Texte intégral
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Présidents, Mesdames et Messieurs,
Vous l'avez deviné, je ne suis pas candidat à l'élection présidentielle. Je viens néanmoins avec un très grand plaisir vous rencontrer. J'ai, comme vous, des idées sur l'artisanat. C'est ce qui nous réunit à l'occasion des congrès, mais également au quotidien dans ce travail en faveur de l'entreprise, de l'emploi et du développement économique.
Monsieur le Président, vous avez indiqué que vous approchiez de la fin de votre mandat. J'aurai par conséquent quelques mots personnels pour vous remercier d'avoir été un homme de sagesse, suffisamment combatif pour obtenir ce que l'UPA considérait comme des revendications légitimes. Nous avons eu ensemble des relations de travail très constructives. J'associe bien entendu à votre présidence l'ensemble de vos collaborateurs. Je sais qu'une organisation professionnelle aussi importante que l'UPA ne saurait fonctionner sans des hommes qui travaillent, qui préparent les dossiers et qui savent argumenter sur le plan technique afin d'être bien compris.
Vous pouvez, je me tourne vers Pierre Burban, savourer votre victoire. Le 18 octobre a en effet été un grand jour pour l'artisanat et, en particulier, pour l'UPA. Même si le Gouvernement n'a pas à prendre parti entre les partenaires sociaux, je vous félicite d'avoir, au terme d'un premier mandat à la tête de l'ACOSS, renouvelé un deuxième bail dont j'aperçois les effets bénéfiques en ce qui concerne les rapports entre les URSSAF et les artisans. De très nombreuses URSSAF sont en effet présidées par des artisans qui ont contribué à les humaniser. Nous sentons en effet une meilleure compréhension de la petite entreprise au sein de ces organismes.
Vous êtes au coeur du dialogue social, au coeur des relations entre les partenaires sociaux et surtout vous portez une révolution qui à mes yeux est très importante. Il s'agit en effet de comprendre que l'économie de demain ne réside pas dans la dictature des grandes entreprises, mais dans la force des PME. Notre plus grande réussite est sans doute d'avoir fait comprendre à nos concitoyens que l'avenir de l'économie réside dans les petites et moyennes entreprises. Lors des précédentes réformes, 95 % des entreprises françaises étaient écartées. Les 35 heures ont été conçues par le gouvernement Jospin avec l'idée que seules des grandes entreprises faisaient l'économie de notre pays. Il a d'ailleurs fallu sortir en catastrophe du dispositif près de 80 % des entreprises françaises de moins de 20 salariés. Au moment où le Conseil d'Etat vient d'annuler un dispositif essentiel du secteur de la restauration, nous voyons le désordre causé par les 35 heures dans les entreprises de services. Sans une certaine flexibilité dans l'organisation du travail, il n'est plus possible de rendre des services au client, ce qui aboutit à ne plus créer d'emplois et à tuer les entreprises. Essayons de faire preuve de bon sens.
Un bon sens incarné par les PME et en particulier par l'artisanat qui est un secteur organisé, puissant et efficace. Vous le savez bien, vous qui allez assister au défilé spectaculaire des personnalités politiques françaises les plus éminentes. Tout se passe aujourd'hui à l'UPA ! Si les discours divergent sur le fond, aucun ne manquera d'être flatteur. C'est normal en cette période d'automne où les feuilles tombent et les promesses pleuvent. J'ai pour ma part l'avantage de n'être candidat à rien et d'avoir travaillé efficacement avec vous pendant 5 ans. Nous avons à regarder aujourd'hui des résultats plus que des promesses. Des problèmes demeurent évidemment, vous en avez évoqué certains. Nous avons cependant contribué, ensemble, à faire progresser l'ensemble du secteur de l'artisanat.
Je voudrais tout d'abord évoquer le CNE. En effet, j'ai constaté combien ce contrat, adapté aux très petites entreprises, est devenu au fil du temps un élément clé de la création d'emplois en France. Vous savez que près de 650 000 CNE ont été signés parmi lesquels 70 000 correspondent à des emplois qui n'auraient jamais vu le jour sans ce dispositif. En outre, contrairement à la coutume française qui consiste à aller chercher dans la poche du contribuable l'argent qui permet de créer des emplois publics ou parapublics, le CNE concerne des emplois marchands qui s'autofinancent par de l'activité économique. Vous vous êtes montrés particulièrement responsables dans l'utilisation de ce contrat. Les syndicalistes qui luttaient contre cette mesure l'accusaient de mettre en péril le CDI. Or dans l'artisanat, le CNE a trouvé sa juste place puisqu'il représente 8 à 10 % des contrats. Les employeurs que vous êtes sont des hommes et des femmes responsables. Lorsqu'ils peuvent employer des salariés en CDI, ils le font. Le CNE n'est utilisé qu'en cas d'incertitude sur le chiffre d'affaires des mois à venir ou la rentabilité de l'emploi créé. Aujourd'hui, seuls 300 contentieux sont portés devant les prud'hommes pour 600 000 contrats signés. L'employeur n'est pas la bête noire que d'aucun décrive, mais quelqu'un qui prend sur sa barque un nouveau salarié pour le former et qui souhaite par conséquent que la relation de travail perdure. Nous savons combien, dans un certain nombre de métiers, il est difficile de trouver des salariés qualifiés et motivés.
