Texte intégral
P. Weill.- C'est la polémique de ces dernières 24 heures. Le porte-parole du Parti socialiste, B. Hamon, affirme que N. Sarkozy ne résiste pas à la tentation de réécrire l'histoire, à la suite de la controverse suscitée par le récit du chef de l'Etat sur sa présence le 9 novembre 1989 à Berlin, lors de la chute du Mur. B. Hamon dit que manifestement, N. Sarkozy s'était trompé de date, il le traite de "grand affabulateur". Votre réponse.
Ce n'est pas une polémique intéressante après ce qu'on vient d'entendre et après ce que je viens de voir cette nuit. Ce qui est intéressant, faites votre enquête monsieur, vous la ferez très bien, moi j'ai entendu le Président dire qu'il était là, j'ai entendu un monsieur Martel que je ne connais pas, dire qu'il y était aussi, il y en avait d'autres. Vraiment, ce n'est pas intéressant comparé à ce qui s'est passé cette nuit et que B. Guetta rassemblait, parce qu'il y avait tous les acteurs, il y avait 100.000 personnes sous la pluie.
Mais vous n'êtes pas troublé par le récit de N. Sarkozy ?
Monsieur, je ne suis pas troublé et je ne veux pas vous répondre. C'est dérisoire ! Je crois le président de la République et je me demande, monsieur Hamon était là-bas, il n'a pas vu le Président, il y a quelque chose qui s'est passé qui fait que quatre personnes mentent ? Ce n'est pas intéressant !
Mais personne ne s'attendait à la chute du Mur, le 9 novembre 89.
Monsieur, voulez-vous me rendre muet ? Ce n'est pas intéressant ! Je crois systématiquement le président de la République. Jusqu'à preuve du contraire, vous ne m'apprenez rien et vous ne m'apportez aucune preuve.
On a beaucoup parlé de l'Europe lors du vingtième anniversaire de la chute du Mur de Berlin, hier. Alors nouvelle étape pour l'Europe après la ratification du Traité de Lisbonne, elle aura désormais un président pour deux ans et demi, renouvelables, et un ministre des Affaires étrangères. B. Kouchner, qui sont les noms proposés par la France et quand aura lieu la désignation ?
Il n'y a pas de noms proposés par la France pour le moment. Il n'y a pas de noms proposés par d'autres pays. Il y a des noms qui circulent. Vous avez raison, c'est un haut représentant et non un ministre des Affaires étrangères. On peut s'interroger d'ailleurs sur ce que deviendront les ministres des Affaires étrangères des différents 27 pays.
Vous n'avez pas parlé, vous n'avez pas évoqué des noms hier, à Berlin, à cette réunion de chefs d'Etat et de gouvernement ?
Oui, il y a eu des noms qui ont circulé, comme les gens étaient tous là...
Lesquels ?
Tous, les Présidents et les Premiers ministres des 27 pays. Il n'y a pas de favoris pour le moment. Honnêtement, il y a des noms qui circulent, vous le savez. Il y a le nom de T. Blair bien entendu, et ce fut le premier. Il y a le nom du Premier ministre belge et puis il y a d'autres noms qui viennent. Il y a J.-C. Junker. Mais vraiment ça n'a pas été l'objet de la discussion.
Mais quel est votre favori pour ce poste de président de l'Union européenne ?
Pour le moment, d'abord, il n'y a pas de favori de la France. Nous attendons. Il y aura une réunion, je pense, la semaine prochaine. Ce devait être à la fin de cette semaine mais je ne crois pas que ça puisse avoir lieu à cette date précise. Et ce sont le président et le ministre des Affaires étrangères suédois qui ordonnent cette discussion, s'il y a une discussion. Elle se fait surtout par coups de téléphone.
Vous avez sûrement une opinion...
Et vous ?
Moi, je ne suis pas ministre des Affaires étrangères !
Moi non plus, bien entendu.
Vous avez fait un choix ? Vous en avez parlé avec N. Sarkozy ?
Ça, c'est sûr.
On n'en saura pas plus ?
Non, pas pour le moment. Honnêtement, ce ne serait pas bien que la France, dont on sait qu'elle s'entend fort bien avec l'Allemagne et ça c'est très important, surtout quand on a assisté à la nuit de Berlin, la France et l'Allemagne auront des candidats communs.
