Interview de Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, à RMC le 19 octobre 2011, sur la crise de la dette souveraine de la zone euro et les agences de notation, la politique budgétaire et fiscale, la politique du logement et la sécurité nucléaire.

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Texte intégral

JEAN-JACQUES BOURDIN Nathalie KOSCIUSKO-MORIZET, bonjour.
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Bonjour.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Merci d’être avec nous.
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Merci.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Dites-moi si la France perd son fameux AAA, c’est catastrophique ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Eh bien surtout il faut éviter de perdre son fameux AAA, comme vous dites, pourquoi vous…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Mais c’est catastrophique ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Pourquoi vous allez aux conclusions…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Non ! Je vous dis ça parce qu’on est sous surveillance…
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Oui !
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Vous le savez bien ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Oui ! Enfin le terme « sous surveillance » est assez angoissant par rapport à une…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Vous n’en avez pas assez de ces agences de notation qui, telle l’épée de Damoclès, sont suspendues au-dessus de vos têtes ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Ah ! Moi j’aimerais beaucoup qu’on aille au bout de cette réflexion qui a été lancée d’avoir des agences alternatives et notamment une agence européenne, parce que… une agence un peu souveraine en quelque sorte, ce n’est pas seulement une question d’être européen ou pas européen…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui !
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Parce que, oui, c’est vrai qu’ouvrir la presse tous les matins en se demandant comment l’agence de notation nous a trouvé beau ou pas beau ce n’est pas agréable. Ceci dit, derrière il y a des réalités, les réalités c’est les attaques des spéculateurs, c’est la crise de l’endettement et je crois qu’il ne faut pas non plus se focaliser sur ce que disent ou ne disent pas les agences de notation mais s’intéresser aux fondements, les fondements c’est qu’on a besoin d’avoir des politiques rigoureuses du point de vue budgétaire – et c’est ce qu’on fait – on a besoin d’avoir des politiques sérieuses…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui !
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET On a besoin de démontrer notre capacité à réformer, c’est ce qu’on a fait pendant ces dernières années et qui nous permet aujourd’hui d’avoir le AAA et c’est ce qu’on fait en ce moment.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Donc ! Ce triple AAA qui est sous surveillance… Bien ! Mais, Nathalie KOSCIUSKO-MORIZET, il y a un autre fait survenu hier qui est très important, aujourd’hui la France, quand elle emprunte, emprunte à taux de 3,2%, lorsque l’Allemagne emprunte elle emprunte à un taux de 2,2%, 1 point d’écart entre les 2 pays…
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Et vous savez combien…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Ca ne s’est jamais vu.
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET D’accord ! Et vous savez à combien emprunte la Grèce ?
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui ! Mais je suis d’accord, enfin on ne va pas se comparer à la Grèce.
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Oui ! Mais moi je vous pose la question : est-ce que vous savez à combien emprunte la Grèce ?
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Je ne sais pas ! A 6, 7, 10, 12, 15…
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Non ! 18.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN 18 ! Oui…
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET 18 ! Si vous voulez…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Et l’Italie 5,2.
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET 18. Donc, il y a toujours eu un petit différentiel entre la France et l’Allemagne…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Jamais la différence n’a été aussi grande entre la France et l’Allemagne, pourquoi ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Jean-Jacques BOURDIN, il y a toujours eu un petit différentiel entre la France et l’Allemagne et derrière il y a une réalité de fond, c’est pour ça que je n’aime pas qu’on se focalise seulement sur l’angle agence de notation, il faut regarder les réalités de fond, la généralité de fond qui est que l’Allemagne…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Mais, là, la vérité c’est le taux d’emprunt de la France.
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Qui est que l’Allemagne a commencé ses réformes plus tôt que nous, ça ne veut pas dire qu’on est forcément – et pour l’éternité – en retard, on peut très bien les devants j’ai envie de dire.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Budget 2012 catastrophique, dit Jacques ATTALI ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Oui ! Mais Jacques…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Qui avait été chargé de mission par Nicolas SARKOZY d’ailleurs.
