Texte intégral
Madame la ministre et chère collègue,
Mesdames et Messieurs les présidents,
Mesdames et Messieurs les parlementaires,
Mesdames et Messieurs les élus,
Permettez-moi, tout d'abord, chère collègue, de vous féliciter pour l'important travail accompli qui nous permet d'être tous ici, aujourd'hui.
Tout comme vous, je me réjouis de participer à cette réunion plénière de la CNCD, sous sa forme renouvelée, avec une représentation plus large du ministère auquel j'ai l'honneur d'appartenir.
Je suis heureux que cette instance soit mobilisée à nouveau, ce qui témoigne d'un regain d'intérêt pour la coopération décentralisée et, comme vous l'avez dit, nous avons besoin de cet espace de concertation et de dialogue.
En quelques décennies, les collectivités territoriales se sont affirmées comme acteurs incontournables de la coopération décentralisée, dans toutes ses dimensions, que ce soit dans l'action humanitaire ou l'aide au développement. En effet, si la coopération décentralisée peut se définir comme l'ensemble des initiatives et actions de coopération internationale menées par les collectivités territoriales et/ou leurs groupements, elle n'en revêt pas moins des formes de plus en plus variées.
Lien d'amitié entre les peuples à l'origine, elle est devenue, au fil du temps, un outil de solidarité et de développement entre les collectivités françaises et étrangères.
Du côté de l'Etat, cette "diplomatie des villes" mais aussi des régions et des départements voire des EPCI, longtemps regardée avec suspicion, est désormais pleinement reconnue, contribuant au rayonnement de la France à l'étranger.
L'essor de la coopération décentralisée et la complexité croissante de son champ d'action ont appelé, dans le même temps, des aménagements successifs de son cadre légal.
Cette question est à l'ordre du jour et nous y reviendrons. L'expérience nous enseigne qu'en matière de coopération décentralisée, la pratique a très souvent devancé le droit.
Mais auparavant, je voudrais rappeler quelques chiffres, que vous connaissez tous, et vous faire part des réflexions qu'ils m'inspirent. Cela me conduira, ensuite, à proposer de mettre à contribution la CNCD, m'appuyant sur la note d'orientation évoquée par ma collègue Brigitte GIRARDIN.
I. LE CONSTAT
1) Les motivations et les enjeux de la coopération décentralisée sont multiples
Nous le savons, les motivations incitant les collectivités territoriales à agir en coopération décentralisée sont nombreuses. Elles peuvent être, en effet, d'ordre politique, historique, culturel mais aussi économique.
Mais ce sont aussi les enjeux de la coopération décentralisée qui sont multiples. Parmi l'un des axes les plus porteurs d'avenir, il y a, me semble-t-il, l'échange d'expériences et de savoir-faire, sur un mode de réciprocité. C'est, par exemple, à ce titre que la France fait bénéficier ses partenaires de son expérience acquise dans le domaine de la décentralisation, en particulier en matière de gestion de services publics locaux.
2) La coopération décentralisée a changé de nature
La nature de la coopération décentralisée a évolué avec le temps. Une première phase, initiée après la Libération par les communes, a privilégié les liens d'amitié, les jumelages ou les échanges culturels en Europe, et prioritairement avec l'Allemagne qui concentre 1.802 liens avec différentes collectivités françaises, sur les 6.000 au total.
Puis, un tournant s'est opéré dès les années 70, avec une action plus orientée sur l'aide humanitaire, notamment vers les pays du Sud, avec des actions concrètes de solidarité. La coopération décentralisée prend alors de plus en plus la forme de partenariats denses, dépassant les traditionnels jumelages pour aller vers des coopérations opérationnelles sur des thèmes comme l'environnement, la gouvernance, le fait urbain etc.
Depuis quelques années, l'objectif économique est devenu, à son tour, l'un des éléments constitutifs de la motivation des collectivités territoriales, tant dans le cadre des échanges entre pays développés qu'en direction des pays du Sud.