N'est-on pas en train de s'acheminer vers un président de l'Union européenne poids plume, pour ne pas faire de l'ombre aux chefs d'Etat et de gouvernement ? Bref, un président plus décoratif qu'actif ?
C'est une bonne question. Il faut choisir non seulement la personnalité bien sûr, mais le fonctionnement de l'Europe que l'on souhaite. Il me semble que maintenant le temps est venu qu'il y ait une personnalité qui pourrait imprimer non seulement dans les réunions, mais dans la préparation de ces réunions et dans le débat nécessaire, une marque européenne. Il nous faut une représentation. Vous savez le fameux mot d'H. Kissinger, "l'Europe, quel numéro de téléphone ?". Maintenant, il y aura un numéro de téléphone. Et c'est tout à fait utile parce qu'il y a le Moyen-Orient, l'Afghanistan etc. Beaucoup de sujets - l'Iran bien entendu -, sur lesquels l'Europe doit pouvoir parler d'une seule voix.
Vous souhaitez une forte personnalité, vous ?
Moi, je préfère bien entendu, mais pourquoi ? Parce que nous devons parler à 27 et peser dans le monde. Nous sommes 500 millions, l'endroit le plus riche du monde, compliqué certes, 27 pays à diriger mais maintenant ça se clarifie et nous devons participer aux évènements. Pas seulement les financer.
Une forte personnalité, qui par exemple ?
Vous avez bien fait d'insister, vous pouviez essayer !
N. Sarkozy reçoit demain le Premier ministre israélien B. Netanyahou et vendredi, il recevra le président syrien B. El Assad. Le processus de paix au Proche-Orient est totalement bloqué. Quelle est votre recette pour que cela bouge vers la paix dans le conflit israélo-palestinien ?
Peut-être que l'Europe puisse s'exprimer, et d'une seule voix, avec un consensus bien entendu sur la politique à suivre. Alors en effet nous recevons B. Netanyahou, le président de la République le reçoit et ensuite Bachar El Assad. Le président syrien et nous-mêmes avons établi vraiment des relations apparemment franches et pour le moment productives. Vous avez vu qu'il y a deux jours, il y avait, enfin il y a deux jours il n'y avait pas de gouvernement libanais et avant-hier, il s'en esquissait un, qui, hier, a été confirmé. Et ça c'est beaucoup.
Sur le conflit israélo-palestinien, on a l'impression que N. Sarkozy est très agacé par l'attitude de B. Netanyahou qui refuse de stopper la colonisation.
Agacé n'est pas le mot. Il y a un vrai différend politique. Nous avons pensé et nous pensons toujours que le gel des colonisations, c'est-à-dire ne pas coloniser pendant qu'on parle, ce serait absolument indispensable. Et d'ailleurs, ça s'appelle l'initiative de paix arabe. Il faudrait en tenir compte.
L'entretien demain va être très chaud entre N. Sarkozy et B. Netanyahou ?
Non, chaud, ça ne sert à rien. Il faut discuter et faire en sorte que le processus politique reparte.
Comment ?
Mais il n'y en a pas pour le moment. Après nous recevrons, en tous cas moi j'irai voir monsieur M. Abbas.
Quand irez-vous ?
Dans les quelques jours qui viennent.
Et en Israël ?
En Israël, bien sûr, oui. Mais enfin, il faut convaincre. Ce qui me fait beaucoup de peine et ce qui nous choque, c'est qu'avant il y avait en Israël un grand mouvement de la paix. Il y avait une gauche qui se faisait entendre et il y avait une aspiration à la paix. Et il me semble, et j'espère complètement me tromper, que cette aspiration a disparu comme si on n'y croyait plus. Alors il y a eu beaucoup, beaucoup, beaucoup de discussions. Etait-ce nécessaire ? Oui. Etait-ce suffisant ? Pas encore. L'attitude américaine a beaucoup compté. Il faudrait qu'il y ait maintenant, je le dis, je le répète, parce que je crois beaucoup à ça, une poussée, une force européenne politique qui soit mêlée, enfin qui soit partenaire dans les négociations. Indispensable !
Quand on dit à B. Netanyahou, il faut un Etat palestinien en Cisjordanie. Il réplique, « on a évacué Gaza, on a eu le Hamas au pouvoir et des roquettes sur Israël. Pas question de risquer la même chose en Cisjordanie, les roquettes tomberaient sur Tel Aviv ». Qu'est-ce que vous répondez ?
