Déclaration de M. François Fillon, Premier ministre, en réponse à la motion de censure, sur le bilan de l'action gouvernementale face à la récession et la poursuite de la politique de réforme, le plan de relance et d'investissements, les mesures sociales pour l'emploi et l'emprunt national, à l'Assemblée nationale le 8 juillet 2009.

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Circonstance : Motion de censure déposée par le groupe socialiste, radical et citoyen (SRC) contre la politique du gouvernement, à l'Assemblée nationale le 8 juillet 2009

Texte intégral

Monsieur le président,
Mesdames et messieurs les députés,
Nous avons en commun, Monsieur Fabius, d'avoir éprouvé la gravité de gouverner la France. Face à une crise mondiale, vous conviendrez qu'il est plus aisé de blâmer que de décider.
Mais il y a un point - parmi beaucoup d'autres ! - qui nous distingue: vous avez été nommé à Matignon en 1984, pour tenter de mettre un terme à une politique économique désastreuse. Ce fut le tournant de la rigueur qui marqua la rupture avec le programme commun et une déchirure avec une partie de la gauche qui refusa de participer à votre gouvernement.
Pour ma part, j'ai été nommé pour moderniser notre pays dans le cadre des engagements pris par le président de la République.
C'est ce que nous faisons depuis deux ans, et c'est ce que nous allons continuer de faire avec notre majorité, qui elle, ne se sent ni déjugée dans ses valeurs, ni désavouée dans ses engagements.
Comme c'est parfaitement son droit, l'opposition présente sa troisième motion de censure en deux ans, et ce n'est pas sans satisfaction que mon gouvernement et la majorité lui opposeront, une nouvelle fois, leur unité et leur détermination.
Le groupe socialiste, m'a t-on dit, a hésité à déposer cette motion de censure...
Je le comprends.
Cette motion arrive un mois après votre défaite aux élections européennes.
Plutôt que de vous livrer à l'autocritique, vous choisissez le confort de la critique du gouvernement.
Vous voulez censurer notre action pour ne pas voir que les électeurs ont sanctionné la vôtre : croyez-moi, les Français ne seront pas dupes de cette esquive.
Sauf à vouloir banaliser son usage, qu'est-ce qu'une motion de censure ?
C'est certes un acte de défiance vis-à-vis du Gouvernement, mais c'est aussi un signe lancé à l'opinion sur sa capacité à gouverner autrement et à rassembler une autre majorité.
Sans vouloir offenser l'opposition, je pense que rien n'indique qu'elle soit en mesure d'assumer l'une ou l'autre de ces exigences n'ayant ni projet, ni l'appui des Français.
En réalité, cette motion de censure en dit bien davantage sur le parti socialiste que sur le gouvernement et la majorité.
Face à la crise, nous ajustons nos stratégies et nos idées en permanence; à contrario, la gauche ne renouvelle aucune de ses propositions.
Dans l'épreuve, nous croyons au consensus national; vous le repoussez comme si tout compromis était à vos yeux une compromission.
Nous sommes acquis à l'ouverture; l'opposition l'est au manichéisme.
Il y a un paradoxe: plus notre époque est complexe, plus votre jugement est tranché.
Plus nos concitoyens en appellent à une démocratie constructive, plus vous versez dans l'opposition systématique.
Dans une récente interview, Martine Aubry regrettait que "le parti socialiste ait perdu le sens du collectif, du travail et du débat".
Cette motion est à l'image de ce verdict.
Dans la foulée du Congrès et du remaniement gouvernemental, l'opposition prétend qu'il fallait engager la responsabilité du gouvernement.
Pourquoi donc devrais-je vous solliciter sur deux évènements qui ne modifient pas notre cap politique ?
Pourquoi réclamer une confiance que la majorité ne cesse d'afficher depuis deux ans par le vote d'une soixantaine de réformes importantes ?
La question ne se pose pas entre le Gouvernement et la majorité, elle se pose entre l'opposition et les Français !