3) Une trop forte concentration malgré une montée en puissance du nombre de collectivités et des actions menées
a) La montée en puissance du nombre des collectivités
Cette évolution s'est accompagnée d'une montée en puissance du nombre de collectivités territoriales engagées et des actions menées, liée notamment à la décentralisation.
Aujourd'hui, la totalité des régions, les ¾ des départements, l'ensemble des grandes villes, les 4/5ème des villes moyennes mais aussi de plus en plus de groupements intercommunaux (69) et un nombre croissant des petites communes sont engagés dans des actions comportant une dimension internationale.
Pour citer quelques chiffres, on recense aujourd'hui 3.250 collectivités ou groupements français impliqués dans plus de 6.000 coopérations localisées dans près de 120 pays.
b) Une trop forte concentration
Nous constatons une forte présence de nos collectivités en Afrique subsaharienne et dans l'océan indien, avec 640 liens et une concentration, par exemple, sur le Burkina Faso ou encore le Mali qui, à lui seul, rassemble 120 liens.
La densité est remarquable aussi dans les pays ayant des liens historiques et traditionnels avec la France. Ainsi, le Maroc est impliqué dans 66 partenariats avec des collectivités territoriales françaises, ce qui témoigne de notre réel intérêt pour ce pays. Or, il illustre assez bien l'un de nos points faibles en termes de coordination. Là où la France arrive en ordre dispersé, l'Espagne a conçu un mode d'organisation qui assure la lisibilité et la mise en ordre de bataille de toutes les potentialités, élus, chambres consulaires et partenaires intéressés par le Maroc. L'Espagne semble avoir pris une longueur d'avance dans l'optimisation de ses moyens.
Et je n'évoque pas la complexité byzantine des liens de nos collectivités avec la ville de Marrakech et sa région...
Je pense aussi à notre complexité lorsque je constate que Lyon est jumelée avec Canton qui entretient des liens avec la région PACA tandis que Marseille est jumelée avec Shanghai qui a un lien fort avec la région Rhône Alpes...
La Conférence annuelle des Ambassadeurs a mis l'accent sur un réel besoin d'information et de coordination au cours de la séance plénière du 28 août dernier, consacrée aux "Nouveaux outils de mise en cohérence de la coopération décentralisée".
En revanche, la présence du monde local français est discrète, voire inexistante dans des pays qui s'affirment progressivement sur la scène internationale. Les pays émergents, intermédiaires ou en développement, cumulent seulement 220 liens, soit 11,2 % seulement du total hors Union européenne.
Une analyse rapide par pays montre que l'Afrique du Sud a noué une douzaine de liens, contre 7 pour l'Inde et l'Argentine, 4 pour la Corée du Sud, 1 pour les Philippines et la Thaïlande, aucun pour la Malaisie.
A ce jour, nos efforts ont donc porté sur des partenariats plus traditionnels, avec de fortes disparités, au risque, parfois, d'une dilution de nos efforts, voire d'une concurrence stérile.
L'Etat a décidé, dans ce contexte, d'afficher sa propre vision des enjeux de la coopération décentralisée, respectueuse bien sûr de la liberté des collectivités, dans la note d'orientation.
Sous l'angle financier, l'on note la même concentration sur certains pays mais, là encore, beaucoup de saupoudrage. Or, l'aide des collectivités françaises, qui vient s'ajouter à celle de l'Etat, est substantielle. Les estimations vont jusqu'à 230 Meuros environ par an (chiffre de la CNCD).
4) Aujourd'hui, deux grands types de coopération se sont mis en place
De façon schématique, aujourd'hui, deux grands types de coopération se sont mis en place.
a) L'aide au développement, en direction de pays qui sont en retard
La coopération qui relève de l'aide au développement, en direction de pays qui sont en retard et ont besoin du soutien des pays développés comme le nôtre, répond à un devoir de solidarité qui nous oblige tous.
b) La coopération avec des collectivités de pays de niveau plus proche du nôtre
L'autre forme de coopération intervient avec des collectivités de pays dont le niveau de développement est plus proche du nôtre. L'échange est alors basé sur la confrontation d'expériences, la mise en commun de savoir-faire et d'expertise, d'appui institutionnel ou de formation et d'échange de cadres.
