Déclaration de M. Hervé Novelli, secrétaire d'Etat au commerce, à l'artisanat, aux petites et moyennes entreprises, au tourisme et aux services, sur le plan de soutien pour le financement des PME et sur la transmission d'entreprise, Paris le 9 octobre 2008.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Texte intégral

Messieurs les Présidents,
Mesdames, messieurs,
Je souhaite vous parler aujourd'hui de deux sujets bien distincts mais complémentaires. J'ai souhaité vous réunir pour engager un programme d'action pour faciliter la transmission d'entreprise en France. Mais compte-tenu de l'actualité, je souhaite profiter de la présence de François Drouin, président d'Oséo, pour expliciter les dispositifs mis en place pour que les PME résistent aux turbulences actuelles, et plus largement répondre à vos questions sur les modalités de mise en oeuvre du plan PME annoncé par le Président de la République.
En termes de déroulé, je transmettrai donc dans un instant la parole à François Drouin pour qu'il présente les actions mises en place par Oséo pour répondre aux besoins financiers des PME pendant la crise.
Nous aurons ensuite une séance de questions-réponses où l'ensemble des Présidents ici présents et moi-même pourront répondre à vos interrogations concernant la déclaration commune signée ce matin.
C'est après cette séance de questions-réponses que nous signerons la déclaration.
Le sujet de la transmission d'entreprise est la préoccupation de multiples institutions et organismes. Les syndicats patronaux, les fédérations professionnelles, des associations de bénévoles ou d'anciens élèves, les collectivités locales oeuvrent à la transmission d'entreprises. J'ai souhaité signer cette déclaration avec les réseaux, car ce sont vers ces réseaux que les chefs d'entreprises se retournent en premier lieu lorsqu'ils s'interrogent sur la transmission d'entreprise. Mais ce n'est pas exclusif en termes d'action. Les actions que nous allons engager pourront être montées en partenariat avec des organismes tiers.
Tout renfort est bienvenu en la matière car la transmission d'entreprise est un sujet de préoccupation locale, nationale et même européen. La transmission d'entreprise est un enjeu capital pour notre économie. Les chiffres sont impressionnants. Aujourd'hui près d'un dirigeant sur deux n'est pas préparé à la transmission de son entreprise avec, pour conséquence, un échec de la reprise, souvent faute de repreneur.
Une entreprise est souvent attachée à son propriétaire qui en est souvent aussi le dirigeant et l'actionnaire. Ainsi, un changement à la tête d'une entreprise peut induire des risques s'il n'est pas préparé.
Ce changement peut aussi offrir des opportunités de développement quand il est anticipé grâce au souffle nouveau apporté par le repreneur.
En effet, la reprise d'entreprise est l'occasion d'innover sur des bases solides. Le regard neuf apporté par le repreneur est souvent source d'un essor accru de l'entreprise.
En outre, une bonne préparation permet de donner ses chances à un repreneur salarié ou héritier qui dispose d'atouts incontestables pour mener une reprise avec succès. Or, d'après plusieurs études, le taux de transmission familiale est en France très largement inférieur à ce que l'on peut constater dans d'autres pays européens comparables. Vous le savez, ce chiffre a largement été commenté, dans notre pays 1 entreprise sur 10 est transmise de manière familiale alors qu'il y en a 5 sur 10 en Allemagne et 7 sur 10 en Italie ? Or les études révèlent qu'une reprise familiale - ou par un salarié de l'entreprise - est le meilleur gage d'une transmission réussie. La connaissance de l'entreprise par le repreneur est un facteur incontestable de succès : le niveau de risque est faible pour les transmissions familiales et un ancien salarié a deux fois plus de chances de réussite qu'un repreneur extérieur. Pourtant seuls 2 chefs d'entreprise français sur 10 souhaitent transmettre leur entreprise à un membre de leur famille alors qu'en Allemagne et en Italie, ils sont 7 sur 10.
