Texte intégral
Dès ma communication sur la réforme de lEtat du mois de novembre 1997, jannonçais mon intention de promouvoir une réelle égalité entre les hommes et les femmes dans la fonction publique et je mengageais à renforcer « légalité entre les hommes et les femmes, notamment en favorisant laccès des femmes à des postes de responsabilité par une politique volontariste de promotion des femmes qui sera engagée dans tous les ministères ». Le 8 mars 1998, à loccasion de la journée internationale des femmes, le Premier ministre confortait cette volonté en mappelant à poursuivre avec détermination la réflexion et les actions sur cette question.
Nous sommes ces jours-ci à un moment particulier de cette question. En effet le débat vient de reprendre devant le Parlement sur une modification de la Constitution en faveur de légalité entre hommes et femmes. Ce qui est en question, cest légalité dans la vie politique. Mais jai entendu à cette occasion beaucoup de personnes se demander quelles mesures complémentaires le gouvernement comptait prendre par ailleurs, pour que légalité entre les sexes progresse dans les divers secteurs de la vie de notre pays où elle est encore imparfaite, notamment en matière professionnelle. La question mérite dêtre posée. Pour ma part je considère que lEtat employeur se doit dêtre, en la matière, exemplaire et ce dans les meilleurs délais.
Lorsque jai commencé à mettre en oeuvre mon programme sur cette question, il y a environ un an, les statistiques sur légalité entre les hommes et les femmes dans la fonction publique que la DGAFP venait alors de produire, comme elle le fait tous les 2 ans pour le Parlement, confirmaient que si les femmes sont largement majoritaires dans lensemble de la fonction publique tous secteurs confondus, la situation nest pas pour autant équilibrée : il y avait peu de femmes dans les secteurs techniques de la fonction publique, et surtout, trop peu de femmes ayant des emplois dencadrement supérieur par rapport à leur nombre dans lensemble de la fonction publique. Parmi les cadres A de la fonction publique de lEtat, les femmes composent plus de la moitié des agents. Si lon retire les enseignantes, très nombreuses, mais qui occupent des postes qui débouchent rarement sur des fonction dencadrement supérieur, il reste tout de même 33,3 % de femmes dans la catégorie A. Pourtant, dans les emplois dencadrement supérieur la proportion de femmes tombait à 12,5 % des effectifs, et parmi les directeurs dadministration centrale, seulement un peu plus de 7 % et seulement 4 préfets.
Une telle situation nest ni saine ni admissible dans une fonction publique dont le statut général garantit, dans son article 6, la non discrimination, en particulier entre les hommes et les femmes.
Pour mattaquer aux causes réelles et profondes de ce déséquilibre, jai dans un premier temps demandé à mes collègues de fournir à la DGAFP des informations statistiques complémentaires de nature à mieux éclairer le gouvernement sur les composantes de cette inégalité globale, et aussi de sefforcer de rééquilibrer la composition des jurys des concours administratifs et la représentation de ladministration dans les divers conseils et commissions où elle siège. Le Premier ministre, qui simplique très fortement dans ce dossier, comme la encore montré sa réponse hier à la question dun député, a demandé à lensemble du gouvernement de nommer aussi souvent que possible des femmes dans les postes de responsabilité à pourvoir.
Ces premiers efforts nont pas été vains : les statistiques synthétisées par la DGAFP en décembre 1998 démontrent quen un an, des changements notables sont déjà intervenus. Parmi les directeurs dadministration centrale la part des femmes est passée de 7 à 11,4 %. Ainsi, au ministère de léducation nationale, le nombre de directrices a fait un bond, passant à 50 % des emplois de directeurs. Pour lensemble des postes à la décision du gouvernement, la proportion de femmes est passée de 6,3 % à 8,1 %.
Jai également demandé à ma propre administration de veiller à ce que, dans les concours quelle organise, la présidence ou la vice-présidence des jurys soit plus souvent tenue par des femmes. Ce sera désormais le cas.