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Jacques ATTALI est dans une position véritablement étrange ! Avant d’avoir été chargé de mission par Nicolas SARKOZY, il a été conseiller de François MITTERRAND, notamment sur la période 81 – 83 dans laquelle on a beaucoup dépensé et on a dépensé pour longtemps, pour l’avenir. Quand vous faites l’archéologie de la dette française, vous y trouvez beaucoup de ces grandes décisions historiques socialistes, du genre : « Allez ! On va mettre la retraite… on va la ramener de 65 à 65 ans, on va faire les 35 heures, etc. », alors après avoir fait tout cela expliquer aujourd’hui qu’on est très endetté et que c’est grave, et qu’on ne se désendette pas assez vite, c’est quand même assez gonflé vis-à-vis des Français…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Mais…
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Et ça me fait penser, ça me penser, je vais au bout de la logique…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Allez-y !
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET A certains candidats Socialistes que j’entendais récemment…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN François HOLLANDE !
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Qui, au moment…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Non ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Au moment du plan de relance, voulaient qu’on dépense beaucoup plus, qui proposaient des solutions du genre privatisation des banques, etc., qui auraient été… nationalisation des banques, qui auraient toutes coûtées des fortunes et qui, aujourd’hui, les mêmes, disent : « Ah ! La la, mais nos politiques rigoureuses du point de vue budgétaires ne vont pas assez loin ». Bon ! Eh bien, écoutez, tout ça ce n’est pas raisonnable…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN François HOLLANDE et Nicolas SARKOZY ont le même objectif, finalement : réduire la dette à 3%, c’est ce que j’ai compris moi?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Oui ! Mais ils n’ont pas la même crédibilité.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Ah non ! Ca c’est autre chose, chacun sa crédibilité, mais ils ont le même objectif : réduire la dette, on est bien d’accord ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Mais, Jean-Jacques BOURDIN, aujourd’hui tout le monde a compris qu’il fallait réduire la dette…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Alors je voudrais savoir…
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Le problème c’est la crédibilité…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Je pose la même question…
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Que vous avez pour le faire.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Non ! Nathalie KOSCIUSKO-MORIZET, je pose la même question à François HOLLANDE et à Nicolas SARKOZY : comment allez-vous faire ? Vous allez augmenter les impôts, forcément, mais augmenter les impôts de qui, Nathalie KOSCIUSKO-MORIZET ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Mais vous me laissez répondre ?
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui ! Mais je vous la question : de qui ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Mais vous avez raison, vous avez raison de poser la même question, je vous dis c’est un problème de crédibilité, la crédibilité pour moi elle est du côté de Nicolas SARKOZY qui a démontré sa capacité à faire. C’est quoi ? La réforme des retraites, ce n’était pas très facile, hein, mais la réforme des retraites, si on ne l’avait pas faite, aujourd’hui on ne se poserait pas la question de savoir si on est sous surveillance des agences de notation, et tout ci, et tout ça, de toute façon ce serait déjà parti, ce serait déjà dégradé ; C’est par exemple la fameuse Révision Générale des Politiques Publiques, ce n’est pas très facile, ça veut dire, ça veut dire recentrer l’Etat sur ses missions traditionnelles, mais c’est le recentrer pour qu’il puisse toujours les assumer, pour qu’il ne soit pas en faillite, parce que, si on ne le recentre pas, un jour il n’y aura plus d’Etat, il y aura un vrai problème d’Etat. C’est ça la démonstration de sérieux…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Mais je vous pose une question…
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Que fait Nicolas SARKOZY.…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Sur les impôts…
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Et je vous dis ses garants de crédibilité.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Sur les impôts.
