Texte intégral
Vous êtes favorable à la connaissance des origines, vous défendez la convention internationale des droits de l'enfant qui fait de l'identité un droit. Pourquoi ne pas supprimer l'accouchement sous X ?
La meilleure façon de ne pas avoir de réforme aurait été d'adopter une position radicale. J'ai voulu sortir de l'affrontement stérile entre ceux qui défendent le droit au secret et ceux qui défendent le droit aux origines. Le but est que tout enfant puisse avoir accès à son histoire. Je crois qu'avec ce texte, qui garantit toujours la sécurité de la femme mais pousse vers la réversibilité du secret, l'anonymat va s'éteindre de lui-même. C'est le pari que je fais et j'ai prévu un bilan dans un an.
Certaines féministes restent farouchement favorables à l'accouchement sous X, qui représente, selon elles, une liberté de la femme...
Il ne faut pas oublier l'origine idéologique de l'accouchement sous X: c'est un décret-loi du régime de Vichy, qui représentait le pendant de la peine de mort pour les femmes qui avortaient. Celles-ci n'avaient plus aucune excuse puisque la loi leur permettait de cacher l'accouchement et que l'Etat prenait en charge tous les frais. Ce décret-loi protégeait aussi les hommes en empêchant toute recherche en paternité pour les naissances illégitimes. Lorsqu'on explique aux féministes que la liberté des femmes est toute relative quand il s'agit de mères très jeunes, ou d'origine étrangère, qui subissent d'énormes pressions pour abandonner leur enfant, elles admettent que la réforme a du bon.
Lors du débat parlementaire, des députés vont défendre, comme en 1992, que toute vérité n'est pas bonne à savoir...
Le secret comme source de bonheur est une idée qui a vécu. Inversement je ne propose pas de vérité imposée. En quelques années, on a appris à légitimer la parole des enfants, sur la maltraitance comme sur toute souffrance. Tous disent que le fantasme est pire que la vérité cachée, fussent-ils nés d'un viol ou d'un inceste. S'ils recherchent, ce n'est pas tant par besoin de savoir, c'est par solidarité envers une mère. En écoutant les adoptés et les mères de l'ombre, j'ai pu constater qu'il n'y avait aucune revendication de leur part, c'était plus une fusion de malheurs. Les adoptés pensent que celles qui leur ont donné la vie les cherchent peut-être quelque part, et elles, elles sont hantées par cette même inquiétude. Mais le grand changement vient surtout des familles adoptives, dont beaucoup sont en demande d'aide pour accompagner leurs enfants dans cette quête des origines. La crainte du contact avec la famille biologique laisse place, aujourd'hui, à l'idée qu'on peut, pour le respect de l'intégrité de l'enfant, reconnaître que plusieurs adultes tiennent un rôle dans sa vie, sans confusion des places, droits et responsabilités.
(source http://www.liberation.fr, le 18 janvier 2001)
La meilleure façon de ne pas avoir de réforme aurait été d'adopter une position radicale. J'ai voulu sortir de l'affrontement stérile entre ceux qui défendent le droit au secret et ceux qui défendent le droit aux origines. Le but est que tout enfant puisse avoir accès à son histoire. Je crois qu'avec ce texte, qui garantit toujours la sécurité de la femme mais pousse vers la réversibilité du secret, l'anonymat va s'éteindre de lui-même. C'est le pari que je fais et j'ai prévu un bilan dans un an.
Certaines féministes restent farouchement favorables à l'accouchement sous X, qui représente, selon elles, une liberté de la femme...
Il ne faut pas oublier l'origine idéologique de l'accouchement sous X: c'est un décret-loi du régime de Vichy, qui représentait le pendant de la peine de mort pour les femmes qui avortaient. Celles-ci n'avaient plus aucune excuse puisque la loi leur permettait de cacher l'accouchement et que l'Etat prenait en charge tous les frais. Ce décret-loi protégeait aussi les hommes en empêchant toute recherche en paternité pour les naissances illégitimes. Lorsqu'on explique aux féministes que la liberté des femmes est toute relative quand il s'agit de mères très jeunes, ou d'origine étrangère, qui subissent d'énormes pressions pour abandonner leur enfant, elles admettent que la réforme a du bon.
Lors du débat parlementaire, des députés vont défendre, comme en 1992, que toute vérité n'est pas bonne à savoir...
Le secret comme source de bonheur est une idée qui a vécu. Inversement je ne propose pas de vérité imposée. En quelques années, on a appris à légitimer la parole des enfants, sur la maltraitance comme sur toute souffrance. Tous disent que le fantasme est pire que la vérité cachée, fussent-ils nés d'un viol ou d'un inceste. S'ils recherchent, ce n'est pas tant par besoin de savoir, c'est par solidarité envers une mère. En écoutant les adoptés et les mères de l'ombre, j'ai pu constater qu'il n'y avait aucune revendication de leur part, c'était plus une fusion de malheurs. Les adoptés pensent que celles qui leur ont donné la vie les cherchent peut-être quelque part, et elles, elles sont hantées par cette même inquiétude. Mais le grand changement vient surtout des familles adoptives, dont beaucoup sont en demande d'aide pour accompagner leurs enfants dans cette quête des origines. La crainte du contact avec la famille biologique laisse place, aujourd'hui, à l'idée qu'on peut, pour le respect de l'intégrité de l'enfant, reconnaître que plusieurs adultes tiennent un rôle dans sa vie, sans confusion des places, droits et responsabilités.
(source http://www.liberation.fr, le 18 janvier 2001)