Texte intégral
Monsieur le Préfet,
Mesdames et Messieurs,
Je suis vraiment très heureux dêtre ici avec vous pour ouvrir les Assises du logement dabord en ile de France.
Cest la quatrième édition des huit assises interrégionales, que nous ouvrons aujourdhui.
Des assises nationales, le 9 décembre, à Paris, permettront de partager les principaux enseignements de ces journées en région, et den tirer des recommandations opérationnelles.
Je remercie demblée le Préfet de Région, qui nous accueille. Je remercie aussi vivement tous ceux qui ont préparé ces assises, c'est-à-dire les équipes des services de lEtat, tant au niveau national (DHUP, DGCS, DIHAL), que local (DRIHL), ainsi que lAgence nouvelle des solidarités actives qui apporte son appui très précieux.
Vous le savez, le secteur de lhébergement et du logement est en pleine refondation, avec un objectif : améliorer le service rendu aux personnes sans abri ou risquant de lêtre.
Cette refondation saccompagne de progrès, mais sa mise en oeuvre nest pas toujours aussi rapide et concrète quon le souhaiterait tous...
Cest pourquoi jai souhaité mettre en place un plan global daccompagnement à la refondation, dont jai confié le pilotage au Préfet Régnier. Ce plan a de nombreuses facettes parmi lesquelles je pourrais citer :
-Le développement de conseils consultatifs des personnes accueillies et accompagnées,
-Le recueil des bonnes pratiques et lévaluation des SIAO, afin de généraliser les expériences les plus réussies,
-Le recueil des bonnes pratiques des commissions de prévention des expulsions (CCAPEX), et leur diffusion à travers une journée nationale déchanges,
-La simplification et la généralisation de lenquête nationale sur les prestations et les coûts.
Mais aucun de ces volets de la refondation ne fait autant réagir et ne suscite autant de débats que les simples mots de « Logement dabord ».
Cest pourquoi il ma paru nécessaire de réfléchir sur le sens et les modalités concrètes dapplication du « Logement dabord », et de le faire avec tous les acteurs : les associations, les bailleurs, les usagers, ou encore les collectivités locales et les services de lEtat.
Jai conscience que nous sommes engagés dans un changement culturel profond, et que nous réussirons cette réforme, non pas par linjonction, mais par la conviction : c'est-à-dire si nous en voyons tous lintérêt, et si nous décidons tous de nous mobiliser pour la mettre en oeuvre.
Ces assises doivent permettre le dialogue de façon libre et constructive. Les échanges seront nourris par des expériences locales, mais aussi dautres pays européens.
Au moment de débuter ces assises, je sais quil y a des questions que nous nous posons tous, et qui sont essentielles : le logement dabord, cest quoi (1) ? Quels sont le sens et lobjectif de cette politique (2) ? Quelles en sont les traductions concrètes (3) ? Avec quel budget faudra-t-il la mettre en oeuvre (4)?
Bien entendu, je ne prétends pas aujourdhui faire le tour de ces questions, mais simplement lancer avec vous quelques pistes de réflexions, qui seront lobjet de discussions tout au long de cette journée.
I. Le « logement dabord », cest quoi ? :
Cest une stratégie fondée sur la conviction que le logement est un droit fondamental et un bien indispensable.
Le mot « dabord » nous rappelle que le logement nest pas nécessairement le point darrivée dun parcours dinsertion ; il doit être a priori considéré comme un point de départ. Disposer dun logement est nécessaire à lexercice des autres droits, quil sagisse par exemple de lemploi des parents, de léducation des enfants, ou tout simplement du droit à la vie privée et familiale.
* Soyons précis : Ce logement, il doit répondre à 3 caractéristiques :
-Un logement pérenne : c'est-à-dire un logement stable, avec un bail de droit commun, pour pouvoir se projeter dans lavenir.
- Un logement adapté, en termes de loyer, mais aussi adapté à des modes de vie différents : logement totalement autonome pour le plus grand nombre, mais aussi, pour certains, foyers logements, pensions de famille, lieux de vie ou encore maisons de retraite Les besoins et les désirs sont variés, les logements doivent lêtre aussi.