Mais tout en lançant ces actions il y a un an, jai aussi constaté que si la question de légalité des femmes et des hommes dans la fonction publique était posée depuis des années, elle nétait pas encore vraiment clarifiée et surtout les solutions réelles peu explorées. Jai donc demandé à Mme Anne-Marie Colmou, maître des requêtes au Conseil dEtat, délaborer un rapport dans lequel elle recenserait les obstacles que rencontrent les femmes au cours de leur carrière et qui expliquent leur moindre présence parmi les cadres supérieurs de la fonction publique. Enfin je lui demandais les solutions quelle estimerait les plus adaptées.
Anne-Marie Colmou, en se mettant à loeuvre, a également constaté que la question navait pas fait lobjet, jusque là, détudes densemble. Elle sest donc attaquée à lénorme travail de rassembler les éléments épars et a rencontré lensemble des personnalités susceptibles de léclairer : chercheurs, hauts fonctionnaires, syndicats, associations, etc... De ces travaux, qui ont duré plusieurs mois, elle a rédigé le rapport remis aujourdhui.
Les questions quelle soulève sont multiples : certaines touchent à la façon différente dont les filles et les garçons abordent la question de leur métier, dautres aux arbitrages nécessaires pour partager son temps quotidien entre vie professionnelle et vie personnelle. Elle y signale les distorsions nées de lhistoire et qui sont peut-être à lorigine de la situation paradoxale suivante : alors que les filles obtiennent de très bons résultats à lécole et à luniversité, et aussi dans les concours de cadre A de la fonction publique, elles ont de moins bons résultats que les hommes pour les concours de recrutement de niveau supérieur. Anne-Marie Colmou explique encore comment certains modes de fonctionnement des administrations provoquent, sans le vouloir jen suis persuadé, la mise à lécart des femmes en raison des modalités de désignation lors des nominations. Elle montre aussi comment certaines habitudes et certains horaires de travail des cadres peuvent inciter les femmes à éviter les postes dencadrement, fût-ce au détriment de leur carrière.
De ce travail très documenté et très complet résultent 17 propositions, qui répondent aux questions soulevées et que je fais miennes dans leur ensemble, avec dautant plus de détermination que le rapport ma convaincu que les mesures à prendre en faveur des femmes se situent dans la droite ligne des réformes que jimpulse par ailleurs pour la modernisation des services publics et participeront donc de la réforme de lEtat. Ces propositions sont concrètes et susceptibles dune mise en oeuvre rapide.
Je nen citerai ici que quelques unes. Par exemple, pour arriver à une équilibre dans les emplois dencadrement pour lesquels le gouvernement dispose dun choix, il est proposé de créer un système de plans dobjectifs. Dans les services où lencadrement est déficitaire en femmes, des plans pluriannuels fixeront un pourcentage de femmes à atteindre en 3 ou 5 ans pour diminuer lécart. Ces plans seront renouvelés à leur échéance, pour atteindre un palier supplémentaire vers léquilibre. A lissue dune série de plans, les fonctions dencadrement seront partagées entre hommes et femmes selon des proportions comparables à celles du corps ou des corps où sont choisis les candidats.
Pour soutenir cette action volontariste et aider les responsables à repérer les femmes ayant compétence à occuper ces postes, le rapport propose de tenir à jour des listes des femmes par profil professionnel et de carrière, qui serviront de « vivier » lors des choix de candidatures.
Ces propositions, ainsi que dautres qui visent à une plus grande transparence de la situation des hommes et des femmes, à une meilleure gestion prévisionnelle des emplois à pourvoir et des ressources humaines, devraient permettre de combattre les distorsions de carrière défavorables aux femmes.
Une réglementation sera édictée pour inciter à nommer des jurys mixtes pour tous les concours de la fonction publique, et des présidentes de jury de façon plus fréquente.
Dans les meilleurs délais, nous allons examiner avec lensemble du gouvernement le calendrier et les mesures à mettre en oeuvre. Nous prendrons des dispositions pour que les décisions prises soient suivies dans le temps et efficaces. Mon ambition est non seulement de commencer rapidement, mais aussi de tout faire pour que les progrès soient irréversibles et lamélioration constante. Il ne serait pas admissible que dans 10 ans, un nouveau rapport fasse état dune situation toujours anormalement déséquilibrée.
