Texte intégral
Mesdames et Messieurs,
Je suis très heureuse de vous accueillir pour évoquer les manifestations du 40ème anniversaire de la « loi sur les dations » du 31 décembre 1968.
L'intitulé exact que lui avait donné André Malraux était : « loi tendant à favoriser la conservation du patrimoine artistique national ». Ce titre avait le mérite de bien refléter l'objectif poursuivi : permettre que des chefs-d'oeuvre demeurent sur le territoire, pour entrer dans les collections nationales.
Nous connaissons tous le principe de la « dation en paiement ». Il s'agit de permettre aux héritiers, aux donateurs ou aux légataires d'un collectionneur ou d'un artiste, et aux redevables de l'ISF, de s'acquitter de leurs obligations fiscales en proposant un objet d'art à l'Etat, au prix du marché.
En revanche, on connaît moins bien ses modalités.
Notamment le fait que les biens autorisés à faire l'objet d'une dation sont sélectionnés, avec rigueur, par une commission composée à parité de représentants du ministère des Finances et du ministère de la Culture, présidée par le professeur Jean-Pierre Changeux, que je remercie de sa présence.
Cher Jean-Pierre Changeux, tout le monde connaît le neurobiologiste éminent, le professeur au Collège de France ; on ne connaît pas toujours l'amateur d'art, le collectionneur avisé et le généreux donateur de nos musées. Vous présidez la commission interministérielle depuis 1988. C'est dans ce cadre que vous assurez la conciliation de l'intérêt particulier - celui du dateur potentiel - et de l'intérêt général, en donnant un avis sur l'intérêt artistique et historique du bien offert et sur sa valeur. Avis qui est presque toujours suivi par le ministre des Finances.
Pour moi, ce 40e anniversaire est d'abord l'occasion de dresser un bilan de la dation. Les chiffres, mais aussi la qualité des oeuvres, sont saisissants.
Au total, ce sont plus de 10 000 oeuvres d'art, livres, biens culturels divers, qui ont pu entrer dans nos collections nationales grâce à ce dispositif.
C'est en 1972 qu'a lieu la première dation. Il s'agissait de cet illustre portrait de Diderot par Fragonard que nous avons sous les yeux. On le retrouve dans tous les livres d'histoire, car il a appartenu à de grands collectionneurs - de François Hippolyte Walferdin, physicien et ami d'Arago à la comtesse Charles de Vogüé - avant de rejoindre les collections du musée du Louvre. Depuis cette date, la valeur cumulée des oeuvres entrées en dation s'élève à 809 millions d'euros, soit en moyenne 22 à 23 millions d'euros par an.
Le montant des dations qui enrichissent les musées nationaux représente l'équivalent de 70% de leur budget d'acquisition annuel.
Si cette loi n'avait pas été promulguée il n'y aurait pas, aujourd'hui, un second Vermeer au Louvre ; l'Origine du monde de Gustave Courbet ne serait pas exposée au musée d'Orsay ; le public du musée des Beaux-Arts de Lille ne pourrait pas admirer La Femme à l'éventail de Manet ; la Ville de Nantes n'aurait pu recueillir les archives de la biscuiterie Lefèvre-Utile ...
Sans cette loi, il n'y aurait tout simplement pas de musée Picasso.
D'importantes donations ont été faites ces dernières années. Le musée national d'art moderne, par exemple, s'est enrichi de l'exceptionnel Mur d'objets d'André Breton, d'un tableau majeur de Mark Rothko, d'une rare peinture de Francis Bacon.
Quant au tableau de Martial Raysse que vous pouvez admirer ici-même, il est entré dans les collections du MNAM en 2008. Il avait été acheté vers 1966 - donc juste après sa création -, par Monsieur et Madame Pompidou, dont nous connaissons la passion pour l'art de leur temps. Il l'avaient accroché dans l'entrée de leur appartement du quai de Béthune et ne s'en étaient jamais séparé. C'est donc un témoignage très émouvant, qui manifeste aussi la présence dans les dations d'oeuvres d'artistes vivants.
La collection de minéralogie que vous pouvez voir témoigne, elle, de la diversité des biens qui peuvent faire l'objet d'un paiement en dation. La majorité sont des oeuvres d'art, mais ils peuvent aussi relever des sciences et des techniques ou encore de l'histoire naturelle. Cette collection de « pierres à figures » trônait dans tout l'appartement de Roger Caillois et de son épouse Alena. Elle a inspiré les premiers textes de l'écrivain sur l'Esthétique généralisée des formes minérales, et plus particulièrement ses deux ouvrages L'Ecriture des pierres et Pierres réfléchies.