Le CNE est un des éléments qui a permis de montrer aux Français que la très petite entreprise n'était pas l'incarnation du capitalisme sauvage et inhumain. C'est parce que cette dernière reste avant tout humaine que les Français l'aiment. La relation avec les salariés, les apprentis et les clients est forcément personnelle. Vous êtes les meilleurs pédagogues de la réalité de l'entreprise que je connaisse en France. J'espère que les voitures qui vont sillonner les collèges à travers la France porteront les valeurs d'une entreprise humaniste que nous sommes un certain nombre à défendre.
Le RSI constitue une victoire provisoire et un des grands acquis de l'UPA. Il faudra cependant transformer cette réforme en une réussite palpable par chaque cotisant. Si vous n'aviez pas été tenace et si je n'avais pas soutenu cette idée, le conservatisme français aurait empêché le RSI de voir le jour. Au fil du temps, vos dispositifs auraient été laminés. Vous seriez devenus un jour des adhérents du régime des salariés et auriez perdu votre autonomie. Nous avons voulu que les indépendants puissent disposer de leur propre régime social, avec ce que cela comporte d'améliorations sur le plan humain. Lorsque à la fin du mois des artisans éprouvent des difficultés à s'acquitter de leurs cotisations sociales, il faut en effet éviter de leur envoyer immédiatement un huissier. Le chantier RSI n'est pas achevé. Je compte sur vous pour faire en sorte que l'ISU puisse rapidement être mis en place.
La réforme des conjoints-collaborateurs est importante à mes yeux dans la mesure où elle démontre qu'il est possible de jumeler l'efficacité économique et le progrès social. Il était injuste que les conjoints en cas de divorce, de décès ou de dépôt de bilan se retrouvent sans droits sociaux. Désormais, tel ne sera plus le cas. Les 107 propositions de l'UPA me paraissent empruntes de sagesse. Vous proposez notamment d'étendre le statut de conjoint-collaborateur aux Pacsés. Je vous rejoins sur ce point tant il me paraît important de s'adapter à des formes modernes de vie en couple. En revanche, ma position est plus réservée quant au concubinage qui traduit selon moi le refus de s'engager dans un lien contractuel et juridique. J'ai signé le décret précisant les modalités de calcul des cotisations, il y a 3 jours. Il est désormais à la signature chez le Ministre du Budget et chez le Ministre de l'Equipement. Il sera par conséquent publié dans les jours prochains.
Nous avons également beaucoup abaissé la fiscalité sur la transmission d'entreprises. En 2002, la taxation sur les plus-values de cession s'établissait à 26 % de la valeur d'une entreprise, laquelle était déjà taxée dans le cadre de l'impôt sur le revenu. Dans la quasi-totalité des cas, le taux a été ramené de 26 à 0 %. Pour autant, la fiscalité n'est pas tout. Nous sommes conscients des difficultés rencontrées par les entrepreneurs pour trouver des repreneurs. Je salue à ce titre l'action du réseau des Chambres de Métiers et de l'APCM. L'UPA a sans aucun doute un rôle important à jouer dans ce domaine.
Nous avons également agi sur les charges sociales. Nous pourrions évidemment rêver d'un monde où ces dernières seraient abolies. Cependant pourrions-nous rêver d'un monde sans retraite, sans médecins et sans hôpitaux, où les risques maladie et vieillesse seraient mis uniquement à la charge de chacun ? Il importe que les charges sociales soient équilibrées et ne pénalisent pas le travail et l'embauche. En France, notre système de prélèvement est malheureusement construit sur le travail et pénalise un certain nombre de petites entreprises. Le Premier Ministre a par conséquent fait le choix, au 1er juillet 2007, de supprimer les cotisations patronales qui portent sur la Sécurité Sociale, c'est-à-dire l'Assurance Maladie, l'Assurance Vieillesse et la Politique de la Famille. Contrairement à une idée reçue cette baisse des charges sociales concerne les salaires compris entre 1 et 1,6 SMIC. Il me paraît important de continuer dans cette voie pour alléger l'effort consenti pour embaucher.
