Interview de M. Dominique Bussereau, secrétaire d'Etat aux transports, à Europe 1 le 31 juillet 2009, sur la sécurité routière, la taxe carbone, les transports routiers et la tarification des autoroutes.

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Média : Europe 1

Texte intégral

A. Caron.- D. Bussereau, bonjour. Vous êtes le secrétaire d'Etat chargé des Transports. D'abord un mot sur la Sécurité routière. Les chiffres de juin sont assez mauvais, même très mauvais ; 33 % de morts supplémentaires sur les routes par rapport à la même période l'an dernier. Comment expliquez-vous cette hausse ?

Ce sont des chiffres à contre-courant. Rappelez-vous qu'il y a quelques temps, on s'est souvenu de Mazamet, où on avait demandé à toute la population de se coucher ! Il faut se souvenir qu'en 1973, à l'époque de Mazamet, il y avait 16.000 morts par an. On est tombé à 4.274 l'année dernière, c'est en décroissance absolue. L'objectif du président de la République, c'est 3.000 en 2012, mais pas avec un chiffre comme celui du mois de juin. Alors, est-ce qu'il y a eu beaucoup de beau temps, de moments où les gens avaient envie de sortir après une année un peu morose ? Vraisemblablement. Mais si on continuait sur la lancée du mois de juin, on aurait de mauvais chiffres pour 2009 et on ne tiendrait pas nos objectifs. Donc, c'est le moment de faire absolument attention à tout, la vitesse bien sûr, l'usage du téléphone, on n'envoie pas de SMS au volant, on ne regarde pas bien sûr de film sur un lecteur de DVD. Voilà ! C'est absolument la prudence, et on arrive en bonne santé et de bonne humeur en vacances.

Vous avez l'impression qu'il y a comme un petit relâchement des Français ?

Absolument. Au mois de juin, si vous voulez, les conditions météo n'étaient pas spécialement mauvaises ; je pense qu'il y a eu un relâchement. Il faut savoir que le nombre de radars, lui, ne se relâche pas ; on en met de plus en plus, et de fixes et de mobiles. J'entendais hier sur votre antenne qu'il y avait moins de rapport financier ; cela montre que les radars ne sont pas faits pour rapporter de l'argent, ils sont faits pour faire changer les comportements. On rajoute maintenant des radars sur les feux rouges. On va rajouter des radars pour vérifier les intervalles entre les véhicules, et puis il peut y avoir aussi du monde dans le ciel. Beaucoup d'hélicoptères de la gendarmerie surveilleront également les routes et les autoroutes pendant ce grand chassé-croisé.

Vous parliez effectivement à l'instant des radars, de cette baisse des contraventions qui sont liées aux radars fixes et mobiles, à Paris en tout cas. Qu'est-ce que cela veut dire ? Cela veut dire que les gens roulent moins vite ou bien qu'ils connaissent à présent très bien la carte des radars surtout ?

Cela veut dire qu'il y a des dispositifs qu'on connaît bien et qui sont d'ailleurs légaux qui permettent d'enregistrer les emplacements des radars, qui sont d'ailleurs connus, l'Etat ne les cache pas, quand on installe un radar automatique, il y a une information dans le département où c'est installé. Cela veut dire aussi que les gens sont habitués souvent à passer là, mais cela veut dire aussi - je l'ai encore vu hier en circulant sur l'autoroute A 10 au sud de Paris - que beaucoup beaucoup d'automobilistes ne respectent pas les vitesses.

J'imagine que comme chaque année, à cette période, les contrôles seront nombreux sur les routes ce week-end, plus nombreux que d'habitude ?

Beaucoup plus nombreux que d'habitude. Et je le répète, il ne s'agit pas - pardon de l'expression - de fliquer les Français ; il s'agit de faire en sorte que ce grand départ, ce vendredi rouge, demain, c'est noir, ce sera le jour le plus chargé de toute l'année 2009 en matière de circulation automobile, donc, je crois qu'il faut vraiment avoir une conduite très attentive. Cela vaut la peine de se concentrer pendant quelques heures pour passer de très bonnes vacances ensuite.

D. Bussereau, là, on vient de parler de la sécurité. On va parler aussi un peu de l'aspect économique de ce grand chassé-croisé, notamment les tarifs sur les autoroutes, des tarifs qui augmentent. Qu'est-ce qui est prévu dans les mois qui viennent ? Est-ce que vous allez essayer d'en discuter avec les entreprises ?