Chacune de ces oeuvres a vécu un destin exceptionnel. Chacune de ces oeuvres nous raconte une histoire.
Je pourrais multiplier les illustrations - notamment l'entrée dans les collections du musée Picasso, en 2007 du Portrait de Madame Paul Rosenberg et sa fille, que nous avons tous en mémoire. Mais je suppose que Jean-Pierre Changeux a lui-même de nombreux exemples en tête.
Ce 40e anniversaire est donc l'occasion de rendre plus visible la place de la dation et, au-delà, de valoriser le rôle essentiel des collectionneurs privés.
Parler de la dation, c'est déjà un petit événement. L'idée qu'il s'agit d'une forme de privilège, accordé à des personnes fortunées, est restée longtemps vivace. Pourtant, cela n'a absolument rien d'un privilège : les dateurs paient leur impôt à la collectivité, mais sous une forme particulière.
A cause de cette idée, sans doute, il est de coutume de ne pas remercier pas les dateurs.
Je pense au contraire qu'il est du devoir de l'Etat de mieux faire connaître le rôle irremplaçable de la dation dans la constitution des collections publiques. Et d'honorer la mémoire de l'artiste, ou du collectionneur qui a accompli ce geste.
De façon générale, la place éminente des collections et des collectionneurs privés doit être davantage reconnue.
Leur rôle dans la constitution du patrimoine national, dans la diffusion de la culture et dans la défense de nos artistes, doit être davantage mis en lumière.
Il en va de la qualité des relations entre collectionneurs et institutions publiques. Il en va également du succès de toute politique de dynamisation du marché de l'art, qui passe par des mesures concrètes - sur lesquelles je reviendrai - mais également par des actes symboliques destinés à reconnaître le rôle de chacun
A l'occasion de ce 40e anniversaire, j'ai donc décidé de lancer une campagne d'information à destination du grand public comme des professionnels :
une plaquette, rédigée par le professeur Changeux, a été éditée pour expliquer le mécanisme de la loi ;
un logo « dation » sera apposé, dans les musées et les monuments, sur toutes les oeuvres entrées par ce biais dans nos collections nationales ;
une base de données, accessible sur le site « culture.fr », recensera toutes les oeuvres reçues ;
enfin, de très nombreuses expositions seront organisées cette année dans les institutions du ministère de la Culture ; vous pourrez trouver le programme complet sur le site « culture.gouv.fr » mais je peux déjà citer la grande exposition de manuscrits qui a lieu en ce moment-même et jusqu'au 15 mars à la BnF - avec notamment des écrits de Proust, de Simone de Beauvoir et de Jean-Paul Sartre. Des manuscrits de Jules Verne seront également présentés à Nantes, et de Montesquieu à Bordeaux. De très nombreux musées nationaux sont concernés : le MNAM, qui met en place un « parcours des dations », le Louvre, le Quai Branly, Orsay, le musée du Château de Versailles, le musée Picasso et bien d'autres. Mais aussi beaucoup de musées des collectivités territoriales, comme le musée des beaux-arts d'Angers ou le musée de Céret.
Au-delà du ministère de la Culture, tous les musées gérés par d'autres ministères - Justice, Finances, D??fense, Enseignement supérieur et recherche - se sont également mobilisés.
Et après le 40ème anniversaire ?
Nous pourrons, je l'espère, aller encore plus loin dans les mois et les années qui viennent.
Pour ce qui concerne la dation :
j'ai demandé à la direction des musées de France d'étudier, en pleine concertation avec les établissements concernés, la possibilité d'une grande exposition qui rassemblerait, dans un même lieu, les grands chefs-d'oeuvre entrés dans les collections publiques par la dation en paiement ; je ne méconnais pas la difficulté de l'exercice en termes d'organisation, mais je pense que cette idée pourrait rencontrer les faveurs du public et constituer une manifestation éclatante de reconnaissance de la place des dations ;
je souhaite également que la piste d'une extension de la dation au paiement de l'impôt sur le revenu soit étudiée, en liaison avec les services d'Eric Woerth. En effet, l'allègement récent des droits de succession et de mutation risque de remettre en cause l'attractivité du mécanisme. Par ailleurs, une telle mesure permettrait de « lisser », d'une année sur l'autre, le montant des oeuvres concernées, qui varie pour l'instant de moins de 5 millions d'euros à plus de 33 millions d'euros.
Mais la dation s'inscrit dans un ensemble d'autres dispositifs qui permettent de concilier l'intérêt des collectionneurs privés -particuliers ou entreprises - avec l'intérêt général.