Il est étrange d'entendre ceux qui ont refusé de prendre la parole au Congrès exiger du gouvernement une procédure d'explication que nous avons -au surplus- déjà utilisée à deux reprises : lors de la déclaration de politique générale en 2007, et sur notre politique étrangère en mars 2008.
Dois-je rappeler qu'entre 1984 et 1986, la responsabilité du Gouvernement ne fut engagée qu'une seule fois, lors de votre prise de fonction, Monsieur le Premier ministre...
En cinq années d'exercice du pouvoir, Lionel Jospin en fit exactement de même.
Il y eut pourtant des occasions où cette responsabilité aurait mérité d'être éclairée.
Lors de l'ouverture du capital de France Télécom, puisque cette décision rompait avec tous les engagements que vous aviez pris devant vos électeurs.
Lors de la démission fracassante de Jean-Pierre Chevènement, suite aux accords de Matignon.
Quant au remaniement de mars 2000, qui vit quatre ministres sortir du gouvernement et huit y entrer, il ne fit naturellement pas l'objet d'un vaste débat dans cette enceinte.
Bref, l'opposition exige de nous ce qu'elle n'a pas exigé d'elle même lorsqu'elle était aux affaires !
Elle prétend que la réunion du Congrès et le refus d'engager notre responsabilité sont les signes d'une "dérive" institutionnelle.
C'est la thèse du "coup d'Etat permanent" qui continue.
Il est toujours pittoresque d'entendre la gauche se faire le gardien sourcilleux de nos institutions, elle qui les combattit si longtemps du temps du Général de Gaulle, mais qui fut si révérencieuse sous l'autorité du président Mitterrand.
Vous feignez de vous inquiéter pour le statut du Premier ministre, mais nous n'avons pas changé de République ! Conformément à l'article 20 de notre constitution, le Premier ministre reste "chargé de conduire la politique de la nation... et responsable devant le Parlement".
Responsable devant le Parlement, mais aussi responsable devant le président de la République qui m'a nommé !
Vous le savez parfaitement, hors cohabitation, tous les présidents de la Ve République ont, sont et seront au coeur de la décision, et vous n'avez pas été le dernier, Monsieur Fabius, à en faire l'expérience...
La primauté institutionnelle du chef de l'Etat n'est pas contestable au regard de la légitimité démocratique de son mandat.
Il en a toujours été ainsi depuis 1962.
Le Président et moi-même nous avons élaboré ensemble le projet que nous appliquons. Nous sommes complémentaires et soudés dans l'action, et aucun de nous deux n'a besoin de souligner que "lui c'est lui, et moi c'est moi".
Cette lapalissade ne correspond ni à ma lecture de nos institutions, ni à l'idée que je me fais du service de la France. Toutes deux exigent l'unité et l'efficacité du pouvoir exécutif.
Depuis des mois, j'entends la gauche faire le procès d'un régime qui non seulement "détournerait les institutions", je cite, mais aussi "musellerait l'opposition»" et "broierait les libertés publiques".
"Démocratie et libertés publiques", dites-vous !
Mais qu'avez-vous fait à l'époque pour renforcer les droits du Parlement ?
C'est nous qui avons élargi les pouvoirs de l'Assemblée Nationale.
C'est cette majorité qui a offert l'une des principales commissions à l'un des membres de votre groupe.
C'est nous qui avons introduit l'exception d'inconstitutionnalité qui permet à tout citoyen de saisir le conseil constitutionnel.
C'est nous qui avons donné au Parlement le pouvoir de se prononcer sur les principales nominations publiques.
Je n'ai pas le souvenir, dans les années 80, d'une gauche particulièrement oecuménique sur cette question des nominations ! Hier discrétionnaire, ce pouvoir est désormais partagé avec votre assemblée.
"Démocratie et liberté publique", nous dit l'opposition.
Mais si la démocratie est à ce point menacée, pourquoi donc le peuple français ne se mobilise-t-il pas derrière le dernier rempart avant la "tyrannie", c'est-à-dire le parti socialiste ?