C'est celle que j'ai précédemment présentée comme enjeu d'avenir. C'est sur ce second volet qu'il me paraît pertinent de diversifier notre offre.
Les dispositifs classiques pourraient alors s'accompagner d'un rééquilibrage en direction de pays majeurs, ayant un niveau de développement en forte croissance, et constituant des partenaires importants pour la France. Je pense ici à la Chine, où des liens s'établissent progressivement, mais aussi à l'Inde, à la Thaïlande, aux Philippines, à la Malaisie, à la Corée du Sud, au Mexique, au Brésil ou à l'Afrique du Sud.
Dans le respect de la liberté des collectivités locales, je ne verrai que des avantages à ce que les acteurs locaux français s'intéressent un peu plus à ces pays, en favorisant les synergies.
J'insiste sur la notion de liberté, car je sais que des inquiétudes sont nées ici ou là. Je tiens à rassurer tous les présidents d'associations d'élus et leurs représentants, en particulier le Président Claudy LEBRETON. Il n'est nullement question d'instaurer une tutelle d'une collectivité sur une autre. Le temps des tutelles est révolu.
Chacun s'accorde à dire que la coopération décentralisée est l'un des sujets de consensus chez les élus. Attaché au dialogue, je souhaite naturellement que cette unanimité soit préservée.
II-AMELIORATIONS ET PROPOSITIONS
1) Un cadre juridique sécurisé
Cette même unanimité s'est faite, récemment, sur le texte de loi conférant plus de sécurité juridique à l'action extérieure de nos collectivités.
La coopération décentralisée jouit d'une grande autonomie. Elle n'a d'autre limite que le champ de compétences des collectivités territoriales et le respect des accords internationaux de la France.
Les collectivités peuvent néanmoins avoir le sentiment que leur marge d'action est parfois bridée par le carcan des procédures administratives.
Nous l'avons vu, par exemple, avec l'appréciation que l'on peut avoir de l'intérêt local, s'agissant d'aide humanitaire en Asie ou de construction d'équipements scolaires en Afrique.
Initié par le sénateur Michel THIOLLIERE, le texte de loi relatif au renforcement de la coopération décentralisée en matière de solidarité internationale a été voté, dans sa rédaction définitive, à l'unanimité par le Sénat. Il devrait en être de même à l'Assemblée nationale.
Cette sécurisation accrue du cadre juridique est une avancée pour nos collectivités. Elle leur permettra de déployer leur action plus amplement, de l'inscrire dans le long terme, grâce à une pratique plus généralisée de la contractualisation.
Ce contexte juridique favorable sera un levier pour amplifier encore nos actions et ouvrir de nouveaux chantiers.
2) Un nouveau chantier pour la CNCD sur les pays émergents
A cet égard, seront évoqués tout à l'heure les sujets susceptibles de faire l'objet de «chantiers», pour reprendre le vocabulaire de la CNCD.
Pour ceux que l'Etat souhaite initier, ces chantiers doivent traduire les objectifs de la note d'orientation.
C'est dans cet esprit que j'ai proposé que nous examinions, aujourd'hui, la mise en place d'un chantier visant à la réorganisation ou à la diversification de la coopération décentralisée. Le pilotage de ce groupe de travail serait assuré conjointement avec la DAECL (Direction de l'action extérieure des collectivités locales), secrétaire de la CNCD.
Il part du constat de l'insuffisance de la présence des collectivités dans des pays qui paraissent avoir un rôle croissant, sur le plan économique et politique, dans le monde de demain, en particulier les pays émergents.
Il est nécessaire que nous réfléchissions en commun sur les raisons de ce désintérêt et sur les opportunités de prendre pied, comme l'ont fait certaines entreprises en Malaisie par exemple.