Nous avons également un effort important à fournir en matière de simplification administrative. Ayant réouvert un nouveau chantier, je vous invite, Monsieur le Président, à formuler des propositions dans les semaines à venir. Le Premier Ministre a en effet affiché sa volonté de simplifier la vie des entreprises. Les mesures envisagées sont très simples. Il s'agit par exemple de pouvoir téléphoner à un fonctionnaire et de faire en sorte que le dialogue se traduise par des décisions administratives. Nous entendons également favoriser la diffusion des nouvelles technologies. Nous allons, dans quelques semaines, lancer le passeport pour l'économie numérique grâce auquel les artisans bénéficieront d'offres de services et d'offres hardware de matériel très attractives sur le plan commercial. Il s'agit d'une première mondiale qui a justifié la venue en France des PDG de Intel, de HP et de Microsoft. Pour la première fois, un pays revendique que ses petites entreprises soient à la pointe en matière de technologie de l'information et de la communication. Nous avons certes un retard important à combler. Seules 15 % des petites entreprises utilisent pleinement ces technologies qui permettent de gagner de l'argent, notamment en matière de gestion administrative. En effet, les outils nouveaux comme les chèques-emplois TPE permettent de gagner du temps et de l'argent.
Vous avez Monsieur le Président évoqué les sujets qui ne sont pas encore réglés. Permettez-moi d'y revenir. Le premier concernait la majoration de 25 % liée à la réforme du barème de l'impôt sur le revenu. J'espère que vous n'imaginez pas qu'il s'agit d'une augmentation de 25 % des impôts. Cette mesure est en effet fiscalement neutre. Elle a été proposée dans le but de maintenir un régime différencié en faveur des centres de gestion agréés. Eux-mêmes ont demandé à ce qu'il puisse y avoir un différentiel d'avantage entre l'artisan qui adhère à un CGA et celui qui n'y adhère pas. Cette réforme, je le répète, ne consiste aucunement en une augmentation de l'impôt sur le revenu. Je reconnais que, dans la forme, cette dernière n'est pas très élégante. Je suis persuadé qu'aucun artisan n'imagine que l'administration le considère comme un bandit. Toutefois, elle peut laisser entendre que des pratiques de sous-déclaration du revenu imposable sont suspectées. Je suis parfaitement preneur d'une proposition qui ne coûterait rien au budget de l'Etat.
L'apprentissage est une des grandes réussites du Gouvernement ces dernières années. En 2002, l'apprentissage était considéré comme la voie de garage de l'Education nationale. En quelques années, nous sommes parvenus à faire évoluer les mentalités. Des parents envoient désormais leurs enfants dans les CFA. Cette année, le nombre de contrats d'apprentissage signés a augmenté de 10 %. Les Français ont compris que l'apprentissage pouvait les conduire vers un diplôme de niveau bac + 3 ou bac + 4 et qu'il était possible de devenir ingénieur grâce à l'apprentissage. Les mesures coercitives que nous avons prises concernent les grandes entreprises. Savez-vous que les artisans français font 8 fois plus qu'une multinationale pour former les jeunes. C'est la raison pour laquelle nous avons pris la décision de pénaliser financièrement les entreprises de plus de 250 salariés qui ne consentent pas les efforts suffisants pour accueillir des jeunes en alternance. Evidemment, l'argent ainsi récolté devra retourner à l'apprentissage. Les députés sont en train de se pencher sur cette question.
Abordons à présent la question de l'urbanisme commercial. J'ai l'habitude de m'exprimer sans détours. Depuis la loi Royer, que de mensonges ont été dits sur ce sujet. Les lois visant à défendre le petit commerce se sont toujours traduites par une augmentation des grandes surfaces. La loi Raffarin n'a pas davantage fonctionné que les précédentes puisque depuis 1997 nous constatons une augmentation du nombre de mètres carrés de grandes surfaces dans notre pays. Vous la souteniez pourtant en pensant qu'elle allait mettre un frein à l'extension des grandes surfaces. Les CDEC autorisent 90 % des mètres carrés autorisés en France, la CNEC ne se penchant que sur 10 % des cas. Le rôle de cet organisme est très modeste. C'est dans les départements que règne le laxisme. Les maires sont très contents d'engranger des taxes professionnelles. Tout le monde signe. Au final, puisque les mètres carrés et les parkings en périphérie sont, au contraire des coeurs de ville, très peu coûteux, les 2 économies ne jouent pas avec les mêmes armes.