Ça c'est une vision un peu pessimiste parce qu'il ne dit pas que ça. Il a dit aussi dans sa fameuse déclaration, répondant donc aux demandes américaines, il a parlé de l'Etat palestinien. Ce qui, pour B. Netanyahou, est quand même quelque chose comme une avancée. Ce n'est pas suffisant, il faut reparler avec M. Abbas. Il faut d'abord que le président palestinien ne démissionne pas car il a menacé de ne pas se représenter, de ne pas remettre son mandat en...
Comment allez-vous le convaincre de ne pas renoncer ?
Par la persuasion. Nous sommes très bien avec lui, nous sommes très bien avec les Israéliens. Nous avons une position qui, je crois, compte dans la région. Pas seulement la France, la France beaucoup mais l'Europe. Il faut aller les voir, leur permettre de renouer le dialogue sur les sujets qui ont déjà été abordés, les réfugiés, Jérusalem, les colonies, etc.
L'Iran ne dit toujours pas clairement s'il accepte d'envoyer son uranium enrichi à l'étranger, en contrepartie de la livraison de combustible pour son réacteur de recherche de Téhéran. Une proposition validée par Moscou, Washington et vous, et Paris. Vous avez dit la semaine dernière, « nous n'accepterons pas de manoeuvres dilatoires de l'Iran ». Si le défi iranien continue, l'option militaire peut-elle être envisagée ?
Non. C'est pour éviter l'option militaire que nous faisons tout cela. Bien sûr que non, ce serait une catastrophe. Déjà le Moyen-Orient est une poudrière, on ne va pas y ajouter un conflit supplémentaire. Ce n'est pas du tout pour ça.
Mais alors comment faire céder l'Iran ?
Faire céder l'Iran, ça veut dire quoi ? Ca veut dire que l'Iran doit nous répondre, d'abord. Non pas à nous, mais à l'AIEA, l'Agence internationale pour l'énergie atomique. L'Iran ne répond pas. Il y a eu deux réunions, vous le savez, une à Genève qui était une réunion politique et comme depuis plusieurs années l'Iran voulait parler aux Américains, la dernière réunion, les deux dernières réunions d'ailleurs, dix-huit mois avant et puis le mois dernier, ont eu lieu en présence des Américains qui avaient heureusement, et avec notre soutien, tendu la main aux Iraniens. Pas de réponse. Alors ? Alors je pense qu'il faudra retourner à l'ONU. D'abord je souhaite qu'il y ait une réponse. Nous ne sommes pas à la fin du mois de novembre, nous ne sommes pas non plus à la fin du mois de décembre. Il faut continuer. Il y a eu aussi une réunion d'experts et nous avons voulu les aider. Il faut bien comprendre que nous n'interdisons rien, au contraire, nous voulons favoriser l'accès du nucléaire civil aux populations iraniennes.
Mais s'il n'y a pas de réponse, qu'est-ce qu'il va se passer ? Quelles sanctions ?
Quelles sanctions, ça, nous verrons bien. Ce sont des sanctions économiques, vous le savez. Mais enfin, pour le moment, il n'y a pas de sanctions. Pour le moment, nous ne retournons pas à l'ONU mais il faudra bien y songer si ça ne se passe pas comme nous le souhaitons, c'est-à-dire avec une réponse iranienne. Mais entre temps, il y a eu quelque chose de nouveau : il y a dans la rue des mouvements très courageux. Il y a des Iraniens qui ne se satisfont en rien de ce gouvernement et qui apparemment continuent très courageusement, je le répète, à manifester. Alors ça je pense que c'est un problème aussi pour l'Iran. Il y a un Iran qui ne souhaite certainement pas ces manoeuvres dilatoires et aussi cette menace atomique éventuelle, potentielle. Personne ne le sait.
Mais alors, quand vous dites sanctions économiques, vous souhaitez des sanctions qui puissent asphyxier l'économie iranienne pour que le peuple iranien se soulève contre ses dirigeants ?
Moi, je ne souhaite rien du tout sinon la paix et sinon la réponse aux questions de l'AIEA. Et pour cela, il faudra peut-être retourner... Mais vous savez, ce n'est pas nouveau, il y a eu trois résolutions avec des sanctions qui ont été votées, y compris par les Chinois et les Russes, évidemment par les quatre occidentaux...