Je pense bien sûr à la législation sur le mécénat en matière de « trésors nationaux », qui permet aux entreprises de déduire de leur impôt sur les sociétés 90% du prix d'achat de ces oeuvres majeures lorsqu'elles sont destinées aux collections publiques.
Je pense également au dispositif de déduction du résultat imposable, instauré depuis 1987 au bénéfice des entreprises qui acquièrent des oeuvres d'artistes vivants pour les exposer dans des lieux accessibles au public.
A l'occasion de ses voeux au monde de la culture, à Nîmes, le 13 janvier dernier, le Président de la République a réaffirmé le rôle clé de ces différentes mesures dans l'enrichissement de nos collections et dans le dynamisme de notre marché de l'art.
C'était un geste symbolique très important de la part de Nicolas SARKOZY, et c'est pour approfondir l'efficacité de ces dispositifs que j'ai décidé de porter deux préconisations du rapport de Martin Bethenod :
l'adaptation aux PME du dispositif fiscal pour les entreprises qui achètent des oeuvres d'artistes vivants, avec le doublement du plafond autorisé : de 0,5% à 1% de leur chiffre d'affaires ; par ailleurs, le dispositif doit être étendu aux professions libérales et aux entrepreneurs individuels ;
et concernant les particuliers, la mise en place d'un dispositif de prêt sans intérêt, plafonné à 5 000 euros, via la législation sur le mécénat. Vous le savez, ce dispositif s'inspire du programme anglais Own Art, lancé en 2004, qui a rencontré un grand succès, notamment auprès des classes moyennes et des jeunes acheteurs : plus de 30% des utilisateurs avaient un revenu inférieur à la moyenne, et 30% ont acheté une oeuvre pour la première fois. Car encourager les nouveaux collectionneurs, c'est soutenir directement la jeune création.
Plus généralement, le potentiel de croissance économique que recèle le marché de l'art doit être pleinement exploité, comme l'a été celui du patrimoine avec le plan d'investissement exceptionnel de 100 millions d'euros.
Je souhaite à présent, avant de répondre à vos questions, donner la parole au professeur Jean-Pierre Changeux, pour évoquer l'expérience tirée de la présidence de la commission des dations et, peut-être, pour formuler des suggestions aux pouvoirs publics.
Je vous remercie.Source http://www.culture.gouv.fr, le 27 janvier 2009
Je suis très heureuse de vous accueillir pour évoquer les manifestations du 40ème anniversaire de la « loi sur les dations » du 31 décembre 1968.
L'intitulé exact que lui avait donné André Malraux était : « loi tendant à favoriser la conservation du patrimoine artistique national ». Ce titre avait le mérite de bien refléter l'objectif poursuivi : permettre que des chefs-d'oeuvre demeurent sur le territoire, pour entrer dans les collections nationales.
Nous connaissons tous le principe de la « dation en paiement ». Il s'agit de permettre aux héritiers, aux donateurs ou aux légataires d'un collectionneur ou d'un artiste, et aux redevables de l'ISF, de s'acquitter de leurs obligations fiscales en proposant un objet d'art à l'Etat, au prix du marché.
En revanche, on connaît moins bien ses modalités.
Notamment le fait que les biens autorisés à faire l'objet d'une dation sont sélectionnés, avec rigueur, par une commission composée à parité de représentants du ministère des Finances et du ministère de la Culture, présidée par le professeur Jean-Pierre Changeux, que je remercie de sa présence.
Cher Jean-Pierre Changeux, tout le monde connaît le neurobiologiste éminent, le professeur au Collège de France ; on ne connaît pas toujours l'amateur d'art, le collectionneur avisé et le généreux donateur de nos musées. Vous présidez la commission interministérielle depuis 1988. C'est dans ce cadre que vous assurez la conciliation de l'intérêt particulier - celui du dateur potentiel - et de l'intérêt général, en donnant un avis sur l'intérêt artistique et historique du bien offert et sur sa valeur. Avis qui est presque toujours suivi par le ministre des Finances.
Pour moi, ce 40e anniversaire est d'abord l'occasion de dresser un bilan de la dation. Les chiffres, mais aussi la qualité des oeuvres, sont saisissants.
Au total, ce sont plus de 10 000 oeuvres d'art, livres, biens culturels divers, qui ont pu entrer dans nos collections nationales grâce à ce dispositif.
