Texte intégral
Q - Ma première question concerne bien sûr la Birmanie: les choses ont l'air de se compliquer du côté de Rangoon puisque, ce matin, la police a chargé des manifestants. Que faut-il faire aujourd'hui ? Que doivent faire l'Union européenne et la France dans ce dossier ?
R - La situation empire et nous devons, avec nos partenaires européens, exercer la plus grande vigilance et la plus grande pression sur les autorités de Rangoun. Il faut leur faire savoir que ce qui se passe est inacceptable. Nous devons discuter entre Européens sur la nécessité de renforcer des sanctions à l'encontre de la junte. Nous devons également faire savoir à tout officiel birman qu'il sera tenu personnellement responsable de toutes les exactions qui seront commises à l'égard de la population. Nous l'avons fait savoir hier à Paris au chargé d'affaires birman.
Comme vous le savez, le président Sarkozy recevra aujourd'hui des représentants de l'opposition à la junte birmane. Nous ferons tout pour exercer ces pressions vis-à-vis des autorités birmanes qui ont un comportement totalement contraire aux valeurs européennes et françaises.
Q - Les choses peuvent-elles aller vite ? Washington a déjà pris de nouvelles sanctions, on parle de décisions de l'Union européenne le 15 octobre, n'est-ce pas un peu tard ?
R - Il y aura des décisions de l'Union européenne qui seront prises rapidement, il y a eu des initiatives prises par Gordon Brown et il y en aura de M. Solana qui, comme vous le savez, est le représentant pour les affaires étrangères de l'Union européenne.
Q - Les opposants que Nicolas Sarkozy recevra aujourd'hui à l'Elysée demandent précisément des sanctions pour tenter de peser sur le régime de la junte. Pensez-vous qu'aujourd'hui, la position de la France est tenable par rapport à la Birmanie ? Je pense surtout à la présence de l'entreprise Total dans ce pays. La France devrait-elle envoyer un signal en demandant à Total de stopper ses activités ?
R - Total, c'est Total. La position du gouvernement français est celle du gouvernement français, la position de ce gouvernement est très intransigeante à l'égard des autorités birmanes et, comme je vous l'ai dit, chaque officiel birman sera tenu pour responsable - nous l'avons dit au chargé d'affaires birman - des exactions et des souffrances que subira la population dont la révolte est tout à fait légitime.
Q - Le président de la République préside le Conseil de sécurité de l'ONU, peut-il avoir une influence en demandant par exemple, des sanctions sur la position de la Chine ?
R - Concernant la position de la Chine qui est également membre permanent du Conseil de sécurité de l'ONU, nous devons avoir des discussions dans ce cadre comme dans le cadre de l'Union. Mais, ce n'est pas l'urgence, l'urgence concerne la situation birmane.
Q - Passons à une autre actualité qui est la vôtre, on va maintenant parler des brevets, nous sommes six années après, le projet de loi arrive aujourd'hui devant l'Assemblée. Il est question de ratifier le fameux protocole de Londres.
En deux mots, pour rappel, on est aujourd'hui obligé de traduire les brevets en 23 langues, avec ce protocole, on aura le choix entre 3 langues, le Français, l'Anglais et l'Allemand. Il y a les " pour " et les " contre ", et aujourd'hui, vous défendez ce protocole de Londres. Faut-il le signer ?
R - Je le défends avec Valérie Pécresse et Hervé Novelli.
Le Protocole de Londres porte mal son nom puisqu'il a été signé à Paris en 1999. C'est un protocole sur lequel ont travaillé des gouvernements de gauche et de droite et cela tout à fait légitimement : il vise à renforcer le français comme langue officielle dans tous les domaines, scientifiques, juridiques et technologiques. Il renforce la recherche, l'innovation, tout ce que nous souhaitons faire et il renforce la capacité de nos petites et moyennes entreprises à déposer des brevets en langue française en Europe.
Le français sera reconnu comme langue officielle dans tous ces domaines. C'est donc un progrès considérable, à la fois sur le plan linguistique et sur le plan de la recherche.
Q - Certains disent quand que non seulement cela s'appelle le protocole de Londres, mais qu'en plus c'est la porte ouverte au "tout anglais" et la disparition assurée du français.
R - Si nous ne signons pas le Protocole de Londres, si nous le ratifions pas, ce qui nous pend au nez, c'est le tout anglais et c'est le fait qu'un certain nombre de pays choisiront de déposer tous leurs brevets, de les faire et de les éditer en anglais uniquement.
