Déclaration de M. Luc Chatel, secrétaire d'Etat chargé de la consommation et du tourisme, sur l'engagement de la filière de la restauration pour la qualité et le goût des produits alimentaires, et son influence sur le développement de la fréquentation touristique, Paris le 2 novembre 2007.

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Circonstance : Rencontre Eurotoques, à Paris le 2 novembre 2007

Texte intégral

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,
Je tiens d'abord à vous remercier pour votre invitation et vous dire le plaisir que j'ai à être parmi vous aujourd'hui. La perspective de profiter d'un repas succulent n'est bien sûr pas totalement étrangère à ce plaisir, je vous l'avoue ! Mais je suis aussi heureux de vous rencontrer parce que j'ai la conviction sincère, en tant que Secrétaire d'Etat chargé du tourisme, que vos ambitions rejoignent les miennes, que les intérêts que vous défendez sont aussi ceux de l'activité touristique française et européenne.
Vous défendez en effet la qualité et le goût des produits alimentaires, vous promouvez des produits sains, de qualité, et de terroir. Je sais que vous êtes très actifs auprès des institutions nationales mais surtout européennes pour les sensibiliser à cette question, je ne peux que vous encourager dans cette démarche.
Car le combat pour le goût et pour des produits de qualité est aussi un combat en faveur de notre patrimoine. Or, toutes les études le montrent, le patrimoine gustatif et gastronomique d'un pays représente un facteur d'attractivité très fort. Il est parfois même l'objet unique des voyages. Nous voyons ainsi depuis quelques années se développer le concept de voyages gastronomiques. La qualité gastronomique constitue donc, à proprement parler, un « avantage compétitif » pour nos pays. Je suis d'ailleurs persuadé qu'un chef français qui s'installent à l'étranger et qui rencontre le succès fait plus pour la France que l'exportation de 2 000 voitures !

Vous êtes dans le vrai car défendre la qualité et l'authenticité des produits n'a jamais été aussi porteur. Le Dr Jean-Michel Lecerf a évoqué son travail et le mélange original entre santé et plaisir auquel il a abouti. Il rencontre en cela des évolutions sociologiques profondes.
Nous observons en effet dans nos enquêtes que les visiteurs qui se rendent chez nous sont toujours plus sensibles à la découverte du terroir, à un tourisme « nature » au sein duquel les produits sains et de qualité ont toute leur place. Ils servent aussi de porte d'accès à la connaissance plus générale d'une région et de son histoire. L'aliment devient alors une sorte de machine à voyager dans notre pays et dans son imaginaire. Apprendre comment on se procure les aliments et qui les prépare apporte en effet une masse considérable d'informations sur le fonctionnement d'une société.
Cette tendance structurelle est bien entendu une chance pour la France et l'Europe, qui disposent d'une diversité et d'une offre sans doute incomparable dans le monde. Vous savez peut-être que l'organisation mondiale du tourisme prévoit un doublement des flux touristiques à l'échelle mondiale d'ici 2020. C'est dire si nous devrons continuer à valoriser nos atouts, y compris auprès de clientèles nouvelles dont les cultures les éloignent a priori de nos traditions gustatives et culinaires. Cela nous impose un défi : savoir rendre accessible notre savoir-faire, par exemple auprès de touristes chinois ou indiens, sans renoncer aucunement à notre authenticité. Cela demandera un travail de pédagogie et de « marketing » qu'il ne faudra pas négliger à l'avenir.
Mais la mondialisation et l'enrichissement global qui l'accompagne ont d'ores et déjà permis de faire découvrir nos meilleurs vins et nos meilleurs tables à une clientèle nouvelle. Il suffit d'ailleurs de constater la hausse des cours de nos meilleurs grands crus pour s'apercevoir que cette nouvelle demande mondiale est déjà bien là.

Je vous le disais, votre action est la porte d'accès au patrimoine, entendu dans un sens très large. Car l'art culinaire n'est jamais un art orphelin et solitaire, il se nourrit de son environnement culturel et artistique. Il suffit de se rendre dans vos établissements, souvent situés dans des sites superbes, et avec des décors intérieurs splendides, pour se rendre compte que vous participez à valoriser également l'histoire, l'architecture, la créativité, les arts graphiques, le design, c'est-à-dire tout ce qui constitue le patrimoine au sens large d'un pays ou d'une région.
Quelles sont les actions possibles en matière de politique touristique pour développer et défendre le goût comme vous-même le faîtes ?
Le ministère dont j'ai la charge apporte son concours à plusieurs initiatives qui vont dans ce sens. Nous soutenons financièrement l'initiative portée par les sites remarquables du goût et de la fédération des écomusées : 118 sites sont d'ores et déjà sélectionnés parce qu'ils comportent à la fois un produit alimentaire emblématique, un patrimoine exceptionnel, un accueil du public permettant de bien comprendre les liens entre le produit, le patrimoine culturel, les paysages et les hommes. L'objectif est de constituer et de commercialiser des produits touristiques autour de 6 modules : la dégustation, la balade, la visite, les cours de cuisine, le repas et l'animation.
Dans le même registre, nous soutenons le tour de France des traditions culinaires qui vise à monter au grand public lors de manifestations les liens qui existent entre terroirs, patrimoine et gastronomie.
Au niveau gouvernemental, une de mes préoccupations fortes sera de mener avec mes collègues le combat pour que la gastronomie française soit inscrite au patrimoine immatériel mondial de l'UNESCO. Ce serait là une reconnaissance formidable et un atout de communication important pour l'avenir.
En somme, vous pouvez le constater, nos actions et nos intérêts se rejoignent. Pour le touriste, la transparence des aliments, des marchés ravitaillés directement par les paysans, une cuisine directement branchée sur le terroir, sont des éléments de plus en plus essentiels.

Je suis également sensible au fait que votre démarche soit européenne. Si la construction européenne est parfois considérée comme lointaine et peu compréhensible par l'opinion publique, vous contribuez à donner à cette construction européenne un visage festif et sympathique !
Bravo pour votre action, continuez vos combats, pour la France, pour l'Europe et surtout pour le goût et pour notre plaisir.
Je vous remercie.
Source http://www.tourisme.gouv.fr, le 21 janvier 2008