Déclaration de M. Dominique Bussereau, ministre de l'agriculture et de la pêche, sur , Paris le 27 juin 2006.

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Circonstance : Assemblée générale du Comité national des pêches maritimes et des élevages marins, sur le plan avenir pêche prévoyant une meilleure gestion des ressources, une réforme des structures professionnelles, une mensualisation d'une partie des revenus des pêcheu

Texte intégral

Monsieur le Président, cher Pierre Georges DACHICOURT,
Madame le Député, chère Hélène TANGUY,
Mesdames, Messieurs les membres du Comité National des Pêches,
Mesdames et Messieurs,
Je me réjouis de participer à votre Assemblée générale et vous remercie de votre invitation. Je salue les représentants de toutes les façades maritimes, de métropole comme Outre-mer, et des professions qui composent votre Comité.
Aujourd'hui, nous allons, si vous le voulez bien, arrêter notre plan d'avenir de la pêche. Je vous ai proposé d'y travailler en octobre dernier pour répondre à votre besoin unanime de visibilité. Je crois que nous avons tenu notre pari et nous pouvons proposer à aux acteurs de la filière un ensemble d'objectifs et d'outils pour les années à venir.
Je voudrais vous remercier pour vos propositions nombreuses encore jusqu'à ces tous derniers jours dont certaines ont pu enrichir le document initial. Il faut du courage, dans un contexte difficile, pour porter un regard critique et proposer des évolutions, comme vous l'avez fait, Président.
Mais permettez moi, avant de revenir au Plan, de faire un point rapide sur les sujets de cette année.
[ Nous avons travaillé ensemble pour faire face aux difficultés ]
1. Sortir du contentieux « poisson sous taille » qui porte préjudice à l'ensemble de la filière
Nous avons fait le nécessaire pour répondre aux exigences communautaires. Nous demandons que soit levée cette astreinte disproportionnée et que la Commission européenne et la Cour de Justice prennent compte des réalité avec justice et équité. La France exige que la politique des contrôles soit appliquée identiquement partout. J'ai demandé au futur Président finlandais de lancer un travail d'harmonisation des pratiques de contrôles dans l'Union européenne.
Le contrôle est nécessaire. Il doit être réalisé dans de bonnes conditions, c'est pourquoi j'ai voulu qu'une charte du contrôle soit écrite.
Cette affaire a bien entendu fait le jeu des environnementalistes extrémistes. Après s'être attaqués aux filets maillants dérivants, ils s'en prennent maintenant clairement aux chaluts qui font la spécificité de nos pêches.
Je vous invite à communiquer sur les efforts de gestion réalisés, à continuer les travaux menés pour améliorer la sélectivité des engins. Déjouons ces attaques, parfois très violentes à l'image des dernières initiatives de GREENPEACE.
2. Défendre les intérêts de la pêche française lors des négociations à Bruxelles
Avec nos amis de la pêche -qui sont parfois nos concurrents en mer, mais aussi nos principaux partenaires à Bruxelles- nous faisons progresser la Politique commune de la Pêche :
. Ainsi la simplification va devenir une réalité : le ministre finlandais m'a assuré qu'il porterait ce dossier dans les 6 prochains mois, afin notamment, d'assurer une plus grande stabilité à nos quotas, et de dissocier les sujets portant sur les quotas et les mesures techniques.
. Nous avons obtenu un Fonds européen de la pêche (FEP) avec des mesures intéressantes :
- La réserve de jauge va permettre de construire des navires plus sûrs, d'améliorer les conditions de travail ;
- Nous pourrons aider jusqu'en 2008, le développement des flottes des départements d'Outre-mer
- Le maintien des aides à l'achat de navire d'occasion est un signal en direction de nos jeunes ;
- L'installation de moteurs plus performants pourra être aidée, et le plafond des aides qui peuvent être versées sans contrainte sur trois ans par les Etats passera de 3000 euros à 30 000 euros.
. Nous avons des préoccupations immédiates :
- Sur l'anchois : nous attendons l'avis officiel du Comité scientifique, technique et économique des pêches (CSTEP) qui devrait être connu d'ici la fin du mois. Si l'avis du CSTEP n'est pas conforme à nos estimations, je demanderai à la Commission des explications sur les conditions dans lesquelles les validations scientifiques ont été effectuées. En cas de fermeture, nous engagerons un arrêt biologique en tirant les enseignements de l'année dernière pour éviter des ruptures d'approvisionnements pour les mareyeurs. Cette affaire nous invite à renforcer encore la dimension européenne de la recherche halieutique.
- Sur les dérogations au nombre de jours de mer : je rappelle mes propos tenus au Commissaire et, hier, à la nouvelle présidence finlandaise : la France, qui a un bon dossier, demande maintenant à la Commission de faire droit à nos demandes. C'est un sujet crucial pour nos flottes de la Manche et du Nord.