Nous devons inverser cette tendance dans une optique de développement durable. Nous avons un beau pays et devons lutter contre ce massacre des paysages que constituent les entrées de ville. Les maires ont embelli les coeurs de ville, mais les entrées de ces dernières ressemblent à des boîtes à chaussures alignées les unes à côté des autres sans aucun respect du paysage et de l'architecture. Je vous propose que nous rouvrions ce débat. J'installerai mercredi prochain une commission au sein de laquelle nous entendrons tous les acteurs. Claude Bellot vous représentera au nom de la Confédération de l'alimentation de détail. Il importe en effet que nous ayons une vision d'ensemble de ce sujet et que nous traitions les problèmes de paysage, d'énergie, de contribution à la pollution, d'équilibre entre la périphérie et le centre ville et que nous parvenions à mettre en place un système législatif efficace. Je suis prêt à ce que l'Etat impose par la force de la loi des dispositions favorables aux coeurs de ville. Si ces derniers n'accueillent plus que des agences d'assurance, des agences bancaires et des agences immobilières, ils seront bientôt désertés. Le samedi deviendra un jour mort. Nous devons être très attentifs à ce qui touche à la vie quotidienne des Français. Je sortirai très rapidement la mesure que j'ai mise en place dans le cadre de la loi PME qui permet à un maire de préempter un fonds de commerce pour le remettre sur le marché de l'artisanat, du commerce de bouche ou de services. Nous devons veiller à l'équilibre de la diversité commerciale sans léser ceux qui vendent les fonds de commerce.
Vous avez évoqué l'ouverture des commerces le dimanche. Ce jour était considéré par les Français comme celui du repos dominical. Cette tradition est en train d'évoluer, notamment à cause des 35 heures. L'activité commerciale a beaucoup faibli le vendredi dans la mesure où beaucoup de Français partent en week-end dès le jeudi soir. Une partie de la population est également moins attachée aux traditions chrétiennes qui font du dimanche un jour particulier et souhaite l'ouverture des commerces le dimanche. Le Gouvernement a choisi de se prononcer contre cette évolution. En effet, un commerçant qui emploie des salariés sera en mesure de s'organiser pour assurer la rotation de son personnel. En revanche, un couple sans employé aura la possibilité soit de travailler 7 jours sur 7, soit de fermer un autre jour de la semaine, ce qui induit une perte de part de marché. Dans les 2 cas, de nombreux petits commerces risquent de disparaître. Nous pouvons cependant améliorer quelques aspects de cette question. Il est vrai que, sur les Champs-Élysées, il n'y a aucune raison que Mac Donald's soit ouvert le dimanche et que Vuitton qui fait vivre des salariés français et qui symbolise l'excellence en matière d'artisanat soit fermé ce même jour. Nous devons trouver des réponses concrètes là où les vrais problèmes se posent. Je suis prêt à en discuter avec vous. Je vous invite, à ce titre, à vous pencher sur le système espagnol qui, pour favoriser les commerce des centres-villes, a offert une liberté totale d'ouverture le dimanche aux commerces de moins de 300 mètres carrés alors qu'il maintenait le système d'ouverture quelques dimanches par an pour les surfaces de plus de 300 mètres carrés. Au final, les commerces des centres-villes sont ouverts tandis que ceux de la périphérie restent fermés.
S'agissant de la loi Galland, ce sont les observateurs d'un organisme européen chargé de mesurer les prix qui ont constaté que, depuis la réforme, les prix qui flambaient avec les marges-arrières sont en baisse. Dans le même temps, la part des PME dans le volume des grandes surfaces augmente car les Français sont demandeurs de produits innovants. Le bilan est par conséquent positif. Contrairement à ce que les grandes surfaces pronostiquaient, les emplois dans ce secteur n'ont pas été réduits. Nous sommes parvenus à faire baisser les prix tout en protégeant les PME, ce qui était l'objectif de la loi.
En ce qui concerne les Fonds d'assurance formation -FAF- , tous les acteurs syndicaux ont réfléchi et trouvé la bonne solution. Cette dernière me convient. Je suis prêt à prendre les mesures nécessaires pour que, en tant qu'artisan, vous puissiez former vos collègues et, en tant qu'élus, vous ayez accès au dispositif. La réforme est en cours de finalisation. Gérard Larcher est saisi du dossier. Rappelez-lui que celui-ci est important. J'espère que, dès que nous aurons le feu vert du Ministère des Affaires sociales, nous pourrons faire voter le texte par le Parlement.
Puisqu'il s'agit du dernier congrès de ce quinquennat, je voulais, à titre personnel, souligner le plaisir et le bonheur que j'ai eu à être Ministre des artisans et de l'artisanat. C'est certainement le meilleur ministère car il permet de mettre en place des mesures concrètes avec, face à soi, des hommes et des femmes qui ne demandent pas à être des assistés, mais qui souhaitent simplement pouvoir travailler librement. Les artisans aiment et respectent leur métier. Il me semble qu'il s'agit d'une valeur à faire partager à tous les jeunes français. J'ai exercé comme un artisan le métier de Ministre de l'Artisanat. C'est à vous que je le dois. Merci.
