Déclaration de M. Alain Juppé, Premier ministre, sur le rôle de l'UNICEF et son action en faveur de l'enfance, la politique familiale du gouvernement et les mesures dans le cadre de la protection des enfants, Paris le 2 avril 1996.

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Circonstance : Colloque du Comité français de l'UNICEF, à Paris le 2 avril 1996

Texte intégral

Je voudrais tout d'abord remercier le Docteur François Rémy, Président du Comité français de l'UNICEF, et Michel Boyon, Président de Radio France, pour les paroles de bienvenue qu'ils ont prononcées à mon égard. J'y suis très sensible et je tiens à leur dire combien je suis heureux d'ouvrir avec eux ce colloque international consacré à "L'enfant, richesse du monde".
Quel beau titre pour un colloque ! Quel plus beau titre, quel sujet plus émouvant et plus exaltant à la fois peut-on imaginer ? Nous savons bien, nous voyons chaque jour que le monde qui nous entoure est dur, les contradictions permanentes, les conflits sans cesse renaissants. Mais au milieu de tout cela il y a l'enfance, il y a les enfants qui, d'un sourire, peuvent briser la carapace d'égoïsme ou de méchanceté la plus épaisse.
Les responsables du Comité français de l'UNICEF et, en particulier, son Président, le Dr Rémy, mais aussi Radio France et le journal La Croix doivent être félicités pour avoir organisé une telle manifestation dans le cadre du cinquantième anniversaire de l'UNICEF.
Il n'y avait pas meilleure occasion de faire le point sur les défis que les crises du monde contemporain lancent à l'enfance, mais aussi sur les espérances qu'une prise de conscience planétaire lui offre. Au cours de cette journée, vous allez examiner des problèmes essentiels et définir des actions nouvelles : comment favoriser le développement psychologique de l'enfant ? Comment soigner ses détresses quand il a le malheur de vivre dans un pays en guerre ou quand il est exploité ? Comment faire en sorte que le monde que nous sommes en train de construire soit plus accueillant à tous les enfants ?
Je veux mettre à profit ce colloque pour rendre hommage à l'UNICEF et à l'action que cette organisation mène depuis cinquante ans en faveur de l'enfance.
Fondée par l'Organisation des Nations Unies en 1946, l'UNICEF a eu pour première mission de venir en aide aux millions d'enfants traumatisés et affamés, orphelins et infirmes que le conflit le plus meurtrier de l'histoire avait laissé derrière lui. Que ce soit en Europe ou en Asie, il fallait d'urgence soigner, scolariser toutes les petites victimes de la guerre, il fallait les remettre sur le chemin de la vie.
Devenu organisme permanent, le Fonds des Nations Unies pour l'Enfance se met bientôt au service des enfants du Tiers Monde. Il leur apporte lait, vaccins, médicaments, éducation de base. Plus tard, il élargit son action en lançant de très importants programmes hydrauliques afin qu'un nombre croissant de familles ait accès à l'eau. Tout ce travail qui poursuit des objectifs humanitaires à court et à long terme est justement récompensé par le Prix Nobel de la Paix qui est attribué à l'UNICEF en 1965.
Au fil des ans, l'UNICEF lutte contre la malnutrition jusque dans les endroits les plus reculés de la planète, combat avec succès les déshydratations, encourage l'allaitement maternel, vaccine massivement contre les maladies infantiles. Enfin, les années quatre-vingt dix voient l'adoption de la Convention Internationale sur les Droits de l'enfant qui constitue un progrès majeur pour la défense et la protection des enfants dans le monde, j'y reviendrai.
J'ai bien conscience que ce bilan de cinquante années d'UNICEF est loin d'être exhaustif. Le meilleur bilan tient en fait en une question que serait aujourd'hui l'enfance dans le monde si l'UNICEF n'existait pas ?
Quelques chiffres illustrent notre propos : depuis 1960, le taux de mortalité infantile est passé de 139 à 67 pour 1000, celui de mortalité des moins de cinq ans de 216 à 100, le taux d'enfants vaccinés contre les maladies les plus mortelles est passé de 5 à 80 % et le taux d'inscription à l'école de 48 à 77 %.
Bref, en cinquante ans, des millions d'enfants ont été sauvés de la maladie et de la mort. Des millions d'autres ont trouvé le chemin de l'école, des millions encore ont été protégés des horreurs de la guerre. Ce résultat est sans aucun doute la plus belle illustration de ce que peut obtenir la communauté internationale quand elle met la solidarité au premier rang de ses préoccupations.
