Texte intégral
Je tenais beaucoup à être présent aujourd'hui pour signer avec vous la convention qui permet au projet « PASSerelle vers le Milieu Ordinaire » (PASSMO) de voir le jour.
I. Etat des lieux : les handicapés dans les entreprises
En 20 ans, la place des personnes handicapées dans les entreprises n'a cessé d'augmenter. La loi de 1987, qui impose aux entreprises de plus de 20 salariés d'employer 6% de handicapés, a eu un effet levier : aujourd'hui, chaque année, 100.000 personnes handicapées sont embauchées, alors qu'elles n'étaient que 7000 à 9000 avant la loi. L'évolution est très encourageante, mais il faut aller plus loin. Il reste beaucoup à faire pour mieux insérer les handicapés dans le monde du travail.
Seules 65% des entreprises concernées par la loi de 1987 emploient des handicapés, les autres préférant payer des pénalités pourtant élevées.
En outre, les travailleurs handicapés risquent d'être les premières victimes de la crise : en cette période, les chefs d'entreprise sont naturellement plus préoccupés par leur carnet de commandes que par l'embauche de personnes en difficulté. C'est surtout vrai dans les petites et moyennes entreprises, qui ont davantage besoin d'être accompagnées pour intégrer une personne handicapée dans leurs équipes.
Enfin, la dégradation de la conjoncture touche les entreprises adaptées, qui travaillent beaucoup dans le secteur de la sous-traitance (automobile notamment). A la suite du Pacte national pour l'emploi des travailleurs handicapés, annoncé par le Président de la République en juin 2008, plusieurs réformes de fond ont été engagées, grâce à une collaboration active entre les Secrétariats d'Etat à la solidarité et à l'emploi.
On a supprimé la limite d'âge pour l'accès des personnes handicapées à l'apprentissage ;
On a fait tomber la règle des six mois de présence pour le décompte des bénéficiaires de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés (OETH) dans les entreprises ;
On a aussi élargi la palette des stages qui peuvent être valorisés au titre de l'OETH.
Les entreprises adaptées bénéficient de la réforme du chômage partiel. A partir de cette année, l'Etat va aussi prendre en charge une partie du coût des arrêts maladie des travailleurs handicapés dans les entreprises adaptées.
II. La convention : objectifs et moyens
Dans la continuité de ces réformes, nous signons aujourd'hui une convention qui va renforcer les passerelles entre les Etablissements et services d'aide par le travail (ESAT) et les entreprises du milieu ordinaire. Le dispositif PASSMO prolonge la petite révolution des mentalités lancée en 2000 par le dispositif Emploi Protégé en Milieu Ordinaire (EPMO) : il prend à contre-pied les logiques en cours depuis les lois de 1975 sur le handicap. Il s'agit, plutôt que de continuer à augmenter le nombre de places en Etablissements et services d'aide par le travail (ESAT), de relever un pari plus ambitieux : aider les personnes handicapées à s'insérer dans les entreprises du milieu ordinaire, et libérer ainsi des places dans les ESAT pour les handicapés les plus en difficulté.
Je pense par exemple au parcours de Virginie, une femme de 35 ans souffrant de graves problèmes psychologiques. Pendant 5 ans, elle touche le RMI et effectue plusieurs stages en entreprises qui ne se passent pas bien. Elle perd totalement confiance en elle. Elle finit par entrer en ESAT dans le Rhône : elle reprend alors peu à peu confiance en ses capacités, elle se réhabitue au travail et aux relations sociales, elle se soigne tout en se formant au métier du service en restauration collective. Grâce au soutien des équipes d'accompagnement et à plusieurs bilans avec l'employeur qui ont permis d'identifier précisément ses difficultés et de trouver des solutions concrètes, elle est embauchée dans une cafétéria pour 3 ans, dans le cadre d'un Emploi protégé en milieu ordinaire ; à l'issue des 3 ans, elle décroche un CDI qu'elle occupe toujours maintenant.
L'histoire de Virginie, c'est celle de nombreux handicapés qui ont réussi leur intégration parce qu'on leur a donné l'opportunité de se former et de prouver leurs aptitudes en les accompagnant sur la durée. Car le vrai handicap réside bien plus dans l'absence de compétences que dans le dossier médical. La preuve en est : 93% des entreprises se disent satisfaites d'avoir recruté des personnes handicapées, car elles ont apporté diversité et ouverture dans leurs équipes. Notre objectif est donc clair : avec le contrat PASSMO, nous voulons, sur 3 ans, faire recruter en milieu ordinaire 650 travailleurs handicapés des services d'aide par le travail. Notre principale cible, ce sont les entreprises de moins de 100 salariés, en particulier celles qui n'emploient aucun travailleur handicapé. Le projet PASSMO va d'abord être expérimenté dans 4 régions (Île-de-France, Bretagne, Midi-Pyrénées et Rhône-Alpes), qui réunissent environ 400 ESAT.
