Texte intégral
Messieurs les ministres,
Monsieur le président de région,
Monsieur le Maire,
Monsieur le président du conseil général,
Monsieur le président de la communauté urbaine de Marseille Provence Métropole,
Mesdames, Messieurs,
Chers amis,
Je suis très heureuse, et honorée, d'être parmi vous aujourd'hui pour parler de l'un des sujets qui me tiennent le plus à coeur : l'eau.
Car parler de l'eau, c'est parler de tout ce qui fait l'aventure humaine.
C'est parler de notre quotidien, d'une sorte d'évidence en nos pays. Mais c'est également parler d'une ressource rare, d'un bien plus que précieux.
C'est parler d'aujourd'hui, d'une urgence pressante, et c'est parler de notre avenir.
Car aujourd'hui, ce sont nos pays où l'eau coule, parfois trop abondante, souvent polluée.
Car aujourd'hui, ce sont les pays les plus pauvres, où l'eau manque et où l'eau tue. Ce sont des petites filles soumises à la corvée d'eau.
Demain, ce seront les terres arides rendues plus sèches encore et soumises aux aléas brutaux d'un climat déréglé.
Demain, ce seront nos champs où l'eau sera plus rare, ce seront nos terres soumises à des pluies plus violentes ou à des sécheresses plus intenses.
Demain, ce seront encore combien d'hommes privés d'eau potable ?
C'est tout cela qui fait de la question de l'eau une urgence.
Tout cela qui fait de l'écologie un enjeu immédiat.
Pour toutes ces raisons, chers amis, le moment qui nous réunit aujourd'hui est un moment imposant, et même intimidant.
Car en ouvrant officiellement la préparation du 6ème Forum mondial de l'eau qui se tiendra à Marseille en mars 2012, nous ouvrons, ensemble, un rendez-vous à réussir ensemble.
Avec l'Afrique du Sud, candidate valeureuse à l'organisation de ce 6ème forum, et tous ses représentants. Car ce serait un privilège pour nous qu'elle participe activement au processus. C'est le souhait du Président de la République, c'est notre volonté partagée.
Avec tous les pays de la Méditerranée, également, dont Marseille est l'une des soeurs. Avec tous ces pays engagés dans le processus de l'Union pour la Méditerranée qui déjà travaillent ensemble à une stratégie pour l'eau.
Et je salue la présence à nos côtés aujourd'hui de M. le ministre Eroglu, témoignage fort de l'implication de la Turquie dans la réussite de ce nouveau forum.
Avec tout le continent africain, également, dont nous sommes et dont nous nous sentons si proches.
Le combat de la France pour faire de l'eau une priorité mondiale ne sera pas un combat solitaire.
Il sera NOTRE bataille collective.
? Un combat collectif avec une méthode collective
C'est le sens même de notre projet pour le Forum de mars 2012 et c'est pour cela que nous l'avons voulu fondé sur l'association et la participation de tous - des pouvoirs publics aux industriels en passant par les ONG, les partenaires sociaux, les élus et les experts.
Et je remercie, ici, très sincèrement, Jean-Claude Gaudin, Michel Vauzelle Jean-Noël Guérini, Eugène Caselli et tous les acteurs de la région PACA qui ont mis leurs forces, leur énergie et leurs convictions au service de la réussite de ce forum.
Cette méthode, elle a une raison forte. C'est le défi écologique lui-même. Ce défi auquel aucun Etat ni aucun corps social n'a les moyens de répondre seul.
Cette méthode, elle a eu un laboratoire fertile : le Grenelle de l'environnement que nous avons lancé en France en 2007.
Mais cette méthode, elle a surtout un avenir : permettre à la communauté internationale, en tous ses acteurs, de discuter de tout, librement, ouvertement ; lui permettre ainsi de construire les solutions dont nous avons besoin.
C'est pour cela que nous devons écrire, dès aujourd'hui, le rendez-vous de 2012.
Et j'ai envie de dire que l'essentiel est dans la route qui s'ouvre en cet instant.
Cette route elle passe, dès maintenant, par des « dialogues grenelliens » locaux, dans les pays volontaires, puis au niveau régional l'année prochaine et au niveau mondial, enfin, en 2012.
