Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
Florence Parly et moi-même retrouvons avec plaisir votre Haute assemblée après l'interruption des travaux parlementaires pour cause d'élections. Le projet de loi que j'ai l'honneur de vous présenter est un élément important et novateur de la politique économique de l'emploi mise en uvre par le Gouvernement de Lionel Jospin.
Notre stratégie, qui cherche à concilier efficacité économique et solidarité durable, a déjà permis de réduire de un million le nombre des chômeurs avec la création de 1,5 million d'emplois depuis 1997, d'augmenter le revenu des ménages et de soutenir la consommation, de consolider l'investissement des entreprises, de maîtriser les pressions inflationnistes et d'afficher des comptes publics en amélioration. Cela ne veut pas dire, pour autant, que tout soit parfait - loin de là -, il reste encore beaucoup de progrès à réaliser et l'écoute, la modestie, la réforme sont plus que jamais nécessaires.
Nous devons maintenir le cap pour une croissance robuste, durable et riche en emplois. Ce faisant, il ne s'agit pas de se plier à je ne sais quel dogme économique, mais de privilégier constance et vigilance. Constance parce que les résultats obtenus sur le front du chômage montrent le bien fondé des choix de la majorité plurielle. Vigilance parce que, s'il ne faut pas sur-réagir et être prisonnier du court terme, le ralentissement de l'économie américaine, la crise boursière des valeurs technologiques, la dégradation de l'environnement international nous rappellent que la croissance n'est jamais définitivement acquise. La conjoncture a ses aléas, qu'il ne faut pas occulter et qui peuvent, à la marge, faire varier les prévisions. Entre 2,7 % et 3,1 %, voilà le scénario désormais retenu pour 2001. Mais hypothèse haute, hypothèse basse, quelle que soit la décimale, la croissance française reste solide.
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
L'économie développe l'emploi, l'emploi renforce l'économie - ce cercle positif de la croissance repose sur 3 fondements : comme en février 2001 où il est passé sous la barre des 9 %, le chômage va poursuivre sa décrue et le mur des 2 millions de chômeurs pourrait être brisé avant le printemps 2002 ; le revenu des ménages, qui a marqué une pause l'année dernière sous l'effet de la hausse des prix du pétrole, devrait augmenter d'environ 3 % en 2001 et 2002 ; les baisses d'impôts que nous avons engagées à hauteur de 120 MdF d'ici 2003 donnent de l'oxygène aux consommateurs et aux entreprises. Instrument de lutte pour le travail, facteur d'accroissement du pouvoir d'achat, innovation dans notre système fiscal, le projet portant création d'une prime pour l'emploi sera DONC positif pour les Français.
Notre débat a une histoire. On pourrait en fixer le commencement aux années 1970 car, depuis 30 ans, la lutte contre le chômage est un défi pour la nation. Reportons-nous simplement au débat d'orientation budgétaire qui s'est déroulé ici même en mai dernier et durant lequel nous nous étions largement retrouvés sur un constat : le gain net pour un foyer allocataire du RMI est de seulement 4 francs par heure lorsqu'un conjoint reprend un emploi à plein temps. Ce n'est pas ainsi qu'on encourage un retour à l'activité. Constat partagé, phénomène déploré, cette situation, comme les récents travaux de l'INSEE l'ont rappelé avec force, entraîne la constitution de pièges à chômage et à pauvreté. Nous savons qu'il y a là un système à contre emploi, politiquement choquant, socialement injuste, économiquement inefficace.
