Déclaration de Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, sur les priorités concernant la lutte contre le bruit et les nuisances sonores, à Paris le 14 décembre 2010.

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Circonstance : Ouverture des 6e assises nationales de la qualité de l'environnement sonore à la Maison de la Chimie, à Paris le 14 décembre 2010

Texte intégral

Monsieur le Directeur général de l'environnement de la Commission Européenne,
Monsieur le Président du centre d'information et de documentation sur le bruit,
Monsieur le Président du Conseil national du bruit, cher Eric,
Mesdames et Messieurs,
Je suis heureuse d'être parmi vous aujourd'hui et de pouvoir ouvrir cette sixième édition des assises nationales de la qualité de l'environnement sonore organisées par le centre d'information et de documentation sur le bruit.
Ces assises vont nous donner l'occasion de saluer les progrès accomplis, et d'évaluer également les actions menées par l'ensemble des acteurs concernés : l'Etat, les collectivités territoriales, les professionnels ou les associations.
Tous les acteurs qui ont compris que la qualité de l'environnement sonore était un véritable enjeu social, sanitaire et économique.
Quelques mots sur le bruit. Pas des mots bruyants, rassurez-vous. Tendons l'oreille [il suffit de lever la tête, on entendra nécessairement un bruit dans la salle ou à l'extérieur. Sinon, vous pouvez tousser]. Vous entendez ? Il n'y a pas d'activité humaine sans bruit.
Il n'est pas question de l'éradiquer. Il faut en revanche lui imposer une mesure, le maîtriser, au risque sinon de le laisser devenir une nuisance ou une véritable pollution. Une pollution dont on sait très bien qu'elle frappe ceux qui n'ont pas moyens de s'y soustraire, qui vivent dans des logements mal insonorisés ou auprès d'activités industrielles bruyantes.
Ceux, bien sûr, qui n'ont pas pu se loger ailleurs qu'auprès des autoroutes ou des pistes d'aéroports. Nous savons mieux aujourd'hui quels troubles en résultent et quels sont les impacts du bruit sur notre santé.
Le sommeil perturbé ou réduit, l'impact sur le système cardio-vasculaire, la baisse de vigilance qui provoque des accidents.
Dans une enquête que TNS-SOFRES avait conduite en mai dernier, nous avions pu voir combien le bruit était susceptible de nuire à la qualité de vie des Français. Ils étaient plus de deux-tiers à expliquer qu'ils souffrent du bruit à des degrés divers. Au point pour certains d'avoir dû déménager.
Et cela concernait une personne interrogée sur six, ce qui est considérable. Il fallait donc y regarder de près.
Pour comprendre notamment que les nuisances sonores qui gênent le plus proviennent davantage de l'extérieur des habitations que de l'intérieur. A en croire plus de la moitié des personnes interrogées, ce sont les transports qui sont considérés comme la principale source de gêne, avec la circulation routière qui arrive en tête des citations (59 %).
Pour affronter ces nuisances, nous avons aujourd'hui des armes. Les actions qui avaient été conçues en 2003, dans le cadre du plan national d'actions contre le bruit ont été renforcées. A la fois dans le cadre de la mise en oeuvre du Grenelle de l'Environnement et dans celui du plan national santé environnement 2.
En matière de transport aérien tout d'abord. Avec la loi du 3 août 2009 sur la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement, qui rappelle que la prévention et la limitation des nuisances doivent conjuguer l'optimisation des procédures d'approche et de décollage, la maîtrise de l'urbanisation autour des aéroports et un dispositif d'aides à l'insonorisation sur la base du principe pollueur payeur.
Sur le premier point, je constate avec satisfaction que l'engagement que j'avais souscrit avec Dominique BUSSEREAU le 4 décembre 2007 est en passe d'être honoré.
L'optimisation des procédures d'approche en vents d'Est a été mise en oeuvre au Bourget. Elle est en cours de finalisation sur Paris-Orly et la concertation est lancée pour Roissy. Par ailleurs, le dispositif d'aide aux riverains mis en place pour les 10 principaux aéroports sera élargi en 2011 aux aéroports du Bourget et de Beauvais.
En matière d'aide à l'insonorisation, ce sont près de 230 Meuros qui ont été octroyés par les commissions consultatives d'aides aux riverains entre 2005 et 2009.
Quant à la taxe sur les nuisances sonores aériennes (TNSA), qui a été plusieurs fois revalorisée, son montant est désormais de l'ordre de 60 Meuros.
Le dispositif d'aide aux riverains a pour sa part été amélioré, puisqu'il est désormais possible de verser des « avances sur subvention ».
Enfin, je signale que grâce à l'implication d'Eric DIARD, Président du Conseil national du bruit, le décret limitant le trafic des hélicoptères dans les zones à forte densité de population a, au terme de 18 ans d'attente, été publié le 20 octobre dernier.
En matière de nuisances sonores liées aux transports terrestres, le Gouvernement a pris l'engagement, dans le cadre du Grenelle, de traiter les situations les plus critiques dans un délai de 5 à 7 ans et il s'en donne les moyens.
D'abord en luttant contre le bruit du réseau routier.
- 550 Meuros sont prévus d'ici 2014, dans le cadre des programmes de modernisation des itinéraires routiers (PDMI) sur le réseau routier national non concédé ;