- Enfin, un logement avec accompagnement si nécessaire. Jy reviendrai.
* Dans cette optique, lhébergement ou le logement temporaire sont subsidiaires : ils ne doivent pas constituer un passage obligé, et les séjours ne doivent pas sy prolonger plus que nécessaire. La Conférence européenne de consensus sur le sans-abrisme de décembre 2010 est très claire : elle porte un regard critique sur les approches en escalier.
Les hébergements en foyers, les CHRS éclaté, les résidences sociales ou lintermédiation locative sont parfois très utiles, mais ils restent temporaires, avec des statuts doccupation dexception, et la logique du logement dabord doit nous mener plus loin encore, en privilégiant autant que possible la recherche de solutions pérennes.
* Attention, il faut le préciser immédiatement : subsidiaire ne veut pas dire superflu. En Ile de France, le nombre total de places dhébergement (dispositif généraliste et asile) et dintermédiation locative a augmenté de 65% en 5 ans !
Cela nous amène à un niveau record de 43 000 places, soit un nombre de places jamais atteint par le passé !! Laugmentation permanente de places, ce nest pas la solution !
Le nombre de places dhébergement a augmenté de 27% en 4 ans : 25 000 places supplémentaires en hébergement ou en intermédiation locative ont ouvert depuis 2007.
[Je sais à quel point le sujet nuitées hôtelières est sensible : En plus du dispositif dasile, qui augmente, le nombre de places dhôtel financées en ile de France sélève aujourdhui à 11 500, soit 4 500 places dhôtel de plus quen 2007. Cest certes 700 places de moins que lannée dernière à la même époque, mais entre temps nous avons ouvert 1000 places en intermédiation locative ! Par rapport à lannée dernière, nous avons donc au total plus de places, et de meilleure qualité. Ceux qui parlent de baisse nont pas la vision globale de la situation.]
De plus, grâce à un plan dhumanisation totalement inédit, lEtat vient dattribuer plus de 170 millions deuros pour rénover ou construire plus de 15 000 places dhébergement. LIle de France en a largement bénéficié.
Tout cela nest vraiment pas le signe dun désengagement de lEtat ! Oui, lhébergement restera nécessaire, voire indispensable pour certains publics.
II. Deuxième interrogation : le logement dabord, pourquoi, quel sens ?
Je connais très bien la suspicion : le logement dabord serait motivé principalement par la volonté de faire des économies. Je vous le dis demblée : non.
Je reviendrai tout à lheure sur la question du budget, mais je vous laffirme, la motivation, cest lintérêt des personnes concernées. Osons le dire autrement : cest une question defficacité, de conviction que cette approche est plus pertinente pour aider les personnes à sortir de la rue ou à ne pas y tomber.
Il sagit dune question avant tout éthique : cela renvoie à la façon dont on considère les personnes en difficulté. Je défends lidée que pour lutter contre lexclusion, il faut sappuyer au maximum sur le droit commun.
A défaut, on multiplie les dispositifs, mais aussi la complexité des prises en charge, la durée des parcours, les risques de ne jamais passer dune étape à une autre. On sous-estime aussi la capacité et le désir dautonomie des personnes.
[Qui contestera que le modèle de lhébergement collectif ne correspond plus complètement aux attentes des personnes sans domicile, quand il impose des contraintes fortes ? Avec par exemple des horaires de sortie encadrés, limpossibilité de recevoir des amis ou de la famille, ou lobligation de cohabiter avec des personnes aux parcours bien différents.
Qui contestera que les dispositifs dhébergement peuvent aussi être déresponsabilisants, lorsque tout est fourni, de laccueil au ménage en passant par la restauration ? Donne-t-on réellement aux personnes la place qui est la leur, pour mettre en oeuvre toutes leurs capacités ? Sortir dun tel système, une fois quon a pris des habitudes pendant des mois ou des années, cela devient très difficile.]
