Texte intégral
Bonjour Mesdames et Messieurs, pardon pour notre retard mais nous devions parler.
C'est la première visite de mon nouveau collègue, le ministre des Affaires étrangères britannique.
Il doit partir très vite, c'est de ma faute, je l'ai fait attendre.
Alors, je vais donc tout de suite lui donner la parole en me réjouissant devant vous, tout d'abord de l'amitié qui nous unit - c'est une vieille affaire -, mais surtout en me réjouissant des perspectives exaltantes qui s'offrent aux deux diplomaties, et aux deux pays, avec un nouveau gouvernement, un nouveau Premier ministre, de chaque côté, et un nouveau président.
Q- Etes-vous d'accord avec l'idée italienne d'organiser une conférence internationale ou régionale sur l'Afghanistan, afin de trouver une solution politique ?
R - Vous savez qu'il y a eu une conférence internationale à Rome, il y a quelques jours, il y a quinze jours ou trois semaines. Et j'ai reçu ici M. Tom Koenigs, qui est le représentant spécial du Secrétaire général des Nations unies. Nous avons affirmé pour notre part, que nous continuons à espérer une issue favorable, nous envoyons des soldats en plus, nous allons travailler un peu plus encore auprès des populations civiles. Mais je n'avais pas connaissance de cette conférence internationale.
Q - Quels sont les projets politiques que les deux pays souhaitent traiter ensemble ?
R - Pour être brefs, nous avons d'énormes projets politiques, je vous en ferai grâce. En Afrique, David vient de le dire, nous avons la perspective d'être très utiles au Darfour, du moins je l'espère, de toute façon, de faire ensemble cette opération au Tchad auprès des populations civiles. Les populations civiles attendent, attendent, attendent. On dit que l'on va faire quelque chose, mais les femmes et les enfants sont en train de mourir.
Alors, avec l'Union européenne, mais certainement de façon déterminée entre l'Angleterre et la France, nous allons entreprendre cette opération.
Il y a, au Moyen-Orient, au Liban, pour les Palestiniens et les Israéliens à la fois, tellement de choses à faire. Maintenant M. Tony Blair est représentant du Quartette. Il y a beaucoup de perspectives. On a parlé de la Chine, on a parlé du réchauffement climatique. Beaucoup reste à faire. Et vous savez, lorsque le Royaume-Uni et la France sont ensemble, des choses décisives peuvent se passer. Ce qui n'empêche pas, évidemment, que nous travaillions et que nous soyons actifs au sein de l'Union européenne.
Q - M. Sarkozy va-t-il aller en Libye ?
R - C'est possible.
Q - Vous parlez de solidarité avec l'Angleterre en ce qui concerne la Russie. Qu'entendez-vous par solidarité ? Est-ce que la France envisage de prendre des mesures comme en Angleterre où on a expulsé des diplomates ?
R - Non. La France n'envisage pas de faire autre chose que ce qu'elle a fait, c'est-à-dire affirmer une fois de plus sa solidarité entière avec le Royaume-Uni, avec les décisions que le gouvernement anglais a prises. Il nous semble que la meilleure manière, pour les Russes surtout, et pour l'Union européenne également, que cette affaire soit sans suite, c'est que la justice se fasse. M. Litvinenko a été assassiné sur le territoire britannique, une enquête a été lancée. Il faut absolument que cette enquête se poursuive et que la justice soit rendue. C'est une position très ferme de la France.
Q - L'émissaire français, Jean-Claude Cousseran, se trouve aujourd'hui à Damas. Je voudrais savoir si cela signifie un réchauffement ou une amélioration des relations franco-syriennes, et si on peut imaginer d'autres rencontres, et à un plus haut niveau, dans les prochaines semaines ?