3. Faire face à la diminution de certains quotas
Certains quotas ont été fermés de façon précoce, notamment le hareng ou le maquereau. Je pense également à la situation difficile de la langoustine et de la sole. Malgré des marges de manoeuvre étroite dans ce domaine, nous tentons à chaque fois de trouver des solutions pour éviter l
es pénalités :
- nous avons pu obtenir de bons échanges (maquereau, thon rouge) ;
- nous demandons avec détermination à Bruxelles la modification de certaines règles de répartition des TAC comme les préférences de la Haye ou danoises qui sont des entorses à la stabilité relative et pénalisent nos pêcheurs de maquereau et de hareng ;
- l'IFREMER, à ma demande, va mettre l'accent sur les espèces sensibles telles que le hareng ou le maquereau.
- La récente fermeture du quota de maquereau pour ceux qui ne sont pas membres d'une organisation de producteurs nous engage à les intégrer dans des Organisations de producteurs, à régionaliser ces quotas et peut être même à établir des mesures de plafonnement individuel.
La solution de la sortie de flotte doit rester limitée. C'est pourquoi, le plan ouvert cette année, doté de 26 Meuros, s'adresse uniquement à ceux qui exploitent des espèces sous quotas restreints.
J'ai souhaité mettre en place un dispositif d'échange de navires pour éviter la casse des navires jeunes. La défiscalisation totale de la prime de sortie de flotte est appliquée à ce plan.
Enfin, pour répondre à certaines inquiétudes, notamment en Languedoc-Roussillon, nous cherchons les meilleures conditions de mise en place du Plan.
4. Relever le défi du gazole cher
Le Fonds de Prévention des Aléas Pêche, le FPAP, est un dispositif utile, mais vous le savez contesté. J'ai pris connaissance de ses dernières décisions prises hier pour vous prémunir d'une flambée des cours du pétrole dans les prochains mois. Les aides de l'Etat, 80 Meuros sur 12 mois, complèteront ce mécanisme. Mais ne perdons pas de vue notre objectif d'économies d'énergie. L'Etat vous aidera pour définir de nouveaux engins, de nouveaux moteurs, de nouvelles énergies. La loi d'orientation sur l'agriculture adoptée en début d'année vous ouvre la possibilité d'utiliser de l'huile végétale pure.
Dans l'immédiat, des audits individuels seront réalisés au cours de l'été et examinés par des Commissions régionales. Ensuite, des aides qui devront être d'effet équivalent à celles du FPAP, seront accordées. Il s'agit d'exonération de charges sociales et fiscales ou d'avances de trésorerie.
Par ailleurs, les crédits prévus pour les caisses chômages intempérie, soit 6 Meuros, ont été versés au Comité national des Pêches.
Les modalités du moratoire d'un an des intérêts d'emprunt que j'ai annoncé à Nantes, destiné aux entreprises les plus endettées et exploitant notamment des chalutiers, se précisent : le remboursement du capital se fera en fin d'échéancier libérant ainsi de la trésorerie pour les entreprises. Je souhaite qu'il puisse entrer en vigueur dès que possible.
5. réussir la fin de la programmation IFOP
Très rapidement sur ce point, pour vous dire que les crédits impartis à la France ont été très bien dépensés, si bien que plusieurs axes sont aujourd'hui épuisés : sur les équipements des ports, sur le mareyage. Il reste des crédits sur la modernisation de la flotte, mais les règles de l'IFOP ne nous permettent pas de les transférer sur d'autres lignes. Dans ces conditions, nous avons engagé un recensement des projets que nous pourrions reprogrammer sur le FEP. Ainsi, nous allons nous dégager quelques marges de manoeuvre. Bien entendu, je le dis notamment pour les mareyeurs, les dossiers qui ont été engagés, seront honorés.
[ Le Plan d'Avenir pour la Pêche ]
Ce plan est une feuille de route qui prévoit de nombreux chantiers. Certains sont déjà engagés, je pense par exemple aux actions qui sont menées dans le cadre des pôles de compétitivité dont les financements seront bien assurés.
Pour le reste, il nous faut programmer les travaux et en suivre la progression. Je voudrais ici préciser les mesures ayant fait l'objet d'interrogations et vous indiquer les enrichissements réalisés.
1. La meilleure gestion de nos ressources
S'agissant du Conseil de prospective, je souhaite que celui-ci reprenne la composition du CSO, en incluant donc la représentation syndicale, et que celui-ci soit réuni dès que les textes seront adaptés.
S'agissant de la réforme des droits à produire, un décret sera pris dès que les derniers réglages seront trouvés. Je vais vous faire une proposition dans les tout prochains jours. De Même s'agissant du traitement des antériorités des navires inscrits au Plan de sortie de flotte 2006.
Il est prévu dans le plan que les droits d'accès à la ressource -les licences- seront délivrés s'il existe une disponibilité en quotas. Je vous ferai dans le courant de l'été des propositions pour mettre en pratique cette mesure.
Le rattachement à une halle à marée doit être effectif pour tous les navires, sans pour autant imposer la vente aux enchères. Il s'agit d'avoir une meilleure connaissance des ventes directes et de restreindre les pratiques « anarchiques » qui déstabilisent le marché.