Oui, on discute avec les sociétés d'autoroutes. Elles ont bien sûr une certaine liberté tarifaire, mais avec un encadrement de l'Etat. Moi, ce que je souhaite, c'est qu'elles aient des tarifs très modulés en fonction des moments de circulation dans l'année ou dans la journée, et aussi des tarifs très compréhensibles, parce que parfois certains automobilistes ne comprennent pas pourquoi, finalement, un petit trajet est cher ou pourquoi, brutalement, il se trouve avec une facture invraisemblable à l'arrivée. Donc, je crois qu'il faut beaucoup plus de transparence sur les tarifs ; il faut que les sociétés d'autoroutes payent l'entretien de leur autoroute, qu'elles améliorent l'aspect environnemental, c'est tout ce que nous leur demandons avec J.-L. Borloo, mais il faut faire quand même attention à ce que l'autoroute reste accessible à tous les Français. Ce sont les péages qui ont permis de construire notre réseau autoroutier, qui est un des meilleurs aujourd'hui du monde, il faut rester raisonnable dans les tarifs.

En début de semaine, M. Rocard a rendu au Gouvernement son rapport sur la taxe carbone, un dossier que vous suivez de très près. Les transporteurs routiers sont pour l'instant opposés à l'idée de cette taxe. Cela va être compliqué pour vous. Vous êtes un petit peu tiraillé entre la position du Gouvernement et les intérêts des entreprises de transport.

Vous savez, le transport routier assure la majeure partie du transport routier dans notre pays, même si dans le cadre du Grenelle de l'environnement, nous souhaitons un report sur le ferroviaire, le fluvial et le maritime. Ils ont connu toutes les difficultés liées au cours élevé, à certains moments, du carburant. Ils connaissent des difficultés actuellement liées à la crise. Nous avons décidé, dans le cadre du Grenelle de l'environnement d'instaurer un péage électronique pour les transporteurs routiers en France à partir de 2011, 2012 sur les routes nationales et sur les autoroutes encore gratuites. Donc, il faudra voir de quelle manière peut s'appliquer la taxe carbone, et je pense que M. Rocard - je n'ai pas encore lu la totalité de son rapport, mais nous aurons bien en tête de faire en sorte que nous ne tuions pas cette profession, qui est absolument nécessaire à l'économie de notre pays, tout en respectant nos objectifs du Grenelle de l'environnement.

Parce que, pour l'instant, on parle de 8 centimes d'euros d'augmentation par litre d'essence. Cela paraît le bon chiffre a priori ?

Je n'en sais rien. Franchement, je trouve que le rapport de monsieur Rocard est très intéressant. Je trouve moins intéressantes les projections sur des chiffres, parce que je trouve que, pour l'instant, ce sont vraiment des hypothèses, et que le Gouvernement n'a pas fait ses choix. Donc, le débat sur les chiffres est un petit peu présomptueux.

En tout cas, s'il devait y avoir une augmentation du prix de l'essence, vous, vous insisteriez pour qu'il y ait des compensations pour les entreprises ?

Si vous voulez, moi, je souhaite, comme J.-L. Borloo, le report modal ; donc plus de camions sur les autoroutes ferroviaires, plus de camions dans les autoroutes de la mer, mais nous ne voulons pas tuer la profession routière. Donc, nous trouverons avec elle les moyens de lui permettre de continuer à travailler et à créer des emplois dans notre pays.

D. Bussereau, vous êtes maintenant en vacances. Peut-on vous demander où vous partez ?

J'ai la chance d'être l'élu d'une petite ville à côté de Royan, qui s'appelle Saint-Georges-de-Didonne, au bord de l'Atlantique. C'est là où je vais me retrouver avec ma famille et mes amis.

D'accord, parce qu'on avait lu que vous alliez peut-être partir en Jordanie, ce qui aurait été contraire finalement à l'instruction du Président, qui disait que les ministres ne doivent pas partir à plus de deux heures de Paris.

Non, l'instruction du Président, c'est d'être à tout moment joignable. Donc, quand je suis en Charente-maritime, je suis prêt à partir à tout instant. Et si je pars un peu plus loin quelques jours avec ma famille, ce sera en fonction de l'actualité, et en ayant pris toutes les précautions nécessaires.

Vous n'avez donc pas annulé un voyage à l'étranger ?

C'est un court voyage, parce que la Jordanie, ce n'est pas le bout du monde...

Vous y allez donc !

... ce ne sera que quelques jours, durant des vacances qui seront avant tout des vacances de l'Atlantique, pour le Charentais maritime que je suis.

Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 31 juillet 2009