R - Nous allons voir. J'ai toujours affirmé que tous ceux qui recherchaient la paix dans cette région particulière du Moyen-Orient, et plus particulière encore au Liban, recevraient le soutien de la France. Nous avons essayé de réunir à Paris tous les représentants de toutes les communautés libanaises, car nous sommes les amis de tous les Libanais. Un certain nombre d'obstacles ont disparu parce que la Syrie l'a bien voulu. Nous avons envoyé un premier émissaire auprès du gouvernement syrien, parce que cela nous a semblé un bon signe sur le chemin de l'apaisement. Tant qu'il y aura ces signes positifs de la part de la Syrie, en effet, nous parlerons avec elle. C'est un début. J'espère ne pas me tromper, mais dans cette région du monde, les renversements et les surprises, les mauvaises surprises sont fréquentes. Heureusement les communautés libanaises se sont parlées pendant le week-end à la Celle Saint-Cloud. Cela a donné une sorte d'espoir, surtout aux Libanais. Ce sont eux qui sont concernés, pas nous. Je crois que la situation au Liban est très grave et que l'étape suivante, s'ils n'arrivent pas à s'entendre, c'est la guerre, à nouveau.
Q - Est-ce que vous êtes d'accord avec votre homologue, M. Massimo d'Alema, que l'isolement du Hamas pousse ce mouvement dans les bras de Al Qaeda ?
R - Je suis souvent d'accord avec mon ami Massimo d'Alema. Mais là, je ne le suis pas. La politique, si elle se poursuivait, d'isolement de la population palestinienne, à Gaza constitue en effet un risque grave. C'est vrai. Maintenant, je crois que le Hamas n'a pas attendu cette extrémité, la situation terrible de Gaza maintenant, pour avoir des contacts avec Al Qaeda. Et ce serait peut-être trop simple de penser que nous en sommes responsables, nous la communauté internationale. Mais je prends très au sérieux la question soulevée par Massimo d'Alema. Il ne faut pas laisser les Palestiniens dans cette situation à Gaza. Maintenant, n'accusons pas les Occidentaux d'être responsables des liens que les organisations extrémistes entretiennent entre elles.
Q - Est-ce que vous pensez qu'un compromis avec les Russes, à New York, sur le Kosovo, est encore possible ? Si oui, vous êtes prêts à attendre combien de temps, et à aller jusqu'où pour avoir un compromis ?
R - J'espère qu'il y aura un compromis avec les Russes sur la quatrième résolution qui a été écrite à New York. Mais j'en doute beaucoup. Je l'espère, mais malgré toutes les concessions qui ont été faites, malgré tous les changements, non seulement de style, mais aussi de fond, malgré l'ouverture de la résolution, qui ne débouche pas sur l'indépendance, qui ne débouche pas sur le plan Ahtisaari, il semble que les Russes ne soient pas d'accord pour la signer. Dans ces conditions, il n'y aura pas d'entente sur une résolution, et donc sans doute pas de résolution. Alors s'ouvrira une période de négociations, comme cela était prévu. Cette période de négociations sera sans doute de quelques mois, puisqu'on avait dit quatre mois. J'espère qu'entre les Serbes et les Albanais du Kosovo, il y aura une possibilité d'entente. C'est ce qui a été décidé par les Cinq et également l'Union européenne, après beaucoup d'heures de discussions. J'espère que ce sera positif. Je l'espère fortement. Tout dépend des Russes.
Q - Si la situation entre la Russie et l'Angleterre reste bloquée, pensez-vous à des solutions comme le procès de Lugovoi dans un troisième pays par exemple ?
R - Je ne sais pas. Je ne sais pas du tout. La situation, j'espère, ne restera pas bloquée. Il suffirait pour cela que les Russes se rendent compte qu'il ne s'agit pas d'un procès qui leur est fait à eux, mais simplement de la justice démocratique qui suit son cours.
Lorsqu'un citoyen britannique a été assassiné sur le sol britannique, lorsqu'il y a des soupçons, on entame une enquête et ce n'est pas destiné à donner de la Russie une image péjorative. Ce n'est pas destiné à une charge contre le peuple russe, non, c'est la justice habituelle d'un régime démocratique.
J'espère que cela passera.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 19 juillet 2007