Nous avons donc le choix entre le tout anglais, ou bien faire en sorte de renforcer le français comme langue officielle de dépôt et d'en faire une langue qui soit sûre sur le plan juridique.
Q - Et comment convaincre les entreprises qui disent que cela va coûter cher ?
R - Non, nous réduisons les coûts du dépôt de brevet car, aujourd'hui, nous sommes obligés de traduire en vingt-trois langues l'ensemble des brevets.
Il y aura une réduction des coûts d'environ 30 %, à la fois pour les grandes entreprises, qui le demandent, et pour les PME.
Je note que les organisations représentatives des entreprises, que ce soit le MEDEF ou la CGPME, représentante des petites et moyennes entreprises, l'ont demandé.
Q - Le budget, les socialistes disent ce matin qu'il n'est pas sincère. Il est présenté au Conseil des ministres. On dit que c'est un budget de rigueur, d'austérité, pourtant, c'est un terme que Nicolas Sarkozy réfute totalement. Il paraît aujourd'hui que Bruxelles envisage une recommandation politique sur cette question du budget ?
R - Comme vous le dites en effet, le budget est présenté aujourd'hui et il appartient à Mme Lagarde de le soumettre et d'en donner les grandes lignes. Je ne ferai donc pas de commentaire sur la structure du budget.
Concernant les grandes lignes, au-delà des mots, le Premier ministre s'est exprimé. Nous devons maîtriser les dépenses publiques, nous devons respecter nos engagements européens et de ce point de vue-là, le Premier ministre a parfaitement raison.
Q - Avec ce budget, allons-nous "nous faire taper sur les doigts" par Bruxelles ?
R - Si nous respectons nos engagements européens, il n'y a pas de raison que l'on se fasse taper sur les doigts. Bruxelles sait que nous devons, en même temps, maîtriser les dépenses publiques, faire des réformes importantes de gestion publique et le Premier ministre l'a affirmé, la situation est grave en ce qui concerne les finances publiques. Nous devons en même temps stimuler le travail, l'activité, libérer les initiatives. Pour cela, il faut conduire des réformes qui mènent la France au meilleur standard européen et international.
Nous devons avoir un dialogue avec Bruxelles -qui doit être compréhensif- sur l'effort de réformes qui n'a jamais été aussi important en France, ainsi que l'ont rappelé le président de la République et le Premier ministre.
Q - Un autre dossier qui se négocie également avec l'Union européenne :
La Turquie. Où en est-on ? Vous indiquez que vous êtes favorable à la suppression d'un référendum automatique, alors concrètement, comment les choses peuvent-elles se passer ?
R - Je suis favorable à ce que l'on laisse au président de la République, à qui il appartiendra de décider en dernier ressort, d'avoir le choix entre, d'une part le recours au référendum et d'autre part, le recours à la ratification parlementaire.
Q - Sachant qu'aujourd'hui, cette situation que vous décrivez est bloquée.
R - Aujourd'hui, sur le plan de la Constitution, nous avons une automaticité du recours au référendum pour toute adhésion. Je prendrai deux exemples : admettons que demain - ce qui n'est pas le cas je le précise -, un pays comme la Suisse ou la Norvège souhaite adhérer à l'Union européenne, il n'y a pas de problème fondamental pour les Français quant à l'adhésion de ces deux pays.
Q - En revanche, pour la Turquie, cela pose un problème.
R - Oui, si vous avez le choix, vous appréciez en fonction des circonstances et de l'importance des pays, ce que vous pouvez faire en terme de procédure de ratification. Pour le Royaume-Uni en 1972, il y a eu un référendum. Pour les grands pays, vous pouvez donc éventuellement l'envisager et pour la Turquie, ce que je constate, c'est que nous avons du temps. Nous avons maintenant un processus qui est engagé sur deux voies de négociation, celle du partenariat privilégié et celle de l'adhésion. Les propositions du président de la République sont connues, mais, ainsi que l'a indiqué Bernard Kouchner hier, nous ne bloquons pas le processus.
Q - Et d'un mot, Monsieur Jouyet, cela ne signifie pas que nous allons vers un infléchissement de la position de Nicolas Sarkozy sur la Turquie pour des raisons à la fois d'isolement politique peut-être au sein de l'Union et, aussi, pour des raisons économiques ?
