Déclaration de Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'Etat chargée de l'écologie, sur les enjeux de la biodiversité, Chamonix le 10 mai 2010.

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Circonstance : Conférence française pour la biodiversité sur le thème "Quelle gouvernance pour réussir ensemble ?", à Chamonix du 10 au 12 mai 2010

Texte intégral

Messieurs les députés, monsieur le Maire, je suis très heureuse d'être parmi vous aujourd'hui. Je remercie monsieur le Maire, qui nous a clairement montré les difficultés de terrain sur le sujet de la biodiversité. Je remercie également Jean-Claude Ameisen, qui tient un discours très juste sur l'équité et la solidarité. L'impact de nos réponses aux problèmes écologiques sur les inégalités est rarement évalué. Je remercie enfin le groupe de préparation de la Conférence pour son engagement. La présence de quatre cents personnes pour le lancement de ce débat constitue un véritable succès.
En 2010, nous dressons un constat d'échec par rapport à l'engagement européen de stopper la perte de la biodiversité. Pourquoi relancer une stratégie nationale après le Grenelle Environnement ? Le Grenelle n'est pas allé au bout de la réflexion sur la place de l'homme dans la nature. Nous avons fait le choix d'une réflexion très courte afin de pouvoir engager des plans d'actions rapidement. L'écologie n'est pas qu'une question technique ou scientifique. C'est un sujet politique au sens le plus noble du terme. La France a, dans ce domaine, une responsabilité particulière, notamment grâce à l'outre mer. Pour répondre à ces sujets, il faut prendre le temps, avoir de la liberté d'esprit et sortir des sentiers battus. Pour cela, je trouve propice le format des ateliers de créativité auxquels vous allez participer demain. Je pense aussi que Chamonix, un endroit idéal pour être libre, se prête tout à fait à ce travail.
Des réponses ont été apportées et de nombreux débats ont eu lieu. Pourquoi nous engageons-nous à défendre les zones humides ? Pourquoi faut-il placer des bandes enherbées le long des cours d'eau ? À force de pédagogie, ces décisions ont été acceptées. L'engagement de réduire de 50% l'usage des produits phytosanitaires d'ici dix ans est l'un des engagements les plus symboliques du Grenelle. Nous le tiendrons. La fameuse Trame verte et bleue a été votée. C'était une attente forte des associations. Nous disposons de la boîte à outil et l'action doit maintenant passer par le terrain. Le Grenelle n'a pourtant pas posé la question de fond : jusqu'où la relation de dépendance de l'homme vis-à-vis de la nature va-t-elle ? Ceci exige de sortir la biodiversité du monde des experts pour la faire entrer dans la société. C'est l'enjeu de la nouvelle Stratégie nationale de la biodiversité. La précédente souffrait de plusieurs lacunes, notamment des insuffisances dans l'implication des ministères et dans la mobilisation des acteurs.
La biodiversité renvoie à une responsabilité collective. Nous devons engager des stratégies locales. J'aimerais aussi que davantage de ministères s'engagent pour la biodiversité.
Les questions de gouvernance sont notamment celles-ci : à qui appartient le pouvoir de décision ? Que décider lorsque les connaissances sont limitées ? Il n'y a pas de solution unique. Nos engagements doivent de plus être évolutifs dans le temps. Le débat sur la gouvernance pose la question de l'expertise. Vous allez également vous pencher sur la mobilisation de l'ensemble des acteurs. Sur ce point, il convient de partir des expériences de terrain. Nous étudierons vos propositions et vous ferons un bilan de nos réflexions à l'automne. Notre objectif est la publication de cette stratégie, en mai 2011, à l'occasion de la Journée mondiale de la biodiversité.
Vous aurez à débattre du traitement de la biodiversité ordinaire. Nous avons pris l'engagement de réfléchir à une nouvelle instance de gouvernance de la nature en France, que nous avons intitulée Agence de la nature. Cette agence ne sera pas une fusion des organismes existants. Il convient plutôt de mettre ensemble des moyens logistiques, des méthodes d'expertise, de développer des axes de communication communs et de favoriser les synergies entre acteurs. D'ici l'été, les experts nous présenterons leurs propositions en ce sens.
Au niveau communautaire, la Commission européenne élabore un scénario visant à enrayer la perte de biodiversité à l'horizon 2020. À l'échelle internationale, nous avons deux grands rendez-vous : l'assemblée générale des Nations unies en septembre et le Sommet sur la biodiversité à Nagoya en octobre. L'objectif majeur sera d'adopter une plate-forme des experts pour la biodiversité.
S'agissant de la relation entre l'homme et la nature, trois hypothèses à débattre se présentent : la domination de l'homme sur la nature, une dépendance totale de l'homme vis-à-vis de la nature, la voie de la responsabilité qui peut aller jusqu'à tenter de préserver toute forme de vie.
Vous pourriez poser les bases de ce débat pour le dépassionner. Cela nous serait fort utile.
Merci.Source http://www.biodiversite2010.fr, le 30 août 2010