Interview de M. Thierry Mariani, secrétaire d'Etat chargé des transports, à France 2 le 17 décembre 2010, sur les dispositions prises pour améliorer les conditions de circulation en cas d'épisode neigeux et l'assouplissement du permis à points.

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Média : France 2

Texte intégral

R. Sicard.- Bonjour à tous ! Bonjour, T. Mariani. 
 
Bonjour. 
 
Les départs en vacances vont se faire sous la neige. La semaine  dernière, ça avait été la pagaille sur les routes. Qu’est-ce que vous  comptez faire pour que ces départs en vacances, ne se passent pas trop  mal ? 
 
Écoutez, je crois que cette fois, le maximum de préoccupation, le maximum  de précaution pardon, a été prise. En réalité, nous avons revu tous les  mécanismes de coordination, nous avons fait le point, j’allais dire, secteur par  secteur aérien, terrestre, les transports en commun, de ce qui pouvait être  amélioré. Et donc... 
 
Justement qu’est-ce qui va être amélioré ? Qu’est-ce qui va changer ?
 
  Concrètement, qu’est-ce qui a été amélioré ? Je pense l’alerte, à savoir que  désormais, les précautions, effectivement maximum sont prises, vous l’avez  vu, il y a un certain nombre déjà de poids lourds qui ont commencé à être  stockés. Pourquoi ? Parce que quand des poids lourds s’engagent sur des  voies et que ces voies sont enneigées, tout simplement les poids lourds  bloquent les voies. Les voies étant bloquées, les véhicules de déneigement ne  peuvent pas approcher. Par exemple, sur les transports en commun, la  SNCF, on s’est aperçu que les incidents de la semaine dernière étaient  principalement dus à des problèmes qui étaient tombés sur la voie, des  précautions ont été prises en matière d’élagage. Si on regarde la RATP, la  plupart des bus en centre ville, ont pu circuler, il y a eu des problèmes en  banlieue. Pourquoi ? Parce que très souvent les itinéraires n’étaient pas  complètement déneigés. Là aussi, il y a eu une information en direction des  mairies pour faire en sorte que les itinéraires soient complètement déneigés. 
 
Mais est-ce que, mais est-ce qu’il y a des moyens supplémentaires qui  sont mis en place, pour ces vacances ? 
 
Tous les moyens de l’État sont engagés, à savoir que sur les 20 000  kilomètres dont l’État a la responsabilité, tous les moyens sont mis en  pratique. Vous savez de surcroît que B. Hortefeux a décidé d’engager les  blindés de la gendarmerie... 
 
Ce n’est pas un peu excessif les blindés ? 
 
Ça peut sembler excessif, en réalité, les blindés pourquoi ? Tout simplement,  pour j’allais dire, enlever les poids lourds qui pourraient obstruer les voies. Si  les poids lourds tombent sur les voies et empêchent le déneigement, il faut  pouvoir les pousser rapidement et dans ce cas-là, les blindés, c’est peut-être  le plus rapide. 
 
Vous dites que tous les moyens sont mobilisés, mais est-ce que la  France dispose de suffisamment de moyens de déneigement ? 
 
Oui, oui, franchement la France dispose de suffisamment de moyen de  déneigement, par contre... 
 
Alors pourquoi, pourquoi la semaine dernière, on s’est retrouvé dans  cette pagaille ? 
 
Parce que d’abord la semaine dernière, c’était un évènement exceptionnel. Il  faut remonter... 
 
Mais prévu, mais prévu. 
 
Prévu, pas avec la même intensité, mais c’était quand même un évènement... 
 
F. Fillon a même reconnu, lui-même, qu’il avait un petit peu attaqué  trop vite, Météo France ? 
 
Prévu, mais pas avec la même intensité, ce qui est sûr, en tout cas, c’est que  cet évènement, un évènement comparable il faut remonter à 1987. Et puis, je  crois aussi que dans certaines régions, on n’a pas la même culture de  conduite sur la neige. 20 centimètres en Savoie, ça ne produit pas les mêmes  conséquences que 20 centimètres en région parisienne. 
 
Quel conseil vous donnez aux personnes qui vont partir en vacances : est-ce qu’il faut retarder le départ ? Qu’est-ce qu’il faut faire ?
 
Il faut d’abord s’informer, se renseigner, regarder les bulletins météo, voir les  sites de Bison Futé ou de Météo France et ne prendre le volant qu’en cas de  nécessité, s’il y a un risque avéré. 
 
Mais est-ce que vous dites à certaines personnes, quand elles savent que  le problème va exister, qu’il faut ne pas prendre la route, ne pas partir  en vacances ? 
 
Il est évident que si de fortes chutes étaient annoncées par exemple pour  demain, les prévisions de la météo sont affinées, dans ce cas-là, il vaut mieux  peut-être... 
 
On prévoit de grosses chutes de neige demain, justement. 
 
On prévoit des chutes de neige demain plus importantes, notamment,  effectivement, dans l’est de la France qui est la zone des grands départs. Il est  évident que si de fortes chutes de neige sont annoncées, il vaut mieux  retarder son départ de 3-4 heures. 
 
Et alors qu’est-ce que font les gens qui ont des locations, qui doivent  arriver à heure fixe ? 
 
Écoutez, il vaut mieux arriver à mon avis avec 3-4 heures de retard, en  prévenant, qu’être bloqué sur une autoroute pendant une nuit. 
 
Qu’est-ce qui se passe dans les pays qui sont autour de nous ? Est-ce  qu’ils ont les mêmes difficultés ? 
 