- en outre les sociétés concessionnaires d'autoroutes se sont engagées à financer 110 Meuros de travaux acoustiques au cours des 3 prochaines années sur leurs réseaux.
- enfin, l'ADEME contribue au dispositif grâce à des dotations de crédits grenelle de l'environnement et contractualise avec les collectivités territoriales gestionnaires d'infrastructures pour la résorption des points noirs sur ces réseaux.
S'agissant du réseau ferroviaire, un programme de résorption de plus de 100 millions d'euros a été lancé par RFF, avec la participation de l'Etat, de l'ADEME et des collectivités territoriales.
Ce sont donc plus de 150 millions d'euros par an qui seront investis au cours des prochaines années.
Je voudrais mentionner encore quatre ou cinq des chantiers prioritaires qu'il va nous falloir mener.
Le premier d'entre eux est l'achèvement des cartes de bruit et les plans d'action pour les grandes agglomérations. C'est un projet qui s'inscrit dans le cadre de la Directive européenne sur l'évaluation et la gestion du bruit dans l'environnement.
Et c'est un repérage essentiel pour déterminer les zones de lutte prioritaire contre le bruit et les bâtiments les plus touchés.
Nous devrons également travailler sur l'amélioration de l'acoustique des bâtiments notamment ceux accueillant de jeunes enfants, conformément aux objectifs du PNSE 2.
Nous devrons réaliser un bilan de l'exposition des français au bruit et mener l'évaluation de l'impact sanitaire et économique du bruit. L'ANSES travaille sur ce point à l'élaboration d'indicateurs de référence. Ses propositions devraient être disponibles au plus tard début 2012.
Nous devrons travailler également sur les solutions à apporter aux situations de multi-exposition.
En la matière, j'attends dans le courant de l'année prochaine les premiers résultats des travaux du réseau scientifique et technique du ministère.
Nous travaillerons encore à la mise en place de mesures destinées à réduire les nuisances sonores générées par l'aviation légère.
Et enfin, nous allons créer des observatoires du bruit dans les grandes agglomérations. L'objectif est de mettre en place des réseaux de mesure du bruit et d'informer le public.
Et de faire aussi que ces observatoires puissent rassembler les acteurs et leur permettre de débattre et d'échanger pour construire localement les politiques préventives et curatives.
Deux observatoires sont d'ores et déjà opérationnels et bénéficient de subventions de la part du Ministère du Développement durable, des Transports et du Logement : « Acoucité » à Lyon et « BruitParif » en Ile de France.
Afin d'inciter à la création de structures similaires sur l'ensemble du territoire, un premier appel à manifestation d'intérêt a été lancé durant l'été.
A l'issue d'un premier examen des candidatures, 4 observatoires pourront être constitués et donner lieu au versement d'une subvention en 2011. Il s'agit des dossiers présentés par Grenoble, St Etienne métropole, la communauté du Pays d'Aix et Nice.
Au moment où je les ouvre avec vous, je forme un voeu pour les sixièmes assises nationales.
Je souhaite enfin que ces sixièmes assises nationales l'occasion de proposer des évolutions ou des mesures nouvelles sur d'autres nuisances sonores.
Je pense par exemple à la vie nocturne des centre villes, que vous avez prévu d'aborder dans vos ateliers de travail, et à la réglementation applicable aux lieux musicaux. J'examinerai avec attention les propositions qui seront formulées, notamment par AGI-SON, dans le prolongement du Colloque qui s'est tenu à Nancy en octobre dernier.
De manière assez proche, il faut s'intéresser à l'exercice d'activités sportives dites « bruyantes » : des sports mécaniques, certains sports de balles. Je serai donc là encore attentive à vos propositions sur les modes de gestion équilibrés à trouver.
Si le dialogue avec le fauteur de bruit ne peut être mené ou s'il est infructueux, le constat de l'infraction sera nécessaire et il me paraît indispensable que les services de l'Etat restent, de même que les polices municipales, des interlocuteurs indispensables en la matière.
Je suis d'ailleurs satisfaite qu'à la demande du Conseil national du Bruit, le Ministère de la justice ait accepté de sensibiliser une nouvelle fois les procureurs, en élaborant une circulaire, prochainement diffusée, qui incite à une réponse pénale rapide et systématique, à la fois pédagogique et répressive.
Parce qu'il faut développer les actions de prévention et d'éducation des citoyens. C'est la raison pour laquelle je souhaite que nous menions des actions d'éducation à l'écoute, « au vivre ensemble » ainsi que des actions de sensibilisation aux risques auditifs.
Je suis satisfaite, Monsieur le Président du CNB que vous ayez initié une réflexion sur ce sujet qui fait d'ailleurs l'objet de l'atelier 2 de ces assises.
Une grande partie des sujets que je viens d'évoquer sera abordée dans le cadre des assises. Les autres pourront être traités au sein du Conseil National du Bruit. Je m'empresse d'ailleurs de faire silence et de laisser la parole à Eric Diard, Je vous redis, monsieur le Président, que mon ministère et ses services sont attentifs à vos travaux et aux nouvelles pistes d'action qui en résulteront.
Des travaux que je vous souhaite donc féconds, bruyamment féconds.
Merci de votre attention.Source http://www.developpement-durable.gouv.fr, le 15 décembre 2010