Texte intégral
Il y a un an, presque jour pour jour, je représentais ici à Dakar le gouvernement français à la prestation de serment du nouveau président de la République.
En mars 2000, en effet, le peuple sénégalais, à la suite d'un processus électoral pacifique et démocratique, a tourné une page importante de son histoire en portant à sa tête Maître Abdoulaye Wade. Celui-ci, depuis son entrée en fonctions, a engagé le pays dans une démarche de rénovation de ses institutions, marquée par l'adoption d'une nouvelle Constitution, le 7 janvier 2001. L'élection anticipée d'une Assemblée nationale, désormais chambre législative unique, le 29 avril prochain, constituera l'étape suivante de ce mouvement.
La France a accompagné le Sénégal dans cette phase de transition institutionnelle, de renouvellement de ses cadres dirigeants et de redéfinition de sa politique. Partenaire historique du Sénégal et premier des bailleurs de fonds, notre pays entend rester aux côtés du peuple sénégalais dans son aspiration légitime à la paix, à la sécurité, au développement et à l'ouverture sur le monde.
Le modèle démocratique sénégalais et un remarquable esprit de conciliation permettent également aux dirigeants de ce pays d'être écoutés sur la scène internationale. La contribution du Sénégal à l'émergence d'une véritable unité africaine est appréciée de longue date. Les propositions, originales, concrètes et structurées, du président Wade, qu'il a présentées dans le "Plan Oméga", ont retenu l'attention des ses pairs et vont faire l'objet d'un examen approfondi.
C'est dans ce contexte que se situe ma visite à Dakar. Elle me donne l'occasion de confirmer au chef de l'Etat, que je verrai dans quelques instants, et au Premier ministre, Mme Mame Madior Boye, que j'ai rencontré ce matin, le soutien de la France au Sénégal. Comme vous le savez, la France apporte chaque année environ un cinquième de l'aide totale reçue par ce pays.
Par ailleurs, le Sénégal, éligible à l'initiative sur la dette des Pays pauvres très endettés devrait bénéficier à ce titre, comme le président de la République l'a annoncé lors du Sommet de Yaoundé au mois de janvier, de l'annulation complémentaire anticipée de ses créances commerciales traitées en Club de Paris, décidée unilatéralement par la France. Enfin, au titre de nos actions de coopération, j'ai signé tout à l'heure avec le ministre des Affaires étrangères, M. Tidiane Gadio, cinq conventions financées par le fonds de solidarité prioritaire, pour un montant global de trois milliards deux cent millions de Francs CFA.
Ces projets s'inscrivent dans l'évolution de notre politique vers une coopération plus efficace et mieux ciblée, ainsi que le réclament nos amis sénégalais eux-mêmes et le président Wade en particulier, qui a déclaré qu'il n'attendait pas de ses partenaires plus d'argent, mais une aide mieux utilisée. Cette évolution nous conduit également, avec le même souci d'efficacité, à approfondir noter concertation avec les autres bailleurs de fonds, l'Union européenne, les institutions multilatérales du système des Nations unies et les autres pays qui entretiennent ici leur propre coopération. Il ne faut plus les considérer sous l'angle de la concurrence avec nos propres actions, mais sous celui de la complémentarité.
Mesdames,
Messieurs,
La présence française au Sénégal, au-delà de notre politique de coopération, au-delà de notre assistance technique, est d'abord votre uvre à vous, résidents permanents ou temporaires. Je voudrais vous dire d'abord toute l'attention que le gouvernement accorde aux communautés expatriées, vous assurer qu'il en mesure le rôle dans le rayonnement de notre pays, et vous confirmer sa préoccupation en matière de sécurité, de conditions de vie et de justice sociale.
Avec plus de 20 000 résidents, vous constituez l'une des premières communautés étrangères au Sénégal et le nombre des immatriculés ne cesse d'augmenter depuis quelques années. Certains d'entre vous sont présent ici de longue date, parfois depuis l'indépendance, et participent intimement à la vie quotidienne du pays, professionnels de la santé, dirigeants de PME ou d'entreprises du tertiaire. Je pense aussi aux quelques 5 000 binationaux qui symbolisent l'étroitesse et la pérennité de la relation entre nos deux peuples.
Je voudrais mentionner également les 1 200 militaires des forces françaises du Cap Vert et leur famille, dont j'aperçois quelques représentants parmi nous. Je souhaiterais les saluer et souligner l'importance de leur mission, et sa qualité, non seulement dans le cadre de l'accord de défense entre la France et le Sénégal, mais aussi au regard de leurs interventions dans le domaine civilo-militaire, qui sont très appréciées de nos partenaires. A cet égard, je tiens à rappeler aujourd'hui le formidable travail qui a été accompli pour la préparation, l'équipement et le transport des 540 soldats sénégalais du contingent destiné à la Force de maintien de la paix des Nations unies pour le Congo démocratique. Cette opération de partenariat pour le maintien de la paix illustre parfaitement notre nouvelle approche des problèmes de sécurité en Afrique. Elle montre bien que nous sommes toujours présents aux côtés de nos alliés africains, même si les formes de notre engagement militaires ont évolué et sont moins spectaculaires, parfois aussi moins coercitives que par le passé.