Il ne sagit clairement pas dopposer hébergement et logement, mais plutôt dévaluer et dadapter nos réponses pour quelles répondent au mieux aux besoins. Avec un souci : proposer à tous ceux qui le souhaitent un habitat le plus normal possible.
III. Troisième question : quelle mise en oeuvre concrète pour le « Logement dabord » ?
* Bien sûr, pour une telle stratégie, il faut des logements.
La production atteint des niveaux très élevés ; 2010 a été une année record depuis 30 ans, avec 131 000 logements sociaux financés. Ces logements sont :
- surtout des logements très sociaux : nous avons multiplié par 5 le nombre de logements très sociaux PLAI financés, entre 2007 et 2010.
- des logements de mieux en mieux situés, là ou il y en a besoin : la part de la production en zone A (la plus tendue) est passée de 25 à 33% entre 2009 et 2010.
On construit donc plus, plus social, et là où il faut
Mais vous savez comme moi que si cela est fondamental sur le moyen et long terme, cela napporte pas de réponse immédiate. Il faut donc sappuyer sur le parc existant.
Avec en France un parc de 4.5 millions de logements sociaux, on naurait pas de quoi loger les personnes les plus démunies ? La question des attributions est une question majeure, et je veux en faire une priorité !
Cest pourquoi jai demandé aux préfets de « reconquérir » intégralement les 25% de logements sociaux du contingent de lEtat, qui sont dédiés aux ménages en difficulté. Préfets et bailleurs doivent saccorder pour identifier ce contingent, et fixer des modalités claires de gestion.
La mobilisation de logements sociaux existants doit aussi sappuyer sur le contingent des collecteurs dAction Logement. La loi de 2009 qui prévoit que 25% des attributions des collecteurs sont destinées aux ménages DALO est encore insuffisamment appliquée. Nous disposons de marges pour mobiliser de nouveaux logements.
Et les collectivités locales ont bien sûr un rôle essentiel pour contribuer également au relogement des ménages qui en ont le plus besoin. Elles ont souvent un pouvoir important dans les politiques dattribution. [Encore faut-il quil y ait de la transparence dans les pratiques : je ne suis pas sur que tout le monde sait quaujourdhui, à Paris, lEtat demande à loffice public de la ville, Paris habitat, de reloger 22% de ménages DALO, mais que ce bailleur refuse den reloger autant et veut se limiter a 15% ! Cest aussi cela la réalité !]
Mais donner la clé dun logement ne suffit pas toujours.
* Il faut multiplier les services daccompagnement dans le logement. Nous avons là un formidable terrain dinnovation :
Il sagit de réinventer laccompagnement « hors les murs ». Jinsiste : cest là un facteur déterminant pour la réussite de la politique du Logement dabord.
Jusquoù cet accompagnement doit être pluridisciplinaire, global, et comment il sarticule avec laction des conseils généraux : cette question devra trouver des réponses dici la fin des assises. Comment articuler accompagnement individuel et dynamique collective, notamment pour lutter contre lisolement, voilà encore un sujet à débattre.
Je sais que cela peut faire peur à certains travailleurs sociaux, car cela change leurs pratiques professionnelles. Il faudra veiller à ce que les formations adéquates soient proposées.
* Il nous faut aussi poursuivre le développement du logement adapté, comme les pensions de famille. Nous avons 10 000 places ouvertes aujourdhui, c'est-à-dire 3 fois plus quen 2007, et plusieurs milliers sont actuellement en construction ou en projet. Je vous invite à continuer à développer ce type de projets : cest une priorité.
* Il nous faut encore expérimenter, cest par exemple ce que nous faisons à Lille, Marseille, Toulouse et bientôt Paris, avec le programme « Un chez soi dabord », en proposant à des personnes en grande exclusion, ayant des difficultés psychiques, un logement ET un accompagnement medico-social renforcé.
IV. Enfin, quatrième question : avec quel budget ?
Jai bien entendu les difficultés que vous éprouvez pour 2011, puisque, à ce jour, les dotations attribuées aux régions sont en moyenne inférieures de 3% à celles de lannée dernière.