Dans le cadre de ce chantier, l'Etat mobiliserait ses représentations diplomatiques et ses postes d'expansion économique pour apporter la meilleure information aux collectivités qui décideraient en toute liberté de leur intérêt ou non pour les options offertes.
Le dispositif s'appuierait sur certaines collectivités disposées à jouer un rôle pilote vis-à-vis de ces destinations, en acceptant de se positionner en partenaire de référence pour les autres collectivités intéressées.
Telles sont les grandes lignes du projet que je souhaite que nous examinions et dont vous trouverez une fiche descriptive dans votre dossier.
Ce chantier s'inscrit dans la continuité de ceux précédemment menés pour la Chine, l'Inde, le Brésil et le Chili. Présidé par M. VALADE, celui consacré à la Chine a déjà enregistré des retombées prometteuses et je rappellerai, à cet égard, les Rencontres de Wuhan de 2005 auxquelles j'ai participé.
Cette démarche est respectueuse du principe de libre administration et des partenariats déjà existants.
Elle vise essentiellement à élargir l'éventail des actions de coopération décentralisée et à les mettre en concordance avec celles de l'Etat, pour renforcer la cohérence et la lisibilité de l'action extérieure de la France.
La coopération décentralisée française est, aujourd'hui, à la croisée des chemins entre la décentralisation et la mondialisation qui, toutes deux, poussent à rechercher de nouvelles voies.
Forte de ses acquis, elle doit s'engager dans cette nouvelle étape, avec un partenariat renouvelé entre l'Etat et les collectivités territoriales, comme l'a souligné ma collègue, et dans un esprit de partenariat "gagnant-gagnant" avec les pays concernés.
Cette approche, que je souhaite partager avec vous, peut jeter les bases de la coopération décentralisée de demain, ouverte à toutes les collectivités et sur le monde du XXIe siècle.Source http://www.interieur.gouv.fr, le 6 octobre 2006
Mesdames et Messieurs les présidents,
Mesdames et Messieurs les parlementaires,
Mesdames et Messieurs les élus,
Permettez-moi, tout d'abord, chère collègue, de vous féliciter pour l'important travail accompli qui nous permet d'être tous ici, aujourd'hui.
Tout comme vous, je me réjouis de participer à cette réunion plénière de la CNCD, sous sa forme renouvelée, avec une représentation plus large du ministère auquel j'ai l'honneur d'appartenir.
Je suis heureux que cette instance soit mobilisée à nouveau, ce qui témoigne d'un regain d'intérêt pour la coopération décentralisée et, comme vous l'avez dit, nous avons besoin de cet espace de concertation et de dialogue.
En quelques décennies, les collectivités territoriales se sont affirmées comme acteurs incontournables de la coopération décentralisée, dans toutes ses dimensions, que ce soit dans l'action humanitaire ou l'aide au développement. En effet, si la coopération décentralisée peut se définir comme l'ensemble des initiatives et actions de coopération internationale menées par les collectivités territoriales et/ou leurs groupements, elle n'en revêt pas moins des formes de plus en plus variées.
Lien d'amitié entre les peuples à l'origine, elle est devenue, au fil du temps, un outil de solidarité et de développement entre les collectivités françaises et étrangères.
Du côté de l'Etat, cette "diplomatie des villes" mais aussi des régions et des départements voire des EPCI, longtemps regardée avec suspicion, est désormais pleinement reconnue, contribuant au rayonnement de la France à l'étranger.
L'essor de la coopération décentralisée et la complexité croissante de son champ d'action ont appelé, dans le même temps, des aménagements successifs de son cadre légal.
Cette question est à l'ordre du jour et nous y reviendrons. L'expérience nous enseigne qu'en matière de coopération décentralisée, la pratique a très souvent devancé le droit.