Ce déficit en termes de transmission familiale est un handicap pour l'économie française. Je n'ai pas peur de vous le dire aujourd'hui : le capitalisme familial peut et doit être une alternative au capitalisme purement financier. Car les entreprises familiales portent des valeurs différentes du capitalisme financier : les entreprises familiales sont ancrées dans leur territoire, et elles sont donc moins susceptibles de délocaliser. Les entreprises familiales sont gérées de manière plus patrimoniale, avec un horizon de long terme. L'entreprise familiale développe un modèle de capital patient, performant sur de nombreux critères.
Pourquoi ce déficit en termes de transmission ? La fiscalité française a été un handicap évident mais nous y avons remédié. Lorsqu'il était ministre en charge des PME, Renaud Dutreil avait exonéré les plus-values que l'entrepreneur encaissait en vendant sa société. Après l'élection de Nicolas Sarkozy, nous avons concentré nos efforts sur le repreneur.
Ainsi, la loi de modernisation de l'économie adoptée au mois d'août a introduit plusieurs dispositions fiscales en faveur du repreneur : allègement des droits de mutations, aide au financement par l'emprunt, tutorat du repreneur.
1 - Les droits de mutation passent de 5 à 3% pour la vente des sociétés, dès lors que leur valeur taxable n'excède pas 200 000 euros.
2 - En cas de reprise d'une entreprise dont le fonds vaut moins de 300 000 euros par des salariés ou des membres de la famille du vendeur, le rachat peut être exonéré de droits de mutation si les repreneurs s'engagent à poursuivre l'activité pendant 5 ans.
3 - Le repreneur qui souscrit un emprunt pour acheter une part de l'entreprise bénéficie d'une réduction d'impôt sur le revenu. Pour cela, la détention minimale de la société reprise est réduite à un minimum de 25% du capital de la société reprise, au lieu de 50% précédemment.
4 - Le plafond des intérêts retenus pour le calcul de cette réduction d'impôt est doublé et porté à 20 000 euros pour une personne seule et 40 000 euros pour un couple.
Le financement de la transmission des petites et moyennes entreprises fait aussi l'objet d'une attention toute particulière. Oséo facilite le financement des reprises d'entreprises en partenariat avec les banques. Le Contrat de développement transmission permet de consolider un plan de financement fragilisé par une insuffisance d'apport en fonds propres. Dans le cadre de la déclaration signée aujourd'hui, nous avons porté le plafond du Contrat de développement transmission de 240 000 à 400 000 euros ce qui permettra à Oséo d'intervenir sur des opérations de 2 millions d'euros.
Je souhaite aussi saluer le Directeur général de la SIAGI, Michel Cottet ici présent. La SIAGI est la société de caution mutuelle filiale des Chambres de métiers et de l'artisanat. Elle garantit, tout comme Oséo, les financements des entreprises. Ses interventions en garantie sont plus particulièrement dédiées à la transmission-reprise dans l'artisanat et les activités de proximité. Les fonds propres de la SIAGI seront renforcés de 3 Meuros pour poursuivre résolument la croissance de son activité.
Les problèmes de fiscalité et de financement ne sont pas les seuls responsables des difficultés rencontrées en termes de transmission d'entreprise. Il y a des freins psychologiques et culturels pour lesquels j'ai souhaité mettre en oeuvre des mesures de terrain qui vont toucher les entrepreneurs.
Avec les Présidents ici présents, je souhaite promouvoir les mécanismes de la transmission, je souhaite améliorer la préparation à la transmission, je souhaite améliorer la formation et l'accompagnement des repreneurs, je souhaite fluidifier la mise en relation entre cédant et repreneur.