Pourquoi des personnalités proches de la gauche, comme Michel Rocard et d'autres avant lui, acceptent-elles de travailler avec nous ?
Pourquoi le président de la République a-t-il renoncé à présider le Conseil Supérieur de la Magistrature, ce qu'aucun de ses prédécesseurs n'avait envisagé de faire ?
Pourquoi le dialogue social, comme l'a encore montré la rencontre du 1er juillet, est-il aussi soutenu depuis deux ans ?
La réponse est simple : parce que les Français ne croient pas, mais alors pas du tout, aux fantasmes de l'opposition, qui joue à se faire peur en voyant partout la liberté en danger !
Mesdames et messieurs les Députés,
Nous agissons dans le cadre d'une crise mondiale, et je suis stupéfait d'entendre la gauche parler de la France comme si l'environnement international n'existait pas.
Tous les pays développés sont en récession.
Avec le président de la République, nous avons défini une stratégie.
Elle est à la fois défensive pour protéger du mieux que nous le pouvons nos compatriotes, et offensive pour aller chercher la reprise.
L'opposition dénonce notre politique, mais les faits sont là: cette stratégie permet à la France de mieux tenir le choc que la plupart de nos voisins.
Les dernières études de l'OCDE et du FMI reconnaissent que notre économie a mieux résisté que celles de nos partenaires.
Sur l'ensemble de l'année 2009, le PIB de la zone euro devrait chuter de -4,8 %. En Allemagne, la chute devrait atteindre -6 %, en Italie -5,5 %, au Royaume Uni -4, 3 %, en France -3 %.
J'avance ces chiffres avec humilité, car derrière les statistiques, je sais parfaitement que beaucoup de nos concitoyens vivent des heures difficiles.
Face à cette crise, nous poursuivons quatre objectifs.
D'abord, sécuriser le fonctionnement de notre système bancaire et garantir les dépôts des Français.
Sur les 360 milliards du plan de soutien, 112 ont été mobilisés, et dois-je préciser que ce plan n'a rien coûté au contribuable et qu'il rapporte à l'Etat un revenu de 1,4 milliard d'euros utilisé au bénéfice des mesures sociales décidées et gérées par le Fonds d'investissement social.
Par rapport au mois de mai 2008, les encours de crédits ont progressé de 4,3 % pour les entreprises et de 5,2 % pour les ménages.
Bref, nous avons réussi à échapper à l'asphyxie, et l'opposition ne se déshonorerait pas en le reconnaissant !
Ensuite, nous avons fait le choix de miser à fond sur l'investissement public et privé.
Il s'agit, malgré la récession, de faire tourner nos entreprises et de protéger autant d'emplois que possible, mais aussi de préparer l'avenir.
L'exécution du plan de relance de 26 milliards d'euros est bien avancée puisque 11 milliards ont déjà été engagés.
Plus de 500 chantiers ont été lancés dans toute la France, l'Etat a remboursé de manière anticipée 10 milliards d'euros aux entreprises, 19.000 collectivités territoriales se sont engagées, dans le cadre du FCTVA, à accroître leurs investissements, et cette année nous allons supprimer définitivement la part de la taxe professionnelle qui frappe les investissements...
Ce choix de l'investissement, nous allons l'amplifier en nous engageant sur des grandes priorités nationales.
Nourrir la reprise économique tout en prenant 10 ans d'avance sur les grands enjeux du futur, c'est l'objectif que vous a proposé le président de la République. Il s'agit, notamment, dans la lignée du Grenelle de l'environnement que vous avez évoqué, d'orienter notre modèle économique et social vers la croissance verte.
Il vous reviendra, avec nous, de cibler ces priorités structurantes, et j'attends ici avec intérêt les suggestions de la gauche...
Puis, vous devrez débattre à la fin de l'année de leurs modalités de financement. C'est à ce moment là que nous aborderons le sujet que vous avez évoqué c'est à dire les modalités de l'emprunt.
Notre choix de nous concentrer sur l'investissement partait d'un constat simple et pourtant négligé par la gauche: celui que la relative faiblesse de l'endettement des ménages français et la présence de nos stabilisateurs automatiques soutiendraient la consommation.