Mais vous n'avez pas l'impression que les Iraniens vous baladent ?
Je n'ai pas l'impression qu'on se laisse balader monsieur. Je n'ai pas l'impression que la diplomatie française, en particulier, se laisse balader. Pas du tout.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 17 novembre 2009
Ce n'est pas une polémique intéressante après ce qu'on vient d'entendre et après ce que je viens de voir cette nuit. Ce qui est intéressant, faites votre enquête monsieur, vous la ferez très bien, moi j'ai entendu le Président dire qu'il était là, j'ai entendu un monsieur Martel que je ne connais pas, dire qu'il y était aussi, il y en avait d'autres. Vraiment, ce n'est pas intéressant comparé à ce qui s'est passé cette nuit et que B. Guetta rassemblait, parce qu'il y avait tous les acteurs, il y avait 100.000 personnes sous la pluie.
Mais vous n'êtes pas troublé par le récit de N. Sarkozy ?
Monsieur, je ne suis pas troublé et je ne veux pas vous répondre. C'est dérisoire ! Je crois le président de la République et je me demande, monsieur Hamon était là-bas, il n'a pas vu le Président, il y a quelque chose qui s'est passé qui fait que quatre personnes mentent ? Ce n'est pas intéressant !
Mais personne ne s'attendait à la chute du Mur, le 9 novembre 89.
Monsieur, voulez-vous me rendre muet ? Ce n'est pas intéressant ! Je crois systématiquement le président de la République. Jusqu'à preuve du contraire, vous ne m'apprenez rien et vous ne m'apportez aucune preuve.
On a beaucoup parlé de l'Europe lors du vingtième anniversaire de la chute du Mur de Berlin, hier. Alors nouvelle étape pour l'Europe après la ratification du Traité de Lisbonne, elle aura désormais un président pour deux ans et demi, renouvelables, et un ministre des Affaires étrangères. B. Kouchner, qui sont les noms proposés par la France et quand aura lieu la désignation ?
Il n'y a pas de noms proposés par la France pour le moment. Il n'y a pas de noms proposés par d'autres pays. Il y a des noms qui circulent. Vous avez raison, c'est un haut représentant et non un ministre des Affaires étrangères. On peut s'interroger d'ailleurs sur ce que deviendront les ministres des Affaires étrangères des différents 27 pays.
Vous n'avez pas parlé, vous n'avez pas évoqué des noms hier, à Berlin, à cette réunion de chefs d'Etat et de gouvernement ?
Oui, il y a eu des noms qui ont circulé, comme les gens étaient tous là...
Lesquels ?
Tous, les Présidents et les Premiers ministres des 27 pays. Il n'y a pas de favoris pour le moment. Honnêtement, il y a des noms qui circulent, vous le savez. Il y a le nom de T. Blair bien entendu, et ce fut le premier. Il y a le nom du Premier ministre belge et puis il y a d'autres noms qui viennent. Il y a J.-C. Junker. Mais vraiment ça n'a pas été l'objet de la discussion.
Mais quel est votre favori pour ce poste de président de l'Union européenne ?
Pour le moment, d'abord, il n'y a pas de favori de la France. Nous attendons. Il y aura une réunion, je pense, la semaine prochaine. Ce devait être à la fin de cette semaine mais je ne crois pas que ça puisse avoir lieu à cette date précise. Et ce sont le président et le ministre des Affaires étrangères suédois qui ordonnent cette discussion, s'il y a une discussion. Elle se fait surtout par coups de téléphone.
Vous avez sûrement une opinion...
Et vous ?
Moi, je ne suis pas ministre des Affaires étrangères !
Moi non plus, bien entendu.
Vous avez fait un choix ? Vous en avez parlé avec N. Sarkozy ?
Ça, c'est sûr.
On n'en saura pas plus ?
Non, pas pour le moment. Honnêtement, ce ne serait pas bien que la France, dont on sait qu'elle s'entend fort bien avec l'Allemagne et ça c'est très important, surtout quand on a assisté à la nuit de Berlin, la France et l'Allemagne auront des candidats communs.
N'est-on pas en train de s'acheminer vers un président de l'Union européenne poids plume, pour ne pas faire de l'ombre aux chefs d'Etat et de gouvernement ? Bref, un président plus décoratif qu'actif ?
