Déclaration de Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville, sur l'accession sociale à la propriété, la faible disposition de foncier constructible ainsi que sur l'exigence de la qualité de la construction, Villeurbanne le 27 septembre 2007.

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Circonstance : Signature de l'avenant à la convention sur Pass Foncier, dans les locaux de la Fédération Française du Bâtiment du Rhône, à Villeurbanne le 27 septembre 2007.

Texte intégral

Monsieur le Préfet,
Mesdames et Messieurs les Maires,
Messieurs les représentants des partenaires sociaux du 1 % réunis au sein de l'UESL, Messieurs Jean-Luc BERHO et Etienne GUENA
Monsieur le représentant de la Caisse des dépôts, Monsieur Philippe BRAIDY
Mesdames et Messieurs ,
Chers amis,

J'ai engagé le Chantier national pour le logement en installant mon ministère à Lyon pendant 15 jours. Nous tenons une réunion de ce Chantier aujourd'hui dans les bâtiments de la Fédération Française du Bâtiment à Villeurbanne. C'est d'ailleurs la deuxième réunion qui se déroule dans ces locaux puisque la semaine dernière, j'ai signé avec le président, Monsieur Christian BAFFY, une Charte d'engagement pour la mobilisation des entreprises de bâtiment pour répondre à l'objectif de construction de 500 000 logements défini par le Président de la République.
La Réunion de Chantier que nous tenons aujourd'hui est aussi très importante. Je suis d'ailleurs heureuse que tant de personnes aient répondu présent à cette invitation. Je vois là un signe d'engagement fort de tous les partenaires.
Les partenaires signataires de la Charte bien sûr, l'Etat, la Caisse des dépôts et consignation ainsi que les partenaires sociaux du 1 % logement. Les partenaires sont aussi les maires qui jouent un rôle de premier plan dans la politique du logement et, plus largement, dans la politique sociale de leur territoire.
La politique du logement est, au sein des communes, une préoccupation de premier ordre. Sur ce front, les maires sont en première ligne. Leurs permanences sont assaillies par les ménages qui cherchent un logement parce qu'ils sont mal logés ou souhaitent évoluer dans leur parcours d'habitation. Les habitants ont raison de s'adresser à leur premier élu, leur élu de proximité.
En effet, c'est bien lui qui détient aujourd'hui les clefs de la construction, de l'élaboration des règles d'urbanisme avec le plan local d'urbanisme (le PLU) aux lotissements et aux ZAC (zones d'aménagements concertées), de la délivrance des permis de construire au droit de préemption sur les terrains et les logements. Le maire est aussi celui qui détient les pouvoirs de police et qui, à ce titre, prend les arrêtés de périls, si importants pour toutes les politiques de lutte contre l'habitat indigne. Pour compléter cette liste qui ne saurait être exhaustive, ce sont aussi les élus qui administrent les Offices Publics de l'Habitat.
Aucune politique du logement et de l'habitat ne peut se faire sans les maires.
Ils participent largement à une offre de logements diversifiée sur leur territoire et à la gestion de proximité dont on connaît l'importance, notamment pour nos quartiers fragiles.
Ces compétences demeurent même quand l'intercommunalité devient responsable en matière d'habitat ou de délégation des aides à la pierre. Je tiens d'ailleurs à vous dire que je soutiens la décentralisation dans le domaine du logement qui doit permettre de gagner en efficacité pour la production de logements en quantité et en qualité.
Nous le savons tous, les tensions sur le logement et les dynamiques ne sont pas les mêmes sur l'ensemble du territoire national. J'illustre mes propos avec trois régions, l'Ile-de-France, la région Rhône-Alpes et la Bretagne. Leur population est respectivement de 11,5 millions d'habitants, 6 et 3 millions. Le nombre de logements commencés en 2006 a été de 37 000, 47 000 et 35 000. Le nombre de construction pour 1 000 habitants est donc d'environ 2 pour l'Ile-de-France, 8 ici, en Rhône-Alpes, et 11 en Bretagne. Un tel contraste dans l'effort de construction ne peut conduire qu'à des tensions fortes sur les marchés déjà les plus tendus. Tous les ménages en pâtiront, en premier lieu les plus fragiles.
Alors, si je suis pour la décentralisation, je considère que la délégation ne doit pas se faire à n'importe quel prix. S'il n'y a pas de résultats satisfaisants, nous devrons en tirer les conséquences.