R - Pour l'avoir écouter, il n'y a pas d'infléchissement de la position du président de la République, je peux vous le garantir. Mais nous sommes également pragmatiques et nous souhaitons aller le plus loin possible dans les négociations. Nous verrons ensuite ce qui en sortira et la meilleure voie à choisir : pour nous, comme vous le savez, c'est celle du partenariat privilégié. Mais nous avançons et c'est l'essentiel. Nous l'avons également expliqué à nos amis turcs.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 28 septembre 2007
R - La situation empire et nous devons, avec nos partenaires européens, exercer la plus grande vigilance et la plus grande pression sur les autorités de Rangoun. Il faut leur faire savoir que ce qui se passe est inacceptable. Nous devons discuter entre Européens sur la nécessité de renforcer des sanctions à l'encontre de la junte. Nous devons également faire savoir à tout officiel birman qu'il sera tenu personnellement responsable de toutes les exactions qui seront commises à l'égard de la population. Nous l'avons fait savoir hier à Paris au chargé d'affaires birman.
Comme vous le savez, le président Sarkozy recevra aujourd'hui des représentants de l'opposition à la junte birmane. Nous ferons tout pour exercer ces pressions vis-à-vis des autorités birmanes qui ont un comportement totalement contraire aux valeurs européennes et françaises.
Q - Les choses peuvent-elles aller vite ? Washington a déjà pris de nouvelles sanctions, on parle de décisions de l'Union européenne le 15 octobre, n'est-ce pas un peu tard ?
R - Il y aura des décisions de l'Union européenne qui seront prises rapidement, il y a eu des initiatives prises par Gordon Brown et il y en aura de M. Solana qui, comme vous le savez, est le représentant pour les affaires étrangères de l'Union européenne.
Q - Les opposants que Nicolas Sarkozy recevra aujourd'hui à l'Elysée demandent précisément des sanctions pour tenter de peser sur le régime de la junte. Pensez-vous qu'aujourd'hui, la position de la France est tenable par rapport à la Birmanie ? Je pense surtout à la présence de l'entreprise Total dans ce pays. La France devrait-elle envoyer un signal en demandant à Total de stopper ses activités ?
R - Total, c'est Total. La position du gouvernement français est celle du gouvernement français, la position de ce gouvernement est très intransigeante à l'égard des autorités birmanes et, comme je vous l'ai dit, chaque officiel birman sera tenu pour responsable - nous l'avons dit au chargé d'affaires birman - des exactions et des souffrances que subira la population dont la révolte est tout à fait légitime.
Q - Le président de la République préside le Conseil de sécurité de l'ONU, peut-il avoir une influence en demandant par exemple, des sanctions sur la position de la Chine ?
R - Concernant la position de la Chine qui est également membre permanent du Conseil de sécurité de l'ONU, nous devons avoir des discussions dans ce cadre comme dans le cadre de l'Union. Mais, ce n'est pas l'urgence, l'urgence concerne la situation birmane.
Q - Passons à une autre actualité qui est la vôtre, on va maintenant parler des brevets, nous sommes six années après, le projet de loi arrive aujourd'hui devant l'Assemblée. Il est question de ratifier le fameux protocole de Londres.
En deux mots, pour rappel, on est aujourd'hui obligé de traduire les brevets en 23 langues, avec ce protocole, on aura le choix entre 3 langues, le Français, l'Anglais et l'Allemand. Il y a les " pour " et les " contre ", et aujourd'hui, vous défendez ce protocole de Londres. Faut-il le signer ?
R - Je le défends avec Valérie Pécresse et Hervé Novelli.
Le Protocole de Londres porte mal son nom puisqu'il a été signé à Paris en 1999. C'est un protocole sur lequel ont travaillé des gouvernements de gauche et de droite et cela tout à fait légitimement : il vise à renforcer le français comme langue officielle dans tous les domaines, scientifiques, juridiques et technologiques. Il renforce la recherche, l'innovation, tout ce que nous souhaitons faire et il renforce la capacité de nos petites et moyennes entreprises à déposer des brevets en langue française en Europe.
Le français sera reconnu comme langue officielle dans tous ces domaines. C'est donc un progrès considérable, à la fois sur le plan linguistique et sur le plan de la recherche.
Q - Certains disent quand que non seulement cela s'appelle le protocole de Londres, mais qu'en plus c'est la porte ouverte au "tout anglais" et la disparition assurée du français.
R - Si nous ne signons pas le Protocole de Londres, si nous le ratifions pas, ce qui nous pend au nez, c'est le tout anglais et c'est le fait qu'un certain nombre de pays choisiront de déposer tous leurs brevets, de les faire et de les éditer en anglais uniquement.
Nous avons donc le choix entre le tout anglais, ou bien faire en sorte de renforcer le français comme langue officielle de dépôt et d'en faire une langue qui soit sûre sur le plan juridique.