Avec Nathalie Kosciusko-Morizet, nous avons signalé cette difficulté au sein du Gouvernement, et le Premier Ministre a décidé début octobre daccorder 75 millions deuros de crédits supplémentaires pour lhébergement et laccès au logement, à répartir entre 2011 et 2012.
Grâce à cela, nous engagerons cette année 1 128 millions deuros pour lhébergement et le logement adapté, cest 257 millions de plus quen 2007, soit 30% daugmentation en 4 ans.
Dans ces conditions, je vous le dis clairement, lengagement financier de lEtat atteindra en 2011 un niveau record, jamais vu jusqu'à présent. Je peux même vous annoncer que lengagement de lEtat sera maintenu à ce niveau record en 2012.
Compte tenu de la décision du Premier Ministre, le budget de lhébergement et laccès au logement sera donc stable sur la période 2010-2011-2012. Cela est vrai au niveau national, comme au niveau de la région Ile de France. Chacun comprendra quen cette période de très forte contrainte budgétaire et déconomies, cela est bien le signe que ce chantier est une priorité.
La encore, il faut que toute le monde ait accès à la même information : le budget du samu social pour 2011 sera supérieur à celui de lannée dernière, qui était de 105 millions deuros, il sera deux fois plus élevé quen 2007.
En plus de ces crédits, nous allons disposer des nouveaux crédits du Fond daccompagnement vers et dans le Logement, qui a été instauré par la loi de finance de juillet dernier, et qui va permettre de proposer des mesures daccompagnement aux ménages DALO. Cela permettra de répondre aux attentes des bailleurs et de collectivités locales. Un premier appel à projet a déjà eu lieu en Ile de France et 3 millions deuros vont être engagés dans le mois qui vient, mais dès lannée prochaine plus de 10 millions deuros seront disponibles en Ile de France. Tout cela permettra de compléter utilement laction des conseils généraux dans ce domaine.
Au-delà du montant des crédits, nous aurons pour la première fois de la visibilité, puisque les services de lEtat connaissent dès le 21 octobre lintégralité de leur dotation pour 2012, et cela leur permettra de préparer plus tôt leur budget, et donc aussi dannoncer plus tôt à chaque association les moyens dont elle disposera.
Cela devra se faire dans un cadre contractuel entre les associations et lEtat, avec une double volonté :
- léquité, avec une démarche de convergence entre structures et entre régions.
- laffirmation de priorités claires : Oui, en 2012 comme en 2011, il nous faut continuer à développer les dispositifs daide à laccès au logement.
Toute cette dynamique a vocation à être particulièrement forte en Ile de France, puisque je suis heureux de vous annoncer que la région a été retenue parmi les 10 « territoires pilotes » pour la mise en oeuvre renforcée du « Logement dabord ».
En conclusion
Questions de définition, de sens, de modalités dapplication, de budget, voici quelques pistes de réflexion que je souhaitais partager avec vous, et que vous allez discuter tout au long de cette journée.
Je voudrais à nouveau vous redire mon souhait que cette journée soit constructive et imaginative. Nous connaissons tous les contraintes du quotidien, les difficultés de laction. Lorsque lon rencontre sans cesse de nouvelles personnes confrontées à des difficultés de logement, survient parfois lidée quon narrivera jamais à répondre à tous les besoins, et la tentation de baisser les bras.
Eh bien répétons-le, il ny a pas de fatalité à lexclusion, mais la vaincre suppose dagir tous ensemble, et de façon déterminée, tout en acceptant de renouveler et dadapter sans cesse nos actions.
Je vous souhaite de vous engager dans cette stratégie du « Logement dabord », non pas contraints, et à reculons, mais avec élan, et avec la conviction que cest une opportunité à saisir pour améliorer le service rendu à tous ceux qui sont sans abri ou mal logés.
Je vous remercie.
Bonne journée, bonnes assises à tous !