Comment allons-nous procéder ? Le dispositif est simple et directement opérationnel. Nous allons utiliser deux leviers :
- Premier levier : le renforcement du soutien aux entreprises qui recrutent un travailleur sortant d'ESAT. Pendant les 3 ans que dure le contrat PASSMO, l'employeur et le travailleur handicapé sont accompagnés par les établissements et services d'aide par le travail (ESAT), et si besoin par un service d'accompagnement à la vie sociale.
- Deuxième levier : l'incitation financière. Pendant 3 ans, l'Agefiph va verser à l'employeur une aide forfaitaire annuelle. Son montant est calculé en fonction du temps de travail : ce sera par exemple 9000 euros pour un temps de travail supérieur ou égal à 80% d'un temps plein.
La convention PASSMO est conclue pour trois ans. Elle est suivie par un comité de pilotage, qui se livrera dans un an à une première grande évaluation du dispositif : il s'agit de mesurer son efficacité et de veiller à ce que les crédits de l'Etat et de l'Agefiph soient bien utilisés. Si le premier bilan est positif, et je ne doute pas qu'il le sera, l'action se poursuivra jusqu'au 31 décembre 2011. Le grand risque, dans cette crise, c'est de fermer la porte des entreprises à toutes les personnes en difficulté, comme on l'a fait dans les années 1980, où les personnes handicapées ont été les premières à perdre leur emploi et à s'enfoncer dans la spirale du chômage de longue durée. Mon message est clair : il faut lever les blocages des mentalités, les tabous autour du handicap qui sont propres à la société française, et qui sont beaucoup moins présents aux Etats-Unis ou dans les pays nordiques. L'égalité entre tous les salariés, qui figure dans la loi du 1er janvier.
2006, ne doit pas être un voeu pieux, un idéal inaccessible. Le dispositif PASSMO va contribuer à traduire concrètement ce principe, au service d'une expérience gagnant-gagnant pour les entreprises et pour les travailleurs handicapés.
Source http://www.travail-solidarite.gouv.fr, le 14 mai 2009
I. Etat des lieux : les handicapés dans les entreprises
En 20 ans, la place des personnes handicapées dans les entreprises n'a cessé d'augmenter. La loi de 1987, qui impose aux entreprises de plus de 20 salariés d'employer 6% de handicapés, a eu un effet levier : aujourd'hui, chaque année, 100.000 personnes handicapées sont embauchées, alors qu'elles n'étaient que 7000 à 9000 avant la loi. L'évolution est très encourageante, mais il faut aller plus loin. Il reste beaucoup à faire pour mieux insérer les handicapés dans le monde du travail.
Seules 65% des entreprises concernées par la loi de 1987 emploient des handicapés, les autres préférant payer des pénalités pourtant élevées.
En outre, les travailleurs handicapés risquent d'être les premières victimes de la crise : en cette période, les chefs d'entreprise sont naturellement plus préoccupés par leur carnet de commandes que par l'embauche de personnes en difficulté. C'est surtout vrai dans les petites et moyennes entreprises, qui ont davantage besoin d'être accompagnées pour intégrer une personne handicapée dans leurs équipes.
Enfin, la dégradation de la conjoncture touche les entreprises adaptées, qui travaillent beaucoup dans le secteur de la sous-traitance (automobile notamment). A la suite du Pacte national pour l'emploi des travailleurs handicapés, annoncé par le Président de la République en juin 2008, plusieurs réformes de fond ont été engagées, grâce à une collaboration active entre les Secrétariats d'Etat à la solidarité et à l'emploi.
On a supprimé la limite d'âge pour l'accès des personnes handicapées à l'apprentissage ;
On a fait tomber la règle des six mois de présence pour le décompte des bénéficiaires de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés (OETH) dans les entreprises ;
On a aussi élargi la palette des stages qui peuvent être valorisés au titre de l'OETH.
Les entreprises adaptées bénéficient de la réforme du chômage partiel. A partir de cette année, l'Etat va aussi prendre en charge une partie du coût des arrêts maladie des travailleurs handicapés dans les entreprises adaptées.
