Déclaration de Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville, sur son attachement au livret A comme moyen d'épargne populaire et comme moyen pour financer le logement social, Lyon le 18 septembre 2007.

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Circonstance : Dîner du groupe Caisse d'épargne à Lyon le 18 septembre 2007.

Texte intégral

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,
Chers Amis,

Je tenais avant tout à vous remercier pour votre invitation et pour avoir également associé à ce dîner, l'essentiel de mes conseillers présents ce soir à Lyon.
Comme vous le savez, depuis hier, et jusqu'au 28 septembre, nous sommes installés dans des algécos sur la place Bellecour. Stendhal trouvait cette place lugubre parce qu'habitée par une population, « fort dévote et peu gaie ». D'ailleurs, l'animation qui y règne depuis quelques heures autour de nous, en est en tout cas un désaveu flagrant. Je veux croire que, pour votre part, vous serez sensibles au fait que j'ai élu domicile dans la ville natale de son contemporain, Benjamin DELESSERT, le fondateur de la première caisse d'épargne en France.
Depuis sa création en 1818, La Caisse d'épargne est devenue un groupe bancaire d'envergure international, multi-métiers et multi-enseignes et je suis heureuse de vous retrouver ce soir pour évoquer avec vous les grands défis qui attendent notre pays en matière de logement .

Les objectifs fixés par le Président de la République et déclinés par le Premier ministre, lors de sa déclaration de politique générale, sont sans précédent :

  • Il s'agit de construire 500.000 logements nouveaux par an, dont 120.000 logements sociaux.
  • Il s'agit également de promouvoir une France de propriétaires : avec l'objectif d'atteindre rapidement le chiffre de 70% de propriétaires (avec un moyen parmi d'autres : 40 000 locataires de logement HLM doivent pouvoir devenir propriétaires de leur habitation).

Derrière ces chiffres, il y a surtout les besoins des hommes et des femmes de ce pays qui sont gigantesques. Les problèmes de logement touchent en effet tous les Français. Nos compatriotes ne peuvent plus se loger que dans des conditions de confort et de coût inacceptables.
Sans parler de ceux, de plus en plus nombreux, qui n'ont tout simplement plus de toit. Nous ne pouvons pas nous y résigner
La crise du logement - j'en suis convaincue - met en péril l'équilibre de notre République et la cohésion de notre société.
Afin d'afficher ma totale détermination à relever le défi du logement, j'ai décidé de décentraliser une partie de mon ministère à Lyon, non pas pour en faire un gadget mais pour y rencontrer et y mobiliser tous les grands acteurs du Monde du Logement. A-delà des organismes HLM, des notaires ou des promoteurs constructeurs qui y tiennent leur congrès, ce sont pas moins d'une trentaine organismes, publics, privés ou associatifs qui ont en effet accepté de participer activement à ce grand Chantier national en organisant à Lyon une réunion de leurs instances.
Jules Siegfried, le père de la politique du logement en France, disait il y a plus d'un siècle « Laissons donc de côté les hypothèses et les utopies, faisons de la science sociale expérimentale ». C'est d'une certaine manière, ce que je suis venue faire ici pendant 15 jours, avec vous et grâce à vous.
Chacun des membres de ce « Groupe des 30 » a été invité à envisager les accords « transverses » qu'il serait susceptible de nouer avec d'autres partenaires et avec l'Etat. Plusieurs conventions vont aboutir et être signées, dans les jours qui viennent. Cela a commencé ce matin.
J'attends beaucoup de ce travail de « maillage » au sein du monde de logement pour parvenir à atteindre nos objectifs car, je suis un ministre qui croit moins aux déclarations d'intention et aux solennités législatives, qu'au travail concret qui commence par la mise en marche de l'existant.

Ce soir, j'ai essentiellement un message à vous adresser :
Monsieur le Président, vous venez de rappeler avec une grande force de conviction votre attachement au Livret A dont la distribution est remise en cause par une décision du 10 mai 2007 de la Commission européenne, non seulement pour votre réseau, mais aussi pour ceux de la Banque Postale et du Crédit Mutuel.
Vous savez fort bien que parallèlement aux contentieux nationaux en cours au Conseil d'Etat sur la même question, l'Etat français a déposé un recours devant la Commission. De plus, nous attendons dans le courant de cet automne les fruits imminents de la réflexion de la mission de Michel CAMDESSUS, que j'ai encore reçu, il y a quelques jours, pour faire un point d'étape avec lui.
Il est clair que vos 3 millions 100 000 actionnaires verraient d'un mauvais oeil la perte de 5 % de votre chiffre d'affaires à long terme et j'en ai parfaitement conscience. Cela serait encore pire pour la Banque Postale pour laquelle les revenus du livret A représentent 17 % de son produit bancaire. Vous pouvez être certain que j'examinerai très attentivement et avec une vigilance à la hauteur des enjeux colossaux pour nos 46 millions de Français attachés au Livret A, toute évolution qui aurait pour conséquence le moindre déséquilibre du financement du logement social.
Vous savez parfaitement combien je demeurerai attentive aux conditions de bancarisation des populations défavorisées, puisque le livret A et le livret Bleu sont utilisés comme unique compte bancaire par environ 660 000 de nos concitoyens.
Le contraire annihilerait une partie de mes efforts en faveur du développement et de l'amélioration du parc locatif social.
Vous pouvez donc compter sur ma totale vigilance sur ces questions.
Monsieur le Président, je ne serai pas plus longue pour laisser à vos invités le temps de se retrouver et d'échanger. Je veux simplement vous redire à quel point votre présence et votre rôle sont essentiels à ce qu'il est convenu d'appeler le « modèle social français ». sans doute ce dernier est-il perfectible ; sans doute doit-il être adapté aux réalités nouvelles, sans doute doit-il être ouvert au meilleur de ce que d'autres modèles peuvent nous apporter. Mais il reste pour longtemps sans doute, la référence indispensable qui fait consensus dans notre pays.
Pour la part que vous y prenez, pour l'impulsion que vous lui donnez, je tiens à vous exprimer ma reconnaissance et à vous remercier de l'initiative que vous avez prise d'organiser, ce soir à Lyon, ce dîner auquel encore une fois, je suis très heureuse de participer.

Source http://www.reunions-de-chantier.org, le 21 septembre 2007