C'est ainsi que naîtront des solutions concertées et partagées.
C'est ainsi que naîtront des engagements forts, construits ensemble et portés par tous, d'amont en aval.
Notre pari est là :
- Faire du Forum de 2012 une instance de dialogue permanent. Un dialogue qui commence aujourd'hui pour, nous l'espérons, ne jamais se rompre. Un dialogue qui passe par une véritable mobilisation citoyenne.
- Faire du rendez-vous de 2012 un tournant dans la gouvernance mondiale de l'eau : réussir à placer l'eau au coeur de nos politiques ; en faire une ressource protégée et partagée ; construire un véritable droit à l'accès à l'eau et à l'assainissement - un droit clarifié et appliqué.
Autant de pistes d'actions essentielles rappelées hier par le Président de la République.
Car nous sommes bel et bien face à :
? Un combat urgent
Plus tueuse, mais moins visible, que les guerres, l'eau reste le premier drame de notre planète.
Et ce malgré les résolutions, malgré les engagements internationaux et les déclarations.
Parmi les objectifs du Millénaire pour le Développement, il y avait la réduction de moitié, d'ici à 2015, du nombre des personnes n'ayant pas accès à l'eau et à l'assainissement.
Pourtant, si le rythme démographique actuel se maintient, ce sont plus de 2 milliards d'êtres humains qui seront toujours dépourvus d'accès à des installations sanitaires d'ici 2015.
Pour l'accès à l'eau potable, en revanche, les objectifs seront dépassés...
C'est une grande victoire...Mais c'est une victoire partielle : en 2015, plus de 670 millions de personnes seront toujours privées d'eau potable - dont 80% en Afrique sub-saharienne.
A l'horizon de l'eau, il y a donc un avenir inquiétant.
Et ce d'autant qu'en 2030, les projections donnent près de 2 milliards de personnes vivant dans des bidonvilles.
Si rien ne change, c'est une vraie catastrophe sanitaire qui se profile.
C'est pourquoi, le Président l'a rappelé, lorsque la France présidera le G8 et le G20, en 2011, elle placera la question de l'eau au coeur des discussions.
C'est pourquoi nous serons particulièrement vigilants sur la façon dont la question de l'eau sera traitée lors de la session spéciale de l'Assemblée générale des Nations unies qui, en septembre prochain, examinera les objectifs du Millénaire.
Sur ce point, l'entretien que j'ai eu en avril dernier avec l'administratrice du PNUD m'a rassurée : le sujet est bien au coeur de ses préoccupations.
Et il doit l'être.
Car l'eau est non seulement le fondement de notre humanité, mais elle est aussi la clé de nos ecosystèmes. De la qualité de l'eau dépendent en effet la biodiversité et les équilibres biologiques mondiaux.
Au-delà, c'est le développement lui-même qui est inextricablement lié à la question de l'eau.
On estime ainsi à 443 millions le nombre de jours de scolarité perdus, et en particulier par les petites filles, chaque année à cause de questions liées à l'eau.
Dans les régions rurales d'Afrique, la corvée d'eau mobilise chaque jour plus de 100 millions de femmes pendant trois heures.
Cette question est donc bien, profondément, un enjeu humaniste.
Elle donne à l'écologie son sens fort de double combat pour l'homme et pour la nature.
Car elle participe à l'émancipation des femmes, à la lutte contre la pauvreté, au développement, à l'éducation, à la protection de l'environnement.
Et pour chiffrer ce qui, au fond ne se mesure pas : chaque euro investi pour l'eau rapporte 8 euros.
? Un combat pour le développement mondial
Ce combat, il est de notre responsabilité à tous.
Responsabilité des pays riches, bien sûr, dont l'aide au développement est au coeur de la stratégie pour l'accès à l'eau et à l'assainissement.
C'est le sens de l'engagement français : en 2008, l'ensemble des financements français a permis l'accès à l'eau et à l'assainissement de 2,5 millions de personnes supplémentaires dans les pays en développement.