Parmi les hommes qui se sont consacrés à cette lâche, je pense évidemment à James P. Grant. Pendant quinze ans, il a présidé l'UNICEF avec une énergie peu commune et je ne pouvais concevoir d'ouvrir cette journée sans saluer sa mémoire. Je souhaite également rendre hommage à Mme Carol Bellamy, qui lui a succédé à la tête de l'organisation, avec un dynamisme remarquable.
Faisant preuve d'un grand réalisme, elle a su mettre l'UNICEF en position de répondre aux nouveaux défis du monde actuel, la lutte conte le Sida ou l'intervention dans les situations d'urgence que les conflits armés ont générées en Europe, en Afrique ou en Asie, pour ne citer que ceux-là.
Les réformes qu'elle a lancées ont été vivement appréciées par le Gouvernement français. Je veux l'assurer de notre entière confiance pour mener à bien les actions d'envergure qu'elle projette en faveur de l'enfance. La France a toujours soutenu l'UNICEF avec vigueur. Elle entend bien participer pleinement à son développement. La convergence d'intérêts entre notre pays et l'organisation est d'ailleurs évidente pour des raisons dictées autant par l'Histoire que par la vocation humaniste et universaliste de notre pays.
Je voudrais rendre enfin hommage au docteur François Rémy. Son activité inlassable a fait du Comité français de l'UNICEF un des plus dynamiques et des plus performants au monde. C'est grâce à lui et à ses onze mille adhérents que l'effort national en faveur de l'UNICEF se situe, année après année, aux tout premiers rangs.
L'enfance, richesse du monde...
Quel père de famille n'a pas senti son cur fondre quant, au matin, penché sur son berceau, il voit son enfant lui offrir son rire ? Tous les enfants ont du génie et d'abord celui de l'amour.
Trop nombreux, hélas ! sont ceux qui en sont privés, sur les cinq continents. Les conflits armés, les guerres civiles, d'odieuses formes d'esclavage, les mauvais traitements de toutes sortes, autant de scandales dont le monde des adultes porte la responsabilité face au besoin d'amour que lui adressent ses enfants. Pour combattre et empêcher ce qui est la pire offense à l'avenir de l'homme, la tâche à accomplir reste colossale, nous en avons tous conscience.
Les progrès spectaculaires qui ont été réalisés dans la santé, l'alphabétisation, la nutrition sont menacés par des dangers nouveaux devant lesquels la France et l'UNICEF éprouvent une égale préoccupation et demandent que la Communauté internationale agisse avec la plus grande vigueur.
Le premier de ces fléaux est évidemment celui de la guerre et de ses conséquences sur les enfants. Elles sont terribles et les chiffres malheureusement, parlent d'eux-mêmes : en dix ans, deux millions d'enfants ont été tués, quatre à cinq millions sont devenus infirmes, douze millions ont perdu leur foyer, plus d'un million ont été privés ou séparés de leurs parents et dix millions ont subi des traumatismes psychologiques graves.
Au cours des conflits armés qui se déroulent dans plus de cinquante pays sur la planète, les enfants sont délibérément pris pour cibles. Les belligérants en font des soldats, des otages politiques ou les premières victimes des campagnes de terreur. Quand ils ne sont pas enrôlés de force, c'est de malnutrition ou de maladie que les enfants meurent. Les tortures, les viols, les déplacements massifs de population sont devenus systématiques.
Comment un homme digne de ce nom peut-il accepter pareille honte ?
Je pense en particulier aux mines terrestres qui mutilent et tuent des milliers d'enfants chaque année. Le rapport 1996 de l'UNICEF sur la situation des enfants dans le monde estime que 110 millions de mines menacent la vie ou l'intégrité physique des habitants de 64 pays, et d'abord les enfants. Pour sa part, la France a adopté sur ce problème une position sans ambiguïté en décidant de ne plus produire ni exporter de mines antipersonnel.
Notre pays ne ménage pas non plus ses efforts pour déminer les zones qui sont infestées, au Cambodge ou en Bosnie. Dans le cadre des opérations des Nations Unies, nos troupes spécialisées sont à l'uvre, jour après jour, et accomplissent, dans des conditions de grand danger, un travail extraordinaire qui a été salué par tous.
Le Gouvernement français affirme ainsi fortement sa présence, en particulier à travers l'action de M. Xavier Emmanuelli, Secrétaire d'État à l'Action humanitaire d'urgence - qui sera parmi vous cet après-midi.
Ses efforts rejoignent ceux "du plan d'action contre la guerre" de l'UNICEF, notamment dans l'organisation systématique des secours d'urgence, la réadaptation des victimes de la guerre, la protection des femmes et des petites filles. Je n'en citerai que deux exemples forts : le programme d'aide aux petites filles des rues en Angola et le soutien au Centre National du Traumatisme au Rwanda.