C'est en 1972 qu'a lieu la première dation. Il s'agissait de cet illustre portrait de Diderot par Fragonard que nous avons sous les yeux. On le retrouve dans tous les livres d'histoire, car il a appartenu à de grands collectionneurs - de François Hippolyte Walferdin, physicien et ami d'Arago à la comtesse Charles de Vogüé - avant de rejoindre les collections du musée du Louvre. Depuis cette date, la valeur cumulée des oeuvres entrées en dation s'élève à 809 millions d'euros, soit en moyenne 22 à 23 millions d'euros par an.
Le montant des dations qui enrichissent les musées nationaux représente l'équivalent de 70% de leur budget d'acquisition annuel.
Si cette loi n'avait pas été promulguée il n'y aurait pas, aujourd'hui, un second Vermeer au Louvre ; l'Origine du monde de Gustave Courbet ne serait pas exposée au musée d'Orsay ; le public du musée des Beaux-Arts de Lille ne pourrait pas admirer La Femme à l'éventail de Manet ; la Ville de Nantes n'aurait pu recueillir les archives de la biscuiterie Lefèvre-Utile ...
Sans cette loi, il n'y aurait tout simplement pas de musée Picasso.
D'importantes donations ont été faites ces dernières années. Le musée national d'art moderne, par exemple, s'est enrichi de l'exceptionnel Mur d'objets d'André Breton, d'un tableau majeur de Mark Rothko, d'une rare peinture de Francis Bacon.
Quant au tableau de Martial Raysse que vous pouvez admirer ici-même, il est entré dans les collections du MNAM en 2008. Il avait été acheté vers 1966 - donc juste après sa création -, par Monsieur et Madame Pompidou, dont nous connaissons la passion pour l'art de leur temps. Il l'avaient accroché dans l'entrée de leur appartement du quai de Béthune et ne s'en étaient jamais séparé. C'est donc un témoignage très émouvant, qui manifeste aussi la présence dans les dations d'oeuvres d'artistes vivants.
La collection de minéralogie que vous pouvez voir témoigne, elle, de la diversité des biens qui peuvent faire l'objet d'un paiement en dation. La majorité sont des oeuvres d'art, mais ils peuvent aussi relever des sciences et des techniques ou encore de l'histoire naturelle. Cette collection de « pierres à figures » trônait dans tout l'appartement de Roger Caillois et de son épouse Alena. Elle a inspiré les premiers textes de l'écrivain sur l'Esthétique généralisée des formes minérales, et plus particulièrement ses deux ouvrages L'Ecriture des pierres et Pierres réfléchies.
Chacune de ces oeuvres a vécu un destin exceptionnel. Chacune de ces oeuvres nous raconte une histoire.
Je pourrais multiplier les illustrations - notamment l'entrée dans les collections du musée Picasso, en 2007 du Portrait de Madame Paul Rosenberg et sa fille, que nous avons tous en mémoire. Mais je suppose que Jean-Pierre Changeux a lui-même de nombreux exemples en tête.
Ce 40e anniversaire est donc l'occasion de rendre plus visible la place de la dation et, au-delà, de valoriser le rôle essentiel des collectionneurs privés.
Parler de la dation, c'est déjà un petit événement. L'idée qu'il s'agit d'une forme de privilège, accordé à des personnes fortunées, est restée longtemps vivace. Pourtant, cela n'a absolument rien d'un privilège : les dateurs paient leur impôt à la collectivité, mais sous une forme particulière.
A cause de cette idée, sans doute, il est de coutume de ne pas remercier pas les dateurs.
Je pense au contraire qu'il est du devoir de l'Etat de mieux faire connaître le rôle irremplaçable de la dation dans la constitution des collections publiques. Et d'honorer la mémoire de l'artiste, ou du collectionneur qui a accompli ce geste.
De façon générale, la place éminente des collections et des collectionneurs privés doit être davantage reconnue.
Leur rôle dans la constitution du patrimoine national, dans la diffusion de la culture et dans la défense de nos artistes, doit être davantage mis en lumière.
Il en va de la qualité des relations entre collectionneurs et institutions publiques. Il en va également du succès de toute politique de dynamisation du marché de l'art, qui passe par des mesures concrètes - sur lesquelles je reviendrai - mais également par des actes symboliques destinés à reconnaître le rôle de chacun
A l'occasion de ce 40e anniversaire, j'ai donc décidé de lancer une campagne d'information à destination du grand public comme des professionnels :
une plaquette, rédigée par le professeur Changeux, a été éditée pour expliquer le mécanisme de la loi ;
un logo « dation » sera apposé, dans les musées et les monuments, sur toutes les oeuvres entrées par ce biais dans nos collections nationales ;
une base de données, accessible sur le site « culture.fr », recensera toutes les oeuvres reçues ;
enfin, de très nombreuses expositions seront organisées cette année dans les institutions du ministère de la Culture ; vous pourrez trouver le programme complet sur le site « culture.gouv.fr » mais je peux déjà citer la grande exposition de manuscrits qui a lieu en ce moment-même et jusqu'au 15 mars à la BnF - avec notamment des écrits de Proust, de Simone de Beauvoir et de Jean-Paul Sartre. Des manuscrits de Jules Verne seront également présentés à Nantes, et de Montesquieu à Bordeaux. De très nombreux musées nationaux sont concernés : le MNAM, qui met en place un « parcours des dations », le Louvre, le Quai Branly, Orsay, le musée du Château de Versailles, le musée Picasso et bien d'autres. Mais aussi beaucoup de musées des collectivités territoriales, comme le musée des beaux-arts d'Angers ou le musée de Céret.