Responsabilité de chaque pays concerné. L'une des grandes avancées du 5ème forum mondial de l'eau d'Istanbul a ainsi été de reconnaître que l'essentiel des financements de l'accès à l'eau et l'assainissement est du ressort des pays concernés eux-mêmes.
La solidarité internationale ne peut venir qu'en soutien à ces politiques nationales - et, surtout, locales.
Car il faut veiller à cette articulation, entre local et national.
Il faut adapter les solutions à chaque cas particulier puis les généraliser.
C'est pourquoi la France plaide pour qu'une véritable place soit donnée à l'hygiène.
Un autre grand résultat d'Istanbul est d'ailleurs d'avoir promu dans sa déclaration finale, et pour la première fois, une approche globale de l'assainissement. Occupons mous de l'eau sale, la tueuse.
Au-delà, de cette responsabilité de chaque pays, où qu'il soit, il y a, enfin, une responsabilité partagée de la communauté internationale.
A cet égard, le plus fondamental et le plus urgent est d'extraire l'eau des rivalités nationales. Urgence si difficile !
Les chiffres sont là :
90% de la population mondiale vivent dans des pays qui partagent leurs ressources en eau avec d'autres.
15% des pays dépendent à 50% d'eaux extérieures à leurs frontières.
Plus de 250 bassins transfrontaliers ne font, pour la plupart, l'objet d'aucune coopération entre les différents Etats concernés.
Les réalités, nous les connaissons, conflits accrus, tensions .... Spectres des guerres de l'eau.
Notre devoir est clair : la coopération mondiale en matière de gestion des cours d'eau transfrontaliers doit être renforcée.
Vous l'avez entendu hier : le Président de la République a confirmé que la France poursuivait le processus d'adhésion à la convention des Nations Unies sur les cours d'eau internationaux à des fins autres que la navigation : le 8 avril dernier, la décision a été votée à l'Assemblée Nationale et passera prochainement devant le Sénat.
La France rejoindra ainsi les 18 pays qui ont déjà adhéré.
Travaillons ensemble pour atteindre le seuil des 35 nations signataires nécessaires à une mise en oeuvre.
Au-delà, l'enjeu est fort : nous devons travailler à construire un droit à l'eau, un droit porteur de paix.
? Un combat pour la reconnaissance du droit à l'accès à l'eau et l'assainissement
Sur cette question, lors du Forum de Mexico, les autorités locales et le processus parlementaire avaient lancé le débat. Le Forum d'Istanbul a permis de progresser, mais nous avons encore beaucoup à faire. Soyons justes.
Sur cette question, comme l'a rappelé le Président, il faut être clair.
Le droit d'accès à l'eau et à l'assainissement est un droit humain fondamental. C'est un droit à la vie- C'est un droit au développement. La terre est à 70 % composée d'eau - L'homme est à 70 % composé d'eau - Ouvrons simplement les yeux sur cette évidente réalité, l'homme et la planète sont d'eau.
La reconnaissance de ce droit, c'est donc permettre à chacun de disposer sur son lieu de vie d'une eau potable et de l'évacuation de ses eaux usées.
C'est donc penser équitablement l'usage d'une ressource précieuse, le coût de son traitement et les situations de chaque famille.
C'est pourquoi la France encouragera les réflexions du comité des droits de l'homme, fondées sur les travaux en cours de l'expert indépendant chargé par les Nations unies de rendre un rapport sur le sujet en 2011, Madame Catarina de Albuquerque.
C'est pourquoi la France apportera son à l'Espagne et à l'Allemagne qui préparent sur ce sujet un projet de résolution au Conseil des Droits de l'Homme.
C'est pourquoi la France proposera d'élaborer pendant les deux ans à venir une déclaration ministérielle pour le Forum de Marseille.
C'est pourquoi la France a souhaité inscrire dans sa propre loi sur l'eau de 2006 ce principe :« l'usage de l'eau appartient à tous et chaque personne physique, pour son alimentation et son hygiène, a le droit d'accéder à l'eau potable, dans des conditions économiques acceptables par tous ».
Mais il ne veut pas dire gratuité de l'eau.
Car cette gratuité porterait en elle-même la plus forte des injustices : l'inévitable gaspillage d'une ressource trop rare.