Mais auparavant, je voudrais rappeler quelques chiffres, que vous connaissez tous, et vous faire part des réflexions qu'ils m'inspirent. Cela me conduira, ensuite, à proposer de mettre à contribution la CNCD, m'appuyant sur la note d'orientation évoquée par ma collègue Brigitte GIRARDIN.
I. LE CONSTAT
1) Les motivations et les enjeux de la coopération décentralisée sont multiples
Nous le savons, les motivations incitant les collectivités territoriales à agir en coopération décentralisée sont nombreuses. Elles peuvent être, en effet, d'ordre politique, historique, culturel mais aussi économique.
Mais ce sont aussi les enjeux de la coopération décentralisée qui sont multiples. Parmi l'un des axes les plus porteurs d'avenir, il y a, me semble-t-il, l'échange d'expériences et de savoir-faire, sur un mode de réciprocité. C'est, par exemple, à ce titre que la France fait bénéficier ses partenaires de son expérience acquise dans le domaine de la décentralisation, en particulier en matière de gestion de services publics locaux.
2) La coopération décentralisée a changé de nature
La nature de la coopération décentralisée a évolué avec le temps. Une première phase, initiée après la Libération par les communes, a privilégié les liens d'amitié, les jumelages ou les échanges culturels en Europe, et prioritairement avec l'Allemagne qui concentre 1.802 liens avec différentes collectivités françaises, sur les 6.000 au total.
Puis, un tournant s'est opéré dès les années 70, avec une action plus orientée sur l'aide humanitaire, notamment vers les pays du Sud, avec des actions concrètes de solidarité. La coopération décentralisée prend alors de plus en plus la forme de partenariats denses, dépassant les traditionnels jumelages pour aller vers des coopérations opérationnelles sur des thèmes comme l'environnement, la gouvernance, le fait urbain etc.
Depuis quelques années, l'objectif économique est devenu, à son tour, l'un des éléments constitutifs de la motivation des collectivités territoriales, tant dans le cadre des échanges entre pays développés qu'en direction des pays du Sud.
3) Une trop forte concentration malgré une montée en puissance du nombre de collectivités et des actions menées
a) La montée en puissance du nombre des collectivités
Cette évolution s'est accompagnée d'une montée en puissance du nombre de collectivités territoriales engagées et des actions menées, liée notamment à la décentralisation.
Aujourd'hui, la totalité des régions, les ¾ des départements, l'ensemble des grandes villes, les 4/5ème des villes moyennes mais aussi de plus en plus de groupements intercommunaux (69) et un nombre croissant des petites communes sont engagés dans des actions comportant une dimension internationale.
Pour citer quelques chiffres, on recense aujourd'hui 3.250 collectivités ou groupements français impliqués dans plus de 6.000 coopérations localisées dans près de 120 pays.
b) Une trop forte concentration
Nous constatons une forte présence de nos collectivités en Afrique subsaharienne et dans l'océan indien, avec 640 liens et une concentration, par exemple, sur le Burkina Faso ou encore le Mali qui, à lui seul, rassemble 120 liens.
La densité est remarquable aussi dans les pays ayant des liens historiques et traditionnels avec la France. Ainsi, le Maroc est impliqué dans 66 partenariats avec des collectivités territoriales françaises, ce qui témoigne de notre réel intérêt pour ce pays. Or, il illustre assez bien l'un de nos points faibles en termes de coordination. Là où la France arrive en ordre dispersé, l'Espagne a conçu un mode d'organisation qui assure la lisibilité et la mise en ordre de bataille de toutes les potentialités, élus, chambres consulaires et partenaires intéressés par le Maroc. L'Espagne semble avoir pris une longueur d'avance dans l'optimisation de ses moyens.
Et je n'évoque pas la complexité byzantine des liens de nos collectivités avec la ville de Marrakech et sa région...
Je pense aussi à notre complexité lorsque je constate que Lyon est jumelée avec Canton qui entretient des liens avec la région PACA tandis que Marseille est jumelée avec Shanghai qui a un lien fort avec la région Rhône Alpes...