A l'heure actuelle, beaucoup d'entrepreneurs répugnent à dire publiquement que leur retraite approche, pour ne pas fragiliser leur société. Nous avons mis au point avec les experts-comptables, les notaires et les réseux consulaires un mécanisme qui leur permettra d'étudier les modalités de transmission de leur affaire sans s'inquiéter des répercussions. J'ai souhaité lancer ce dispositif dès 2008. 2 millions d'euros permettront de financer un premier lot de 500 pré-diagnostics de performance pour des entreprises indépendantes de plus de 10 salariés. Cette opération sera mise en oeuvre par l'APCE qui développera à cette fin un programme particulier.
Voilà les grandes lignes de la déclaration que nous allons signer dans un instant. Il est important d'améliorer les conditions de la transmission d'entreprise, afin de pérenniser et surtout de développer les entreprises françaises. En améliorant les conditions de la transmission d'entreprise, le Gouvernement permet aux entreprises petites et moyennes de grandir pour devenir des eEntreprises de taille intermédiaires désormais consacrées dans la loi de modernisation de l'économie. Cette dynamique est fondamentale pour que la France retrouve le chemin de la croissance.
Avant de répondre à vos questions sur cette déclaration, je me devais de revenir sur la crise financière. Le Président de la République l'a dit avec force, l'Etat garantit tous les dépôts et il ne laissera aucune institution bancaire française acculée à la faillite.
Dans l'épreuve, les PME sont au coeur de notre sursaut. Elles le sont aujourd'hui, au moment où nous allons devoir compter sur nos forces vives pour passer le cap des turbulences financières.
Pour les PME, l'urgence c'est la pérennité du système de financement de l'économie. Car si ce système bascule, si le crédit se resserre, l'activité des PME s'étouffera, et c'est alors toutes nos chances de rebondir qui s'effondreront.
L'urgence, c'est aussi de garantir aux PME la possibilité de continuer à financer leurs investissements ou d'assurer leur trésorerie.
Le 2 octobre, nous avons décidé la mise en place d'un plan de soutien aux entreprises de 22 milliards d'euros. Ce plan prend en premier lieu appui sur Oséo.
Nous avons décidé d'augmenter le montant des prêts bancaires aux PME pouvant bénéficier de la garantie d'Oséo de 2 milliards d'euros d'ici à la fin 2009. Cette mesure est déjà opérationnelle.
Pour tenir compte de la fragilité des PME dont le financement repose sur des prêts court terme, le gouvernement a aussi demandé à Oséo de faciliter la conversion des prêts court terme en moyen ou long terme. Oséo a donc la capacité d'accompagner la consolidation de financements court terme à hauteur d'1 milliard d'euros. Cette disposition s'appuie sur un fonds de garantie spécifique opérationnel sous quelques jours.
Les fonds mis à disposition d'Oséo financement seront aussi augmentés de 50%. Concrètement, la Caisse des dépôts va ouvrir une nouvelle ligne de refinancement de 2 milliards d'euros à Oséo à des conditions attractives. Ceci permettra d'augmenter d'autant la capacité d'Oséo à accompagner en cofinancement les prêts bancaires aux PME et aux entreprises de taille intermédiaire. Cette disposition est déjà effective pour les entreprises. François Drouin y reviendra.
En pratique, je souhaite que ces prêts supplémentaires répondent au besoin crucial de trésorerie des PME. Pour cela :
- Oséo propose aujourd'hui un produit de mobilisation de créance « Avance Plus ». La mobilisation de créance cela signifie qu'une PME cède ses créances à Oséo qui lui en assure l''avance en contrepartie. Je peux vous annoncer que ce dispositif qui est aujourd'hui utilisé essentiellement pour des donneurs d'ordre publics sera ouvert plus largement aux donneurs d'ordres privés. C'est une véritable réponse à la question du crédit inter-entreprise.