Vous connaissez, j'en suis sûre, les grandes orientations de l'engagement national pour le logement, définis par le Président de la République. Nous voulons :

  • Promouvoir une France de propriétaires. Il faut atteindre le chiffre de 70% de propriétaires en France, avec comme moyen parmi d'autres le fait que 40 000 locataires de logement HLM deviennent propriétaires de leur habitation.
  • Il s'agit aussi d'intensifier notre politique de construction, en produisant 500 000 logements neufs par an, et parmi ces 500 000 logements, 120 000 logements sociaux.

Et je vous le rappelle, la France s'est aussi engagée dans la mise en oeuvre du droit au logement opposable pour que cesse ce scandale qui fait que, dans notre pays, des hommes, des femmes et des enfants ne trouvent n'ont pas de toit.
Cette ambition nationale doit se mettre en oeuvre au niveau local. Ce sont les réalisations locales les unes à côté des autres qui feront le succès de notre politique.

Comment les maires peuvent-ils participer à l'effort national ?

  • Il y a tout d'abord les outils pour l'accession sociale à la propriété,
  • Plus largement, les maires doivent mettre à disposition du foncier constructible,
  • Finalement, je souhaite aborder avec vous la qualité de la construction car nous devons construire du beau tout en en maîtrisant le coût.

