjeux de 2007, ce sont les élections aux chambres d'agriculture. ]
Tous les membres, à l'exception de ceux du collège des administrateurs des centres régionaux de la propriété forestière, seront renouvelés. Avec vous, nous avons simplifié ces élections en généralisant le vote par correspondance. Le décret de modification a été validé par le Conseil d'Etat le 13 juin et est en cours de publication au journal officiel.
Je prendrai dans les prochains jours un arrêté qui précisera le calendrier. Les listes des candidatures devront être déposées avant le 2 janvier 2007, la campagne électorale débutant avec leur publication le 8 janvier. Elle s'achèvera le 30 janvier 2007.
[ CONCLUSION ]
Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs,
L'agriculture française et européenne se situe à une époque charnière. Il nous appartient de relever le défi d'un contexte mondial et communautaire en évolution. Une certitude nous guide : l'agriculture est stratégique pour l'indépendance de notre pays et l'emploi ; c'est aussi notre identité qui est en jeu. Nous défendrons notre modèle agricole dans les jours et les mois à venir.
Je vous remercie de votre attention.
Source http://www.agriculture.gouv.fr, le 26 juin 2006