Source http://www.upa.fr, le 7 novembre 2006
Vous l'avez deviné, je ne suis pas candidat à l'élection présidentielle. Je viens néanmoins avec un très grand plaisir vous rencontrer. J'ai, comme vous, des idées sur l'artisanat. C'est ce qui nous réunit à l'occasion des congrès, mais également au quotidien dans ce travail en faveur de l'entreprise, de l'emploi et du développement économique.
Monsieur le Président, vous avez indiqué que vous approchiez de la fin de votre mandat. J'aurai par conséquent quelques mots personnels pour vous remercier d'avoir été un homme de sagesse, suffisamment combatif pour obtenir ce que l'UPA considérait comme des revendications légitimes. Nous avons eu ensemble des relations de travail très constructives. J'associe bien entendu à votre présidence l'ensemble de vos collaborateurs. Je sais qu'une organisation professionnelle aussi importante que l'UPA ne saurait fonctionner sans des hommes qui travaillent, qui préparent les dossiers et qui savent argumenter sur le plan technique afin d'être bien compris.
Vous pouvez, je me tourne vers Pierre Burban, savourer votre victoire. Le 18 octobre a en effet été un grand jour pour l'artisanat et, en particulier, pour l'UPA. Même si le Gouvernement n'a pas à prendre parti entre les partenaires sociaux, je vous félicite d'avoir, au terme d'un premier mandat à la tête de l'ACOSS, renouvelé un deuxième bail dont j'aperçois les effets bénéfiques en ce qui concerne les rapports entre les URSSAF et les artisans. De très nombreuses URSSAF sont en effet présidées par des artisans qui ont contribué à les humaniser. Nous sentons en effet une meilleure compréhension de la petite entreprise au sein de ces organismes.
Vous êtes au coeur du dialogue social, au coeur des relations entre les partenaires sociaux et surtout vous portez une révolution qui à mes yeux est très importante. Il s'agit en effet de comprendre que l'économie de demain ne réside pas dans la dictature des grandes entreprises, mais dans la force des PME. Notre plus grande réussite est sans doute d'avoir fait comprendre à nos concitoyens que l'avenir de l'économie réside dans les petites et moyennes entreprises. Lors des précédentes réformes, 95 % des entreprises françaises étaient écartées. Les 35 heures ont été conçues par le gouvernement Jospin avec l'idée que seules des grandes entreprises faisaient l'économie de notre pays. Il a d'ailleurs fallu sortir en catastrophe du dispositif près de 80 % des entreprises françaises de moins de 20 salariés. Au moment où le Conseil d'Etat vient d'annuler un dispositif essentiel du secteur de la restauration, nous voyons le désordre causé par les 35 heures dans les entreprises de services. Sans une certaine flexibilité dans l'organisation du travail, il n'est plus possible de rendre des services au client, ce qui aboutit à ne plus créer d'emplois et à tuer les entreprises. Essayons de faire preuve de bon sens.
Un bon sens incarné par les PME et en particulier par l'artisanat qui est un secteur organisé, puissant et efficace. Vous le savez bien, vous qui allez assister au défilé spectaculaire des personnalités politiques françaises les plus éminentes. Tout se passe aujourd'hui à l'UPA ! Si les discours divergent sur le fond, aucun ne manquera d'être flatteur. C'est normal en cette période d'automne où les feuilles tombent et les promesses pleuvent. J'ai pour ma part l'avantage de n'être candidat à rien et d'avoir travaillé efficacement avec vous pendant 5 ans. Nous avons à regarder aujourd'hui des résultats plus que des promesses. Des problèmes demeurent évidemment, vous en avez évoqué certains. Nous avons cependant contribué, ensemble, à faire progresser l'ensemble du secteur de l'artisanat.
Je voudrais tout d'abord évoquer le CNE. En effet, j'ai constaté combien ce contrat, adapté aux très petites entreprises, est devenu au fil du temps un élément clé de la création d'emplois en France. Vous savez que près de 650 000 CNE ont été signés parmi lesquels 70 000 correspondent à des emplois qui n'auraient jamais vu le jour sans ce dispositif. En outre, contrairement à la coutume française qui consiste à aller chercher dans la poche du contribuable l'argent qui permet de créer des emplois publics ou parapublics, le CNE concerne des emplois marchands qui s'autofinancent par de l'activité économique. Vous vous êtes montrés particulièrement responsables dans l'utilisation de ce contrat. Les syndicalistes qui luttaient contre cette mesure l'accusaient de mettre en péril le CDI. Or dans l'artisanat, le CNE a trouvé sa juste place puisqu'il représente 8 à 10 % des contrats. Les employeurs que vous êtes sont des hommes et des femmes responsables. Lorsqu'ils peuvent employer des salariés en CDI, ils le font. Le CNE n'est utilisé qu'en cas d'incertitude sur le chiffre d'affaires des mois à venir ou la rentabilité de l'emploi créé. Aujourd'hui, seuls 300 contentieux sont portés devant les prud'hommes pour 600 000 contrats signés. L'employeur n'est pas la bête noire que d'aucun décrive, mais quelqu'un qui prend sur sa barque un nouveau salarié pour le former et qui souhaite par conséquent que la relation de travail perdure. Nous savons combien, dans un certain nombre de métiers, il est difficile de trouver des salariés qualifiés et motivés.