Q - Et comment convaincre les entreprises qui disent que cela va coûter cher ?
R - Non, nous réduisons les coûts du dépôt de brevet car, aujourd'hui, nous sommes obligés de traduire en vingt-trois langues l'ensemble des brevets.
Il y aura une réduction des coûts d'environ 30 %, à la fois pour les grandes entreprises, qui le demandent, et pour les PME.
Je note que les organisations représentatives des entreprises, que ce soit le MEDEF ou la CGPME, représentante des petites et moyennes entreprises, l'ont demandé.
Q - Le budget, les socialistes disent ce matin qu'il n'est pas sincère. Il est présenté au Conseil des ministres. On dit que c'est un budget de rigueur, d'austérité, pourtant, c'est un terme que Nicolas Sarkozy réfute totalement. Il paraît aujourd'hui que Bruxelles envisage une recommandation politique sur cette question du budget ?
R - Comme vous le dites en effet, le budget est présenté aujourd'hui et il appartient à Mme Lagarde de le soumettre et d'en donner les grandes lignes. Je ne ferai donc pas de commentaire sur la structure du budget.
Concernant les grandes lignes, au-delà des mots, le Premier ministre s'est exprimé. Nous devons maîtriser les dépenses publiques, nous devons respecter nos engagements européens et de ce point de vue-là, le Premier ministre a parfaitement raison.
Q - Avec ce budget, allons-nous "nous faire taper sur les doigts" par Bruxelles ?
R - Si nous respectons nos engagements européens, il n'y a pas de raison que l'on se fasse taper sur les doigts. Bruxelles sait que nous devons, en même temps, maîtriser les dépenses publiques, faire des réformes importantes de gestion publique et le Premier ministre l'a affirmé, la situation est grave en ce qui concerne les finances publiques. Nous devons en même temps stimuler le travail, l'activité, libérer les initiatives. Pour cela, il faut conduire des réformes qui mènent la France au meilleur standard européen et international.
Nous devons avoir un dialogue avec Bruxelles -qui doit être compréhensif- sur l'effort de réformes qui n'a jamais été aussi important en France, ainsi que l'ont rappelé le président de la République et le Premier ministre.
Q - Un autre dossier qui se négocie également avec l'Union européenne :
La Turquie. Où en est-on ? Vous indiquez que vous êtes favorable à la suppression d'un référendum automatique, alors concrètement, comment les choses peuvent-elles se passer ?
R - Je suis favorable à ce que l'on laisse au président de la République, à qui il appartiendra de décider en dernier ressort, d'avoir le choix entre, d'une part le recours au référendum et d'autre part, le recours à la ratification parlementaire.
Q - Sachant qu'aujourd'hui, cette situation que vous décrivez est bloquée.
R - Aujourd'hui, sur le plan de la Constitution, nous avons une automaticité du recours au référendum pour toute adhésion. Je prendrai deux exemples : admettons que demain - ce qui n'est pas le cas je le précise -, un pays comme la Suisse ou la Norvège souhaite adhérer à l'Union européenne, il n'y a pas de problème fondamental pour les Français quant à l'adhésion de ces deux pays.
Q - En revanche, pour la Turquie, cela pose un problème.
R - Oui, si vous avez le choix, vous appréciez en fonction des circonstances et de l'importance des pays, ce que vous pouvez faire en terme de procédure de ratification. Pour le Royaume-Uni en 1972, il y a eu un référendum. Pour les grands pays, vous pouvez donc éventuellement l'envisager et pour la Turquie, ce que je constate, c'est que nous avons du temps. Nous avons maintenant un processus qui est engagé sur deux voies de négociation, celle du partenariat privilégié et celle de l'adhésion. Les propositions du président de la République sont connues, mais, ainsi que l'a indiqué Bernard Kouchner hier, nous ne bloquons pas le processus.
Q - Et d'un mot, Monsieur Jouyet, cela ne signifie pas que nous allons vers un infléchissement de la position de Nicolas Sarkozy sur la Turquie pour des raisons à la fois d'isolement politique peut-être au sein de l'Union et, aussi, pour des raisons économiques ?
R - Pour l'avoir écouter, il n'y a pas d'infléchissement de la position du président de la République, je peux vous le garantir. Mais nous sommes également pragmatiques et nous souhaitons aller le plus loin possible dans les négociations. Nous verrons ensuite ce qui en sortira et la meilleure voie à choisir : pour nous, comme vous le savez, c'est celle du partenariat privilégié. Mais nous avançons et c'est l'essentiel. Nous l'avons également expliqué à nos amis turcs.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 28 septembre 2007