Et les inégalités dans l'accès à l'eau ne sont pas seulement mondiales.
Elles sont également au coeur même de nos pays riches, où le coût de l'eau pèse parfois de façon insurmontable sur le budget des plus fragiles.
C'est pourquoi nous tenons à mettre en place une aide pour les plus démunis.
Pour que dans nos pays aussi l'accès à l'eau soit un droit, et une réalité, pour tous.
Cette aide, nous la voulons à deux niveaux complémentaires l'un de l'autre :
- Une aide préventive : afin de faciliter l'accès des plus démunis au service public de l'eau, nous allons verser une allocation aux personnes dont les charges d'eau représentent plus de 3 % de leur revenu.
- Une aide curative qui permettra de faciliter l'aide au paiement des factures d'eau des personnes en situation d'impayés.
Ces dispositifs de solidarité seront financés par les usagers de la ressource en eau, dans une limite de 1% de leur facture d'eau.
Cette augmentation reste indolore sur le budget global de la facture d'eau tout en dégageant une somme suffisante d'argent.
Le dispositif curatif, déjà partiellement en oeuvre, a permis d'aider sur la seule année dernière 55 000 familles à honorer leur facture d'eau.
Le besoin est réel et les solutions proposées montrent toute leur pertinence, et toute leur urgence.
Le reste du dispositif est actuellement en cours d'examen au parlement.
C'est là un exemple. Une solution envisageable.
Et je souhaite que le Forum Mondial soit également un grand rendez-vous des expériences, des solutions locales ou nationales expérimentées dans chaque pays.
C'est ensemble que nous trouverons les voies nouvelles d'une gestion nouvelle de l'eau.
Pour cela,
Nous avons besoin du droit international.
Nous avons besoin de la mobilisation de toutes les instances internationales.
Nous avons besoin du processus du 6ème Forum Mondial de l'eau.
De toute ma volonté et mon énergie, je souhaite qu'il réussisse.
Qu'il parvienne à être ce « grand rendez-vous du donner et du recevoir » dont rêvait Senghor et dont notre monde a aujourd'hui tant besoin.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 30 juin 2010
Monsieur le président de région,
Monsieur le Maire,
Monsieur le président du conseil général,
Monsieur le président de la communauté urbaine de Marseille Provence Métropole,
Mesdames, Messieurs,
Chers amis,
Je suis très heureuse, et honorée, d'être parmi vous aujourd'hui pour parler de l'un des sujets qui me tiennent le plus à coeur : l'eau.
Car parler de l'eau, c'est parler de tout ce qui fait l'aventure humaine.
C'est parler de notre quotidien, d'une sorte d'évidence en nos pays. Mais c'est également parler d'une ressource rare, d'un bien plus que précieux.
C'est parler d'aujourd'hui, d'une urgence pressante, et c'est parler de notre avenir.
Car aujourd'hui, ce sont nos pays où l'eau coule, parfois trop abondante, souvent polluée.
Car aujourd'hui, ce sont les pays les plus pauvres, où l'eau manque et où l'eau tue. Ce sont des petites filles soumises à la corvée d'eau.
Demain, ce seront les terres arides rendues plus sèches encore et soumises aux aléas brutaux d'un climat déréglé.
Demain, ce seront nos champs où l'eau sera plus rare, ce seront nos terres soumises à des pluies plus violentes ou à des sécheresses plus intenses.
Demain, ce seront encore combien d'hommes privés d'eau potable ?
C'est tout cela qui fait de la question de l'eau une urgence.
Tout cela qui fait de l'écologie un enjeu immédiat.
Pour toutes ces raisons, chers amis, le moment qui nous réunit aujourd'hui est un moment imposant, et même intimidant.
Car en ouvrant officiellement la préparation du 6ème Forum mondial de l'eau qui se tiendra à Marseille en mars 2012, nous ouvrons, ensemble, un rendez-vous à réussir ensemble.
Avec l'Afrique du Sud, candidate valeureuse à l'organisation de ce 6ème forum, et tous ses représentants. Car ce serait un privilège pour nous qu'elle participe activement au processus. C'est le souhait du Président de la République, c'est notre volonté partagée.