Je n'oublie pas non plus ceux d'entre vous qui, créateurs de leur propre entreprise ou expatriés du secteur économique, travaillent chaque jour au dynamisme de nos relations commerciales. C'est grâce à vous que la France maintient son rang de premier partenaire du Sénégal. Le flux d'investissement émanant des entreprises a certainement contribué à la performance économique satisfaisante du Sénégal, qui a connu en l'an 2000 une croissance de l'ordre de 6 %.
Cette présence doit être maintenue et encouragée et je sais bien quelles sont, de ce point de vue, vos préoccupations en termes de conditions de vie. Pour pouvoir pleinement vous consacrer à vos activités professionnelles, il est naturel que vous vous souciiez de la scolarisation de vos enfants, de la santé de vos familles et de l'environnement de votre séjour.
S'agissant de la scolarisation, vous savez que vous pouvez compter au Sénégal sur l'un des réseaux les plus denses qui soient à l'étranger. Onze établissements permettent d'accueillir 2 620 jeunes français et presque autant d'élèves étrangers de 45 nationalités. Ce réseau scolaire se situe au 6ème rang mondial en terme d'effectif. L'enseignement y est assuré par 290 professeurs, presque tous français.
La variété des statuts des établissements, simplement reconnus par le ministère de l'Education nationale ou gérés directement par l'AEFE, religieux pour certains ou laïcs pour d'autres, permet un choix apprécié des parents. Le caractère binational de plusieurs d'entre eux autorise des échanges féconds entre les enfants et avec les écoles du système éducatif sénégalais. C'est le cas notamment de deux écoles primaires franco-sénégalaises de Dakar pour lesquelles nous cherchons une formule qui en garantira le maintien.
Les équipements des établissements correspondent à ceux des écoles et lycées de la métropole. Un effort tout particulier a été fait récemment pour relier tous ces établissements au réseau Internet et pour offrir aux enseignants la possibilité d'une utilisation régulière des nouveaux supports informatiques.
Les résultats obtenus aux examens sont en tout cas excellents puisqu'ils ont atteint 90,25 % à la dernière session du baccalauréat (contre 79,8 % pour la France).
Les conditions de la scolarisation à l'étranger demeurent depuis plusieurs années une priorité du gouvernement et je rappelle que les crédits destinés aux bourses scolaires allouées par l'AEFE sont en hausse de plus de 4% dans le budget 2001. Ce sont près de 500 bourses qui ont été attribuées aux élèves scolarisés au Sénégal cette année.
La santé est aussi naturellement une des préoccupations majeures de la communauté française. Il s'agit là d'un secteur privilégié de notre coopération avec le Sénégal. Le changement de statut de l'hôpital principal de Dakar, intervenu au 1er janvier 2000, lui permet désormais de s'intégrer dans la carte hospitalière du pays, et de bénéficier des subventions de droit commun. Nous continuerons, pour notre part, à y maintenir un encadrement de très haut niveau pour conserver à cet établissement, désormais pris en charge par les autorités locales, son rôle d'hôpital de référence pour la région tout entière et de garantie pour la communauté française.
En troisième lieu, la communauté française dispose, avec les deux consulats généraux de Dakar et de Saint-Louis et les cinq agents consulaires et consuls honoraires installés en province, d'un réseau dynamique pour l'assister dans ses démarches. Je sais que les services consulaires travaillent en parfaite harmonie - et je m'en réjouis - avec les quatre représentants du Conseil supérieur des français à l'étranger, dont je salue la présence ici, ainsi que les associations représentatives qui sont nombreuses et efficaces. Ce maillage dense est la clef de la cohésion et de l'harmonie de votre communauté. C'est particulièrement vrai au Sénégal, où je mentionnais l'importance numérique de la présence française.
Faut-il rappeler que c'est une somme de près de 5 millions de francs que le poste de Dakar consacre aux dépenses d'aide sociale. Vous savez aussi que la France a décidé d'étendre progressivement le bénéfice des prestations d'insertion à ses ressortissants établis hors du territoire national. Je me réjouis que le Sénégal ait été retenu comme poste pilote pour la mise en place d'une allocation locale d'insertion sociale (ALIS) et d'un revenu local de substitution (RLS). Ce choix est particulièrement approprié au regard du contexte local et des caractéristiques de la communauté française qui réside ici.
L'Afrique occidentale traverse actuellement une zone de fortes turbulences qui menacent sa stabilité et mobilisent les préoccupations de ses partenaires, au premier rang desquels figure la France. Ce n'est pas une raison pour négliger les pays qui, tels que le Sénégal, échappent à ces conflits. Dakar reste un pôle régional essentiel pour la stabilité. Votre présence et votre action ici n'en sont que plus importantes pour le développement du Sénégal, pour le rayonnement de la France et pour le renforcement de la coopération franco-sénégalaise. Soyez assurés que les services de l'Etat feront tout pour vous aider.
Je vous remercie
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 5 avril 2001)