Source http://www.drihl.ile-de-france.developpement-durable.gouv.fr, le 26 décembre 2011
Mesdames et Messieurs,
Je suis vraiment très heureux dêtre ici avec vous pour ouvrir les Assises du logement dabord en ile de France.
Cest la quatrième édition des huit assises interrégionales, que nous ouvrons aujourdhui.
Des assises nationales, le 9 décembre, à Paris, permettront de partager les principaux enseignements de ces journées en région, et den tirer des recommandations opérationnelles.
Je remercie demblée le Préfet de Région, qui nous accueille. Je remercie aussi vivement tous ceux qui ont préparé ces assises, c'est-à-dire les équipes des services de lEtat, tant au niveau national (DHUP, DGCS, DIHAL), que local (DRIHL), ainsi que lAgence nouvelle des solidarités actives qui apporte son appui très précieux.
Vous le savez, le secteur de lhébergement et du logement est en pleine refondation, avec un objectif : améliorer le service rendu aux personnes sans abri ou risquant de lêtre.
Cette refondation saccompagne de progrès, mais sa mise en oeuvre nest pas toujours aussi rapide et concrète quon le souhaiterait tous...
Cest pourquoi jai souhaité mettre en place un plan global daccompagnement à la refondation, dont jai confié le pilotage au Préfet Régnier. Ce plan a de nombreuses facettes parmi lesquelles je pourrais citer :
-Le développement de conseils consultatifs des personnes accueillies et accompagnées,
-Le recueil des bonnes pratiques et lévaluation des SIAO, afin de généraliser les expériences les plus réussies,
-Le recueil des bonnes pratiques des commissions de prévention des expulsions (CCAPEX), et leur diffusion à travers une journée nationale déchanges,
-La simplification et la généralisation de lenquête nationale sur les prestations et les coûts.
Mais aucun de ces volets de la refondation ne fait autant réagir et ne suscite autant de débats que les simples mots de « Logement dabord ».
Cest pourquoi il ma paru nécessaire de réfléchir sur le sens et les modalités concrètes dapplication du « Logement dabord », et de le faire avec tous les acteurs : les associations, les bailleurs, les usagers, ou encore les collectivités locales et les services de lEtat.
Jai conscience que nous sommes engagés dans un changement culturel profond, et que nous réussirons cette réforme, non pas par linjonction, mais par la conviction : c'est-à-dire si nous en voyons tous lintérêt, et si nous décidons tous de nous mobiliser pour la mettre en oeuvre.
Ces assises doivent permettre le dialogue de façon libre et constructive. Les échanges seront nourris par des expériences locales, mais aussi dautres pays européens.
Au moment de débuter ces assises, je sais quil y a des questions que nous nous posons tous, et qui sont essentielles : le logement dabord, cest quoi (1) ? Quels sont le sens et lobjectif de cette politique (2) ? Quelles en sont les traductions concrètes (3) ? Avec quel budget faudra-t-il la mettre en oeuvre (4)?
Bien entendu, je ne prétends pas aujourdhui faire le tour de ces questions, mais simplement lancer avec vous quelques pistes de réflexions, qui seront lobjet de discussions tout au long de cette journée.
I. Le « logement dabord », cest quoi ? :
Cest une stratégie fondée sur la conviction que le logement est un droit fondamental et un bien indispensable.
Le mot « dabord » nous rappelle que le logement nest pas nécessairement le point darrivée dun parcours dinsertion ; il doit être a priori considéré comme un point de départ. Disposer dun logement est nécessaire à lexercice des autres droits, quil sagisse par exemple de lemploi des parents, de léducation des enfants, ou tout simplement du droit à la vie privée et familiale.
* Soyons précis : Ce logement, il doit répondre à 3 caractéristiques :
-Un logement pérenne : c'est-à-dire un logement stable, avec un bail de droit commun, pour pouvoir se projeter dans lavenir.
- Un logement adapté, en termes de loyer, mais aussi adapté à des modes de vie différents : logement totalement autonome pour le plus grand nombre, mais aussi, pour certains, foyers logements, pensions de famille, lieux de vie ou encore maisons de retraite Les besoins et les désirs sont variés, les logements doivent lêtre aussi.