II. La convention : objectifs et moyens
Dans la continuité de ces réformes, nous signons aujourd'hui une convention qui va renforcer les passerelles entre les Etablissements et services d'aide par le travail (ESAT) et les entreprises du milieu ordinaire. Le dispositif PASSMO prolonge la petite révolution des mentalités lancée en 2000 par le dispositif Emploi Protégé en Milieu Ordinaire (EPMO) : il prend à contre-pied les logiques en cours depuis les lois de 1975 sur le handicap. Il s'agit, plutôt que de continuer à augmenter le nombre de places en Etablissements et services d'aide par le travail (ESAT), de relever un pari plus ambitieux : aider les personnes handicapées à s'insérer dans les entreprises du milieu ordinaire, et libérer ainsi des places dans les ESAT pour les handicapés les plus en difficulté.
Je pense par exemple au parcours de Virginie, une femme de 35 ans souffrant de graves problèmes psychologiques. Pendant 5 ans, elle touche le RMI et effectue plusieurs stages en entreprises qui ne se passent pas bien. Elle perd totalement confiance en elle. Elle finit par entrer en ESAT dans le Rhône : elle reprend alors peu à peu confiance en ses capacités, elle se réhabitue au travail et aux relations sociales, elle se soigne tout en se formant au métier du service en restauration collective. Grâce au soutien des équipes d'accompagnement et à plusieurs bilans avec l'employeur qui ont permis d'identifier précisément ses difficultés et de trouver des solutions concrètes, elle est embauchée dans une cafétéria pour 3 ans, dans le cadre d'un Emploi protégé en milieu ordinaire ; à l'issue des 3 ans, elle décroche un CDI qu'elle occupe toujours maintenant.
L'histoire de Virginie, c'est celle de nombreux handicapés qui ont réussi leur intégration parce qu'on leur a donné l'opportunité de se former et de prouver leurs aptitudes en les accompagnant sur la durée. Car le vrai handicap réside bien plus dans l'absence de compétences que dans le dossier médical. La preuve en est : 93% des entreprises se disent satisfaites d'avoir recruté des personnes handicapées, car elles ont apporté diversité et ouverture dans leurs équipes. Notre objectif est donc clair : avec le contrat PASSMO, nous voulons, sur 3 ans, faire recruter en milieu ordinaire 650 travailleurs handicapés des services d'aide par le travail. Notre principale cible, ce sont les entreprises de moins de 100 salariés, en particulier celles qui n'emploient aucun travailleur handicapé. Le projet PASSMO va d'abord être expérimenté dans 4 régions (Île-de-France, Bretagne, Midi-Pyrénées et Rhône-Alpes), qui réunissent environ 400 ESAT.
Comment allons-nous procéder ? Le dispositif est simple et directement opérationnel. Nous allons utiliser deux leviers :
- Premier levier : le renforcement du soutien aux entreprises qui recrutent un travailleur sortant d'ESAT. Pendant les 3 ans que dure le contrat PASSMO, l'employeur et le travailleur handicapé sont accompagnés par les établissements et services d'aide par le travail (ESAT), et si besoin par un service d'accompagnement à la vie sociale.
- Deuxième levier : l'incitation financière. Pendant 3 ans, l'Agefiph va verser à l'employeur une aide forfaitaire annuelle. Son montant est calculé en fonction du temps de travail : ce sera par exemple 9000 euros pour un temps de travail supérieur ou égal à 80% d'un temps plein.
La convention PASSMO est conclue pour trois ans. Elle est suivie par un comité de pilotage, qui se livrera dans un an à une première grande évaluation du dispositif : il s'agit de mesurer son efficacité et de veiller à ce que les crédits de l'Etat et de l'Agefiph soient bien utilisés. Si le premier bilan est positif, et je ne doute pas qu'il le sera, l'action se poursuivra jusqu'au 31 décembre 2011. Le grand risque, dans cette crise, c'est de fermer la porte des entreprises à toutes les personnes en difficulté, comme on l'a fait dans les années 1980, où les personnes handicapées ont été les premières à perdre leur emploi et à s'enfoncer dans la spirale du chômage de longue durée. Mon message est clair : il faut lever les blocages des mentalités, les tabous autour du handicap qui sont propres à la société française, et qui sont beaucoup moins présents aux Etats-Unis ou dans les pays nordiques. L'égalité entre tous les salariés, qui figure dans la loi du 1er janvier.
2006, ne doit pas être un voeu pieux, un idéal inaccessible. Le dispositif PASSMO va contribuer à traduire concrètement ce principe, au service d'une expérience gagnant-gagnant pour les entreprises et pour les travailleurs handicapés.
Source http://www.travail-solidarite.gouv.fr, le 14 mai 2009