La Conférence annuelle des Ambassadeurs a mis l'accent sur un réel besoin d'information et de coordination au cours de la séance plénière du 28 août dernier, consacrée aux "Nouveaux outils de mise en cohérence de la coopération décentralisée".
En revanche, la présence du monde local français est discrète, voire inexistante dans des pays qui s'affirment progressivement sur la scène internationale. Les pays émergents, intermédiaires ou en développement, cumulent seulement 220 liens, soit 11,2 % seulement du total hors Union européenne.
Une analyse rapide par pays montre que l'Afrique du Sud a noué une douzaine de liens, contre 7 pour l'Inde et l'Argentine, 4 pour la Corée du Sud, 1 pour les Philippines et la Thaïlande, aucun pour la Malaisie.
A ce jour, nos efforts ont donc porté sur des partenariats plus traditionnels, avec de fortes disparités, au risque, parfois, d'une dilution de nos efforts, voire d'une concurrence stérile.
L'Etat a décidé, dans ce contexte, d'afficher sa propre vision des enjeux de la coopération décentralisée, respectueuse bien sûr de la liberté des collectivités, dans la note d'orientation.
Sous l'angle financier, l'on note la même concentration sur certains pays mais, là encore, beaucoup de saupoudrage. Or, l'aide des collectivités françaises, qui vient s'ajouter à celle de l'Etat, est substantielle. Les estimations vont jusqu'à 230 Meuros environ par an (chiffre de la CNCD).
4) Aujourd'hui, deux grands types de coopération se sont mis en place
De façon schématique, aujourd'hui, deux grands types de coopération se sont mis en place.
a) L'aide au développement, en direction de pays qui sont en retard
La coopération qui relève de l'aide au développement, en direction de pays qui sont en retard et ont besoin du soutien des pays développés comme le nôtre, répond à un devoir de solidarité qui nous oblige tous.
b) La coopération avec des collectivités de pays de niveau plus proche du nôtre
L'autre forme de coopération intervient avec des collectivités de pays dont le niveau de développement est plus proche du nôtre. L'échange est alors basé sur la confrontation d'expériences, la mise en commun de savoir-faire et d'expertise, d'appui institutionnel ou de formation et d'échange de cadres.
C'est celle que j'ai précédemment présentée comme enjeu d'avenir. C'est sur ce second volet qu'il me paraît pertinent de diversifier notre offre.
Les dispositifs classiques pourraient alors s'accompagner d'un rééquilibrage en direction de pays majeurs, ayant un niveau de développement en forte croissance, et constituant des partenaires importants pour la France. Je pense ici à la Chine, où des liens s'établissent progressivement, mais aussi à l'Inde, à la Thaïlande, aux Philippines, à la Malaisie, à la Corée du Sud, au Mexique, au Brésil ou à l'Afrique du Sud.
Dans le respect de la liberté des collectivités locales, je ne verrai que des avantages à ce que les acteurs locaux français s'intéressent un peu plus à ces pays, en favorisant les synergies.
J'insiste sur la notion de liberté, car je sais que des inquiétudes sont nées ici ou là. Je tiens à rassurer tous les présidents d'associations d'élus et leurs représentants, en particulier le Président Claudy LEBRETON. Il n'est nullement question d'instaurer une tutelle d'une collectivité sur une autre. Le temps des tutelles est révolu.
Chacun s'accorde à dire que la coopération décentralisée est l'un des sujets de consensus chez les élus. Attaché au dialogue, je souhaite naturellement que cette unanimité soit préservée.
II-AMELIORATIONS ET PROPOSITIONS
1) Un cadre juridique sécurisé
Cette même unanimité s'est faite, récemment, sur le texte de loi conférant plus de sécurité juridique à l'action extérieure de nos collectivités.
La coopération décentralisée jouit d'une grande autonomie. Elle n'a d'autre limite que le champ de compétences des collectivités territoriales et le respect des accords internationaux de la France.
