Interview de Mme Ségolène Royal, députée PS et candidate à l'élection présidentielle de 2007, sur "France 3" le 31 mars 2007, sur la montée de la violence, sur la sécurité ainsi que sur le chômage.

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Média : France 3

Texte intégral

Catherine Matausch
Dans ce 19/20, nous recevons chaque candidat à l'élection présidentielle. Ce soir, Ségolène Royal, bonsoir.
Ségolène Royal
Bonsoir.
Catherine Matausch
Vous le voyez, en matière de lutte contre l'insécurité, Nicolas SARKOZY apparaît aux yeux des Français comme l'homme le mieux placé, le plus crédible. Vous avez tout intérêt à ce que l'insécurité quitte vite cette campagne présidentielle.
Ségolène Royal
Ce que vous n'avez pas dit, c'est que plus d'un Français sur trois ne se prononce pas. Donc les Français sont en train d'observer, de regarder, de comparer les différents projets sur lesquels dans quelques semaines, ils vont devoir se prononcer. Et puis ce que vous n'avez pas dit non plus, c'est que dans le même sondage, 80% des Français estiment que depuis un an, c'est-à-dire depuis la révolte des banlieues, il ne s'est rien passé et que ces révoltes peuvent repartir à tout moment. Et moi je ne veux pas que les révoltes repartent dans nos banlieues et je pense être la candidate la mieux à même de régler les problèmes. Pourquoi ? Parce que je crois que tout se tient, que d'abord il faut aider les familles à élever correctement leurs enfants ; ensuite, il faut que la violence disparaisse des établissements scolaires et c'est ce que je ferai. J'ai proposé de créer un métier nouveau de tuteur éducateur dans les établissements scolaires, dans les écoles ; là d'ailleurs où la droite a supprimé les aides éducateurs, où la violence est revenue et enfin dans les quartiers, j'ai l'intention de créer la police de quartier, c'est-à-dire une police respectée qui sera connue des habitants et de renforcer ce qui marche, c'est-à-dire, j'ai regardé dans les villes où il n'y avait pas eu d'émeutes et de révoltes comme dans les quartiers de Marseille ou dans les quartiers de La Rochelle, on pourrait en citer d'autres : ce sont des villes qui ont mis en place des médiateurs de quartier qui sont là également la nuit, qui travaillent en partenariat avec une police de proximité dont les commissariats sont également ouverts la nuit.
Catherine Matausch
Ségolène Royal...
Ségolène Royal
Ce que je veux dire, c'est que des solutions, il y en a. Il faut qu'elles soient fermes, équilibrées et je pense que d'une façon générale, les Français estiment que la violence monte dans la société française et ça, il faut stopper cela et en particulier en commençant très tôt l'éducation civique à l'école et je veux dire que l'ordre juste que je veux mettre en place...
Catherine Matausch
Alors juste un mot...
Ségolène Royal
Justement l'ordre juste que je veux mettre en place, sera aussi une société où les gens vont respecter les professions en uniforme.
Catherine Matausch
Alors que répondez-vous à Nicolas SARKOZY qui hier soir à Nice a beaucoup ironisé sur cet ordre juste ? Selon lui, c'est trouver normal de frauder et de frapper la police.
Ségolène Royal
Ecoutez, je crois que l'élection présidentielle doit se situer à un certain niveau et là Nicolas SARKOZY a frappé comme on dit en-dessous de la ceinture. Donc lui aussi doit respecter les règles parce qu'il doit respecter les électeurs. En ce qui me concerne, je respecterai mes adversaires et je ne les traiterai pas de la même façon et comme ça, les Français seront à même de choisir qui sera le mieux en responsabilité et qui pourra le mieux incarner la France de demain, celle où l'on apprend à se respecter mutuellement et celle où chacun doit obéir aux mêmes droits et aux mêmes devoirs. Et donc monsieur SARKOZY devrait donner l'exemple parce que l'exemple de l'ordre juste, c'est aussi d'avoir les mots justes et de ne pas déformer, vilipender ou dégrader le débat public. Mais je veux dire aussi sur la question dans les transports publics que là aussi il y a des solutions. Vous savez, je prends beaucoup le train compte tenu de mes activités et les contrôleurs me disent en effet qu'il y a de plus en plus de voyageurs qui n'acceptent pas de se voir contrôler, pas seulement les jeunes, toutes les catégories, en première classe comme en seconde classe. Donc je crois que c'est la maison France qu'il faut remettre debout et comme je le disais tout à l'heure, que chacun comprenne qu'il y a des droits, qu'il y a des devoirs ; on a le droit de prendre les transports en commun, on paie son billet et on doit accepter d'être contrôlé, c'est ce que j'appelle le respect des professions en uniforme.
Catherine Matausch
Ségolène Royal, vous n'avez quand même pas le sentiment qu'à trois semaines maintenant du premier tour, la campagne se cristallise maintenant sur ces questions de sécurité ? Et si c'est le cas, vous risquez d'échouer.
Ségolène Royal
Ecoutez, ce qui m'importe, c'est de m'adresser aux Français et de penser à la France et je crois que le principal fléau dont nous souffrons aujourd'hui, c'est celui du chômage, du chômage des jeunes, du chômage des femmes et du chômage des salariés de plus de cinquante ans. Et d'ailleurs je crois qu'il y a un lien très direct avec la question de la sécurité et la question du chômage parce que quand les jeunes sont dans l'échec scolaire ou dans l'oisiveté, à ce moment-là en effet ils sont tentés par la délinquance.
Catherine Matausch
Mais le chômage baisse en France même s'il y a eu cette polémique sur le taux de chômage en France.
Ségolène Royal
Il y a toujours beaucoup trop de chômage et je ne veux pas entrer dans la polémique des chiffres. Si je suis élue présidente de la République, il n'y aura plus de pugilat sur les chiffres parce que dans un pays moderne, cela ne doit pas exister. Ce seront donc des commissions de l'Assemblée nationale avec la majorité et l'opposition rassemblées qui cautionneront les chiffres publics pour qu'il n'y ait plus ces disputes politiques qui ne débouchent sur rien. En revanche...
Catherine Matausch
Pour conclure...
Ségolène Royal
Pour conclure... les propositions concrètes que je fais en particulier pour lutter contre le chômage des jeunes en France, c'est en France en Europe que le chômage des jeunes est le plus élevé ; c'est pourquoi je veux créer les emplois tremplins qui allègeront le coût du travail des jeunes pour les entreprises mais on fera du donnant-donnant. Je vais aider les entreprises en supprimant les gaspillages des aides à l'emploi pour les concentrer sur les jeunes et sur les catégories qui souffrent du chômage.
Catherine Matausch
Merci beaucoup Ségolène Royal d'avoir accepté notre invitation.
Source http://www.desirsdavenir.org, le 2 avril 2007