Le CNE est un des éléments qui a permis de montrer aux Français que la très petite entreprise n'était pas l'incarnation du capitalisme sauvage et inhumain. C'est parce que cette dernière reste avant tout humaine que les Français l'aiment. La relation avec les salariés, les apprentis et les clients est forcément personnelle. Vous êtes les meilleurs pédagogues de la réalité de l'entreprise que je connaisse en France. J'espère que les voitures qui vont sillonner les collèges à travers la France porteront les valeurs d'une entreprise humaniste que nous sommes un certain nombre à défendre.
Le RSI constitue une victoire provisoire et un des grands acquis de l'UPA. Il faudra cependant transformer cette réforme en une réussite palpable par chaque cotisant. Si vous n'aviez pas été tenace et si je n'avais pas soutenu cette idée, le conservatisme français aurait empêché le RSI de voir le jour. Au fil du temps, vos dispositifs auraient été laminés. Vous seriez devenus un jour des adhérents du régime des salariés et auriez perdu votre autonomie. Nous avons voulu que les indépendants puissent disposer de leur propre régime social, avec ce que cela comporte d'améliorations sur le plan humain. Lorsque à la fin du mois des artisans éprouvent des difficultés à s'acquitter de leurs cotisations sociales, il faut en effet éviter de leur envoyer immédiatement un huissier. Le chantier RSI n'est pas achevé. Je compte sur vous pour faire en sorte que l'ISU puisse rapidement être mis en place.
La réforme des conjoints-collaborateurs est importante à mes yeux dans la mesure où elle démontre qu'il est possible de jumeler l'efficacité économique et le progrès social. Il était injuste que les conjoints en cas de divorce, de décès ou de dépôt de bilan se retrouvent sans droits sociaux. Désormais, tel ne sera plus le cas. Les 107 propositions de l'UPA me paraissent empruntes de sagesse. Vous proposez notamment d'étendre le statut de conjoint-collaborateur aux Pacsés. Je vous rejoins sur ce point tant il me paraît important de s'adapter à des formes modernes de vie en couple. En revanche, ma position est plus réservée quant au concubinage qui traduit selon moi le refus de s'engager dans un lien contractuel et juridique. J'ai signé le décret précisant les modalités de calcul des cotisations, il y a 3 jours. Il est désormais à la signature chez le Ministre du Budget et chez le Ministre de l'Equipement. Il sera par conséquent publié dans les jours prochains.
Nous avons également beaucoup abaissé la fiscalité sur la transmission d'entreprises. En 2002, la taxation sur les plus-values de cession s'établissait à 26 % de la valeur d'une entreprise, laquelle était déjà taxée dans le cadre de l'impôt sur le revenu. Dans la quasi-totalité des cas, le taux a été ramené de 26 à 0 %. Pour autant, la fiscalité n'est pas tout. Nous sommes conscients des difficultés rencontrées par les entrepreneurs pour trouver des repreneurs. Je salue à ce titre l'action du réseau des Chambres de Métiers et de l'APCM. L'UPA a sans aucun doute un rôle important à jouer dans ce domaine.
Nous avons également agi sur les charges sociales. Nous pourrions évidemment rêver d'un monde où ces dernières seraient abolies. Cependant pourrions-nous rêver d'un monde sans retraite, sans médecins et sans hôpitaux, où les risques maladie et vieillesse seraient mis uniquement à la charge de chacun ? Il importe que les charges sociales soient équilibrées et ne pénalisent pas le travail et l'embauche. En France, notre système de prélèvement est malheureusement construit sur le travail et pénalise un certain nombre de petites entreprises. Le Premier Ministre a par conséquent fait le choix, au 1er juillet 2007, de supprimer les cotisations patronales qui portent sur la Sécurité Sociale, c'est-à-dire l'Assurance Maladie, l'Assurance Vieillesse et la Politique de la Famille. Contrairement à une idée reçue cette baisse des charges sociales concerne les salaires compris entre 1 et 1,6 SMIC. Il me paraît important de continuer dans cette voie pour alléger l'effort consenti pour embaucher.