Vous avez ensuite demandé des précisions sur la régionalisation des quotas des pêcheurs qui n'adhèrent pas à une organisation de producteurs. Cela signifie très concrètement que chaque comité régional, via le CNPM, sera associé à ces mesures de gestion, et que la région (la DRAM) sera désormais le niveau de gestion.
La lutte contre la pêche illégale a été oubliée dans le Plan. La volonté de l'Etat est de prolonger les efforts engagés depuis quelques années et qui ont produit de bons effets. Nous devrons donc compléter le plan sur ce point.
2. La rénovation de l'encadrement du secteur
Je voudrais aussi préciser le cadre dans lequel sera mis en place l'interprofession. L'Etat ne peut se substituer aux acteurs mais je propose que la Direction des pêches, en liaison avec votre Comité national des Pêches et l'OFIMER, prenne l'initiative de convoquer, dès le mois de septembre, les acteurs de la filière, pour une première table ronde.
Le système d'information à la pêche et le journal de bord électronique seront mis en place progressivement. L'Etat accompagnera cette évolution en concertation avec la profession.
La réforme des structures professionnelles : les comités locaux des pêches, celui de Marennes-Oléron notamment, se sont inquiétés de leur avenir. Votre proposition de réforme, Président, va naturellement faire l'objet de concertations et de discussions. Une chose est sûre : nous aurons toujours besoin de professionnels représentatifs et légitimes sur le terrain.
3. Améliorer la rentabilité des entreprises
Hélène TANGUY constituera, à ma demande, un Comité de suivi chargé de veiller à la mise en oeuvre des mesures relatives au marché, aux produits, aux entreprises, qui sont de la responsabilité :
De L'OFIMER tout d'abord, avec qui je signerai un contrat d'objectifs. Plus que jamais, l'Office doit s'impliquer dans l'amélioration des conditions de mise en marché des produits et coproduits. Un travail de réflexion sur les missions et les pouvoirs des organisations de producteurs doit également être engagé. Je propose qu'une personnalité indépendante travaille sur un schéma de regroupement des OP.
De L'IFREMER ensuite, chargé de coordonner la recherche et l'innovation, tant en ce qui concerne la technologie des pêches que les nouvelles énergies. L'objectif, c'est de créer rapidement un véritable réseau d'innovation technologique. J'attends des propositions en ce sens y compris pour favoriser des opérations de recherche communes à plusieurs entreprises.
De la DPMA enfin, à qui je confie le soin de travailler en lien avec les services du Ministère des Finances, sur la fiscalité, la transmission, l'investissement et l'installation dans le secteur des pêches. Un vade mecum sur les avantages de la forme sociétaire sera rédigé dans ce cadre. Je crois également nécessaire de prévoir comme piste d'avenir, l'implantation de nos entreprises à l'étranger et en outre-mer.
Enfin, le Comité de suivi sera chargé de s'assurer de l'avancement des travaux sur le financement des ports de pêche qui seront lancés très rapidement.
4. Maintenir l'attractivité du métier
S'agissant du mode de rémunération des marins, je connais leur attachement à la part. Néanmoins, je crois nécessaire de mensualiser une partie de la rémunération. Les objectifs sont multiples : assurer un revenu minimum en cas de coup dur, fidéliser les marins, pour éviter les comportements de chasseurs de primes.
La sécurité des navires et des pêcheurs : il s'agit de dégager des moyens pour aider la mise en place des « gyrophares électroniques » dès 2007 et pour généraliser la déclaration unique de prévention. Je propose de mandater l'Institut Maritime de Prévention sur ces sujets.
5. L'outre-mer
Nous devons établir les plans de modernisation et de construction des flottes et identifier des crédits nationaux disponibles. Ce travail va être réalisé dans les mois à venir par les Directions régionales des Affaires maritimes avec le soutien de la Direction des Pêches. Il a été tenu compte de la judicieuse remarque du Comité régional des pêches de GUYANE, visant à « mettre le paquet » sur la promotion des produits de la pêche outre-mer pour leur assurer de bons débouchés.
6. Les élevages marins
Il faut en effet que toutes créations nouvelles de zones de productions aquacoles se fassent selon un schéma de développement qui tienne compte des usages.
[ CONCLUSION ]
Au moment de conclure, je voudrai avoir une pensée pour ceux qui nous ont quittés, victimes d'accident du travail. Je pense aux marins du KLEIN FAMILIE, du GWEL VO, du LIBERTE, mais aussi à tous les autres marins disparus et à leurs familles.
Je vous remercie, Président, d'avoir salué publiquement les nouvelles mesures sur la sécurité. Nous en reparlerons longuement lors du colloque que l'Institut Maritime de Prévention organise à Lorient du 7 au 10 octobre prochains.
Le Gouvernement vous soutient. Rien ne pourra se faire sans le Comité National des pêches et ses différentes composantes. Pour aborder le tournant, il ne s'agit pas de s'isoler du monde mais, grâce à l'union de nos forces, de résister aux attaques.
Je vous remercie de votre attention et bon vent au Plan d'avenir.
Source http://www.agriculture.gouv.fr, le 28 juin 2006