C'est une bonne question. Il faut choisir non seulement la personnalité bien sûr, mais le fonctionnement de l'Europe que l'on souhaite. Il me semble que maintenant le temps est venu qu'il y ait une personnalité qui pourrait imprimer non seulement dans les réunions, mais dans la préparation de ces réunions et dans le débat nécessaire, une marque européenne. Il nous faut une représentation. Vous savez le fameux mot d'H. Kissinger, "l'Europe, quel numéro de téléphone ?". Maintenant, il y aura un numéro de téléphone. Et c'est tout à fait utile parce qu'il y a le Moyen-Orient, l'Afghanistan etc. Beaucoup de sujets - l'Iran bien entendu -, sur lesquels l'Europe doit pouvoir parler d'une seule voix.
Vous souhaitez une forte personnalité, vous ?
Moi, je préfère bien entendu, mais pourquoi ? Parce que nous devons parler à 27 et peser dans le monde. Nous sommes 500 millions, l'endroit le plus riche du monde, compliqué certes, 27 pays à diriger mais maintenant ça se clarifie et nous devons participer aux évènements. Pas seulement les financer.
Une forte personnalité, qui par exemple ?
Vous avez bien fait d'insister, vous pouviez essayer !
N. Sarkozy reçoit demain le Premier ministre israélien B. Netanyahou et vendredi, il recevra le président syrien B. El Assad. Le processus de paix au Proche-Orient est totalement bloqué. Quelle est votre recette pour que cela bouge vers la paix dans le conflit israélo-palestinien ?
Peut-être que l'Europe puisse s'exprimer, et d'une seule voix, avec un consensus bien entendu sur la politique à suivre. Alors en effet nous recevons B. Netanyahou, le président de la République le reçoit et ensuite Bachar El Assad. Le président syrien et nous-mêmes avons établi vraiment des relations apparemment franches et pour le moment productives. Vous avez vu qu'il y a deux jours, il y avait, enfin il y a deux jours il n'y avait pas de gouvernement libanais et avant-hier, il s'en esquissait un, qui, hier, a été confirmé. Et ça c'est beaucoup.
Sur le conflit israélo-palestinien, on a l'impression que N. Sarkozy est très agacé par l'attitude de B. Netanyahou qui refuse de stopper la colonisation.
Agacé n'est pas le mot. Il y a un vrai différend politique. Nous avons pensé et nous pensons toujours que le gel des colonisations, c'est-à-dire ne pas coloniser pendant qu'on parle, ce serait absolument indispensable. Et d'ailleurs, ça s'appelle l'initiative de paix arabe. Il faudrait en tenir compte.
L'entretien demain va être très chaud entre N. Sarkozy et B. Netanyahou ?
Non, chaud, ça ne sert à rien. Il faut discuter et faire en sorte que le processus politique reparte.
Comment ?
Mais il n'y en a pas pour le moment. Après nous recevrons, en tous cas moi j'irai voir monsieur M. Abbas.
Quand irez-vous ?
Dans les quelques jours qui viennent.
Et en Israël ?
En Israël, bien sûr, oui. Mais enfin, il faut convaincre. Ce qui me fait beaucoup de peine et ce qui nous choque, c'est qu'avant il y avait en Israël un grand mouvement de la paix. Il y avait une gauche qui se faisait entendre et il y avait une aspiration à la paix. Et il me semble, et j'espère complètement me tromper, que cette aspiration a disparu comme si on n'y croyait plus. Alors il y a eu beaucoup, beaucoup, beaucoup de discussions. Etait-ce nécessaire ? Oui. Etait-ce suffisant ? Pas encore. L'attitude américaine a beaucoup compté. Il faudrait qu'il y ait maintenant, je le dis, je le répète, parce que je crois beaucoup à ça, une poussée, une force européenne politique qui soit mêlée, enfin qui soit partenaire dans les négociations. Indispensable !
Quand on dit à B. Netanyahou, il faut un Etat palestinien en Cisjordanie. Il réplique, « on a évacué Gaza, on a eu le Hamas au pouvoir et des roquettes sur Israël. Pas question de risquer la même chose en Cisjordanie, les roquettes tomberaient sur Tel Aviv ». Qu'est-ce que vous répondez ?