Sur l'accession sociale à la propriété
Aujourd'hui, nous allons signer une convention importante entre l'Etat, la Caisse des dépôts et consignations et les partenaires sociaux du 1% logement réunis au sein de l'UESL (l'Union d'Economie Sociale pour le Logement), une convention d'engagement pour améliorer et développer le Pass-Foncier qui bénéficiera de la même fiscalité favorable que les opérations neuves en PSLA (prêt social location-accession), c'est à dire la TVA à 5,5 % et l'exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) de 15 ans.
Le dispositif sera aussi applicable pour l'acquisition d'appartements dans des logements collectifs, permettant ainsi que favoriser la mixité sociale au coeur de nos villes.
Je tiens à remercier vivement les partenaires pour leur engagement dans cette démarche.
Je veux encourager les formules d'accession sécurisée très sociale, comme celles du Pass-Foncier et du PSLA qui offrent des garanties de rachat du bien ou de relogement pour les ménages qui ne peuvent pas aller jusqu'au bout de leur projet d'accession.
Je travaille actuellement à d'autres formules d'accession sécurisée pour les ménages à revenus irréguliers sur les bases du rapport Vorms - Taffin.
Ces différentes mesures viennent compléter d'autres mesures existantes.
Tout d'abord, le nouveau crédit d'impôts sur les intérêts d'emprunts cumulé avec le prêt à taux zéro, le PTZ servent de base à l'accession sociale à la propriété. Je veux d'ailleurs dissiper une crainte et je vous confirme que le prêt à taux zéro n'est nullement remis en cause. Le PTZ touche aujourd'hui chaque année 250 000 primo-accédants dans le neuf comme dans l'ancien, il est incontournable pour atteindre l'objectif de 70% de propriétaires, fixé par le Président de la République.
Ces mesures ne pourront se développer qu'avec l'engagement des élus locaux.
Comme vous le savez, le Pass-Foncier comme le PTZ majoré, supposent une intervention financière préalable d'une collectivité territoriale, en particulier les communes et leurs groupements. Il faut donc qu'elles s'impliquent dans ces dispositifs.
Cette implication doit se faire à deux niveaux : d'abord en ouvrant les terrains à l'urbanisation pour permettre des constructions, ensuite en contribuant par des moyens financiers.
Ces dispositifs ne pourront trouver des clients que s'ils sont connus et reconnus. Je demanderai à ce que la plus large information soit faite par mes services.
L'écho ne portera que si cette communication est portée en même temps et relayée par l'ensemble des élus.
En signant cette convention, nous avons franchi une première étape. Elle était déjà difficile. Maintenant, nous devons la mettre en oeuvre. Chacun d'entre nous, partenaires de cette démarche, doit s'impliquer pour y parvenir.
Sur la question du foncier
Tout d'abord, nous savons tous que l'une des difficultés pour construire aujourd'hui tient à la trop faible disposition de foncier constructible.
Les collectivités doivent mettre tout en oeuvre pour mobiliser du foncier. Les documents d'urbanisme, par exemple, doivent être de véritables documents de projet de développement de l'habitat portés par un projet de développement du territoire. Les plans locaux d'urbanisme, les PLU, doivent être ambitieux dans le développement de terrains pour le logement. Nous ne devons pas nous résoudre à avoir des politiques malthusiennes qui asphyxient nos villes.
Je rappelle aussi que la loi portant engagement national pour le logement (ENL) du 13 juillet 2006 permet aux communes qui le souhaitent de majorer la taxe foncière sur les terrains non bâtis pour lutter contre la rétention foncière. Cette loi permet aussi, à l'initiative de la commune, qu'une partie de la plus-value dégagée lors du classement de terrains agricoles en terrains constructibles revienne à la collectivité pour lui permettre de mieux financer les charges d'aménagement liées à l'urbanisation. Ces dispositions volontaires sont aujourd'hui peu utilisées.
Cela ne vous a probablement pas échappé, je n'ai pas en charge l'urbanisme qui dépend du Ministère de l'écologie, de l'aménagement et du développement durable, le MEDAD.
Construire des logements sans maîtriser les règles d'urbanisme : c'est, pour moi, une difficulté supplémentaire. La révision générale des politiques publiques, la RGPP abordera ce point. Il me semble pour ma part que le ministère du logement devrait, pour conduire la politique de l'habitat, être en charge des règles d'urbanisme.
Quand je parle d'effort national, je pense aussi par exemple aux particuliers qui refusent que des constructions se fassent à proximité de chez eux. Il faut rappeler chacun à ses responsabilités. Je compte sur vous pour faire oeuvre de pédagogie ! Pour ma part, je mettrai tout mon poids politique pour faire changer les mentalités.
Sur l'exigence de la qualité de la construction.
La qualité, c'est la qualité technique tout autant que la qualité esthétique des bâtiments. Elle a un coût mais elle peut permettre de faire des économies à long terme.
C'est vrai pour la maîtrise de l'énergie dans les bâtiments. C'est vrai aussi pour les aspects d'accessibilité. Il faut raisonner en coût global de l'habitat, en prenant en compte les coûts d'investissement et les coûts de fonctionnement.
Je comprends qu'on puisse rechigner à investir dans ce domaine en se disant qu'après tout on ne sait pas pour combien de temps, que c'est peut être un autre que soi qui en profitera. Cependant, le bon sens devrait nous pousser à être prévoyants et à adapter les logements en tout état de cause.
Penser tout de suite à l'accessibilité ou anticiper la pose de gaines pour le très haut débit coûte tellement moins cher que réaliser des travaux a posteriori.
Je sais que la réglementation est parfois lourde, complexe. Je n'ai donc pas - rassurez-vous - l'intention d'en rajouter mais je vous invite à expérimenter, à innover dans une démarche volontaire en ayant une approche globale de la conception des logements, susceptible d'en améliorer le confort tout en maîtrisant les coûts.
Mesdames, Messieurs,
Le Chantier national pour le logement doit permettre de remettre en mouvement toute la chaîne du logement, cette chaîne de solidarité qui va de la personne aujourd'hui sans domicile au cadre supérieur. Je veux tout d'abord que cesse ce scandale qui fait qu'aujourd'hui des hommes, des femmes et des enfants de notre pays ne sont pas logés. Je veux aussi permettre à chacun de pouvoir choisir librement son logement en accession ou en location.
Je suis le Ministre du logement et de la ville, pas seulement Ministre du logement social. Je suis le Ministre de tous les logements, garant de la solidité de toute la chaîne du logement.
La solidité d'une chaîne se mesure à la force de son plus faible maillon. En signant aujourd'hui l'avenant à la convention du Pass-Foncier, nous renforçant le chaînon de l'accession très sociale à la propriété. Nous contribuons donc aujourd'hui à renforcer ainsi toute la chaîne du logement.
Je vous remercie.

Source http://www.reunions-de-chantier.org, le 28 septembre 2007