Le projet de prime pour l'emploi a donc une origine : la volonté du Gouvernement et de la majorité de réduire ce que les économistes appellent le " coin fiscal " entre la richesse produite et la rémunération du travail, de consolider l'activité et de réinstaller le travail au fondement du lien collectif, non seulement pour le revenu qu'il procure mais parce qu'il offre dignité humaine et identité sociale. La mise en place d'une ristourne dégressive de CSG et de CRDS, contenue dans l'article 3 du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2001, visait précisément à amplifier notre arsenal social et fiscal en faveur de l'emploi. Elle se combinait avec la possibilité offerte par la loi contre l'exclusion de conserver le RMI et les droits qui l'accompagnent en même temps qu'un certain revenu d'activité. Elle s'ajoutait à la réforme des dégrèvements de taxe d'habitation votée dans le collectif budgétaire du printemps dernier, celle des allocations logement engagée à l'issue de la conférence de la famille qui s'est tenue en juin 2000, celle de l'impôt sur le revenu approuvée par le Parlement dans la loi de finances pour 2001 qui conjugue exonération de 2 millions de foyers supplémentaires et réduction sensible des effets de seuil grâce à l'amélioration de la décote.
Chacun sait ce qu'il advint. Saisi par des parlementaires de l'opposition, le Conseil constitutionnel a annulé le 19 décembre cette mesure applicable dès le mois suivant et attendue par plusieurs millions de Français. Soucieux du fonctionnement de notre démocratie et respectueux de la haute juridiction, le Gouvernement a pris acte de cette décision, qui l'a surpris. Critère déterminant, l'égalité devant l'impôt ne lui semblait en effet pas remise en cause puisque le Conseil constitutionnel lui-même avait, par une jurisprudence établie, toujours admis que ce principe n'empêchait pas l'octroi d'avantages fiscaux à certaines catégories de contribuables dès lors que ce choix répondait aux objectifs assignés par le législateur - en l'espèce le retour à l'emploi.
Quoiqu'il en soit, le Gouvernement s'est remis très rapidement au travail afin, à l'intérieur de la même enveloppe financière, de ne pas décevoir l'attente des bénéficiaires qui avaient déjà anticipé la mesure censurée. Plusieurs solutions de remplacement ont été examinées, y compris de la part des annulateurs eux-mêmes, je pense notamment à la proposition de crédit d'impôt d'activité votée par la majorité sénatoriale lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2001 puis revotée - mais je ne vois là qu'un hasard du calendrier - lors de la nouvelle lecture du projet de loi de finances rectificative 48 heures après la décision des juges constitutionnels. En moins d'un mois, le Premier ministre s'est déterminé pour la prime pour l'emploi, le texte a été préparé, la mesure annoncée, le Conseil d'Etat consulté. Le projet de loi a été adopté par le Conseil des ministres le 31 janvier, débattu et voté par l'Assemblée nationale le 6 février, présentée à votre commission des Finances mardi dernier.
Votre assemblée n'examinant le texte qu'aujourd'hui et le Gouvernement ne pouvant présager du vote de la représentation nationale, nous avons dû agir très vite. Les services de l'administration fiscale se sont mobilisés pour informer au maximum les contribuables, les aider à remplir leur déclaration de revenus, notamment les deux cases nécessaires à l'octroi de la prime, et, dans les semaines à venir, ils relanceront d'une façon amiable et volontariste tous ceux qui auraient omis de le faire avant hier soir. Déjà, de 60 à 70 % des ayants droits ont souscrit leurs déclarations. Nous prenons les dispositions pour aller vers 100 %, afin que chacun des bénéficiaires reçoive effectivement sa PPE au 15 septembre. Que les millions de personnes éligibles à la PPE se rassurent : en dépit des difficultés, elles bénéficieront de ce droit.
Mesdames et messieurs les Sénateurs, la prime pour l'emploi que l'article unique du projet de loi énonce, est d'abord une mesure destinée à ceux qui travaillent ou retournent vers le travail. Elle les aidera à faire face aux coûts supplémentaires et aux contraintes nouvelles que peut causer paradoxalement l'emploi retrouvé, notamment pour les femmes, et elle donnera un plus pour le travail.