Autre chantier qui mérite la plus grande vigilance, celui de l'exploitation du travail des enfants ou de leur exploitation sexuelle. Face au trafic particulièrement odieux d'enfants, la France participe activement à l'élaboration du protocole relatif à la lutte contre la vente d'enfants, la prostitution enfantine et la pornographie impliquant les enfants, protocole qui sera ajouté à la Convention internationale des Droits de l'Enfant.
En ce qui concerne le travail, une récente étude du Bureau international du Travail a établi qu'un enfant de moins de quatorze ans sur quatre travaille. Soit près de 80 millions d'enfants exploités dans le monde, surtout dans les pays en voie de développement.
La France mène de longue date la lutte contre le travail des enfants, elle a adhéré aux conventions de l'Organisation Internationale du Travail instaurant un âge minimum pour le travail des enfants et s'emploie à sensibiliser les autres États de la planète.
L'UNICEF a élaboré avec les états et ses Comités nationaux une Convention relative aux Droits de l'Enfant qui a été adoptée à l'unanimité par l'Assemblée générale des Nations Unies.
Elle définit de la façon la plus précise possible les droits sociaux, économiques, culturels et civils des enfants et s'engage à les protéger de la violence, de la guerre, des catastrophes et de l'exploitation. La quasi-totalité des États-Membres ont ratifié cette Convention en septembre 1995, marquant ainsi la volonté de tous de promouvoir plus solennellement les droits de l'enfant. C'est là un progrès majeur de nos sociétés, acquis grâce à l'opiniâtreté de l'UNICEF.
La France partage depuis longtemps cette conviction. Justement réputée pour assurer à l'enfant une protection médicale d'un niveau inégalé ou un accueil exceptionnellement riche en école maternelle, elle l'est également pour la diversité de la politique familiale qu'elle met en uvre.
Aujourd'hui, le Gouvernement français consent des efforts importants pour sa politique familiale (250 mds F environ) et entend lui donner un nouvel essor. L'objectif premier qu'il poursuit est de favoriser le développement de l'enfant à travers ce qui est le plus nécessaire à son bonheur et à son épanouissement : la famille.
Car si la responsabilité de l'État est de garantir les droits de l'enfant, c'est le rôle de la famille de lui donner amour et sécurité. Elle est le socle sur lequel l'enfant va prendre appui pour se développer, appréhender le monde, se lancer dans l'existence. Source à la fois de vie, d'énergie et d'élan pour l'enfant, la famille reste le noyau fondamental de notre société.
Elle n'est certes pas restée à l'écart des évolutions socio-économiques des dernières années. Elle a considérablement évolué avec le temps, le changement des murs et des mentalités. Si la famille classique reste le modèle prédominant, d'autres modèles sont apparus.
Dès lors, la question se pose de savoir comment ces nouvelles familles pourront demeurer ou redevenir le lieu où se forge le bonheur de l'enfant. Comment elles réserveront à l'enfant toute sa place, comment elles pourront lui apporter tout ce dont il a le plus besoin, l'affection et la disponibilité de ses parents. Cette question est au cur de notre réflexion politique sur l'enfance.
Elle ne prend pas seulement en compte les évolutions sociales, elle intègre également les évolutions économiques liées au travail féminin. Aujourd'hui, temps professionnel et temps familial ne peuvent plus être pensés séparément. Là aussi, le Gouvernement veut tenir compte de l'aspiration d'un nombre croissant de femmes à se consacrer davantage à leurs enfants pour les élever.
Trouver un équilibre plus satisfaisant entre vie professionnelle et vie familiale est donc une exigence économique, mais aussi sociale. Les incitations à négocier sur l'aménagement et la réduction du temps de travail que le Gouvernement adresse aux partenaires sociaux sont largement inspirées par ce souci.
Les femmes ne doivent plus être contraintes de choisir entre travailler ou élever leurs enfants. C'est-à-dire d'exclure l'un des deux termes au choix. Une meilleure organisation du temps de travail doit permettre aux mères de mieux cumuler temps familial et temps de travail et d'adapter leur rythme professionnel en fonction du temps qu'elles souhaitent consacrer à leurs enfants.
Il faut également que les femmes puissent être davantage en mesure de satisfaire leur désir de maternité. La plupart d'entre elles souhaitent avoir plus d'enfants. Nous voulons leur permettre de concrétiser cette aspiration en leur facilitant la vie, par exemple, avec une meilleure prise en compte des problèmes de logement, de transport, de garde d'enfant que rencontrent les couples d'aujourd'hui. La faiblesse préoccupante de la natalité dans notre pays, qui n'assure plus le renouvellement de la population, appelle un sursaut de la communauté nationale.
