Texte intégral
La France face à l'enjeu de la réduction des gaz à effet de serre
Depuis trois ans, et pour la première fois, les rejets de CO2 ont diminué conformément aux objectifs de Kyoto. Bien plus que dans d'autres pays.
La réduction des émissions de gaz à effet de serre est une priorité nationale. C'est un impératif planétaire, au coeur des enjeux du changement climatique, qui nous place devant une des responsabilités historiques les plus importantes de notre génération, pour nos enfants et les générations futures.
C'est aussi la condition nécessaire de la compétitivité économique de demain pour notre territoire, nos entreprises et nos industries. Elle mérite d'être traitée avec la plus grande rigueur.
Il est faux de dire que la France ne rejette pas moins de CO2 aujourd'hui qu'en 1990. C'est en 2007 que les rejets de CO2 en France ont atteint le même niveau qu'en 1990. Ils n'ont cessé de diminuer depuis. En outre, ce niveau de CO2 avait été constaté malgré une croissance de 9,5 % de la population, et de 38 % du produit intérieur brut durant cette période.
Cette stabilisation des émissions de CO2 sur la période est en réalité déjà un résultat majeur, qui distingue la France de beaucoup d'autres pays : pas plus d'émissions de CO2, alors que nous étions plus nombreux, produisant et consommant davantage, effectuant plus de déplacements ! Mais l'histoire ne s'arrête pas là. Nous sommes en 2010. Il faut aussi préciser que les engagements de Kyoto, qui prévoient pour la France la stabilisation des émissions de gaz à effet de serre en 2012 par rapport à 1990, comme d'ailleurs les travaux scientifiques du Groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat (GIEC), sont fondés sur des critères internationaux qui prennent en compte l'ensemble des gaz à effet de serre émis sur le territoire de chaque Etat, et pas simplement le CO2.
Depuis 2007, pour la première fois historiquement, à la suite du Grenelle de l'environnement voulu par le président de la République, les courbes s'infléchissent nettement et dans la durée. Pour les six gaz du Protocole de Kyoto, la France a réduit de 6,4 % ses émissions entre 1990 et 2008 (1,1 % pour le seul CO2), pour atteindre le niveau de 527 millions de tonnes équivalent CO2 (MteqCO2), ce qui en fait un des très rares pays industrialisés qui respecte, et dépasse même ses engagements au titre du Protocole de Kyoto.
Ce résultat remarquable place la France à la tête de la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre, comme deux études récentes, canadienne et américaine, citées dans l'article du Monde du 13 août l'établissent. Pour en mesurer pleinement la portée, il faut le comparer aux évolutions constatées sur la même période dans d'autres pays comme les Etats-Unis (+ 13 %), le Canada (+ 24 %), l'Australie (+ 31 %), l'Espagne (+ 42 %), le Japon (+ 1 %) ou la Finlande (- 0,3 %).
Plus encore, la diminution des émissions de gaz à effet de serre s'accélère à un rythme spectaculaire. Selon les données disponibles, les émissions de la France diminuent encore de près de 4 % pour la seule année 2009, ce qui permet d'atteindre une réduction de 10,3 % des émissions de 1990 à fin 2009.
La mise en oeuvre des engagements du Grenelle de l'environnement, déjà transcrite dans la loi, permettra au final une réduction de 21,8 % des émissions de gaz à effet de serre de la France entre 2005 et 2020, soit une baisse de 22,8 % entre 1990 et 2020 selon les calculs du Boston Consulting Group. C'est un résultat qui nous oblige, au niveau international, et qui donne à la voix de la France un écho particulier dans les négociations sur le climat.