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Du côté de François HOLLANDE…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Vous serez obligés d’augmenter les impôts, vous…
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Du côté de François HOLLANDE on a des paroles verbales…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Nicolas SARKOZY, comme vous François HOLLANDE ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Mais enfin vous me posez des questions à moi ou c’est vous qui faites la réponse ?
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Mais je vous pose la question : est-ce que vous augmenterez les impôts ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Je vous dis que notre côté il y a de la crédibilité et c’est celle de la réforme, et des réformes pas toujours faciles, des réformes courageuses dans un contexte dans lequel les Français…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Alors dites aux Français : « nous augmenterons les impôts ».
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Les Français portent beaucoup d’efforts. Je vous dis… Non ! Justement je ne vous dis pas ça, je vous dis que, grâce aux réformes qu’on mène, on peut éviter d’augmenter les impôts. En revanche, je vous dis une chose c’est que les Socialistes qui ne proposent pas de réforme et qui proposent des dépenses considérables, on les a chiffrées hier à la convention de l’UMP, il y en avait pour 250 milliards d’euros…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Moi j’ai vu…
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Non !
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui !
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Mais attendez…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Non ! Non, je vous…
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET C’est la plus grande arnaque du siècle, la…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Ah ! Je vous laisse le…
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Mais moi je vous le dis !
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Eh bien oui !
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Cette primaire, pour laquelle chaque Français qui le souhaitait, qui se reconnaissait comme étant de Gauche, payait un euro pour voter et, au bout du compte, c’est un mauvais deal, on sort avec un candidat qui propose 255 milliards de dépenses, dites les un euro par personne de la primaire ne vont pas le couvrir, hein ?
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Bien ! Le budget, parlons des propositions qui sont faites ici ou là. Il y a… Tiens ! Une proposition sur les indemnités de… vous savez quand on est malade on touche des indemnités et le gouvernement souhaite que l’on calcule ces indemnités sur le salaire net, 60% du salaire net au lieu de 50% du salaire brut, manque à gagner pour quelqu’un qui est au SMIC, qui est en arrêt maladie, il touchera 640 euros au lieu de 680 euros, il va perdre 40 euros. Etait-ce nécessaire ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET C’est un sujet très ancien ! Parce que vous savez que c’était…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Eh bien oui, mais…
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Oui ! Mais, Jean-Jacques BOURDIN, moi je ne vous dis pas…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui ! Mais je vous pose la question : était-ce nécessaire ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET C’est marrant ! C’est marrant, on a eu cette même discussion il y a quelques semaines ici quand je suis venue…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui !
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Et, au risque de me répéter, je vous redis la même chose, je ne vous dis pas que c’est facile. Moi dans mon ministère, dans mon ministère, il y a un milliard à économiser…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui !
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Il a fallu que j’en prenne 170 millions pour moi, c’est ma quotepart…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui !
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Vous savez c’est plus facile de lancer des grandes politiques avec 170 millions en plus qu’avec 170 millions en moins…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Hum !
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Simplement aujourd’hui c’est la responsabilité, ça oblige à faire des choix, et je prétends que dans ce contexte qui est un contexte horriblement difficile on fait de bons et de vrais choix. Je pourrais vous parler longtemps de mon budget, j’essaie…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Mais, ça, c’est un bon choix ou un mauvais choix du gouvernement ? C’est un bon choix, vous l’approuvez, vous êtes au gouvernement ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Mais je vous dis, je vous dis que c’est difficile…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui ! C’est un choix qu’il fallait faire ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Mais je vous dis que c’est difficile.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Qu’il fallait faire.
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Mais je vous dis que c’est difficile, je vous donne l’exemple de mon budget, c’est difficile.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui ! Alors je vous pose une autre question budgétaire…
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Oui !
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Et puis nous passerons au logement. Nathalie KOSCIUSKOMORIZET, Yves BUR, qui est rapporteur du budget de la Sécurité Sociale, souhaitait augmenter les taxes de 10% sur le vin, sur la bière et sur le rhum, et les députés ont dit non.