Oui, absolument. Quand je regarde ce qui s’est passé, par exemple en  Allemagne, je constate que la semaine dernière, les problèmes ont été pires, il  y a eu plus de 100 000 véhicules bloqués. Et puis regardez simplement hier,  ce qui s’est passé au Canada, où le Gouvernement a dû faire intervenir  l’armée, pour débloquer certains automobilistes qui étaient bloqués à cause  de la neige dans l’Ontario. Qu’est-ce que ça veut dire ? Ça veut dire que les  pouvoirs publics peuvent beaucoup, on peut prévoir, on peut essayer  d’encadrer, mais qu’à un moment, en cas d’évènement exceptionnel, la  nature est la plus forte et que la prudence dans ce cas-là est quand même le  meilleur des remèdes. 
 
Autrement dit, malgré tous les moyens mis en oeuvre, vous ne pouvez  pas garantir que tout se passera bien ? 
 
Bien sûr que non ! Je veux dire, je crois qu’il faut avoir l’humilité, de  reconnaître que si la nature est exceptionnelle, il y a un moment où la nature  sera trop forte. 5 centimètres, 10 centimètres, mais s’il y avait 30 centimètres,  il est évident que la nature poserait beaucoup de problèmes, et il faut quand  même avoir le courage de dire aux citoyens que l’État ne peut pas tout. 
 
Vous parliez tout à l’heure des trains, il y a des précautions qui sont  prises, vous l’avez dit. Mais est-ce qu’il faut prévoir, des retards de  train ?
 
Les trains, je le répète, les retards la semaine dernière, ont été dus  principalement à des arbres qui étaient tombés sur la voie. Donc la SNCF a  pris des précautions en faisant de l’élagage préventif, a priori, je ne pense pas  qu’il devrait y avoir trop de problème avec les trains. 
 
Et dans les aéroports ? 
 
Dans les aéroports, la marge de progression est très difficile. Pourquoi ?  Parce que les aéroports français et bien sûr notamment Roissy et Orly, sont  parmi les plus grands aéroports d’Europe. C’est-à-dire qu’il y a des départs  quasiment, plusieurs départs par minute. Qu’est-ce que ça veut dire ? Ça veut  dire que si les pistes sont obstruées, en réalité, il est très difficile de rattraper  ensuite les retards. Je constate que la semaine dernière, un aéroport comme  celui de Berlin, a perdu 38 % de son trafic c’est-à-dire exactement pareil,  même légèrement plus que ce qu’a perdu Roissy. 
 
On a parlé de pénurie de sel, c’est vrai ?
 
Au niveau de l’État, je peux vous assurer, je l’ai vérifié personnellement, que  les stocks de sel sont tout à fait satisfaisants. Au niveau des collectivités  locales, c’est variable, il y a des collectivités locales qui ont des stocks de sel  suffisants, d’autres non. N’oubliez pas que l’État a la responsabilité de 20  000 kilomètres de route et que l’ensemble du réseau routier, il y a aussi des  communes et des départements qui en assurent la responsabilité. 
 
Sur un dossier différent, les députés hier ont assoupli le système du  permis à points. Est-ce que vous pensez que c’est une bonne chose ? Le  Gouvernement était contre. Et il a fini par céder. Pourquoi le  Gouvernement a cédé ? 
 
Non, le Gouvernement n’a pas cédé, je crois qu’il y a eu une conciliation et... 
 
Si, au départ, il était contre. 
 
Il y a eu une conciliation et un équilibre qui a été trouvé, entre la position du  ministère et la position des députés. La Sécurité Routière reste la priorité et je  rajoute que c’est en plus une grande réussite de politique publique, ces  dernières années. Je sais que ça nous ennuie quand on est sur la route, je sais  aussi que plus de 12 000 vies ont été épargnées et les mesures très claires qui  ont été prises, sont maintenues. Quel est, j’allais dire, l’équilibre qui a été  trouvé à l’Assemblée nationale ? Il y a effectivement un assouplissement, sur  les très légères fautes, mais remarquez bien que sur tous les grands excès de  vitesse, sur tout ce qui est alcoolisme, sur tout ce qui est conduite dangereuse,  par exemple à contresens, le gouvernement est resté ferme. Et je crois que le  cap est très net, la Sécurité Routière reste une de nos priorités. 
 
On parlait tout à l’heure, de la SNCF, les tarifs vont augmenter, est-ce  que le train ne va pas devenir un luxe ? 
 
Non, les tarifs, quel est le problème aujourd’hui, en France, Réseau Ferré de  France, qui gère les voies SNCF est en situation d’endettement très forte.  Pourquoi ? Parce que quand on a séparé Réseau Ferré de France et la SNCF,  en réalité soyons honnêtes, c’est Réseau Ferré de France qui a pris  quasiment toute la dette, à peu près 28 milliards d’euros. Donc si on veut  maintenir le niveau de qualité de notre réseau, il faut investir, très peu avait  été investi avant 2005. Si on veut investir, il n’y a que deux solutions... 
 
Notamment dans les passages à niveau ? 
 
Notamment dans les passages à niveau, mais les passages à niveau, c’est  surtout de la, on y reviendra après, si vous le voulez, c’est surtout des  problèmes de voiries. Et donc en réalité pour investir, ou nous arrivons à  baisser les coûts d’entretien des voies, ou alors, effectivement on augmente le  prix de ce qu’on appelle, j’allais dire les sillons. Et donc effectivement, si les  tarifs de péages qui sont payés par la SNCF, pour faire circuler ses trains sur  les voies ferrées augmentent, il est possible voire même probable, qu’il y ait  une légère augmentation des tickets de train. 
 Source : Premier ministre, Service d’Information du Gouvernement, le 21 décembre 2010