Texte intégral
Je voudrais vous dire à tous combien nous sommes émus au départ de ce bateau "le Cap Camarat" de la compagnie CMA/CGM à destination de Beyrouth.
Permettez-moi, ici, de Marseille, d'abord de dire combien nous sommes heureux de l'immense solidarité qui a permis à ce bateau de partir, mais également de lancer un message sur le droit humanitaire international et enfin de dire dans quel esprit je me rends dans quelques heures à New York au Conseil de sécurité des Nations unies.
D'abord s'agissant de la solidarité, il y a une semaine, le ministère des Affaires étrangères a lancé cette opération "un bateau pour le Liban" en association avec l'UNICEF, le Haut Comité pour les Réfugiés et le Programme alimentaire mondial. Il s'agissait de permettre aux Françaises et aux Français, qui connaissent l'engagement politique de la France envers le Liban et savent les efforts diplomatiques que nous déployons au Conseil de sécurité pour arrêter le conflit, de manifester eux-mêmes directement, concrètement, leur solidarité, leur amitié. Grâce à des milliers d'appels, ce bateau est déjà prêt à partir. Le message des Français est clair. Leur préoccupation face à la situation humanitaire ne cesse de grandir. En effet, les chiffres sont insoutenables : aujourd'hui le seuil du million de déplacés a été dépassé, soit près d'un tiers de la population du Liban, et parmi ces déplacés la moitié sont des enfants. On comptabilise 1.000 tués, parmi eux, et malheureusement, plus d'un tiers sont des enfants. Il y aura eu, jusqu'à maintenant, dans ce conflit plus d'enfants tués que de militaires tués.
Dans la plaine de la Bekaa, depuis les opérations militaires menées mercredi, un quart de la population est parti. Les infrastructures de base sont quasiment totalement détruites. La communauté internationale est très inquiète des lourdes carences subies par les populations libanaises réfugiées. Les prix des produits alimentaires connaissent une inflation très importante. Le Sud et la vallée de la Bekaa souffrent de graves pénuries de médicaments pédiatriques. La baisse de l'approvisionnement en carburant, notamment celui destiné aux centrales électriques, aux hôpitaux, aux stations de pompage d'eau, pourrait entraîner une crise humanitaire majeure. Par manque d'énergie, certains hôpitaux au Nord Liban pourraient cesser de fonctionner d'ici cinq à huit jours, pendant que d'autres au Sud pourraient fermer d'ici moins de 48 heures.
Je voudrais aussi dire que si la France lance ce bateau pour les personnes déplacées du Liban, nous lançons également une opération humanitaire pour les personnes déplacées d'Haïfa, dans le Nord d'Israël.
Permettez-moi maintenant de lancer un message concernant le droit humanitaire international. Aujourd'hui, il n'y a aucune garantie d'accès des secours humanitaires aux plus démunis. La sécurité des parcours, l'accès aux populations sont les contraintes majeures qui pèsent sur les opérations humanitaires. Depuis le début du conflit, les Nations unies ont pu faire parvenir 19 convois humanitaires, 162 camions, depuis Beyrouth vers le sud du pays, (Tyr, Jezzine, Naqoura, Rmaich, Saïda, Cana et Tebnin). Ces convois contenaient de l'aide alimentaire, de l'eau, des couvertures, des tentes et des médicaments. Au nord du Liban cependant, les récents bombardements sur les ponts autoroutiers ont rendu extrêmement difficile l'acheminement de l'aide par voie terrestre, et ce, même jusqu'à Beyrouth. Au sud, la situation s'aggrave. Le bombardement du dernier pont sur le fleuve Litani empêche dorénavant tout convoi routier vers Tyr et dans la zone comprise entre le fleuve et la frontière sud du Liban. Il n'est donc plus possible d'acheminer de l'aide humanitaire aux villages situés dans cette partie du Liban, au sud du fleuve Litani.
Nous avons noté par ailleurs que les voies d'acheminement de l'aide sont devenues le théâtre de graves actes d'intimidation. Le symbole des Nations unies ne semble plus protéger sur le terrain les personnels, chaque jour plus menacés. Le CICR, qui s'est heurté à de nombreux problèmes liés aux combats sur les lieux de passage des convois, a appelé l'attention des donateurs sur les questions de sécurité. Depuis le début du conflit, l'organisation aurait été attaquée en moyenne tous les deux jours.
Nous souhaitons, par conséquent que les forces militaires israéliennes cessent leurs attaques sur les infrastructures civiles et renoncent aux actions qui entravent l'acheminement de l'aide humanitaire aux centaines de milliers de personnes déplacées à travers le pays.
