Déclaration de M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'Etat aux affaires européennes, sur l'action de l'Union européenne en faveur de la santé maternelle dans le cadre des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), à Bruxelles le 3 septembre 2008.

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Circonstance : Déclaration du Conseil européen sur les objectifs du millénaire pour le développement, objectif 5 : améliorer la santé maternelle, à Bruxelles le 3 septembre 2008

Texte intégral

Monsieur le Président,
Madame la Commissaire,
Mesdames et Messieurs les Députés,
Tout comme le Parlement européen, le Conseil attache une importance majeure à la réalisation de l'ensemble des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) dans le monde entier d'ici à 2015, en particulier à l'OMD 5, qui vise, entre 1990 et 2015, à réduire des trois quarts le taux de mortalité maternelle.
L'Union européenne rappelle à cet égard que des progrès durables en la matière passent par le respect et la promotion des droits des femmes et des filles, en leur garantissant l'accès aux services de santé, notamment en matière de santé sexuelle et génésique, afin notamment de mieux les protéger de l'infection par le VIH.
Les trois Institutions de l'Union européenne ont clairement marqué leur volonté collective d'améliorer la santé maternelle dans les pays en développement, notamment par la signature, le 20 décembre 2005, du Consensus européen sur le développement, qui place la santé maternelle parmi les objectifs prioritaires de la politique du développement de l'Union européenne.
L'Union européenne s'est par ailleurs dotée des instruments financiers nécessaires pour mettre en oeuvre cet objectif, notamment en adoptant en 2006 l'instrument de financement de la coopération au développement - qui vise à l'amélioration de la santé maternelle parmi les objectifs des programmes géographiques - ou plus récemment dans le cadre du Partenariat UE-Afrique sur les OMD.
Or, en matière de santé maternelle, des défis énormes restent à relever, tel que signalé dans le rapport annuel 2007 des Nations unies sur les OMD : plus de 500.000 femmes meurent encore chaque année des suites de complications de grossesse ou d'accouchement pouvant être soignées et évitées. La probabilité pour une femme de mourir de ces causes-là est de 1 sur 16 en Afrique sub-saharienne, alors qu'elle est de 1 sur 3800 dans les pays développés.
Devant l'amplitude de ce défi, le Conseil a pris la décision d'accélérer et de renfoncer l'action dans ce domaine. Suite aux conclusions adoptées par le Conseil en mai 2008 sur "L'Union européenne - Partenaire mondial pour le développement: accélérer les progrès en vue de la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD)", le Conseil européen a endossé en juin dernier un Agenda d'action de l'Union européenne concernant les OMD.
Compte tenu des progrès limités accomplis globalement dans la réalisation de l'OMD 5, cet Agenda d'action prévoit que l'Union européenne appuiera de manière urgente les efforts visant à atteindre l'objectif fixé en 2005 concernant l'accès universel à la santé procréative ainsi que les objectifs intermédiaires pour 2010 consistant :
- à sauver 4 millions de vies d'enfants de plus chaque année, dont 2 millions en Afrique ;
- et à avoir chaque année 35 millions de naissances supplémentaires assistées par du personnel de santé qualifié, dont 13 millions en Afrique.
Si nous voulons réduire des trois quarts le taux de mortalité maternelle d'ici à 2015, cela signifie que 21 millions de naissances de plus devront être assistées par du personnel de santé qualifié chaque année d'ici à 2010.
En outre, l'Union européenne apportera son soutien en vue d'atteindre l'objectif de 50 millions de femmes de plus en Afrique ayant accès aux méthodes modernes de contraception d'ici à 2010, et plus généralement accès au planning familial.
L'Agenda d'action prévoit également que l'Union européenne joue un rôle important pour contribuer à réduire, d'ici à 2010, le déficit de financement estimé à 13,4 milliards d'euros, sur la base de l'objectif fixé par la commission macroéconomie et santé de l'OMS. Selon la Commission européenne, ceci devrait se traduire par une augmentation de l'aide de l'Union européenne de 8 milliards d'euros d'ici à 2010 dont quasiment 6 milliards seraient destinés à l'Afrique. Mais il est indispensable que tant les pays partenaires que les autres donateurs soient parties prenantes aux efforts déployés pour faire face à ce défi concernant la santé maternelle si l'on veut que l'aide apportée par l'Union européenne permette d'atteindre les résultats souhaités.
