Déclaration de Mme Nelly Olin, ministre de l'Écologie et du Développement durable, sur les événements commémoratifs du centenaire de la loi de 1906 sur la protection des sites et sur la politique de classement des sites, à Paris le 8 décembre 2006.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Ouverture du colloque intitulé le "Centenaire de la protection des sites, une politique d'avenir", à Paris le 8 décembre 2006

Texte intégral

Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs les élus ;
Mesdames et Messieurs les Conseillers d'Etat ;
Mesdames et Messieurs les membres de la commission supérieure des sites ;
Mesdames et Messieurs les membres des commissions départementales de la nature, des paysages et des sites ;
Mesdames et Messieurs,
C'est avec un très grand plaisir que je me trouve avec vous aujourd'hui pour ouvrir ce colloque qui célèbre le centenaire de la protection des sites.
Car un centenaire n'est pas un événement banal dans les champs dont j'ai la responsabilité. Et la loi sur les sites du 21 avril 1906 était tout sauf anodine pour l'époque.
Il faut en effet souligner le caractère résolument novateur de cette première loi qui est à l'origine d'une grande partie du droit de la protection de la nature.
Pour la première fois, il était admis que le droit de propriété « inviolable et sacré » issu de la Révolution pouvait être limité pour préserver des beautés de la nature, pour conserver, au profit de tous, des paysages remarquables ou pittoresques.
Pour la première fois, il était admis qu'il fallait trouver un équilibre entre le développement des activités humaines et la protection d'une nature, source de vie.
Sur un territoire perçu comme limité, il fallait savoir conserver pour les générations futures les lieux exceptionnels, uniques et irremplaçables, que la nature et nos ancêtres avaient façonnés et que l'histoire nous avait légués.
Après la loi du 30 mars 1887 qui avait fondé la notion de patrimoine historique, la loi de 1906, en instituant la protection des monuments naturels et des sites, fondait la notion même de patrimoine naturel.
Pour célébrer le centenaire, l'année 2006 a été jalonnée d'une série de manifestations : 2 manifestations de dimension nationale organisées par le ministère, celle du 18 mai sur l'île de Bréhat et celle d'aujourd'hui.
Mais aussi de nombreuses manifestations organisées en régions à l'initiative des préfets, du réseau associatif et du réseau universitaire.
Ainsi, la Société pour la protection du paysage et de l'esthétique de la France a pris l'initiative d'une journée au Sénat et d'une manifestation lors du Salon du Patrimoine.
De son côté, la Société Française pour le Droit de l'Environnement consacre son colloque annuel, la semaine prochaine à Lyon, au centenaire de la protection des sites. Ce sera le point d'orgue des manifestations de l'année du centenaire.
Marquer l'événement, c'est ensuite mieux faire connaître les sites.
Un programme très complet d'actions de communication et de publications a été établi et mis en oeuvre par mes services, aussi bien au niveau central qu'en régions.
Ces actions ont pris des formes diverses : publications, expositions, actions partenariales dont je voudrais citer les plus marquantes.
Je commencerai par le produit-phare du centenaire : le bel ouvrage « Lieux de beauté, lieux de mémoire, cent ans de protection des sites », édité par les éditions De Vecchi en partenariat avec le ministère, qui vient de paraître en librairie.
Cet ouvrage, nous le devons à l'énergie et au talent de tous ceux qui y ont cru et qui l'ont porté : la sous-direction des sites et des paysages, qui en a proposé le principe et suivi de près la mise en oeuvre, le département de l'information et de la communication qui a relevé le défi en portant le projet avec un coordonnateur jeune et talentueux, un auteur dont la sensibilité et la plume ont fait merveille, une équipe de photographes inspirés, dont celui de l'IGN également partenaire de l'ouvrage, enfin un éditeur qui a tiré le meilleur parti des textes et des photos fournis.
Le résultat est là, nous pouvons en être collectivement fiers.
Sans oublier les préfets, qui ont, à notre demande, et avec les équipes des DIREN, mobilisé les commissions départementales des sites, pour identifier dans chaque département le site retenu pour l'ouvrage.
La sortie de l'ouvrage s'accompagne de l'édition, par le ministère, d'une série de 8 cartes postales qui en sont extraites. Et une sélection de 36 photos du livre est également exposée dans le hall.
D'autres publications ont aussi été consacrées au centenaire des sites :
- un numéro spécial de la revue « Sites et Monuments », édité par la Société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France, dont la Présidente est ici présente ;
- un dossier spécial « centenaire » dans la revue Actualité Juridique de Droit Administratif, dont le Directeur scientifique animera la table ronde de ce matin.
- Je n'oublie pas dans la présentation de ce panorama le partenariat avec la Poste, qui a permis de fabriquer un tampon postal du centenaire, à la date du 8 décembre, à l'usage des collectionneurs, mais aussi de ceux d'entre vous qui voudraient conserver un souvenir de cette journée-anniversaire.
Par ailleurs, la Poste a eu la bonne idée de nous offrir ses vitrines de la poste centrale du Louvre pour contribuer à la promotion de l'ouvrage « Lieux de beauté, lieux de mémoire ».
En régions également, mes services ont mis l'accent sur les actions de communication ou de promotion.
Pour conserver la mémoire collective des évènements de l'année, un album-souvenir a été constitué : y ont été archivés les photos des commissions départementales des sites, mais aussi les souvenirs de certaines manifestations organisées en régions.