Avec tous les pays de la Méditerranée, également, dont Marseille est l'une des soeurs. Avec tous ces pays engagés dans le processus de l'Union pour la Méditerranée qui déjà travaillent ensemble à une stratégie pour l'eau.
Et je salue la présence à nos côtés aujourd'hui de M. le ministre Eroglu, témoignage fort de l'implication de la Turquie dans la réussite de ce nouveau forum.
Avec tout le continent africain, également, dont nous sommes et dont nous nous sentons si proches.
Le combat de la France pour faire de l'eau une priorité mondiale ne sera pas un combat solitaire.
Il sera NOTRE bataille collective.
? Un combat collectif avec une méthode collective
C'est le sens même de notre projet pour le Forum de mars 2012 et c'est pour cela que nous l'avons voulu fondé sur l'association et la participation de tous - des pouvoirs publics aux industriels en passant par les ONG, les partenaires sociaux, les élus et les experts.
Et je remercie, ici, très sincèrement, Jean-Claude Gaudin, Michel Vauzelle Jean-Noël Guérini, Eugène Caselli et tous les acteurs de la région PACA qui ont mis leurs forces, leur énergie et leurs convictions au service de la réussite de ce forum.
Cette méthode, elle a une raison forte. C'est le défi écologique lui-même. Ce défi auquel aucun Etat ni aucun corps social n'a les moyens de répondre seul.
Cette méthode, elle a eu un laboratoire fertile : le Grenelle de l'environnement que nous avons lancé en France en 2007.
Mais cette méthode, elle a surtout un avenir : permettre à la communauté internationale, en tous ses acteurs, de discuter de tout, librement, ouvertement ; lui permettre ainsi de construire les solutions dont nous avons besoin.
C'est pour cela que nous devons écrire, dès aujourd'hui, le rendez-vous de 2012.
Et j'ai envie de dire que l'essentiel est dans la route qui s'ouvre en cet instant.
Cette route elle passe, dès maintenant, par des « dialogues grenelliens » locaux, dans les pays volontaires, puis au niveau régional l'année prochaine et au niveau mondial, enfin, en 2012.
C'est ainsi que naîtront des solutions concertées et partagées.
C'est ainsi que naîtront des engagements forts, construits ensemble et portés par tous, d'amont en aval.
Notre pari est là :
- Faire du Forum de 2012 une instance de dialogue permanent. Un dialogue qui commence aujourd'hui pour, nous l'espérons, ne jamais se rompre. Un dialogue qui passe par une véritable mobilisation citoyenne.
- Faire du rendez-vous de 2012 un tournant dans la gouvernance mondiale de l'eau : réussir à placer l'eau au coeur de nos politiques ; en faire une ressource protégée et partagée ; construire un véritable droit à l'accès à l'eau et à l'assainissement - un droit clarifié et appliqué.
Autant de pistes d'actions essentielles rappelées hier par le Président de la République.
Car nous sommes bel et bien face à :
? Un combat urgent
Plus tueuse, mais moins visible, que les guerres, l'eau reste le premier drame de notre planète.
Et ce malgré les résolutions, malgré les engagements internationaux et les déclarations.
Parmi les objectifs du Millénaire pour le Développement, il y avait la réduction de moitié, d'ici à 2015, du nombre des personnes n'ayant pas accès à l'eau et à l'assainissement.
Pourtant, si le rythme démographique actuel se maintient, ce sont plus de 2 milliards d'êtres humains qui seront toujours dépourvus d'accès à des installations sanitaires d'ici 2015.
Pour l'accès à l'eau potable, en revanche, les objectifs seront dépassés...
C'est une grande victoire...Mais c'est une victoire partielle : en 2015, plus de 670 millions de personnes seront toujours privées d'eau potable - dont 80% en Afrique sub-saharienne.
A l'horizon de l'eau, il y a donc un avenir inquiétant.
Et ce d'autant qu'en 2030, les projections donnent près de 2 milliards de personnes vivant dans des bidonvilles.
Si rien ne change, c'est une vraie catastrophe sanitaire qui se profile.
C'est pourquoi, le Président l'a rappelé, lorsque la France présidera le G8 et le G20, en 2011, elle placera la question de l'eau au coeur des discussions.