- Enfin, un logement avec accompagnement si nécessaire. Jy reviendrai.
* Dans cette optique, lhébergement ou le logement temporaire sont subsidiaires : ils ne doivent pas constituer un passage obligé, et les séjours ne doivent pas sy prolonger plus que nécessaire. La Conférence européenne de consensus sur le sans-abrisme de décembre 2010 est très claire : elle porte un regard critique sur les approches en escalier.
Les hébergements en foyers, les CHRS éclaté, les résidences sociales ou lintermédiation locative sont parfois très utiles, mais ils restent temporaires, avec des statuts doccupation dexception, et la logique du logement dabord doit nous mener plus loin encore, en privilégiant autant que possible la recherche de solutions pérennes.
* Attention, il faut le préciser immédiatement : subsidiaire ne veut pas dire superflu. En Ile de France, le nombre total de places dhébergement (dispositif généraliste et asile) et dintermédiation locative a augmenté de 65% en 5 ans !
Cela nous amène à un niveau record de 43 000 places, soit un nombre de places jamais atteint par le passé !! Laugmentation permanente de places, ce nest pas la solution !
Le nombre de places dhébergement a augmenté de 27% en 4 ans : 25 000 places supplémentaires en hébergement ou en intermédiation locative ont ouvert depuis 2007.
[Je sais à quel point le sujet nuitées hôtelières est sensible : En plus du dispositif dasile, qui augmente, le nombre de places dhôtel financées en ile de France sélève aujourdhui à 11 500, soit 4 500 places dhôtel de plus quen 2007. Cest certes 700 places de moins que lannée dernière à la même époque, mais entre temps nous avons ouvert 1000 places en intermédiation locative ! Par rapport à lannée dernière, nous avons donc au total plus de places, et de meilleure qualité. Ceux qui parlent de baisse nont pas la vision globale de la situation.]
De plus, grâce à un plan dhumanisation totalement inédit, lEtat vient dattribuer plus de 170 millions deuros pour rénover ou construire plus de 15 000 places dhébergement. LIle de France en a largement bénéficié.
Tout cela nest vraiment pas le signe dun désengagement de lEtat ! Oui, lhébergement restera nécessaire, voire indispensable pour certains publics.
II. Deuxième interrogation : le logement dabord, pourquoi, quel sens ?
Je connais très bien la suspicion : le logement dabord serait motivé principalement par la volonté de faire des économies. Je vous le dis demblée : non.
Je reviendrai tout à lheure sur la question du budget, mais je vous laffirme, la motivation, cest lintérêt des personnes concernées. Osons le dire autrement : cest une question defficacité, de conviction que cette approche est plus pertinente pour aider les personnes à sortir de la rue ou à ne pas y tomber.
Il sagit dune question avant tout éthique : cela renvoie à la façon dont on considère les personnes en difficulté. Je défends lidée que pour lutter contre lexclusion, il faut sappuyer au maximum sur le droit commun.
A défaut, on multiplie les dispositifs, mais aussi la complexité des prises en charge, la durée des parcours, les risques de ne jamais passer dune étape à une autre. On sous-estime aussi la capacité et le désir dautonomie des personnes.
[Qui contestera que le modèle de lhébergement collectif ne correspond plus complètement aux attentes des personnes sans domicile, quand il impose des contraintes fortes ? Avec par exemple des horaires de sortie encadrés, limpossibilité de recevoir des amis ou de la famille, ou lobligation de cohabiter avec des personnes aux parcours bien différents.
Qui contestera que les dispositifs dhébergement peuvent aussi être déresponsabilisants, lorsque tout est fourni, de laccueil au ménage en passant par la restauration ? Donne-t-on réellement aux personnes la place qui est la leur, pour mettre en oeuvre toutes leurs capacités ? Sortir dun tel système, une fois quon a pris des habitudes pendant des mois ou des années, cela devient très difficile.]