Nous avons également un effort important à fournir en matière de simplification administrative. Ayant réouvert un nouveau chantier, je vous invite, Monsieur le Président, à formuler des propositions dans les semaines à venir. Le Premier Ministre a en effet affiché sa volonté de simplifier la vie des entreprises. Les mesures envisagées sont très simples. Il s'agit par exemple de pouvoir téléphoner à un fonctionnaire et de faire en sorte que le dialogue se traduise par des décisions administratives. Nous entendons également favoriser la diffusion des nouvelles technologies. Nous allons, dans quelques semaines, lancer le passeport pour l'économie numérique grâce auquel les artisans bénéficieront d'offres de services et d'offres hardware de matériel très attractives sur le plan commercial. Il s'agit d'une première mondiale qui a justifié la venue en France des PDG de Intel, de HP et de Microsoft. Pour la première fois, un pays revendique que ses petites entreprises soient à la pointe en matière de technologie de l'information et de la communication. Nous avons certes un retard important à combler. Seules 15 % des petites entreprises utilisent pleinement ces technologies qui permettent de gagner de l'argent, notamment en matière de gestion administrative. En effet, les outils nouveaux comme les chèques-emplois TPE permettent de gagner du temps et de l'argent.
Vous avez Monsieur le Président évoqué les sujets qui ne sont pas encore réglés. Permettez-moi d'y revenir. Le premier concernait la majoration de 25 % liée à la réforme du barème de l'impôt sur le revenu. J'espère que vous n'imaginez pas qu'il s'agit d'une augmentation de 25 % des impôts. Cette mesure est en effet fiscalement neutre. Elle a été proposée dans le but de maintenir un régime différencié en faveur des centres de gestion agréés. Eux-mêmes ont demandé à ce qu'il puisse y avoir un différentiel d'avantage entre l'artisan qui adhère à un CGA et celui qui n'y adhère pas. Cette réforme, je le répète, ne consiste aucunement en une augmentation de l'impôt sur le revenu. Je reconnais que, dans la forme, cette dernière n'est pas très élégante. Je suis persuadé qu'aucun artisan n'imagine que l'administration le considère comme un bandit. Toutefois, elle peut laisser entendre que des pratiques de sous-déclaration du revenu imposable sont suspectées. Je suis parfaitement preneur d'une proposition qui ne coûterait rien au budget de l'Etat.
L'apprentissage est une des grandes réussites du Gouvernement ces dernières années. En 2002, l'apprentissage était considéré comme la voie de garage de l'Education nationale. En quelques années, nous sommes parvenus à faire évoluer les mentalités. Des parents envoient désormais leurs enfants dans les CFA. Cette année, le nombre de contrats d'apprentissage signés a augmenté de 10 %. Les Français ont compris que l'apprentissage pouvait les conduire vers un diplôme de niveau bac + 3 ou bac + 4 et qu'il était possible de devenir ingénieur grâce à l'apprentissage. Les mesures coercitives que nous avons prises concernent les grandes entreprises. Savez-vous que les artisans français font 8 fois plus qu'une multinationale pour former les jeunes. C'est la raison pour laquelle nous avons pris la décision de pénaliser financièrement les entreprises de plus de 250 salariés qui ne consentent pas les efforts suffisants pour accueillir des jeunes en alternance. Evidemment, l'argent ainsi récolté devra retourner à l'apprentissage. Les députés sont en train de se pencher sur cette question.
Abordons à présent la question de l'urbanisme commercial. J'ai l'habitude de m'exprimer sans détours. Depuis la loi Royer, que de mensonges ont été dits sur ce sujet. Les lois visant à défendre le petit commerce se sont toujours traduites par une augmentation des grandes surfaces. La loi Raffarin n'a pas davantage fonctionné que les précédentes puisque depuis 1997 nous constatons une augmentation du nombre de mètres carrés de grandes surfaces dans notre pays. Vous la souteniez pourtant en pensant qu'elle allait mettre un frein à l'extension des grandes surfaces. Les CDEC autorisent 90 % des mètres carrés autorisés en France, la CNEC ne se penchant que sur 10 % des cas. Le rôle de cet organisme est très modeste. C'est dans les départements que règne le laxisme. Les maires sont très contents d'engranger des taxes professionnelles. Tout le monde signe. Au final, puisque les mètres carrés et les parkings en périphérie sont, au contraire des coeurs de ville, très peu coûteux, les 2 économies ne jouent pas avec les mêmes armes.