Au-delà du ministère de la Culture, tous les musées gérés par d'autres ministères - Justice, Finances, D??fense, Enseignement supérieur et recherche - se sont également mobilisés.
Et après le 40ème anniversaire ?
Nous pourrons, je l'espère, aller encore plus loin dans les mois et les années qui viennent.
Pour ce qui concerne la dation :
j'ai demandé à la direction des musées de France d'étudier, en pleine concertation avec les établissements concernés, la possibilité d'une grande exposition qui rassemblerait, dans un même lieu, les grands chefs-d'oeuvre entrés dans les collections publiques par la dation en paiement ; je ne méconnais pas la difficulté de l'exercice en termes d'organisation, mais je pense que cette idée pourrait rencontrer les faveurs du public et constituer une manifestation éclatante de reconnaissance de la place des dations ;
je souhaite également que la piste d'une extension de la dation au paiement de l'impôt sur le revenu soit étudiée, en liaison avec les services d'Eric Woerth. En effet, l'allègement récent des droits de succession et de mutation risque de remettre en cause l'attractivité du mécanisme. Par ailleurs, une telle mesure permettrait de « lisser », d'une année sur l'autre, le montant des oeuvres concernées, qui varie pour l'instant de moins de 5 millions d'euros à plus de 33 millions d'euros.
Mais la dation s'inscrit dans un ensemble d'autres dispositifs qui permettent de concilier l'intérêt des collectionneurs privés -particuliers ou entreprises - avec l'intérêt général.
Je pense bien sûr à la législation sur le mécénat en matière de « trésors nationaux », qui permet aux entreprises de déduire de leur impôt sur les sociétés 90% du prix d'achat de ces oeuvres majeures lorsqu'elles sont destinées aux collections publiques.
Je pense également au dispositif de déduction du résultat imposable, instauré depuis 1987 au bénéfice des entreprises qui acquièrent des oeuvres d'artistes vivants pour les exposer dans des lieux accessibles au public.
A l'occasion de ses voeux au monde de la culture, à Nîmes, le 13 janvier dernier, le Président de la République a réaffirmé le rôle clé de ces différentes mesures dans l'enrichissement de nos collections et dans le dynamisme de notre marché de l'art.
C'était un geste symbolique très important de la part de Nicolas SARKOZY, et c'est pour approfondir l'efficacité de ces dispositifs que j'ai décidé de porter deux préconisations du rapport de Martin Bethenod :
l'adaptation aux PME du dispositif fiscal pour les entreprises qui achètent des oeuvres d'artistes vivants, avec le doublement du plafond autorisé : de 0,5% à 1% de leur chiffre d'affaires ; par ailleurs, le dispositif doit être étendu aux professions libérales et aux entrepreneurs individuels ;
et concernant les particuliers, la mise en place d'un dispositif de prêt sans intérêt, plafonné à 5 000 euros, via la législation sur le mécénat. Vous le savez, ce dispositif s'inspire du programme anglais Own Art, lancé en 2004, qui a rencontré un grand succès, notamment auprès des classes moyennes et des jeunes acheteurs : plus de 30% des utilisateurs avaient un revenu inférieur à la moyenne, et 30% ont acheté une oeuvre pour la première fois. Car encourager les nouveaux collectionneurs, c'est soutenir directement la jeune création.
Plus généralement, le potentiel de croissance économique que recèle le marché de l'art doit être pleinement exploité, comme l'a été celui du patrimoine avec le plan d'investissement exceptionnel de 100 millions d'euros.
Je souhaite à présent, avant de répondre à vos questions, donner la parole au professeur Jean-Pierre Changeux, pour évoquer l'expérience tirée de la présidence de la commission des dations et, peut-être, pour formuler des suggestions aux pouvoirs publics.
Je vous remercie.Source http://www.culture.gouv.fr, le 27 janvier 2009