C'est pourquoi nous serons particulièrement vigilants sur la façon dont la question de l'eau sera traitée lors de la session spéciale de l'Assemblée générale des Nations unies qui, en septembre prochain, examinera les objectifs du Millénaire.
Sur ce point, l'entretien que j'ai eu en avril dernier avec l'administratrice du PNUD m'a rassurée : le sujet est bien au coeur de ses préoccupations.
Et il doit l'être.
Car l'eau est non seulement le fondement de notre humanité, mais elle est aussi la clé de nos ecosystèmes. De la qualité de l'eau dépendent en effet la biodiversité et les équilibres biologiques mondiaux.
Au-delà, c'est le développement lui-même qui est inextricablement lié à la question de l'eau.
On estime ainsi à 443 millions le nombre de jours de scolarité perdus, et en particulier par les petites filles, chaque année à cause de questions liées à l'eau.
Dans les régions rurales d'Afrique, la corvée d'eau mobilise chaque jour plus de 100 millions de femmes pendant trois heures.
Cette question est donc bien, profondément, un enjeu humaniste.
Elle donne à l'écologie son sens fort de double combat pour l'homme et pour la nature.
Car elle participe à l'émancipation des femmes, à la lutte contre la pauvreté, au développement, à l'éducation, à la protection de l'environnement.
Et pour chiffrer ce qui, au fond ne se mesure pas : chaque euro investi pour l'eau rapporte 8 euros.
? Un combat pour le développement mondial
Ce combat, il est de notre responsabilité à tous.
Responsabilité des pays riches, bien sûr, dont l'aide au développement est au coeur de la stratégie pour l'accès à l'eau et à l'assainissement.
C'est le sens de l'engagement français : en 2008, l'ensemble des financements français a permis l'accès à l'eau et à l'assainissement de 2,5 millions de personnes supplémentaires dans les pays en développement.
Responsabilité de chaque pays concerné. L'une des grandes avancées du 5ème forum mondial de l'eau d'Istanbul a ainsi été de reconnaître que l'essentiel des financements de l'accès à l'eau et l'assainissement est du ressort des pays concernés eux-mêmes.
La solidarité internationale ne peut venir qu'en soutien à ces politiques nationales - et, surtout, locales.
Car il faut veiller à cette articulation, entre local et national.
Il faut adapter les solutions à chaque cas particulier puis les généraliser.
C'est pourquoi la France plaide pour qu'une véritable place soit donnée à l'hygiène.
Un autre grand résultat d'Istanbul est d'ailleurs d'avoir promu dans sa déclaration finale, et pour la première fois, une approche globale de l'assainissement. Occupons mous de l'eau sale, la tueuse.
Au-delà, de cette responsabilité de chaque pays, où qu'il soit, il y a, enfin, une responsabilité partagée de la communauté internationale.
A cet égard, le plus fondamental et le plus urgent est d'extraire l'eau des rivalités nationales. Urgence si difficile !
Les chiffres sont là :
90% de la population mondiale vivent dans des pays qui partagent leurs ressources en eau avec d'autres.
15% des pays dépendent à 50% d'eaux extérieures à leurs frontières.
Plus de 250 bassins transfrontaliers ne font, pour la plupart, l'objet d'aucune coopération entre les différents Etats concernés.
Les réalités, nous les connaissons, conflits accrus, tensions .... Spectres des guerres de l'eau.
Notre devoir est clair : la coopération mondiale en matière de gestion des cours d'eau transfrontaliers doit être renforcée.
Vous l'avez entendu hier : le Président de la République a confirmé que la France poursuivait le processus d'adhésion à la convention des Nations Unies sur les cours d'eau internationaux à des fins autres que la navigation : le 8 avril dernier, la décision a été votée à l'Assemblée Nationale et passera prochainement devant le Sénat.
La France rejoindra ainsi les 18 pays qui ont déjà adhéré.
Travaillons ensemble pour atteindre le seuil des 35 nations signataires nécessaires à une mise en oeuvre.
Au-delà, l'enjeu est fort : nous devons travailler à construire un droit à l'eau, un droit porteur de paix.