Nous devons inverser cette tendance dans une optique de développement durable. Nous avons un beau pays et devons lutter contre ce massacre des paysages que constituent les entrées de ville. Les maires ont embelli les coeurs de ville, mais les entrées de ces dernières ressemblent à des boîtes à chaussures alignées les unes à côté des autres sans aucun respect du paysage et de l'architecture. Je vous propose que nous rouvrions ce débat. J'installerai mercredi prochain une commission au sein de laquelle nous entendrons tous les acteurs. Claude Bellot vous représentera au nom de la Confédération de l'alimentation de détail. Il importe en effet que nous ayons une vision d'ensemble de ce sujet et que nous traitions les problèmes de paysage, d'énergie, de contribution à la pollution, d'équilibre entre la périphérie et le centre ville et que nous parvenions à mettre en place un système législatif efficace. Je suis prêt à ce que l'Etat impose par la force de la loi des dispositions favorables aux coeurs de ville. Si ces derniers n'accueillent plus que des agences d'assurance, des agences bancaires et des agences immobilières, ils seront bientôt désertés. Le samedi deviendra un jour mort. Nous devons être très attentifs à ce qui touche à la vie quotidienne des Français. Je sortirai très rapidement la mesure que j'ai mise en place dans le cadre de la loi PME qui permet à un maire de préempter un fonds de commerce pour le remettre sur le marché de l'artisanat, du commerce de bouche ou de services. Nous devons veiller à l'équilibre de la diversité commerciale sans léser ceux qui vendent les fonds de commerce.
Vous avez évoqué l'ouverture des commerces le dimanche. Ce jour était considéré par les Français comme celui du repos dominical. Cette tradition est en train d'évoluer, notamment à cause des 35 heures. L'activité commerciale a beaucoup faibli le vendredi dans la mesure où beaucoup de Français partent en week-end dès le jeudi soir. Une partie de la population est également moins attachée aux traditions chrétiennes qui font du dimanche un jour particulier et souhaite l'ouverture des commerces le dimanche. Le Gouvernement a choisi de se prononcer contre cette évolution. En effet, un commerçant qui emploie des salariés sera en mesure de s'organiser pour assurer la rotation de son personnel. En revanche, un couple sans employé aura la possibilité soit de travailler 7 jours sur 7, soit de fermer un autre jour de la semaine, ce qui induit une perte de part de marché. Dans les 2 cas, de nombreux petits commerces risquent de disparaître. Nous pouvons cependant améliorer quelques aspects de cette question. Il est vrai que, sur les Champs-Élysées, il n'y a aucune raison que Mac Donald's soit ouvert le dimanche et que Vuitton qui fait vivre des salariés français et qui symbolise l'excellence en matière d'artisanat soit fermé ce même jour. Nous devons trouver des réponses concrètes là où les vrais problèmes se posent. Je suis prêt à en discuter avec vous. Je vous invite, à ce titre, à vous pencher sur le système espagnol qui, pour favoriser les commerce des centres-villes, a offert une liberté totale d'ouverture le dimanche aux commerces de moins de 300 mètres carrés alors qu'il maintenait le système d'ouverture quelques dimanches par an pour les surfaces de plus de 300 mètres carrés. Au final, les commerces des centres-villes sont ouverts tandis que ceux de la périphérie restent fermés.
S'agissant de la loi Galland, ce sont les observateurs d'un organisme européen chargé de mesurer les prix qui ont constaté que, depuis la réforme, les prix qui flambaient avec les marges-arrières sont en baisse. Dans le même temps, la part des PME dans le volume des grandes surfaces augmente car les Français sont demandeurs de produits innovants. Le bilan est par conséquent positif. Contrairement à ce que les grandes surfaces pronostiquaient, les emplois dans ce secteur n'ont pas été réduits. Nous sommes parvenus à faire baisser les prix tout en protégeant les PME, ce qui était l'objectif de la loi.
En ce qui concerne les Fonds d'assurance formation -FAF- , tous les acteurs syndicaux ont réfléchi et trouvé la bonne solution. Cette dernière me convient. Je suis prêt à prendre les mesures nécessaires pour que, en tant qu'artisan, vous puissiez former vos collègues et, en tant qu'élus, vous ayez accès au dispositif. La réforme est en cours de finalisation. Gérard Larcher est saisi du dossier. Rappelez-lui que celui-ci est important. J'espère que, dès que nous aurons le feu vert du Ministère des Affaires sociales, nous pourrons faire voter le texte par le Parlement.
Puisqu'il s'agit du dernier congrès de ce quinquennat, je voulais, à titre personnel, souligner le plaisir et le bonheur que j'ai eu à être Ministre des artisans et de l'artisanat. C'est certainement le meilleur ministère car il permet de mettre en place des mesures concrètes avec, face à soi, des hommes et des femmes qui ne demandent pas à être des assistés, mais qui souhaitent simplement pouvoir travailler librement. Les artisans aiment et respectent leur métier. Il me semble qu'il s'agit d'une valeur à faire partager à tous les jeunes français. J'ai exercé comme un artisan le métier de Ministre de l'Artisanat. C'est à vous que je le dois. Merci.
Source http://www.upa.fr, le 7 novembre 2006