De même, ce fut parce que le projet de loi de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement avait été adopté en première lecture par l'Assemblée nationale à la quasi-unanimité que la France, alors présidente de l'Union européenne, put convaincre ses partenaires d'adopter le "paquet climat-énergie" : - 20 % de consommation énergétique, - 20 % de gaz à effet de serre et 20 % d'énergies renouvelables en 2020. Déjà, l'évolution actuelle permet d'envisager de dépasser cet objectif, comme j'ai pu le formuler avec mes collègues britannique et allemand, Chris Huhne et Norbert Röttgen dans les colonnes du Monde du 16 juillet, pour viser une baisse de 30 % des émissions européennes de gaz à effet de serre en 2020.
A côté du suivi des engagements de Kyoto, la méthodologie "empreinte carbone" citée par l'article, même si elle n'est pas validée au plan international, permet bien sûr d'enrichir l'évaluation de l'impact de notre économie sur les émissions mondiales, en tenant compte du solde des émissions liées aux importations et aux exportations, et pas seulement de celles liées aux activités situées sur notre territoire.
Pour la France, ce solde vient augmenter le total de nos émissions, en comptabilisant les rejets de gaz à effet de serre qui s'effectuent dans les pays fournisseurs de nos importations. En bref, l'empreinte carbone ajoute à nos propres émissions nationales celles résultant des productions réalisées sur d'autres territoires pour notre propre consommation intérieure. "L'empreinte carbone" pose donc la question des produits fabriqués sur des territoires dont les normes d'émission de gaz à effet de serre sont plus souples.
Deux réflexions peuvent être tirées de ce constat : d'abord, en effet, la France, en pointe de l'économie verte et des productions décarbonées, développe un avantage comparatif, et est en train de prendre de l'avance et de créer dès aujourd'hui les conditions de sa compétitivité économique de demain, dans un monde d'énergie chère et de matières premières rares.
Ensuite, ce décalage entre notre économie nationale, de plus en plus sobre en carbone, et des pays compétiteurs qui n'auraient pas encore débuté leur mutation environnementale justifie naturellement le débat sur la création d'un mécanisme d'inclusion carbone aux frontières, afin d'intégrer dans le prix de tous les produits vendus sur le territoire européen leur "coût carbone".Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 23 août 2010
Depuis trois ans, et pour la première fois, les rejets de CO2 ont diminué conformément aux objectifs de Kyoto. Bien plus que dans d'autres pays.
La réduction des émissions de gaz à effet de serre est une priorité nationale. C'est un impératif planétaire, au coeur des enjeux du changement climatique, qui nous place devant une des responsabilités historiques les plus importantes de notre génération, pour nos enfants et les générations futures.
C'est aussi la condition nécessaire de la compétitivité économique de demain pour notre territoire, nos entreprises et nos industries. Elle mérite d'être traitée avec la plus grande rigueur.
Il est faux de dire que la France ne rejette pas moins de CO2 aujourd'hui qu'en 1990. C'est en 2007 que les rejets de CO2 en France ont atteint le même niveau qu'en 1990. Ils n'ont cessé de diminuer depuis. En outre, ce niveau de CO2 avait été constaté malgré une croissance de 9,5 % de la population, et de 38 % du produit intérieur brut durant cette période.
Cette stabilisation des émissions de CO2 sur la période est en réalité déjà un résultat majeur, qui distingue la France de beaucoup d'autres pays : pas plus d'émissions de CO2, alors que nous étions plus nombreux, produisant et consommant davantage, effectuant plus de déplacements ! Mais l'histoire ne s'arrête pas là. Nous sommes en 2010. Il faut aussi préciser que les engagements de Kyoto, qui prévoient pour la France la stabilisation des émissions de gaz à effet de serre en 2012 par rapport à 1990, comme d'ailleurs les travaux scientifiques du Groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat (GIEC), sont fondés sur des critères internationaux qui prennent en compte l'ensemble des gaz à effet de serre émis sur le territoire de chaque Etat, et pas simplement le CO2.
