Déclaration de Mme Catherine Tasca, ministre de la culture et de la communication, sur le soutien public à l'innovation et à la création, notamment dans l'audiovisuel et le multimédia, Paris le 20 février 2001.

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Circonstance : Lancement du RIAM, Réseau pour la recherche et l'innovation en audiovisuel et multimédia à Paris le 20 février 2001

Texte intégral

Messieurs les ministres,
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
Je suis particulièrement heureuse d'être avec vous aujourd'hui pour lancer ce nouveau réseau pour l'innovation dans l'audiovisuel et le multimédia. Je ne répéterai pas devant vous les arguments développés par Roger-Gérard SCHWARTZENBERG et par Christian PIERRET. Je les partage entièrement.
Avec le RIAM, pour mieux répondre aux enjeux des nouveaux réseaux, l'administration se met en réseau. C'est une bonne chose que trois ministères se réunissent pour penser l'avenir avec l'ensemble d'une filière, dans toute sa diversité et sa complexité. Il est aussi intéressant que l'État décide de partager avec des professionnels son pouvoir de sélection et de décision, comme il le fera dans le RIAM. Cette exigence de concertation accrue est l'une des lignes fortes de la politique de Lionel JOSPIN dans tous les domaines, vous le savez.
Faut-il un soutien public dans ce secteur ?
J'ai la conviction que dans la société de l'information aussi, le soutien public à l'innovation et à la création demeure et demeurera nécessaire. Il serait dangereux de penser que les forces du marché sont assez clairvoyantes pour trouver et développer seules en Europe les services et les programmes à haute valeur ajoutée de demain. Les soubresauts récents de la nouvelle économie nous incitent à travailler plus en amont sur les technologies et sur leurs usages et à le faire tous ensemble. J'espère que ce nouveau réseau, cette plate-forme interministérielle, sera un bon outil. Je tiens à remercier tout particulièrement les professionnels qui ont accepté de prendre de leur temps pour travailler avec nous, et notamment le Président Jean-Charles HOURCADE.
Qu'attend le ministère de la culture et de la communication du RIAM ?
Avant moi, mes collègues ont souligné à juste titre le caractère stratégique des programmes et des contenus interactifs dans l'univers numérique et des technologies qui permettent de les diffuser et d'y accéder. Il y a un peu plus d'une semaine, au MILIA, le Premier Ministre et moi-même avons pu constater une nouvelle fois la vitalité de ces nouvelles industries culturelles mais aussi les interrogations et les soucis de l'ensemble des acteurs.
Inquiétude des acteurs les plus petits face aux concentrations des plus grands : de la même façon que les dispositifs de soutien en faveur du cinéma et des programmes audiovisuels ont pour objectif de maintenir la diversité de la création, un réseau tel que le RIAM doit favoriser la recherche et l'innovation dans les entreprises de toutes tailles, y compris et surtout dans les plus petites. Nous souhaitons préserver cet acquis majeur du programme PRIAMM.
Inquiétude face au piratage et à la contrefaçon : les dispositifs techniques de marquage et de protection des uvres peuvent freiner ce fléau. Le RIAM devra aider à leur perfectionnement et à leur développement. Il peut également améliorer l'efficacité des systèmes techniques de gestion et de perception des droits. C'est un enjeu essentiel.
Mais la plus grande interrogation des professionnels que nous avons rencontrés, qu'ils soient producteurs de jeux, de produits éducatifs et culturels ou de programmes audiovisuels interactifs, c'est celle de l'économie des contenus et des usages qui pourraient assurer la croissance de ces nouveaux marchés. La nouvelle économie ne se construira pas uniquement par les technologies. Le droit de la propriété littéraire et artistique, par exemple et en tout premier lieu, joue et jouera un rôle toujours plus important. Pour permettre une saine économie de la société de l'information, ce doit être un droit qui permette à la fois la diffusion et la circulation des oeuvres tout en garantissant une juste rémunération à l'ensemble des ayants droits. Cet équilibre difficile ne peut être trouvé uniquement par des procédés techniques de verrouillage et de traçage. C'est cet équilibre qui doit être trouvé dans la Directive " droits d'auteurs et droits voisins dans la société de l'information " qui sera bientôt adoptée. Ce n'est pas seulement un enjeu économique, c'est aussi un enjeu démocratique pour qu'utilisateurs et créateurs puissent agir en harmonie sur les nouveaux réseaux.
Voilà pourquoi je souhaite que le RIAM ne se borne pas aux technologies. Nous avons trop peu d'études sérieuses sur l'économie des contenus numériques. Qui doit payer ? Où ? Quand ? Quels sont les seuils de rentabilité ? À quelles échéances ? Nous ne disposons pas suffisamment d'analyses sur les usages, ceux d'aujourd'hui et ceux qui pourraient naître demain. Nous ne provoquons pas suffisamment la discussion sur les scénarios, parfois fantaisistes, qui nous sont proposés. Le RIAM, en coordination étroite avec les initiatives européennes, pourra aussi apporter des réponses originales à l'ensemble de ces questions.
Enfin, et pour conclure, je sais que vous aurez à cur de faire en sorte que le RIAM ne soit pas trop parisien. Les collectivités territoriales, notamment les régions, multiplient les initiatives dans ces secteurs. L'innovation requiert parfois des synergies qui se trouvent, dans certains cas, plus rapidement au niveau local qu'au seul niveau national. Le RIAM devra les prendre en compte et devenir aussi un lieu d'échanges et d'expertise pour ces initiatives locales. C'est important dans le cadre de la politique de décentralisation et d'aménagement du territoire de notre gouvernement.
Le ministère de la culture et de la communication jouera pleinement son rôle dans ce réseau. Vous pouvez compter sur le Centre national de la cinématographie qui s'est doté d'une direction du multimédia mais aussi sur la Direction du développement des médias, de l'INA et les services de recherche du ministère.
Bon travail à vous tous.

(Source http://www.culture.gouv.fr, le 22 février 2001)