Les collectivités peuvent néanmoins avoir le sentiment que leur marge d'action est parfois bridée par le carcan des procédures administratives.
Nous l'avons vu, par exemple, avec l'appréciation que l'on peut avoir de l'intérêt local, s'agissant d'aide humanitaire en Asie ou de construction d'équipements scolaires en Afrique.
Initié par le sénateur Michel THIOLLIERE, le texte de loi relatif au renforcement de la coopération décentralisée en matière de solidarité internationale a été voté, dans sa rédaction définitive, à l'unanimité par le Sénat. Il devrait en être de même à l'Assemblée nationale.
Cette sécurisation accrue du cadre juridique est une avancée pour nos collectivités. Elle leur permettra de déployer leur action plus amplement, de l'inscrire dans le long terme, grâce à une pratique plus généralisée de la contractualisation.
Ce contexte juridique favorable sera un levier pour amplifier encore nos actions et ouvrir de nouveaux chantiers.
2) Un nouveau chantier pour la CNCD sur les pays émergents
A cet égard, seront évoqués tout à l'heure les sujets susceptibles de faire l'objet de «chantiers», pour reprendre le vocabulaire de la CNCD.
Pour ceux que l'Etat souhaite initier, ces chantiers doivent traduire les objectifs de la note d'orientation.
C'est dans cet esprit que j'ai proposé que nous examinions, aujourd'hui, la mise en place d'un chantier visant à la réorganisation ou à la diversification de la coopération décentralisée. Le pilotage de ce groupe de travail serait assuré conjointement avec la DAECL (Direction de l'action extérieure des collectivités locales), secrétaire de la CNCD.
Il part du constat de l'insuffisance de la présence des collectivités dans des pays qui paraissent avoir un rôle croissant, sur le plan économique et politique, dans le monde de demain, en particulier les pays émergents.
Il est nécessaire que nous réfléchissions en commun sur les raisons de ce désintérêt et sur les opportunités de prendre pied, comme l'ont fait certaines entreprises en Malaisie par exemple.
Dans le cadre de ce chantier, l'Etat mobiliserait ses représentations diplomatiques et ses postes d'expansion économique pour apporter la meilleure information aux collectivités qui décideraient en toute liberté de leur intérêt ou non pour les options offertes.
Le dispositif s'appuierait sur certaines collectivités disposées à jouer un rôle pilote vis-à-vis de ces destinations, en acceptant de se positionner en partenaire de référence pour les autres collectivités intéressées.
Telles sont les grandes lignes du projet que je souhaite que nous examinions et dont vous trouverez une fiche descriptive dans votre dossier.
Ce chantier s'inscrit dans la continuité de ceux précédemment menés pour la Chine, l'Inde, le Brésil et le Chili. Présidé par M. VALADE, celui consacré à la Chine a déjà enregistré des retombées prometteuses et je rappellerai, à cet égard, les Rencontres de Wuhan de 2005 auxquelles j'ai participé.
Cette démarche est respectueuse du principe de libre administration et des partenariats déjà existants.
Elle vise essentiellement à élargir l'éventail des actions de coopération décentralisée et à les mettre en concordance avec celles de l'Etat, pour renforcer la cohérence et la lisibilité de l'action extérieure de la France.
La coopération décentralisée française est, aujourd'hui, à la croisée des chemins entre la décentralisation et la mondialisation qui, toutes deux, poussent à rechercher de nouvelles voies.
Forte de ses acquis, elle doit s'engager dans cette nouvelle étape, avec un partenariat renouvelé entre l'Etat et les collectivités territoriales, comme l'a souligné ma collègue, et dans un esprit de partenariat "gagnant-gagnant" avec les pays concernés.
Cette approche, que je souhaite partager avec vous, peut jeter les bases de la coopération décentralisée de demain, ouverte à toutes les collectivités et sur le monde du XXIe siècle.Source http://www.interieur.gouv.fr, le 6 octobre 2006