De fait, c'est bien ce que nous avons observé jusqu'ici.
Il y a quelques mois, l'opposition réclamait à corps et à cri une baisse globale de la TVA, à l'instar de ce qui a été décidé au Royaume Uni.
Pour l'heure, cette mesure n'a pas eu l'effet escompté.
La consommation des ménages britanniques a chuté de -1,3 % au premier trimestre et devrait, selon l'OCDE, baisser de -3,4 % sur l'année.
L'INSEE prévoit dans le même temps pour la France une hausse de +0,7 % de la consommation sur l'année 2009, alors qu'elle devrait chuter de -1,6 % dans l'ensemble de la zone euro.
Oui, en France, la consommation des ménages tient.
Et elle tient, parce que nous avons choisi de renforcer notre socle social, et non, comme l'opposition le laisse entendre, de laisser les Français se débattre seuls face à la crise.
Le pouvoir d'achat continue de progresser en 2009, et ceci pour la troisième année consécutive.
Ceci s'explique par la progression de 4 % des prestations sociales.
Par la mise en place de la prime de solidarité active qui a été versée à 4 millions de foyers.
Par la revalorisation de 7 % du minimum vieillesse.
Par la suppression du 2e et 3e tiers provisionnel pour 6 millions de Français issus des classes moyennes et modestes. Et désormais la mise en oeuvre du revenu de solidarité active va venir soutenir cet effort.
La résistance de notre consommation s'explique aussi par notre décision de soutenir des secteurs clés, comme celui du logement et de l'automobile.
Nous affichons les meilleurs chiffres de ventes d'automobiles en Europe, et notamment de véhicules propres. Le choix de la prime à la casse et du bonus écologique que votre Assemblée a validé était un bon choix tant pour l'environnement que pour notre économie.
Monsieur Fabius, vous avez raison de souligner la rudesse de cette crise.
Beaucoup de nos compatriotes subissent la violence de la récession, mais je n'accepte pas que l'opposition abrite l'insuffisance de son projet sous l'étendard de la justice sociale.
La solidarité n'est pas une valeur de gauche, c'est une valeur de la République !
Parmi les défis que nous avons à relever, celui de l'emploi est le plus difficile et le plus douloureux. Et il en est de même partout autour de nous, que les pays soient gérés par la droite, la gauche ou le centre.
Le taux de chômage en Europe se situe à 9,2 %. Il atteint 18 % chez nos voisins espagnols.
Avec 3 % de croissance, la France restait encore à l'époque l'un des Etats européens les plus mal classés en matière d'emploi. Avec -3 % de croissance, qui, dans cet hémicycle, oserait prétendre qu'il a la solution miracle ?
L'année 2009 sera très difficile sur le plan de l'emploi.
Ce n'est que dans le courant de l'année 2010 que nous devrions assister à une reprise très graduelle qui pourrait permettre une détente du marché de l'emploi.
Nous mettons tous les outils en action pour amortir le choc.
Amélioration de l'indemnisation de l'activité partielle, extension du Contrat de transition professionnelle et de la convention de reclassement personnalisé, lancement d'un plan d'urgence, doté de 1,3 milliards d'euros, pour le développement de l'alternance, exonération totale des charges dans les TPE qui a déjà bénéficié à 350.000 embauches, création du Fonds d'investissement social -suggéré par les partenaires sociaux- qui a été abondé par l'Etat de plus de 1,5milliards d'euros.
Voilà, Mesdames et Messieurs les Députés, comment nous nous battons dans la crise et pour sortir de la crise.
Le gouvernement fait son devoir avec combativité mais aussi avec humilité car je sais que le regard des Français sur leurs responsables est plus exigeant que jamais.
Ce combat exige une maîtrise sérieuse de nos dépenses publiques et la poursuite résolue des réformes.
Je n'ai pas attendu l'opposition pour m'inquiéter de l'état de nos finances publiques, et je ne crois pas qu'elle soit la mieux placée pour nous donner des leçons !