La prime pour l'emploi cible plus particulièrement le travail à temps plein, et je crois que le contraire n'aurait pas été bien admis. Elle concerne les salariés comme les non salariés, agriculteurs, artisans, commerçants, professionnels libéraux, qui ne recueillent pas toujours assez les fruits de leurs initiatives et de leurs efforts. Pour répondre aux critiques que votre majorité avait articulées devant le au Conseil constitutionnel, elle n'est accordée d'une part que si les revenus tirés du travail sont faibles et, d'autre part, que si le montant des autres revenus du foyer n'est pas non plus élevé.
Elle prend en compte la situation familiale de trois points de vue au moins : le niveau maximal de revenu, augmente s'il y a des enfants à charge ; la prime sera majorée à raison de ces mêmes enfants à charge, et elle le sera davantage s'ils sont à la charge de parents isolés dont la situation est plus difficile ; enfin, elle augmentera pour les ménages où un seul des deux conjoints travaille. Il faut en effet tenir compte de cette situation, qui est moins favorable, mais en veillant à un nécessaire équilibre, la prime pour l'emploi devant dans tous les cas offrir de meilleures perspectives à ceux qui font le choix du retour à l'activité.
La prime pour l'emploi est une mesure fiscale, qui réduit l'impôt dû ou se traduit par une restitution aux contribuables. Cette innovation pour notre architecture fiscale a deux conséquences : elle implique l'administration des impôts et, ce faisant, elle a pour point de départ la déclaration de revenus, elle est traitée en dehors du champ de l'employeur qui n'a pas à savoir si son salarié en bénéficie ou non, ce qui est une garantie pour l'employé.
Ce dispositif sera évolutif. Le projet de loi dont vous êtes saisi propose de la créer et de l'appliquer dès cette année. Le projet de loi de finances pour 2002 comportera la tranche suivante et, comme l'a indiqué le Gouvernement, la prime pour l'emploi montera en puissance sur trois ans. A terme, elle devrait atteindre 4 500 F par personne au niveau du SMIC à temps plein, soit, par exemple, 9 400 F par an pour un foyer avec deux enfants où les deux conjoints travaillent au SMIC.
Ainsi conçue, la prime pour l'emploi se distingue d'autres mesures, notamment celles suggérées par la majorité sénatoriale même si je me réjouis que vous ayez rejoint l'analyse du Gouvernement dans sa détermination à remédier aux insuffisances de la rémunération du travail. Comme je l'ai précisé devant votre Commission des Finances qui nous auditionnait, Florence Parly et moi-même, la semaine dernière, le crédit d'impôt d'activité que vous aviez voté n'aurait, si on est logique, lui non plus pas échappé à la censure du Conseil constitutionnel et, de surcroît, il n'aurait pas touché un public aussi large - la prime pour l'emploi concernant normalement environ 8 millions de foyers et 10 millions de personnes. Par ailleurs, la proposition du Revenu minimum d'activité que vous avez adoptée présente des différences fondamentales qui ne peuvent emporter l'adhésion du Gouvernement : il nous semble qu'on ne peut pas accepter de disqualifier, comme le laisse entendre ce texte, la valeur d'un travailleur qui ne serait pas suffisante pour que l'employeur la rémunère justement, ce qui nécessiterait que l'Etat le subventionne en versant de l'argent à l'entreprise. Ce serait aussi, je le crois, une menace pour le SMIC. La prime pour l'emploi offre, au contraire, des garanties complémentaires pour les salariés. Le SMIC a progressé de près de 11 % entre 1996 et 2000. De 1970 à 1997, son pouvoir d'achat réel a plus que doublé. Il protège et doit continuer de protéger les travailleurs.
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
Ceux qui voteront la prime pour l'emploi, participeront donc à une évolution significative de notre droit fiscal. Surtout, ils apporteront leur contribution à la politique économique de l'emploi. C'est pourquoi je vous demande de voter la prime pour l'emploi.