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Hum ! Oui ! Moi je vous donne un point de vue très personnel…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui ! Votre point de vue très personnel.
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Le point de vue de maire d’une ville de 22.000 habitants.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui ! Voilà, Longjumeau.
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Moi ce que je préfère qu’on taxe – et je trouve qu’on pourrait les taxer un maximum – c’est les premix, parce que les premix c’est des cochonneries qui détruisent la santé des enfants, enfin des enfants, des adolescents, vous savez les premix c’est les cannettes dans lesquelles vous avez de l’alcool et le soda mélangés, en fait c’est très, très sucré, c’est très, très alcoolisé, et vous savez bien comment sait le sucre masque l’alcool, donc ça se boit d’autant plus facilement. Ca, c’est la vraie cochonnerie.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Mais vous n’avez pas répondu à ma question, enfin celle d’augmenter les taxes…
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Mais si je vous réponds !
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Non ! Non, mais je vous pose la question sur le vin, sur la bière...
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Je vous réponds moi je ne suis pas pour la taxe uniforme, je préfère qu’on aille taxer ce qui est vraiment une cochonnerie.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Le vin, la bière, le rhum ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Moi ce n’est pas ma priorité, je préfère qu’on taxe les premix, je vous ai répondu.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Bien. 8 h 44 ! On va parler logement, Nathalie KOSCIUSKOMORIZET…
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Hum ! Hum.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Nathalie KOSCIUSKO-MORIZET, troisième source de préoccupations pour les Français, le logement derrière l’emploi évidemment, et la santé, et avant, la sécurité, le logement ; je vais simplement, là encore, faire une comparaison avec l’Allemagne, puisque, il y a deux grands pays en Europe aujourd’hui, la France et l’Allemagne, c’est simple : un ménage en France dépense près de 30% de son budget pour son logement, en Allemagne, c’est 17%. Pourquoi cet écart ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET D’abord, c’est normal que le logement soit très haut dans les priorités des Français, parce qu’il concentre toutes les autres problématiques que vous avez dites, le logement, pour beaucoup, c’est : ma sécurité dans la retraite, le logement, c’est une condition à l’emploi, c’est aussi un problème en lien avec le marché de l’emploi, la flexibilité qu’on a à changer de logement. Donc le logement est un lieu de concentration des problèmes ou des solutions. Et c’est vrai que, il a pris de plus en plus de place dans le budget des Français, ce qui pose un problème d’ailleurs, parce que quand on regarde les chiffres, le pouvoir d’achat a l’air d’augmenter, mais quand on regarde la réalité de chacun, il y a le sentiment qu’il baisse, parce que les dépenses contraintes sont de plus en plus importantes. Donc cette place que prend le logement, c’est celle qui crée cette réalité, qui est que la disponibilité à utiliser son argent pour des loisirs, pour autre chose, eh bien, elle a un peu tendance à diminuer. Alors, il faut faire la différence entre les régions, parce que ça, ce n’est pas vrai à travers toute la France, par exemple, là, l’année passée, on a sept régions dans lesquelles les loyers ont baissé, c’est-à-dire qu’en fait, le prix du logement, il augmente et il prend une place considérable dans les régions dans lesquelles c’est le plus tendu, par exemple, en Ile-de-France, oui, c’est vrai. Et c’est pour ça qu’il ne faut pas avoir une politique uniforme, mais qu’on essaie de différencier nos politiques suivant les régions, parce qu’en fait, ce n’est pas vrai qu’on a besoin de construire partout, on a besoin de construire là où aujourd’hui c’est vraiment très tendu.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Et est-ce que vous préparez de nouvelles mesures justement pour encourager, je ne sais pas, moi, la mise sur le marché de nouveaux logements, pour, je ne sais pas, pour débloquer du foncier…