Il ne sagit clairement pas dopposer hébergement et logement, mais plutôt dévaluer et dadapter nos réponses pour quelles répondent au mieux aux besoins. Avec un souci : proposer à tous ceux qui le souhaitent un habitat le plus normal possible.
III. Troisième question : quelle mise en oeuvre concrète pour le « Logement dabord » ?
* Bien sûr, pour une telle stratégie, il faut des logements.
La production atteint des niveaux très élevés ; 2010 a été une année record depuis 30 ans, avec 131 000 logements sociaux financés. Ces logements sont :
- surtout des logements très sociaux : nous avons multiplié par 5 le nombre de logements très sociaux PLAI financés, entre 2007 et 2010.
- des logements de mieux en mieux situés, là ou il y en a besoin : la part de la production en zone A (la plus tendue) est passée de 25 à 33% entre 2009 et 2010.
On construit donc plus, plus social, et là où il faut
Mais vous savez comme moi que si cela est fondamental sur le moyen et long terme, cela napporte pas de réponse immédiate. Il faut donc sappuyer sur le parc existant.
Avec en France un parc de 4.5 millions de logements sociaux, on naurait pas de quoi loger les personnes les plus démunies ? La question des attributions est une question majeure, et je veux en faire une priorité !
Cest pourquoi jai demandé aux préfets de « reconquérir » intégralement les 25% de logements sociaux du contingent de lEtat, qui sont dédiés aux ménages en difficulté. Préfets et bailleurs doivent saccorder pour identifier ce contingent, et fixer des modalités claires de gestion.
La mobilisation de logements sociaux existants doit aussi sappuyer sur le contingent des collecteurs dAction Logement. La loi de 2009 qui prévoit que 25% des attributions des collecteurs sont destinées aux ménages DALO est encore insuffisamment appliquée. Nous disposons de marges pour mobiliser de nouveaux logements.
Et les collectivités locales ont bien sûr un rôle essentiel pour contribuer également au relogement des ménages qui en ont le plus besoin. Elles ont souvent un pouvoir important dans les politiques dattribution. [Encore faut-il quil y ait de la transparence dans les pratiques : je ne suis pas sur que tout le monde sait quaujourdhui, à Paris, lEtat demande à loffice public de la ville, Paris habitat, de reloger 22% de ménages DALO, mais que ce bailleur refuse den reloger autant et veut se limiter a 15% ! Cest aussi cela la réalité !]
Mais donner la clé dun logement ne suffit pas toujours.
* Il faut multiplier les services daccompagnement dans le logement. Nous avons là un formidable terrain dinnovation :
Il sagit de réinventer laccompagnement « hors les murs ». Jinsiste : cest là un facteur déterminant pour la réussite de la politique du Logement dabord.
Jusquoù cet accompagnement doit être pluridisciplinaire, global, et comment il sarticule avec laction des conseils généraux : cette question devra trouver des réponses dici la fin des assises. Comment articuler accompagnement individuel et dynamique collective, notamment pour lutter contre lisolement, voilà encore un sujet à débattre.
Je sais que cela peut faire peur à certains travailleurs sociaux, car cela change leurs pratiques professionnelles. Il faudra veiller à ce que les formations adéquates soient proposées.
* Il nous faut aussi poursuivre le développement du logement adapté, comme les pensions de famille. Nous avons 10 000 places ouvertes aujourdhui, c'est-à-dire 3 fois plus quen 2007, et plusieurs milliers sont actuellement en construction ou en projet. Je vous invite à continuer à développer ce type de projets : cest une priorité.
* Il nous faut encore expérimenter, cest par exemple ce que nous faisons à Lille, Marseille, Toulouse et bientôt Paris, avec le programme « Un chez soi dabord », en proposant à des personnes en grande exclusion, ayant des difficultés psychiques, un logement ET un accompagnement medico-social renforcé.
IV. Enfin, quatrième question : avec quel budget ?
Jai bien entendu les difficultés que vous éprouvez pour 2011, puisque, à ce jour, les dotations attribuées aux régions sont en moyenne inférieures de 3% à celles de lannée dernière.