Ça c'est une vision un peu pessimiste parce qu'il ne dit pas que ça. Il a dit aussi dans sa fameuse déclaration, répondant donc aux demandes américaines, il a parlé de l'Etat palestinien. Ce qui, pour B. Netanyahou, est quand même quelque chose comme une avancée. Ce n'est pas suffisant, il faut reparler avec M. Abbas. Il faut d'abord que le président palestinien ne démissionne pas car il a menacé de ne pas se représenter, de ne pas remettre son mandat en...
Comment allez-vous le convaincre de ne pas renoncer ?
Par la persuasion. Nous sommes très bien avec lui, nous sommes très bien avec les Israéliens. Nous avons une position qui, je crois, compte dans la région. Pas seulement la France, la France beaucoup mais l'Europe. Il faut aller les voir, leur permettre de renouer le dialogue sur les sujets qui ont déjà été abordés, les réfugiés, Jérusalem, les colonies, etc.
L'Iran ne dit toujours pas clairement s'il accepte d'envoyer son uranium enrichi à l'étranger, en contrepartie de la livraison de combustible pour son réacteur de recherche de Téhéran. Une proposition validée par Moscou, Washington et vous, et Paris. Vous avez dit la semaine dernière, « nous n'accepterons pas de manoeuvres dilatoires de l'Iran ». Si le défi iranien continue, l'option militaire peut-elle être envisagée ?
Non. C'est pour éviter l'option militaire que nous faisons tout cela. Bien sûr que non, ce serait une catastrophe. Déjà le Moyen-Orient est une poudrière, on ne va pas y ajouter un conflit supplémentaire. Ce n'est pas du tout pour ça.
Mais alors comment faire céder l'Iran ?
Faire céder l'Iran, ça veut dire quoi ? Ca veut dire que l'Iran doit nous répondre, d'abord. Non pas à nous, mais à l'AIEA, l'Agence internationale pour l'énergie atomique. L'Iran ne répond pas. Il y a eu deux réunions, vous le savez, une à Genève qui était une réunion politique et comme depuis plusieurs années l'Iran voulait parler aux Américains, la dernière réunion, les deux dernières réunions d'ailleurs, dix-huit mois avant et puis le mois dernier, ont eu lieu en présence des Américains qui avaient heureusement, et avec notre soutien, tendu la main aux Iraniens. Pas de réponse. Alors ? Alors je pense qu'il faudra retourner à l'ONU. D'abord je souhaite qu'il y ait une réponse. Nous ne sommes pas à la fin du mois de novembre, nous ne sommes pas non plus à la fin du mois de décembre. Il faut continuer. Il y a eu aussi une réunion d'experts et nous avons voulu les aider. Il faut bien comprendre que nous n'interdisons rien, au contraire, nous voulons favoriser l'accès du nucléaire civil aux populations iraniennes.
Mais s'il n'y a pas de réponse, qu'est-ce qu'il va se passer ? Quelles sanctions ?
Quelles sanctions, ça, nous verrons bien. Ce sont des sanctions économiques, vous le savez. Mais enfin, pour le moment, il n'y a pas de sanctions. Pour le moment, nous ne retournons pas à l'ONU mais il faudra bien y songer si ça ne se passe pas comme nous le souhaitons, c'est-à-dire avec une réponse iranienne. Mais entre temps, il y a eu quelque chose de nouveau : il y a dans la rue des mouvements très courageux. Il y a des Iraniens qui ne se satisfont en rien de ce gouvernement et qui apparemment continuent très courageusement, je le répète, à manifester. Alors ça je pense que c'est un problème aussi pour l'Iran. Il y a un Iran qui ne souhaite certainement pas ces manoeuvres dilatoires et aussi cette menace atomique éventuelle, potentielle. Personne ne le sait.
Mais alors, quand vous dites sanctions économiques, vous souhaitez des sanctions qui puissent asphyxier l'économie iranienne pour que le peuple iranien se soulève contre ses dirigeants ?
Moi, je ne souhaite rien du tout sinon la paix et sinon la réponse aux questions de l'AIEA. Et pour cela, il faudra peut-être retourner... Mais vous savez, ce n'est pas nouveau, il y a eu trois résolutions avec des sanctions qui ont été votées, y compris par les Chinois et les Russes, évidemment par les quatre occidentaux...
Mais vous n'avez pas l'impression que les Iraniens vous baladent ?
Je n'ai pas l'impression qu'on se laisse balader monsieur. Je n'ai pas l'impression que la diplomatie française, en particulier, se laisse balader. Pas du tout.
Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 17 novembre 2009