Depuis 2007, pour la première fois historiquement, à la suite du Grenelle de l'environnement voulu par le président de la République, les courbes s'infléchissent nettement et dans la durée. Pour les six gaz du Protocole de Kyoto, la France a réduit de 6,4 % ses émissions entre 1990 et 2008 (1,1 % pour le seul CO2), pour atteindre le niveau de 527 millions de tonnes équivalent CO2 (MteqCO2), ce qui en fait un des très rares pays industrialisés qui respecte, et dépasse même ses engagements au titre du Protocole de Kyoto.
Ce résultat remarquable place la France à la tête de la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre, comme deux études récentes, canadienne et américaine, citées dans l'article du Monde du 13 août l'établissent. Pour en mesurer pleinement la portée, il faut le comparer aux évolutions constatées sur la même période dans d'autres pays comme les Etats-Unis (+ 13 %), le Canada (+ 24 %), l'Australie (+ 31 %), l'Espagne (+ 42 %), le Japon (+ 1 %) ou la Finlande (- 0,3 %).
Plus encore, la diminution des émissions de gaz à effet de serre s'accélère à un rythme spectaculaire. Selon les données disponibles, les émissions de la France diminuent encore de près de 4 % pour la seule année 2009, ce qui permet d'atteindre une réduction de 10,3 % des émissions de 1990 à fin 2009.
La mise en oeuvre des engagements du Grenelle de l'environnement, déjà transcrite dans la loi, permettra au final une réduction de 21,8 % des émissions de gaz à effet de serre de la France entre 2005 et 2020, soit une baisse de 22,8 % entre 1990 et 2020 selon les calculs du Boston Consulting Group. C'est un résultat qui nous oblige, au niveau international, et qui donne à la voix de la France un écho particulier dans les négociations sur le climat.
De même, ce fut parce que le projet de loi de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement avait été adopté en première lecture par l'Assemblée nationale à la quasi-unanimité que la France, alors présidente de l'Union européenne, put convaincre ses partenaires d'adopter le "paquet climat-énergie" : - 20 % de consommation énergétique, - 20 % de gaz à effet de serre et 20 % d'énergies renouvelables en 2020. Déjà, l'évolution actuelle permet d'envisager de dépasser cet objectif, comme j'ai pu le formuler avec mes collègues britannique et allemand, Chris Huhne et Norbert Röttgen dans les colonnes du Monde du 16 juillet, pour viser une baisse de 30 % des émissions européennes de gaz à effet de serre en 2020.
A côté du suivi des engagements de Kyoto, la méthodologie "empreinte carbone" citée par l'article, même si elle n'est pas validée au plan international, permet bien sûr d'enrichir l'évaluation de l'impact de notre économie sur les émissions mondiales, en tenant compte du solde des émissions liées aux importations et aux exportations, et pas seulement de celles liées aux activités situées sur notre territoire.
Pour la France, ce solde vient augmenter le total de nos émissions, en comptabilisant les rejets de gaz à effet de serre qui s'effectuent dans les pays fournisseurs de nos importations. En bref, l'empreinte carbone ajoute à nos propres émissions nationales celles résultant des productions réalisées sur d'autres territoires pour notre propre consommation intérieure. "L'empreinte carbone" pose donc la question des produits fabriqués sur des territoires dont les normes d'émission de gaz à effet de serre sont plus souples.
Deux réflexions peuvent être tirées de ce constat : d'abord, en effet, la France, en pointe de l'économie verte et des productions décarbonées, développe un avantage comparatif, et est en train de prendre de l'avance et de créer dès aujourd'hui les conditions de sa compétitivité économique de demain, dans un monde d'énergie chère et de matières premières rares.
Ensuite, ce décalage entre notre économie nationale, de plus en plus sobre en carbone, et des pays compétiteurs qui n'auraient pas encore débuté leur mutation environnementale justifie naturellement le débat sur la création d'un mécanisme d'inclusion carbone aux frontières, afin d'intégrer dans le prix de tous les produits vendus sur le territoire européen leur "coût carbone".Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 23 août 2010