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Non…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Débloquer du foncier, friches industrielles, des logements vides, des appartements conservés par des gens qui n’en font rien, et d’autres, et tant d’autres…
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Alors, nos mesures, c’est quoi…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Des parkings qui…
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Laissez-moi lire, Jean-Jacques BOURDIN, nos mesures, c’est quoi, parce qu’il y en a beaucoup, là, vous ne me laissez pas de temps…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui, oui, le foncier ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Nos mesures, c’est d’abord en effet construire, construire par exemple en Ile-de-France, on prépare avec Benoist APPARU, Plan Logement Ile-de-France, débloquer du foncier, c’est la réforme du droit de l’urbanisme, mettre à disposition, dans les zones les plus tendues, j’insiste, vous n’avez pas besoin de construire partout en France, ça peut être une catastrophe, ça a pu l’être aussi par le passé, donc d’abord, construire, construire aussi dans les logements sociaux, là-dessus, moi, je vous donne juste un chiffre, en cinq ans, il y a 600.000 logements sociaux qui ont été construits, l’année dernière, on en a… enfin, on en finance en ce moment, par an, 130.000 ; je vois dans le programme du Parti socialiste qu’ils en veulent 150.000 par an, mais que ne l’ont-ils pas fait du temps du gouvernement JOSPIN, c’était 40.000 par an ! On en fait trois fois plus en ce moment des logements sociaux ! Avec le plan de Relance et le SCELLIER, on a mis, en 2010, 80.000 logements neufs en plus sur le marché…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Le SCELLIER…
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Laissez-moi finir. Ça, c’est pour l’existant (sic), c’est pour le neuf, c’est pour le neuf. Après, il y a la question des loyers. Qu’est-ce qu’on a fait sur les loyers, on les a maîtrisés à travers l’indice de référence des loyers, c’est un indice de référence qui maintenant est calé sur l’inflation. Avant, il était calé sur le coût de la construction qui était beaucoup plus dynamique, qui croissait beaucoup plus vite. Donc c’était moins favorable. Il reste une difficulté, c’est au moment du changement de locataires, on sait bien que les loyers, en fait, ils sont plus ou moins importants, c’est très, très variable suivant que vous êtes resté longtemps dans votre logement, et à ce moment-là, il y a eu une augmentation modérée à cause notamment de tous les dispositifs qu’on a mis en place, ou si c’est un logement qui a changé très souvent de locataires. Et là, moi, je n’adhère pas à certaines des propositions irréalistes et démagogiques qui sont faites par les socialistes, on voit au détour de leur programme, on pourrait aller jusqu’à la réquisition…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Non, mais Nathalie KOSCIUSKO-MORIZET…
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Attendez, laissez-moi parler, exemple de la réquisition…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui, mais arrêtez de me parler des socialistes, c’est une obsession !
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Mais parce que… mais ce n’est pas une obsession…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Moi, je voudrais savoir ce que vous allez faire dans les semaines, les mois qui viennent…
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Ah ben, je vous donne un exemple de ce qu’on fait en ce moment…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Alors, et de ce que vous allez faire…
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET La taxe sur les surloyers, la taxe sur les loyers excessifs sur les petites surfaces….
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Mais est-ce que…
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Je peux vous expliquer aussi pourquoi on ne le fait pas sur tous les loyers, non, ça ne vous intéresse pas ?