Malgré plusieurs années de croissance, la gauche n'a jamais entrepris d'efforts significatifs. En 2000, le Royaume Uni, l'Allemagne, la Suède, les Pays-Bas, la Belgique, l'Irlande étaient revenus en excédent, alors que nous restions en déficit avec une croissance de près de 4 %.
De 1997 à 2000, ces Etats ont réduit leur dette de façon parfois spectaculaire: -7 % pour le Royaume Uni, -18 % pour la Suède, -14% pour les Pays Bas, - 15 % pour la Belgique. La dette Française est, elle, restée inchangée.
Durant toutes ces années, qu'avez-vous fait des fruits de la croissance ? Vous les avez dispersés dans le financement des 35 heures et l'embauche de 48.000 agents publics, alors même que notre pays rencontrait un problème de compétitivité et alors même qu'il était déjà l'un des plus administrés d'Europe.
Durant ces années pourtant fastes, aucune réforme de structure ne fut engagée : les dépenses d'assurance maladie ont progressé sans retenue.
Quant aux retraites, vous avez mis tous les rapports qui vous intimaient d'agir au placard.
Et non contents de n'avoir rien fait pour sauver les retraites, certains à gauche n'ont pourtant pas hésité à manifester contre la réforme des régimes spéciaux !
Depuis des années, Mesdames et Messieurs les Députés, notre laxisme budgétaire ronge les capacités d'action de la puissance publique, érode notre compétitivité et fragilise notre pacte social.
Cette question des déficits n'a pas été résolue depuis 30 ans !
Elle est encore plus difficile à gérer en période de récession.
Certaines dépenses -et donc certains déficits liés à la crise liés à l'investissement- sont inéluctables, voire nécessaires à la croissance future. Les sacrifier aujourd'hui serait suicidaire.
Mais pour les autres, il faut réaliser un effort considérable.
Ce n'est pas maintenant que nous allons augmenter les impôts pour combler les déficits car cela accentuerait la récession. Et ce n'est pas au moment de la reprise, car cela briserait la croissance.
Il ne reste donc que deux solutions: être inflexible sur les dépenses structurelles de l'Etat et continuer de réformer.
Cette année, comme les deux années précédentes, le budget de l'Etat sera strictement reconduit.
Le non remplacement d'un agent public sur deux partant à la retraite est et sera intégralement respecté. En l'espace de 3 ans, 87.000 fonctionnaires n'auront pas été renouvelés. Depuis 50 ans, aucun gouvernement n'a été aussi volontariste sur cette question.
Dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, la réforme des administrations va s'amplifier.
Celle des hôpitaux doit entraîner une meilleure maîtrise des dépenses de santé.
Avec l'aide du Parlement, nous allons identifier toutes les dépenses inutiles.
Il n'y aura pas de tabou: l'effort portera aussi sur les dépenses sociales, y compris les "niches sociales" si rarement évaluées.
La réforme des collectivités territoriales doit permettre d'optimiser les moyens et les politiques locales.
En réduisant le nombre d'élus et en fusionnant les responsabilités des conseillers régionaux et généraux, nous mettrons un terme à la redondance et à l'enchevêtrement de ces politiques.
A la mi-2010, nous assumerons, avec le président de la République, nos responsabilités sur les retraites.
Si nous voulons conserver notre régime de retraite par répartition, si nous voulons que nos pensions restent à un niveau élevé, nous n'avons pas d'autre choix que d'augmenter la durée d'activité.
Le problème des retraites n'est ni de droite, ni de gauche, il est implacablement démographique !
Alors pourrait on, pour une fois, espérer que l'opposition nous aide à agir ?
Je veux y croire car j'ai en mémoire le discours courageux de Jean-Marc Ayrault à la Rochelle, il y a deux ans de cela.