Avec Nathalie Kosciusko-Morizet, nous avons signalé cette difficulté au sein du Gouvernement, et le Premier Ministre a décidé début octobre daccorder 75 millions deuros de crédits supplémentaires pour lhébergement et laccès au logement, à répartir entre 2011 et 2012.
Grâce à cela, nous engagerons cette année 1 128 millions deuros pour lhébergement et le logement adapté, cest 257 millions de plus quen 2007, soit 30% daugmentation en 4 ans.
Dans ces conditions, je vous le dis clairement, lengagement financier de lEtat atteindra en 2011 un niveau record, jamais vu jusqu'à présent. Je peux même vous annoncer que lengagement de lEtat sera maintenu à ce niveau record en 2012.
Compte tenu de la décision du Premier Ministre, le budget de lhébergement et laccès au logement sera donc stable sur la période 2010-2011-2012. Cela est vrai au niveau national, comme au niveau de la région Ile de France. Chacun comprendra quen cette période de très forte contrainte budgétaire et déconomies, cela est bien le signe que ce chantier est une priorité.
La encore, il faut que toute le monde ait accès à la même information : le budget du samu social pour 2011 sera supérieur à celui de lannée dernière, qui était de 105 millions deuros, il sera deux fois plus élevé quen 2007.
En plus de ces crédits, nous allons disposer des nouveaux crédits du Fond daccompagnement vers et dans le Logement, qui a été instauré par la loi de finance de juillet dernier, et qui va permettre de proposer des mesures daccompagnement aux ménages DALO. Cela permettra de répondre aux attentes des bailleurs et de collectivités locales. Un premier appel à projet a déjà eu lieu en Ile de France et 3 millions deuros vont être engagés dans le mois qui vient, mais dès lannée prochaine plus de 10 millions deuros seront disponibles en Ile de France. Tout cela permettra de compléter utilement laction des conseils généraux dans ce domaine.
Au-delà du montant des crédits, nous aurons pour la première fois de la visibilité, puisque les services de lEtat connaissent dès le 21 octobre lintégralité de leur dotation pour 2012, et cela leur permettra de préparer plus tôt leur budget, et donc aussi dannoncer plus tôt à chaque association les moyens dont elle disposera.
Cela devra se faire dans un cadre contractuel entre les associations et lEtat, avec une double volonté :
- léquité, avec une démarche de convergence entre structures et entre régions.
- laffirmation de priorités claires : Oui, en 2012 comme en 2011, il nous faut continuer à développer les dispositifs daide à laccès au logement.
Toute cette dynamique a vocation à être particulièrement forte en Ile de France, puisque je suis heureux de vous annoncer que la région a été retenue parmi les 10 « territoires pilotes » pour la mise en oeuvre renforcée du « Logement dabord ».
En conclusion
Questions de définition, de sens, de modalités dapplication, de budget, voici quelques pistes de réflexion que je souhaitais partager avec vous, et que vous allez discuter tout au long de cette journée.
Je voudrais à nouveau vous redire mon souhait que cette journée soit constructive et imaginative. Nous connaissons tous les contraintes du quotidien, les difficultés de laction. Lorsque lon rencontre sans cesse de nouvelles personnes confrontées à des difficultés de logement, survient parfois lidée quon narrivera jamais à répondre à tous les besoins, et la tentation de baisser les bras.
Eh bien répétons-le, il ny a pas de fatalité à lexclusion, mais la vaincre suppose dagir tous ensemble, et de façon déterminée, tout en acceptant de renouveler et dadapter sans cesse nos actions.
Je vous souhaite de vous engager dans cette stratégie du « Logement dabord », non pas contraints, et à reculons, mais avec élan, et avec la conviction que cest une opportunité à saisir pour améliorer le service rendu à tous ceux qui sont sans abri ou mal logés.
Je vous remercie.
Bonne journée, bonnes assises à tous !
Source http://www.drihl.ile-de-france.developpement-durable.gouv.fr, le 26 décembre 2011