Nous souhaitons, de la même manière, que les deux parties, y compris les autorités libanaises, augmentent le nombre de passages sécurisés, étant donné les récentes difficultés d'acheminement de l'aide humanitaire causées par les bombardements d'infrastructures. Nous souhaitons que les autorités israéliennes et libanaises accordent les garanties et autorisations nécessaires à l'arrimage de pétroliers, étant donné la pénurie de carburant.
Enfin, nous demandons aux deux parties de respecter le droit humanitaire international. Ce principe comporte deux exigences, celle de ne pas prendre pour cible des populations civiles, notamment les convois humanitaires et les opérations d'évacuation, celle de systématiquement distinguer les objectifs civils des cibles militaires.
Enfin, je pars à New York dans quelques heures, immédiatement après être venu ici, à Marseille. Nous avons déployé tous nos efforts pour parvenir à un cessez-le-feu et à un règlement durable de cette crise dramatique. Comme la France l'a affirmé depuis le début, on ne résoudra rien par la force. Toute solution doit passer par un accord politique. Les discussions se poursuivent à New York depuis le début de cette crise pour trouver une solution. La France, pour sa part, reste déterminée à faire le maximum pour trouver très rapidement une solution qui permette une cessation immédiate des hostilités. L'essentiel, dans un premier temps, est, en effet, d'obtenir l'arrêt des violences pour enclencher un processus qui assure le déploiement de l'armée libanaise de façon concomitante avec le retrait graduel de l'armée israélienne au Sud de la Ligne bleue. Il s'agit d'une première étape indispensable à un cessez-le-feu durable.
Voilà, ce sont les trois messages que je voulais vous faire passer. Je voudrais remercier enfin le ministère de la Défense : les rotations quotidiennes du ministère de la Défense nous permettent en effet d'amener l'aide humanitaire. Plus de 700 tonnes sont déjà arrivés à Beyrouth par un pont aérien et un pont maritime.
Je voudrais vous remercier, Monsieur le président, de permettre à ce bateau de partir de Marseille pour aller à Beyrouth. Rien ne peut permettre la destruction du Liban.
Sachez que la France et le président de la République, qui s'est exprimé il y a peu de temps encore, sont proches du Liban et que nous demandons aux deux pays d'arrêter le plus vite possible leurs hostilités. J'espère que nous trouverons, dans les heures qui viennent à New York, une solution de paix.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 16 août 2006
Permettez-moi, ici, de Marseille, d'abord de dire combien nous sommes heureux de l'immense solidarité qui a permis à ce bateau de partir, mais également de lancer un message sur le droit humanitaire international et enfin de dire dans quel esprit je me rends dans quelques heures à New York au Conseil de sécurité des Nations unies.
D'abord s'agissant de la solidarité, il y a une semaine, le ministère des Affaires étrangères a lancé cette opération "un bateau pour le Liban" en association avec l'UNICEF, le Haut Comité pour les Réfugiés et le Programme alimentaire mondial. Il s'agissait de permettre aux Françaises et aux Français, qui connaissent l'engagement politique de la France envers le Liban et savent les efforts diplomatiques que nous déployons au Conseil de sécurité pour arrêter le conflit, de manifester eux-mêmes directement, concrètement, leur solidarité, leur amitié. Grâce à des milliers d'appels, ce bateau est déjà prêt à partir. Le message des Français est clair. Leur préoccupation face à la situation humanitaire ne cesse de grandir. En effet, les chiffres sont insoutenables : aujourd'hui le seuil du million de déplacés a été dépassé, soit près d'un tiers de la population du Liban, et parmi ces déplacés la moitié sont des enfants. On comptabilise 1.000 tués, parmi eux, et malheureusement, plus d'un tiers sont des enfants. Il y aura eu, jusqu'à maintenant, dans ce conflit plus d'enfants tués que de militaires tués.
Dans la plaine de la Bekaa, depuis les opérations militaires menées mercredi, un quart de la population est parti. Les infrastructures de base sont quasiment totalement détruites. La communauté internationale est très inquiète des lourdes carences subies par les populations libanaises réfugiées. Les prix des produits alimentaires connaissent une inflation très importante. Le Sud et la vallée de la Bekaa souffrent de graves pénuries de médicaments pédiatriques. La baisse de l'approvisionnement en carburant, notamment celui destiné aux centrales électriques, aux hôpitaux, aux stations de pompage d'eau, pourrait entraîner une crise humanitaire majeure. Par manque d'énergie, certains hôpitaux au Nord Liban pourraient cesser de fonctionner d'ici cinq à huit jours, pendant que d'autres au Sud pourraient fermer d'ici moins de 48 heures.