(source http://www.finances.gouv.fr, le 4 avril 2001)
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
Florence Parly et moi-même retrouvons avec plaisir votre Haute assemblée après l'interruption des travaux parlementaires pour cause d'élections. Le projet de loi que j'ai l'honneur de vous présenter est un élément important et novateur de la politique économique de l'emploi mise en uvre par le Gouvernement de Lionel Jospin.
Notre stratégie, qui cherche à concilier efficacité économique et solidarité durable, a déjà permis de réduire de un million le nombre des chômeurs avec la création de 1,5 million d'emplois depuis 1997, d'augmenter le revenu des ménages et de soutenir la consommation, de consolider l'investissement des entreprises, de maîtriser les pressions inflationnistes et d'afficher des comptes publics en amélioration. Cela ne veut pas dire, pour autant, que tout soit parfait - loin de là -, il reste encore beaucoup de progrès à réaliser et l'écoute, la modestie, la réforme sont plus que jamais nécessaires.
Nous devons maintenir le cap pour une croissance robuste, durable et riche en emplois. Ce faisant, il ne s'agit pas de se plier à je ne sais quel dogme économique, mais de privilégier constance et vigilance. Constance parce que les résultats obtenus sur le front du chômage montrent le bien fondé des choix de la majorité plurielle. Vigilance parce que, s'il ne faut pas sur-réagir et être prisonnier du court terme, le ralentissement de l'économie américaine, la crise boursière des valeurs technologiques, la dégradation de l'environnement international nous rappellent que la croissance n'est jamais définitivement acquise. La conjoncture a ses aléas, qu'il ne faut pas occulter et qui peuvent, à la marge, faire varier les prévisions. Entre 2,7 % et 3,1 %, voilà le scénario désormais retenu pour 2001. Mais hypothèse haute, hypothèse basse, quelle que soit la décimale, la croissance française reste solide.
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
L'économie développe l'emploi, l'emploi renforce l'économie - ce cercle positif de la croissance repose sur 3 fondements : comme en février 2001 où il est passé sous la barre des 9 %, le chômage va poursuivre sa décrue et le mur des 2 millions de chômeurs pourrait être brisé avant le printemps 2002 ; le revenu des ménages, qui a marqué une pause l'année dernière sous l'effet de la hausse des prix du pétrole, devrait augmenter d'environ 3 % en 2001 et 2002 ; les baisses d'impôts que nous avons engagées à hauteur de 120 MdF d'ici 2003 donnent de l'oxygène aux consommateurs et aux entreprises. Instrument de lutte pour le travail, facteur d'accroissement du pouvoir d'achat, innovation dans notre système fiscal, le projet portant création d'une prime pour l'emploi sera DONC positif pour les Français.
Notre débat a une histoire. On pourrait en fixer le commencement aux années 1970 car, depuis 30 ans, la lutte contre le chômage est un défi pour la nation. Reportons-nous simplement au débat d'orientation budgétaire qui s'est déroulé ici même en mai dernier et durant lequel nous nous étions largement retrouvés sur un constat : le gain net pour un foyer allocataire du RMI est de seulement 4 francs par heure lorsqu'un conjoint reprend un emploi à plein temps. Ce n'est pas ainsi qu'on encourage un retour à l'activité. Constat partagé, phénomène déploré, cette situation, comme les récents travaux de l'INSEE l'ont rappelé avec force, entraîne la constitution de pièges à chômage et à pauvreté. Nous savons qu'il y a là un système à contre emploi, politiquement choquant, socialement injuste, économiquement inefficace.