"Il faut - disait-il - augmenter le nombre de Français au travail...et accroître la durée de la vie professionnelle (...), car ce n'est pas l'augmentation continue des prélèvements qui sauvera les retraites et la sécurité sociale ". Et il ajoutait en forme d'avertissement : "si la gauche continue de se mettre la tête dans le sable (...), elle connaîtra les mêmes déboires que sur la valeur travail".
Je ne saurais mieux dire.
Laurent Fabius s'inquiète pour nos comptes publics, et il a raison.
Mais il faut être cohérent.
On ne peut, d'un coté, tirer la sonnette d'alarme, et de l'autre côté, dire non à la réforme des retraites, non à la réforme de l'hôpital, non à la réforme de l'Etat, non à la réduction du nombre de fonctionnaires, non à la maîtrise des dépenses de l'Etat et des comptes sociaux...
Sans réforme et sans effort de gestion des deniers publics, nous n'arriverons jamais à rééquilibrer nos finances !
Pour l'opposition, les seules sources d'économies, c'est encore et toujours la suppression des mesures fiscales adoptées à l'été 2007 qui bénéficient principalement aux classes moyennes et populaires.
Sur ce sujet, votre goût de la revanche idéologique écrase toute raison économique.
Supprimer l'exonération des heures supplémentaires, le crédit d'impôt logement, l'exonération des petites successions et des petites donations serait socialement injuste.
Supprimer les mesures qui favorisent les investissements dans les PME, en les rendant déductibles de l'ISF, ce serait une faute économique.
Quant à la suppression du bouclier fiscal, ce n'est pas avec les 500 millions d'euros qu'elle rapporterait à l'Etat que vous combleriez les déficits.
Nous sommes l'un des pays de l'Union où les prélèvements obligatoires demeurent les plus élevés, et nous sommes le seul pays en Europe à conserver l'ISF, puisque même la Suède et l'Espagne y ont renoncé.
Est-ce vraiment nécessaire d'en rajouter ?
En mars 2000, Laurent Fabius, alors ministre de l'économie, se fixait des objectifs auquel je souscris volontiers : "Nous devons - disait-il - alléger l'impôt sur le revenu, pour l'ensemble du barème: en bas, afin d'éviter les trappes d'inactivité, au milieu pour réduire la charge des classes moyennes, en haut, afin d'éviter la fuite ou la démotivation des contribuables aux revenus les plus élevés".
Vous aviez parfaitement raison !
Cette motion de censure, Mesdames et messieurs les Députés, ce n'est pas la voix de l'avenir mais celle du passé.
Devant l'Histoire qui s'accélère, c'est la complainte des utopies perdues.
Cette motion est terriblement caricaturale et défensive.
"Mentalement enfermée dans le pessimisme, la gauche est victime du syndrome de Fort Alamo", disait récemment Manuel Valls.
Jamais la majorité ne suivra l'opposition sur le chemin de la nostalgie et de l'immobilisme !
Nous allons continuer d'agir parce que nous n'avons pas d'autre choix que d'être audacieux pour tenir le choc de la crise et aller chercher la croissance.
Dès les prochains jours, votre assemblée sera invitée à légiférer sur la formation professionnelle, afin de consacrer l'accord des partenaires sociaux.
A la rentrée, le Grenelle 2 sera examiné au Parlement, et il confortera notre choix du développement durable.
A l'automne, votre assemblée débattra de l'organisation de nos collectivités territoriales.
A l'hiver, vous serez conduits à fixer par la loi les grandes priorités qui seront financées par l'emprunt.
Avec le président de la République, avec la majorité, toute notre volonté est tendue vers le redressement de la France.
Tous nos engagements prolongent les efforts et les rêves d'une nation qui a encore le pouvoir de rayonner.
Il n'y aura pas de pause car l'avenir n'attend pas.
Il n'y aura pas de tergiversation car nous respecterons notre projet.
Il n'y aura pas de relâchement car nous savons que l'Histoire sera juge de nos actes.
Pour tout dire, Mesdames et Messieurs les Députés, dès que nous en aurons terminé avec cette motion de censure, nous allons continuer à servir la France.
Source http://www.premier.ministre.gouv.fr, le 9 juillet 2009