Dans limmédiat, je vais passer la parole à Anne-Marie Colmou pour quelle vous donne un aperçu plus complet de son travail et réponde à vos questions.
(Source http://www.fonction-publique.gouv.fr, le 17 février 1999)
Nous sommes ces jours-ci à un moment particulier de cette question. En effet le débat vient de reprendre devant le Parlement sur une modification de la Constitution en faveur de légalité entre hommes et femmes. Ce qui est en question, cest légalité dans la vie politique. Mais jai entendu à cette occasion beaucoup de personnes se demander quelles mesures complémentaires le gouvernement comptait prendre par ailleurs, pour que légalité entre les sexes progresse dans les divers secteurs de la vie de notre pays où elle est encore imparfaite, notamment en matière professionnelle. La question mérite dêtre posée. Pour ma part je considère que lEtat employeur se doit dêtre, en la matière, exemplaire et ce dans les meilleurs délais.
Lorsque jai commencé à mettre en oeuvre mon programme sur cette question, il y a environ un an, les statistiques sur légalité entre les hommes et les femmes dans la fonction publique que la DGAFP venait alors de produire, comme elle le fait tous les 2 ans pour le Parlement, confirmaient que si les femmes sont largement majoritaires dans lensemble de la fonction publique tous secteurs confondus, la situation nest pas pour autant équilibrée : il y avait peu de femmes dans les secteurs techniques de la fonction publique, et surtout, trop peu de femmes ayant des emplois dencadrement supérieur par rapport à leur nombre dans lensemble de la fonction publique. Parmi les cadres A de la fonction publique de lEtat, les femmes composent plus de la moitié des agents. Si lon retire les enseignantes, très nombreuses, mais qui occupent des postes qui débouchent rarement sur des fonction dencadrement supérieur, il reste tout de même 33,3 % de femmes dans la catégorie A. Pourtant, dans les emplois dencadrement supérieur la proportion de femmes tombait à 12,5 % des effectifs, et parmi les directeurs dadministration centrale, seulement un peu plus de 7 % et seulement 4 préfets.
Une telle situation nest ni saine ni admissible dans une fonction publique dont le statut général garantit, dans son article 6, la non discrimination, en particulier entre les hommes et les femmes.
Pour mattaquer aux causes réelles et profondes de ce déséquilibre, jai dans un premier temps demandé à mes collègues de fournir à la DGAFP des informations statistiques complémentaires de nature à mieux éclairer le gouvernement sur les composantes de cette inégalité globale, et aussi de sefforcer de rééquilibrer la composition des jurys des concours administratifs et la représentation de ladministration dans les divers conseils et commissions où elle siège. Le Premier ministre, qui simplique très fortement dans ce dossier, comme la encore montré sa réponse hier à la question dun député, a demandé à lensemble du gouvernement de nommer aussi souvent que possible des femmes dans les postes de responsabilité à pourvoir.
Ces premiers efforts nont pas été vains : les statistiques synthétisées par la DGAFP en décembre 1998 démontrent quen un an, des changements notables sont déjà intervenus. Parmi les directeurs dadministration centrale la part des femmes est passée de 7 à 11,4 %. Ainsi, au ministère de léducation nationale, le nombre de directrices a fait un bond, passant à 50 % des emplois de directeurs. Pour lensemble des postes à la décision du gouvernement, la proportion de femmes est passée de 6,3 % à 8,1 %.
Jai également demandé à ma propre administration de veiller à ce que, dans les concours quelle organise, la présidence ou la vice-présidence des jurys soit plus souvent tenue par des femmes. Ce sera désormais le cas.
Mais tout en lançant ces actions il y a un an, jai aussi constaté que si la question de légalité des femmes et des hommes dans la fonction publique était posée depuis des années, elle nétait pas encore vraiment clarifiée et surtout les solutions réelles peu explorées. Jai donc demandé à Mme Anne-Marie Colmou, maître des requêtes au Conseil dEtat, délaborer un rapport dans lequel elle recenserait les obstacles que rencontrent les femmes au cours de leur carrière et qui expliquent leur moindre présence parmi les cadres supérieurs de la fonction publique. Enfin je lui demandais les solutions quelle estimerait les plus adaptées.