Le projet de prime pour l'emploi a donc une origine : la volonté du Gouvernement et de la majorité de réduire ce que les économistes appellent le " coin fiscal " entre la richesse produite et la rémunération du travail, de consolider l'activité et de réinstaller le travail au fondement du lien collectif, non seulement pour le revenu qu'il procure mais parce qu'il offre dignité humaine et identité sociale. La mise en place d'une ristourne dégressive de CSG et de CRDS, contenue dans l'article 3 du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2001, visait précisément à amplifier notre arsenal social et fiscal en faveur de l'emploi. Elle se combinait avec la possibilité offerte par la loi contre l'exclusion de conserver le RMI et les droits qui l'accompagnent en même temps qu'un certain revenu d'activité. Elle s'ajoutait à la réforme des dégrèvements de taxe d'habitation votée dans le collectif budgétaire du printemps dernier, celle des allocations logement engagée à l'issue de la conférence de la famille qui s'est tenue en juin 2000, celle de l'impôt sur le revenu approuvée par le Parlement dans la loi de finances pour 2001 qui conjugue exonération de 2 millions de foyers supplémentaires et réduction sensible des effets de seuil grâce à l'amélioration de la décote.
Chacun sait ce qu'il advint. Saisi par des parlementaires de l'opposition, le Conseil constitutionnel a annulé le 19 décembre cette mesure applicable dès le mois suivant et attendue par plusieurs millions de Français. Soucieux du fonctionnement de notre démocratie et respectueux de la haute juridiction, le Gouvernement a pris acte de cette décision, qui l'a surpris. Critère déterminant, l'égalité devant l'impôt ne lui semblait en effet pas remise en cause puisque le Conseil constitutionnel lui-même avait, par une jurisprudence établie, toujours admis que ce principe n'empêchait pas l'octroi d'avantages fiscaux à certaines catégories de contribuables dès lors que ce choix répondait aux objectifs assignés par le législateur - en l'espèce le retour à l'emploi.
Quoiqu'il en soit, le Gouvernement s'est remis très rapidement au travail afin, à l'intérieur de la même enveloppe financière, de ne pas décevoir l'attente des bénéficiaires qui avaient déjà anticipé la mesure censurée. Plusieurs solutions de remplacement ont été examinées, y compris de la part des annulateurs eux-mêmes, je pense notamment à la proposition de crédit d'impôt d'activité votée par la majorité sénatoriale lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2001 puis revotée - mais je ne vois là qu'un hasard du calendrier - lors de la nouvelle lecture du projet de loi de finances rectificative 48 heures après la décision des juges constitutionnels. En moins d'un mois, le Premier ministre s'est déterminé pour la prime pour l'emploi, le texte a été préparé, la mesure annoncée, le Conseil d'Etat consulté. Le projet de loi a été adopté par le Conseil des ministres le 31 janvier, débattu et voté par l'Assemblée nationale le 6 février, présentée à votre commission des Finances mardi dernier.
Votre assemblée n'examinant le texte qu'aujourd'hui et le Gouvernement ne pouvant présager du vote de la représentation nationale, nous avons dû agir très vite. Les services de l'administration fiscale se sont mobilisés pour informer au maximum les contribuables, les aider à remplir leur déclaration de revenus, notamment les deux cases nécessaires à l'octroi de la prime, et, dans les semaines à venir, ils relanceront d'une façon amiable et volontariste tous ceux qui auraient omis de le faire avant hier soir. Déjà, de 60 à 70 % des ayants droits ont souscrit leurs déclarations. Nous prenons les dispositions pour aller vers 100 %, afin que chacun des bénéficiaires reçoive effectivement sa PPE au 15 septembre. Que les millions de personnes éligibles à la PPE se rassurent : en dépit des difficultés, elles bénéficieront de ce droit.
Mesdames et messieurs les Sénateurs, la prime pour l'emploi que l'article unique du projet de loi énonce, est d'abord une mesure destinée à ceux qui travaillent ou retournent vers le travail. Elle les aidera à faire face aux coûts supplémentaires et aux contraintes nouvelles que peut causer paradoxalement l'emploi retrouvé, notamment pour les femmes, et elle donnera un plus pour le travail.