? Un combat pour la reconnaissance du droit à l'accès à l'eau et l'assainissement
Sur cette question, lors du Forum de Mexico, les autorités locales et le processus parlementaire avaient lancé le débat. Le Forum d'Istanbul a permis de progresser, mais nous avons encore beaucoup à faire. Soyons justes.
Sur cette question, comme l'a rappelé le Président, il faut être clair.
Le droit d'accès à l'eau et à l'assainissement est un droit humain fondamental. C'est un droit à la vie- C'est un droit au développement. La terre est à 70 % composée d'eau - L'homme est à 70 % composé d'eau - Ouvrons simplement les yeux sur cette évidente réalité, l'homme et la planète sont d'eau.
La reconnaissance de ce droit, c'est donc permettre à chacun de disposer sur son lieu de vie d'une eau potable et de l'évacuation de ses eaux usées.
C'est donc penser équitablement l'usage d'une ressource précieuse, le coût de son traitement et les situations de chaque famille.
C'est pourquoi la France encouragera les réflexions du comité des droits de l'homme, fondées sur les travaux en cours de l'expert indépendant chargé par les Nations unies de rendre un rapport sur le sujet en 2011, Madame Catarina de Albuquerque.
C'est pourquoi la France apportera son à l'Espagne et à l'Allemagne qui préparent sur ce sujet un projet de résolution au Conseil des Droits de l'Homme.
C'est pourquoi la France proposera d'élaborer pendant les deux ans à venir une déclaration ministérielle pour le Forum de Marseille.
C'est pourquoi la France a souhaité inscrire dans sa propre loi sur l'eau de 2006 ce principe :« l'usage de l'eau appartient à tous et chaque personne physique, pour son alimentation et son hygiène, a le droit d'accéder à l'eau potable, dans des conditions économiques acceptables par tous ».
Mais il ne veut pas dire gratuité de l'eau.
Car cette gratuité porterait en elle-même la plus forte des injustices : l'inévitable gaspillage d'une ressource trop rare.
Et les inégalités dans l'accès à l'eau ne sont pas seulement mondiales.
Elles sont également au coeur même de nos pays riches, où le coût de l'eau pèse parfois de façon insurmontable sur le budget des plus fragiles.
C'est pourquoi nous tenons à mettre en place une aide pour les plus démunis.
Pour que dans nos pays aussi l'accès à l'eau soit un droit, et une réalité, pour tous.
Cette aide, nous la voulons à deux niveaux complémentaires l'un de l'autre :
- Une aide préventive : afin de faciliter l'accès des plus démunis au service public de l'eau, nous allons verser une allocation aux personnes dont les charges d'eau représentent plus de 3 % de leur revenu.
- Une aide curative qui permettra de faciliter l'aide au paiement des factures d'eau des personnes en situation d'impayés.
Ces dispositifs de solidarité seront financés par les usagers de la ressource en eau, dans une limite de 1% de leur facture d'eau.
Cette augmentation reste indolore sur le budget global de la facture d'eau tout en dégageant une somme suffisante d'argent.
Le dispositif curatif, déjà partiellement en oeuvre, a permis d'aider sur la seule année dernière 55 000 familles à honorer leur facture d'eau.
Le besoin est réel et les solutions proposées montrent toute leur pertinence, et toute leur urgence.
Le reste du dispositif est actuellement en cours d'examen au parlement.
C'est là un exemple. Une solution envisageable.
Et je souhaite que le Forum Mondial soit également un grand rendez-vous des expériences, des solutions locales ou nationales expérimentées dans chaque pays.
C'est ensemble que nous trouverons les voies nouvelles d'une gestion nouvelle de l'eau.
Pour cela,
Nous avons besoin du droit international.
Nous avons besoin de la mobilisation de toutes les instances internationales.
Nous avons besoin du processus du 6ème Forum Mondial de l'eau.
De toute ma volonté et mon énergie, je souhaite qu'il réussisse.
Qu'il parvienne à être ce « grand rendez-vous du donner et du recevoir » dont rêvait Senghor et dont notre monde a aujourd'hui tant besoin.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 30 juin 2010