Cet album de famille des sites, que j'ai dédicacé, servira aussi de Livre d'Or que je vous invite tous à parapher à l'occasion de cette journée.
Marquer le centenaire, c'était enfin donner du sens à l'événement au travers d'un bilan et des perspectives d'avenir.
S'il fallait n'en faire qu'un commentaire, il ne serait pas exagéré de qualifier ce bilan d'exceptionnel : le fichier national compte 2 640 sites classés, pour une superficie de plus 800 000 hectares, et 4 700 sites inscrits, couvrant au total 1,6 millions d'hectares.
4 % du territoire national est donc protégé au titre de cette législation.
On peut ainsi considérer que ces 100 années d'activité au service de la protection des sites ont permis de faire entrer dans le patrimoine paysager protégé la plus grande part des monuments naturels et des sites les plus remarquables.
Faut-il considérer pour autant que l'oeuvre est terminée ?
Non, cette politique de longue haleine doit rester très active et est plus que jamais d'actualité.
La nécessité de toujours veiller au bon achèvement de l'édifice demeure une réalité.
Tout d'abord, achever l'édifice : cela veut dire inscrire au fichier national les quelques sites majeurs qui y font encore défaut, de façon à assurer leur conservation.
J'ai ainsi décidé de mieux fixer le cadre de l'action qui reste à conduire et d'établir une liste indicative des sites éligibles à l'étude d'un classement futur à partir des propositions établies par les services.
Pour ce faire, j'ai adressé 2 circulaires aux préfets en décembre 2005 puis en septembre 2006.
Une liste d'environ 300 sites a donc été établie et permet de donner une meilleure lisibilité à cette politique.
On s'étonne d'ailleurs d'y découvrir certains de nos plus beaux fleurons paysagers dont on aurait pu croire que la valeur patrimoniale et la renommée avaient depuis longtemps été reconnues par un classement de site.
Cette cohérence d'un réseau national des sites classés vise en effet :
- à palier les disparités régionales liées à l'histoire de la mise en oeuvre des protections ;
- à représenter au mieux la diversité des paysages français en application même de la convention européenne du paysage ;
- enfin à préserver au mieux les sites ou paysages culturels que la France a proposés ou propose à l'inscription au patrimoine mondial de l'humanité.
Je pense notamment à l'extension des protections de la baie du Mont Saint-Michel ou du Val-de-Loire, aux abords du Canal du Midi et à ses paysages associés les plus emblématiques. Je pense également à ceux des Causses et des Cévennes, ainsi qu'aux exceptionnels paysages souterrains présents dans l'ensemble de 18 grottes actuellement proposé à cette reconnaissance internationale.
Selon cette liste indicative, il est fort probable qu'à terme, les sites classés représenteront plus de 2% du territoire national, soit une croissance de près de la moitié des superficies déjà classées.
Ce programme ambitieux me semble tout à fait raisonnable et pleinement justifié au regard du retour économique de ces protections : l'image de notre pays et son développement économique y gagnent.
Cette liste doit également contribuer à faciliter la surveillance des sites et le bon aboutissement des procédures.
C'est pourquoi je n'ai pas hésité à mettre en oeuvre à plusieurs reprises cette année la procédure de l'instance de classement pour sauvegarder les caractéristiques et l'identité de sites, dont l'intégrité était menacée.
En effet, les sites protégés ont une image forte et portent en eux une réelle valeur ajoutée. Par leur attractivité, ils représentent une part très importante du secteur de l'économie touristique qui génère un chiffre d'affaire 2 fois plus important que celui de l'agriculture, 3 fois plus important que celui de l'automobile, et 10 fois plus important que celui du commerce de luxe.
Ils sont donc à la fois une richesse patrimoniale et une richesse économique, dont la préservation relève de la responsabilité et de l'intérêt de tous.
Le bilan tout à fait impressionnant du travail accompli au service de la politique des sites, je le porte au crédit de la mobilisation de tous :
- L'ensemble des services sur lesquels je m'appuie tous les jours pour animer et faire vivre ces politiques. Je me réjouis qu'ils soient aujourd'hui tous représentés ;
- Les commissions des sites qui jouent un rôle essentiel de conseil et d'expertise, auprès des préfets et auprès de moi, dans le confortement de ces politiques et dans l'élaboration de la doctrine ;
- Le Conseil d'Etat dont la section des travaux publics et la section du contentieux apportent un soutien efficace et particulièrement apprécié à nos projets de classements.
M. Jean-Philippe LECAT, ancien ministre de la Culture et Conseiller d'Etat honoraire, en témoignera ici.
- Les élus et l'ensemble des acteurs locaux qui gèrent les sites au quotidien et s'impliquent souvent directement, notamment au travers des opérations grands sites. En effet, cette expérience est au coeur des échanges internationaux sur la gestion des biens du patrimoine mondial de l'UNESCO et sur le développement du tourisme durable.
C'est l'ensemble de ces acteurs, tous représentés aujourd'hui, que je souhaite remercier pour le travail accompli et pour l'énergie et l'attention qu'ils ont apportées et apporteront encore à la mise en oeuvre de la législation.
Je souhaite que vos échanges d'aujourd'hui soient fructueux et qu'ils contribuent à enrichir le diagnostic et à conforter les perspectives pour faire de ces politiques patrimoniales des politiques d'avenir dans un contexte aujourd'hui européen et mondial.
Je vous remercie de votre attention.
Source http://www.environnement.gouv.fr, le 11 décembre 2006