Je voudrais aussi dire que si la France lance ce bateau pour les personnes déplacées du Liban, nous lançons également une opération humanitaire pour les personnes déplacées d'Haïfa, dans le Nord d'Israël.
Permettez-moi maintenant de lancer un message concernant le droit humanitaire international. Aujourd'hui, il n'y a aucune garantie d'accès des secours humanitaires aux plus démunis. La sécurité des parcours, l'accès aux populations sont les contraintes majeures qui pèsent sur les opérations humanitaires. Depuis le début du conflit, les Nations unies ont pu faire parvenir 19 convois humanitaires, 162 camions, depuis Beyrouth vers le sud du pays, (Tyr, Jezzine, Naqoura, Rmaich, Saïda, Cana et Tebnin). Ces convois contenaient de l'aide alimentaire, de l'eau, des couvertures, des tentes et des médicaments. Au nord du Liban cependant, les récents bombardements sur les ponts autoroutiers ont rendu extrêmement difficile l'acheminement de l'aide par voie terrestre, et ce, même jusqu'à Beyrouth. Au sud, la situation s'aggrave. Le bombardement du dernier pont sur le fleuve Litani empêche dorénavant tout convoi routier vers Tyr et dans la zone comprise entre le fleuve et la frontière sud du Liban. Il n'est donc plus possible d'acheminer de l'aide humanitaire aux villages situés dans cette partie du Liban, au sud du fleuve Litani.
Nous avons noté par ailleurs que les voies d'acheminement de l'aide sont devenues le théâtre de graves actes d'intimidation. Le symbole des Nations unies ne semble plus protéger sur le terrain les personnels, chaque jour plus menacés. Le CICR, qui s'est heurté à de nombreux problèmes liés aux combats sur les lieux de passage des convois, a appelé l'attention des donateurs sur les questions de sécurité. Depuis le début du conflit, l'organisation aurait été attaquée en moyenne tous les deux jours.
Nous souhaitons, par conséquent que les forces militaires israéliennes cessent leurs attaques sur les infrastructures civiles et renoncent aux actions qui entravent l'acheminement de l'aide humanitaire aux centaines de milliers de personnes déplacées à travers le pays.
Nous souhaitons, de la même manière, que les deux parties, y compris les autorités libanaises, augmentent le nombre de passages sécurisés, étant donné les récentes difficultés d'acheminement de l'aide humanitaire causées par les bombardements d'infrastructures. Nous souhaitons que les autorités israéliennes et libanaises accordent les garanties et autorisations nécessaires à l'arrimage de pétroliers, étant donné la pénurie de carburant.
Enfin, nous demandons aux deux parties de respecter le droit humanitaire international. Ce principe comporte deux exigences, celle de ne pas prendre pour cible des populations civiles, notamment les convois humanitaires et les opérations d'évacuation, celle de systématiquement distinguer les objectifs civils des cibles militaires.
Enfin, je pars à New York dans quelques heures, immédiatement après être venu ici, à Marseille. Nous avons déployé tous nos efforts pour parvenir à un cessez-le-feu et à un règlement durable de cette crise dramatique. Comme la France l'a affirmé depuis le début, on ne résoudra rien par la force. Toute solution doit passer par un accord politique. Les discussions se poursuivent à New York depuis le début de cette crise pour trouver une solution. La France, pour sa part, reste déterminée à faire le maximum pour trouver très rapidement une solution qui permette une cessation immédiate des hostilités. L'essentiel, dans un premier temps, est, en effet, d'obtenir l'arrêt des violences pour enclencher un processus qui assure le déploiement de l'armée libanaise de façon concomitante avec le retrait graduel de l'armée israélienne au Sud de la Ligne bleue. Il s'agit d'une première étape indispensable à un cessez-le-feu durable.
Voilà, ce sont les trois messages que je voulais vous faire passer. Je voudrais remercier enfin le ministère de la Défense : les rotations quotidiennes du ministère de la Défense nous permettent en effet d'amener l'aide humanitaire. Plus de 700 tonnes sont déjà arrivés à Beyrouth par un pont aérien et un pont maritime.
Je voudrais vous remercier, Monsieur le président, de permettre à ce bateau de partir de Marseille pour aller à Beyrouth. Rien ne peut permettre la destruction du Liban.
Sachez que la France et le président de la République, qui s'est exprimé il y a peu de temps encore, sont proches du Liban et que nous demandons aux deux pays d'arrêter le plus vite possible leurs hostilités. J'espère que nous trouverons, dans les heures qui viennent à New York, une solution de paix.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 16 août 2006