- Ce n'est pas tout, à côté de la mobilisation de la créance inter-entreprise, nous pouvons aussi mobiliser via Oséo les créances fiscales des PME. Le Crédit Impôt Recherche peut théoriquement être mobilisé auprès d'un établissement de crédit en application de la loi Dailly. Or les banques sont peu disposées à accorder un crédit en contrepartie de cette créance qui peut parfois être remise en cause par l'administration fiscale. Je souhaite qu'Oséo développe beaucoup plus fortement cette mobilisation de créance des PME. C'est la suite logique de la loi de modernisation de l'économie qui a introduit le rescrit fiscal pour le crédit d'impôt recherche, dont Oséo devient l'un des opérateurs.
Par ailleurs, nous avons mobilisé 17 milliards d'euros d'épargne réglementée pour le financement des PME. Il s'agit des fonds du Livret de développement durable, l'ancien CODEVI, et du Livret d'épargne populaire. En termes de calendrier, comme le Premier ministre l'a annoncé hier, les 8 milliards provenant de la collecte du LDD sont rendus disponibles dès la fin de cette semaine et les 9 milliards provenant du LEP seront disponibles à la mi-octobre.
Avec ce plan, nous donnons aux banques la matière première qui leur permettra de continuer à prêter à l'économie. Mais que les choses soient claires : le contrat, c'est que l'argent ne reste pas dans les banques, mais qu'il soit reprêté aux PME ! Il est clair que tout euro accordé aux banques sera converti en 1 euro prêté à une PME.
Pour s'en assurer, nous mettrons en place des dispositifs de suivi et de contrôle. Sous 15 jours, l'Etat signera une convention avec la Fédération bancaire française. Cette convention nous permettra de suivre précisément les montants globaux de prêts aux PME. L'outil est déjà en place : depuis un an, nos banques publient le montant de leurs crédits aux PME. Mais cette publication est semestrielle. Vu la vitesse à laquelle évolue notre environnement économique, il faut plus de réactivité. Voilà pourquoi nous exigerons des banques une publication mensuelle et toute la transparence sur l'utilisation des fonds orientés vers les PME, en termes d'encours comme de nouveaux prêts.
Ces mesures complètent les 30 milliards d'euros de prêts aux PME annoncés par la Banque européenne d'investissement (BEI), qui mettra des ressources précieuses à la disposition des banques. Sur ces 30 milliards, la France peut légitimement en attendre 4, soit 1 milliard par an entre 2008 et 2011. Le premier accord conclu entre une banque européenne et la BEI a été signé hier en présence de Christine Lagarde. Nous avons mis en oeuvre avec BNP Paribas le premier prêt en Europe de 300 millions d''euros.
Pour que les PME s'y retrouvent dans ce « maquis » Christine Lagarde a annoncé le lancement d''un numéro azur, le 0810 00 12 10, fonctionnant dès aujourd'hui, et la désignation de « parrains PME » au sein des DRIRE (Directions régionales de l''industrie de la recherche et l''environnement). François Drouin aura le loisir de nous expliquer dans un instant la procédure qu'une entreprise doit suivre pour accéder au dispositif.
En matière de trésorerie, je sais que l'attente des PME est forte s'agissant de la réduction des délais de paiement publics. Pour l'Etat, un décret publié fin avril a réduit de 45 à 30 jours les délais de paiement, et nous appliquerons cette règle avec rigueur.
Et s'agissant des collectivités locales, je mène actuellement une négociation pour qu'elles aussi passent de 45 à 30 jours. J'ai réuni lundi les associations d'élus. Mon souhait est de soumettre ces décrets au comité des finances locales d'ici la fin du mois. Pour ma part, je suis favorable à une entrée en vigueur de cette mesure dès 2009.
Toutes ces mesures sont nécessaires pour faire face à la tempête. Mais elles ne doivent pas nous faire oublier notre cap. Depuis un an, nous déployons un arsenal de mesures qui doivent faciliter la vie et le développement des PME. La transmission d'entreprise est un enjeu majeur pour lequel nous allions nos forces aujourd'hui.
Je vous remercie.
Source http://www.minefe.gouv.fr, le 10 octobre 2008