Dans ce contexte, la Présidence est convaincue que le renforcement des systèmes de santé des pays en développement reste un élément clé dans la réalisation de l'OMD 5. Nous avons donc choisi le renforcement des systèmes de santé des pays en développement comme l'une de nos priorités thématiques, et une série d'actions concrètes sont prévues à cet égard :
- la Présidence et la Commission préparent un document conjoint sur la couverture du risque maladie ;
- les ministres du développement en discuteront lors de la réunion informelle qui aura lieu les 29-30 septembre à Bordeaux en vue de conclusions du Conseil en novembre et des prochaines présidences afin d'assurer un accès universel aux soins ;
- le Conseil examinera le rapport de la Commission sur le plan d'action de l'Union européenne contre la pénurie des personnels de santé dans les pays en développement.
Ainsi, Mesdames et Messieurs les Députés, vous pouvez être sûrs que le Conseil restera pleinement mobilisé et fera tout son possible de manière à ce que l'Union européenne continue de jouer un rôle moteur pour la réalisation des OMD - et en particulier l'OMD 5 relatif à l'amélioration de la santé maternelle.
Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Députés, je ne vais pas reprendre ce que, avec beaucoup d'émotion Mme la commissaire a dit, tout en partageant pleinement ses convictions devant le scandale dans lequel nous nous trouvons. Pour cela, le Conseil a développé un programme d'action. C'est vrai qu'il intervient tard mais ce programme est ambitieux, je n'y reviens pas.
La Présidence, en ce qui la concerne, accordera la priorité, pour être très clair, à la promotion et à la défense des droits des femmes. Notre programme comprend notamment l'élaboration d'orientations pour lutter contre les violences à l'encontre des femmes, qui serviront d'actions à l'Union européenne dans les enceintes internationales et, à la fin de ce mois, dans les réunions de haut niveau aux Nations unies sur les besoins de l'Afrique en matière de développement dans le cadre des Objectifs du Millénaire. Nous avons également l'initiative sur les femmes et les conflits armés, visant à mieux prendre en compte la situation particulière des femmes là où l'Union européenne met justement en oeuvre des opérations de politique de sécurité et de défense.
Nous prendrons l'initiative, en tant que Présidence, d'une nouvelle résolution à l'Assemblée générale des Nations unies avec les Pays-Bas sur les violences contre les femmes. Et puisqu'on a parlé de situation nationale, alors que je suis ici pour représenter le Conseil, je dis que tous les Etats membres sont bienvenus à s'associer à cette résolution dans le cadre des Nations unies. Enfin, en décembre 2008, il y aura un forum des organisations non gouvernementales sur ces situations des femmes.
En ce qui concerne la santé maternelle et tout ce que vous avez dit, je ne puis que partager l'engagement et l'indignation de celles qui se sont exprimées, notamment en ce qui concerne les liens avec le virus HIV, en précisant que l'Union va financer le Fonds mondial contre le SIDA à hauteur de 91 millions d'euros en 2007, et ce au titre de premier donateur à ce fonds pour cette année.
En ce qui concerne les observations de Mme Kinnock qui, comme Européenne convaincue, ne peut pas confondre la présidence du Conseil avec un État national, ou à ce moment-là je ne la reconnais plus, je veux dire qu'en ce qui concerne les montants budgétaires de l'Union européenne, ces montants vont s'accroître en 2008 en ce qui concerne l'Etat que je connais le mieux. Pour être précis, la part allouée à la santé a progressé entre 2006 et 2008 puisqu'elle passe de 820 millions à 930 millions d'euros. Mais je ne crois pas que ce soit là le lieu de jouer à chaque fois les mêmes matches entre nous.
Plus personnellement, et sur le fond après avoir écouté votre débat, je dois dire que la présidence prendra en compte, avec beaucoup d'attention, la proposition qui a été faite par Mme Buitenweg et qu'elle m'a remise. Que, pour la présidence, la lutte contre la pauvreté va de pair avec l'amélioration de la condition de la femme et avec le respect de ses droits et cela partout. Que l'ingérence commence quand systématiquement la santé des femmes est en cause et qu'il faut se donner les moyens nécessaires, tous les moyens nécessaires, dans des conditions légales et sûres, pour mettre fin à ce scandale et que, de ce point de vue là, nous ne devons renoncer à aucun de ces moyens, quelles que soient nos convictions.
Nous devons aller dans le sens du progrès pour mettre fin à ce qui est un véritable scandale en ce qui concerne la situation des femmes, notamment dans les pays les plus pauvres. De ce point de vue là, il devrait y avoir un accord entre nous, je le répète, quelles que soient nos convictions. Pour sa part, la présidence est décidée à agir en ce sens, notamment en Afrique, et à utiliser tous les moyens à sa disposition.
Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 10 septembre 2008