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Mais, expliquez-moi pourquoi… mais si, ça m’intéresse, mais expliquez-moi quelles sont les mesures fortes que vous allez prendre dans les mois qui viennent concernant le logement…
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Là, dans les mois qui viennent, je vous le redis, j’ai commencé par là, on est sur la réforme de l’urbanisme, sur la mise à disposition de terrains, notamment de terrains d’Etat, vous savez, les terrains d’Etat, c’est compliqué, parce que, ils sont comptés dans les comptes en fait des ministères comme en étant en quelque sorte des actifs, les ministères ne veulent pas s’en défaire si facilement, bon. On a un certain nombre de terrains qui sont superbes, qui sont à proximité des transports en commun, on veut densifier autour des transports en commun, derrière, c’est un enjeu aussi vis-à-vis de l’environnement. Et on va mettre le paquet là-dessus.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Flamanville, parlons de nucléaire, est-ce que vous allez arrêter ce chantier ou pas ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Arrêter ce chantier qui est très engagé, ça n’aurait pas de sens, en revanche, rester extrêmement vigilant, comme l’est l’Autorité de sûreté nucléaire…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui, qui est très vigilante, oui…
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Qui est très vigilante, oui. Mais moi, je me félicite tous les jours qu’on ait une Autorité de sûreté indépendante. Vous savez que c’est le fruit d’une longue histoire, il y a encore quelques années, ce n’était pas le cas, il y a encore quelques années, l’Autorité de sûreté, c’était une direction générale de mon ministère. Et donc, moi, je suis heureuse…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Alors, aujourd’hui, où en est ce chantier, là, qui prend du retard…
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Je suis fière qu’on soit le pays le plus en avance sur l’indépendance de la sûreté nucléaire.
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui, alors, l’Autorité de sûreté nucléaire qui a relevé diverses malfaçons dans le gros oeuvre, où est-ce qu’on en est de ce chantier, là, de Flamanville ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Mais, vous voulez que je vous dise, la sûreté nucléaire, ça ne s’échange pas, ça ne se négocie pas, il y a deux enjeux…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Non, mais je vous pose une question : où en est-on ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Je vous réponds, il y a deux enjeux avec lesquels je ne veux pas que la sûreté nucléaire interfère, c’est des enjeux idéologiques, il y a des gens qui sont pour et des gens qui sont contre le nucléaire, ils en font un problème moral, c’est leur problème, mais c’est une erreur, et c’est les enjeux économiques…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN D’accord, où en est le chantier ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Laissez-moi finir. C’est des enjeux économiques, c’est-à-dire que ces sûretés maximales, ça ne s’échange pas avec des considérations économiques. Donc le chantier, il en est où il est, c’est un problème…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Ah, il en est où il est ! C’est-à-dire ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Non, mais, ben, il y a des retards qui ont été pris, bien sûr, il y a des retards qui ont été pris…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Oui, de nouveaux, retards, là ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Et les annonces qui ont été faites sur la cuve…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Mais ça coûte de plus en plus cher, non ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Et les annonces qui ont été faites sur la cuve peuvent être susceptibles de lui faire prendre un retard, pour le moment, ce n’est pas le cas…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN De nouveaux retards…
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Pour le moment…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Ça coûte de plus en plus cher. On en est à combien ?
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Pour le moment, ça n’est pas le cas, mais laissez-moi…
 
JEAN-JACQUES BOURDIN Le surcoût…
 
NATHALIE KOSCIUSKO-MORIZET Mais laissez-moi répondre, je suis en train de vous dire que moi, ma responsabilité, c’est la sûreté nucléaire, et la sûreté nucléaire, je ne la mégotte pas avec des enjeux économiques. Je comprends très bien l’importance des enjeux économiques, je comprends l’importance des enjeux industriels, mais la sûreté nucléaire, elle est première, elle ne se négocie pas. C’est la sûreté maximum, c’est tout, et ce n’est pas un peu plus ou un peu moins en fonction de ce qu’on peut payer, c’est la sûreté maximum. Et l’Autorité de sûreté nucléaire est chargée de mettre en oeuvre cette politique, c’est sa responsabilité en toute indépendance de demander la sûreté maximum. Alors si ça coûte un peu plus cher ou si ça prend un peu plus longtemps, eh bien, ça coûtera un peu plus cher ou ça prendra un peu plus longtemps, ça ne se négocie pas.
 Source : Premier ministre, Service d’Information du Gouvernement, le 21 octobre 2011