C'est dans cet état d'esprit que nous abordons la Conférence de la famille qui se tiendra le 6 mai prochain, conformément aux engagements que j'avais pris lors du Sommet social de décembre dernier. Son objectif est d'appréhender de manière plus globale l'ensemble des préoccupations actuelles des familles dans tous les domaines, en les centrant autour de l'enfant.
Une politique familiale ne peut pas, en effet, consister simplement à augmenter des allocations en faveur de la famille. Elle doit voir plus large et devenir une politique globale.
C'est la raison pour laquelle la Conférence nationale de la famille accueillera non seulement les associations familiales et féminines, mais aussi les représentants des entreprises et des syndicats. Parmi les thèmes qui seront abordés, la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle, et la prise en compte du fait familial dans les politiques mises en uvre par les pouvoirs publics occuperont une place essentielle.
Notre souci de l'épanouissement harmonieux de l'enfant guide également la réflexion du Gouvernement sur les rythmes scolaires. Comment assurer à l'école une place plus équilibrée, donc plus efficace, dans la vie de l'enfant et offrir ainsi de meilleures conditions pratiques à la transmission du savoir ? Comment favoriser les talents créatifs ou sportifs des enfants ?
L'enfant est naturellement créateur, artiste, inventeur. Libre encore des pesanteurs du monde adulte, libre encore des conventions, des dogmes, des codes de tous ordres générés par la société, il s'exprime avec une spontanéité, une franchise qu'il ne retrouvera jamais plus. Mais il lui faut du temps pour s'exprimer, d'où la nécessité de rythmes scolaires mieux adaptés à ses aspirations, à ses désirs, à ses capacités.
Pour compliquer la tâche, toutes ces initiatives devront tenir compte des contraintes budgétaires dont nous ne pourrons nous affranchir, dans l'intérêt même de nos enfants, qui auront à supporter, un jour ou l'autre, le poids de nos dettes et de nos déficits. Bien gérer, aujourd'hui, c'est aussi aider nos enfants demain.
Les dernières années ont vu, par ailleurs, de nombreuses dispositions législatives conforter la place de l'enfant au sein de la communauté nationale et renforcer les moyens légaux de le protéger. Sans les citer toutes, je voudrais attirer votre attention sur les plus significatives d'entre elles car elles traduisent bien l'intérêt de la communauté nationale pour la cause de ses enfants.
J'évoquais tout à l'heure l'exploitation dont sont victimes un grand nombre d'enfants. Les mauvais traitements et les abus sexuels en sont une des formes les plus courantes. Il fallait donc continuer de renforcer les mécanismes de prévention des mauvais traitements à l'égard des mineurs. C'est l'objet de la loi du 10 juillet 1989.
Tout récemment, j'ai confié à une parlementaire, Mme Odile Moirin, une mission destinée à mieux coordonner l'action des pouvoirs publics et des collectivités territoriales dans le secteur de l'enfance en danger. Je lui ai notamment demandé de me faire des propositions en matière de prévention et de soutien aux enfants victimes de mauvais traitements et d'abus sexuels.
Par ailleurs, l'institutionnalisation du Groupe interministériel permanent pour l'enfance maltraitée est venue renforcer la coordination entre les différents ministères qui sont actifs dans ce domaine. Les actions en faveur de l'enfance sont traditionnellement, en France, le fait de très nombreuses institutions publiques et privées. Leur coordination et l'évaluation de leurs incidences sur la vie des enfants est donc un enjeu permanent pour les pouvoirs publics.
Le second rapport triennal au Parlement sur l'application de la loi de 1989 qui vient d'être diffusé montre l'importance des avancées effectuées en quelques années. Il indique clairement que l'opinion publique et les diverses administrations concernées sont de plus en plus sensibilisées au douloureux problème des mauvais traitements. L'action de prévention que mène le Gouvernement dans ce domaine ne peut en être que renforcée.
La santé de la famille et de l'enfant reste pour nous une priorité. La loi du 18 décembre 1989 a modernisé et complété le système français de protection des enfants. S'y sont ajoutés, en 1994 et 1995, le plan périnatalité et le plan mère-enfant qui visent à améliorer le suivi médical des enfants et des femmes enceintes, à développer la prévention et à humaniser la prise en charge des enfants malades.