La prime pour l'emploi cible plus particulièrement le travail à temps plein, et je crois que le contraire n'aurait pas été bien admis. Elle concerne les salariés comme les non salariés, agriculteurs, artisans, commerçants, professionnels libéraux, qui ne recueillent pas toujours assez les fruits de leurs initiatives et de leurs efforts. Pour répondre aux critiques que votre majorité avait articulées devant le au Conseil constitutionnel, elle n'est accordée d'une part que si les revenus tirés du travail sont faibles et, d'autre part, que si le montant des autres revenus du foyer n'est pas non plus élevé.
Elle prend en compte la situation familiale de trois points de vue au moins : le niveau maximal de revenu, augmente s'il y a des enfants à charge ; la prime sera majorée à raison de ces mêmes enfants à charge, et elle le sera davantage s'ils sont à la charge de parents isolés dont la situation est plus difficile ; enfin, elle augmentera pour les ménages où un seul des deux conjoints travaille. Il faut en effet tenir compte de cette situation, qui est moins favorable, mais en veillant à un nécessaire équilibre, la prime pour l'emploi devant dans tous les cas offrir de meilleures perspectives à ceux qui font le choix du retour à l'activité.
La prime pour l'emploi est une mesure fiscale, qui réduit l'impôt dû ou se traduit par une restitution aux contribuables. Cette innovation pour notre architecture fiscale a deux conséquences : elle implique l'administration des impôts et, ce faisant, elle a pour point de départ la déclaration de revenus, elle est traitée en dehors du champ de l'employeur qui n'a pas à savoir si son salarié en bénéficie ou non, ce qui est une garantie pour l'employé.
Ce dispositif sera évolutif. Le projet de loi dont vous êtes saisi propose de la créer et de l'appliquer dès cette année. Le projet de loi de finances pour 2002 comportera la tranche suivante et, comme l'a indiqué le Gouvernement, la prime pour l'emploi montera en puissance sur trois ans. A terme, elle devrait atteindre 4 500 F par personne au niveau du SMIC à temps plein, soit, par exemple, 9 400 F par an pour un foyer avec deux enfants où les deux conjoints travaillent au SMIC.
Ainsi conçue, la prime pour l'emploi se distingue d'autres mesures, notamment celles suggérées par la majorité sénatoriale même si je me réjouis que vous ayez rejoint l'analyse du Gouvernement dans sa détermination à remédier aux insuffisances de la rémunération du travail. Comme je l'ai précisé devant votre Commission des Finances qui nous auditionnait, Florence Parly et moi-même, la semaine dernière, le crédit d'impôt d'activité que vous aviez voté n'aurait, si on est logique, lui non plus pas échappé à la censure du Conseil constitutionnel et, de surcroît, il n'aurait pas touché un public aussi large - la prime pour l'emploi concernant normalement environ 8 millions de foyers et 10 millions de personnes. Par ailleurs, la proposition du Revenu minimum d'activité que vous avez adoptée présente des différences fondamentales qui ne peuvent emporter l'adhésion du Gouvernement : il nous semble qu'on ne peut pas accepter de disqualifier, comme le laisse entendre ce texte, la valeur d'un travailleur qui ne serait pas suffisante pour que l'employeur la rémunère justement, ce qui nécessiterait que l'Etat le subventionne en versant de l'argent à l'entreprise. Ce serait aussi, je le crois, une menace pour le SMIC. La prime pour l'emploi offre, au contraire, des garanties complémentaires pour les salariés. Le SMIC a progressé de près de 11 % entre 1996 et 2000. De 1970 à 1997, son pouvoir d'achat réel a plus que doublé. Il protège et doit continuer de protéger les travailleurs.
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
Ceux qui voteront la prime pour l'emploi, participeront donc à une évolution significative de notre droit fiscal. Surtout, ils apporteront leur contribution à la politique économique de l'emploi. C'est pourquoi je vous demande de voter la prime pour l'emploi.
(source http://www.finances.gouv.fr, le 4 avril 2001)