Anne-Marie Colmou, en se mettant à loeuvre, a également constaté que la question navait pas fait lobjet, jusque là, détudes densemble. Elle sest donc attaquée à lénorme travail de rassembler les éléments épars et a rencontré lensemble des personnalités susceptibles de léclairer : chercheurs, hauts fonctionnaires, syndicats, associations, etc... De ces travaux, qui ont duré plusieurs mois, elle a rédigé le rapport remis aujourdhui.
Les questions quelle soulève sont multiples : certaines touchent à la façon différente dont les filles et les garçons abordent la question de leur métier, dautres aux arbitrages nécessaires pour partager son temps quotidien entre vie professionnelle et vie personnelle. Elle y signale les distorsions nées de lhistoire et qui sont peut-être à lorigine de la situation paradoxale suivante : alors que les filles obtiennent de très bons résultats à lécole et à luniversité, et aussi dans les concours de cadre A de la fonction publique, elles ont de moins bons résultats que les hommes pour les concours de recrutement de niveau supérieur. Anne-Marie Colmou explique encore comment certains modes de fonctionnement des administrations provoquent, sans le vouloir jen suis persuadé, la mise à lécart des femmes en raison des modalités de désignation lors des nominations. Elle montre aussi comment certaines habitudes et certains horaires de travail des cadres peuvent inciter les femmes à éviter les postes dencadrement, fût-ce au détriment de leur carrière.
De ce travail très documenté et très complet résultent 17 propositions, qui répondent aux questions soulevées et que je fais miennes dans leur ensemble, avec dautant plus de détermination que le rapport ma convaincu que les mesures à prendre en faveur des femmes se situent dans la droite ligne des réformes que jimpulse par ailleurs pour la modernisation des services publics et participeront donc de la réforme de lEtat. Ces propositions sont concrètes et susceptibles dune mise en oeuvre rapide.
Je nen citerai ici que quelques unes. Par exemple, pour arriver à une équilibre dans les emplois dencadrement pour lesquels le gouvernement dispose dun choix, il est proposé de créer un système de plans dobjectifs. Dans les services où lencadrement est déficitaire en femmes, des plans pluriannuels fixeront un pourcentage de femmes à atteindre en 3 ou 5 ans pour diminuer lécart. Ces plans seront renouvelés à leur échéance, pour atteindre un palier supplémentaire vers léquilibre. A lissue dune série de plans, les fonctions dencadrement seront partagées entre hommes et femmes selon des proportions comparables à celles du corps ou des corps où sont choisis les candidats.
Pour soutenir cette action volontariste et aider les responsables à repérer les femmes ayant compétence à occuper ces postes, le rapport propose de tenir à jour des listes des femmes par profil professionnel et de carrière, qui serviront de « vivier » lors des choix de candidatures.
Ces propositions, ainsi que dautres qui visent à une plus grande transparence de la situation des hommes et des femmes, à une meilleure gestion prévisionnelle des emplois à pourvoir et des ressources humaines, devraient permettre de combattre les distorsions de carrière défavorables aux femmes.
Une réglementation sera édictée pour inciter à nommer des jurys mixtes pour tous les concours de la fonction publique, et des présidentes de jury de façon plus fréquente.
Dans les meilleurs délais, nous allons examiner avec lensemble du gouvernement le calendrier et les mesures à mettre en oeuvre. Nous prendrons des dispositions pour que les décisions prises soient suivies dans le temps et efficaces. Mon ambition est non seulement de commencer rapidement, mais aussi de tout faire pour que les progrès soient irréversibles et lamélioration constante. Il ne serait pas admissible que dans 10 ans, un nouveau rapport fasse état dune situation toujours anormalement déséquilibrée.
Dans limmédiat, je vais passer la parole à Anne-Marie Colmou pour quelle vous donne un aperçu plus complet de son travail et réponde à vos questions.
(Source http://www.fonction-publique.gouv.fr, le 17 février 1999)