D'autres textes renforcent la lutte contre les inégalités, ou l'échec scolaire, facilitent l'intégration des enfants handicapés, favorisent l'expression des enfants dans les établissements scolaires.
En matière d'accueil du jeune enfant, domaine où la France a toujours été pilote, la loi relative à la famille du 25 juillet 1994 et son volet action sociale ont consacré un effort très important du Gouvernement français en faveur de l'accueil de la petite enfance, qu'il soit collectif ou individualisé, et de la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle.
Enfin la proposition de loi du professeur Mattei relative à l'adoption, préparée en étroite collaboration avec le Gouvernement, manifeste le souci de ne pas laisser d'enfants adoptables sans famille et d'offrir aux enfants adoptés à l'étranger les mêmes garanties que celles dont bénéficient les enfants adoptés en France. Adoptée en première lecture à l'Assemblée Nationale, cette proposition très importante sera présentée au Sénat début mai.
Je veux rappeler également que la France a naturellement signé la Convention Internationale des Droits de l'Enfant et que celle-ci est entrée en vigueur le 6 septembre 1990 après avoir été ratifiée par le Parlement. Le Gouvernement a développé, à cette occasion, un partenariat très actif avec le secteur associatif qui donne lieu, chaque année, à une journée de réflexion entre les Associations et les Pouvoirs publics. Parallèlement, l'action gouvernementale est suivie par les deux assemblées parlementaires : chaque année, le Gouvernement présente un rapport sur la mise en uvre de la Convention et son action en faveur de la situation des enfants dans le monde. L'UNICEF, dans son propre rapport, a tenu à féliciter la France de cette initiative.
Je pense que vous serez nombreux à vous réjouir que le principe d'une Journée Nationale des Droits de l'Enfant, tous les 20 novembre, jour anniversaire de l'adoption par l'Organisation des Nations Unies de la Convention Internationale, ait été tout dernièrement voté à l'unanimité par le Parlement. Cette manifestation aura pour objectif de mieux diffuser auprès de l'opinion publique les droits de l'enfant et de sensibiliser l'opinion sur le travail qui reste à accomplir. Chaque Française et chaque Français pourra ainsi manifester son attachement aux droits de l'enfant et, par là même, mieux assurer leur caractère effectif.
Aider l'enfance, c'est avant tout lui donner les moyens de préparer son avenir. Cette exigence nous impose de mener un combat de tous les jours contre la haine, l'ignorance, le fanatisme, ou la cupidité. Elle nous impose donc de distribuer le plus largement possible savoirs et connaissances, médicaments et nourriture sans lesquels aucun progrès n'est durable.
Les grands objectifs que s'est fixé l'UNICEF pour l'an 2000 contribuent fortement à cette vision de l'avenir. Il n'est pas inutile de les rappeler brièvement dans cette enceinte :
- réduction d'un tiers du taux de mortalité des enfants de moins de cinq ans.
- réduction de moitié du taux de mortalité maternelle, aide à une naissance sans risque et accès à tous à une information en matière de planification familiale.
- réduction de moitié du taux de malnutrition grave et modérée.
- accès de toutes les familles à une eau potable et à un système d'assainissement sûr.
- accès de tous les enfants à l'éducation de base et la scolarisation d'au moins 80 % d'entre eux.
- réduction de moitié au moins du taux d'analphabétisme des adultes, avec un effort particulier pour les femmes et les jeunes filles.
- protection des enfants en situation particulièrement difficile, notamment des enfants victimes de la guerre, des enfants livrés à eux-mêmes dans les rues, des enfants victimes de sévices sexuels et de la prostitution ou dont la force de travail est abusivement utilisée.
Il n'est pas nécessaire, je pense, d'insister sur la noblesse de ces objectifs auxquels le Gouvernement français adhère sans réserve.
La place enfin reconnue de l'enfant dans la société des adultes, le respect et l'amour qui lui sont dus, l'éducation dont il doit pouvoir bénéficier doivent être des enjeux prioritaires du siècle prochain.
George Sand avait un rêve : "Je voudrais qu'il fût possible de laisser l'enfant grandir sans savoir que le mal existe", écrivait-elle dans Les idées d'un Maître d'école. Existe-t-il un cur assez sec, de par le monde, pour ne pas faire sien ce rêve généreux ?
Existe-t-il un esprit assez sourd, qu'il soit chrétien ou non, pour ne pas entendre l'avertissement de l'Évangile qui nous dit des enfants "Le royaume de Dieu est à ceux qui leur ressemblent". Aimons les enfants. Protégeons-les du mal. Préparons les à le combattre. C'est l'ambition de l'UNICEF. C'est l'ambition de la France.