Texte intégral
Ce projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2012 sinscrit dans un contexte particulièrement contraint pour nos finances publiques, comme le Premier ministre la rappelé ce matin. Il a indiqué les mesures supplémentaires que le Gouvernement vous présentera prochainement : ces mesures nous permettront dêtre au rendez-vous de nos objectifs de finances publiques, compte tenu de la révision de notre hypothèse de croissance à 1%.
Au total, cest un effort supplémentaire de 17,4 Md en 2016 dont 7 Md dès 2012 qui sera mis en oeuvre. Ce plan permet déviter près de 65 Md de dette dici 2016.
Dans ce contexte, le texte que jai lhonneur de vous présenter est plus nécessaire que jamais. Chacune des mesures que nous proposons compte, parce quelle nous permet davancer dans la bonne direction, celle dune maîtrise responsable des dépenses, tout en maintenant un haut niveau de prise en charge : la responsabilité et la solidarité, voilà le double objectif de ce texte. Votre commission des affaires sociales a proposé des amendements que nous allons examiner ensemble. Je regrette simplement que certains à gauche naient pas fait preuve du même esprit de responsabilité dont nous avons besoin pour être à la hauteur des enjeux, jy reviendrai.
1. La responsabilité et la solidarité, cela concerne dabord notre système de santé et lassurance maladie.
Comme le Premier ministre a eu loccasion de lindiquer ce matin, au-delà de leffort que nous engageons déjà dans ce PLFSS avec un ONDAM à 2,8%, nous vous présenterons prochainement les moyens daller plus loin pour atteindre 2,5%, ce qui représente 500M déconomies supplémentaires dans le champ de lONDAM. Cest dire combien les propositions adoptées par votre commission, qui représenteraient 1,2 Md en plus sur lONDAM, sont en décalage par rapport à la réalité économique du pays : cela nous amènerait à un ONDAM à 3,6%, soit le plus élevé jamais voté par le Parlement, plus élevé même quen 2002 où la situation économique était pourtant bien différente ! Ce nest évidemment pas acceptable, à moins de vouloir faire peser sur les générations à venir tout le poids des efforts.
Permettez-moi maintenant de vous rappeler les principales mesures que le Gouvernement vous propose et que lAssemblée a votées.
La maîtrise des dépenses nécessite un effort de lensemble des acteurs du système de soins :
* au nombre de des ces acteurs, il y a lindustrie pharmaceutique : ainsi, concernant le médicament, notre texte prévoit que la contribution de lindustrie des produits de santé sera renforcée pour 2012 à hauteur de 960 millions deuros : outre le relèvement de certains prélèvements, nous allons en particulier accroître les baisses de prix à hauteur de 670 millions deuros, et favoriser la substitution des génériques pour 40 millions deuros. Il sagit dune première étape dun effort substantiel, dont le Premier ministre a indiqué ce matin quil sera accentué.
* deuxième acteur, les établissements de santé : les efforts defficience permettront déconomiser 450 millions deuros. Leffort portera notamment sur la rationalisation des achats hospitaliers, qui représentent 18 milliards deuros. Cest le deuxième poste de dépense après le personnel. Les efforts de mutualisation et doptimisation des achats sélèvent à 145 millions deuros en 2012. La convergence tarifaire ciblée se poursuivra pour la troisième année consécutive, pour un montant de 100 millions deuros.
Votre commission souhaite supprimer la convergence tarifaire entre établissements de santé publics et privés. Là encore, ce nest opportun ni à long terme, ni à court terme. La convergence permet daccroître lefficience des établissements de santé, dans les deux sens.
Ce nest surtout pas le moment de sarrêter.
Concernant la mesure propre aux indemnités journalières (IJ), jai indiqué à lAssemblée nationale, en concertation avec la commission des affaires sociales, que jétais prêt à examiner avec les parlementaires, dici la fin du débat, les propositions alternatives qui mont été faites pour un rendement équivalent, en particulier la mise en place dun quatrième jour de délai de carence. Cette mesure devrait permettre de responsabiliser davantage les assurés pour garantir un recours justifié aux IJ maladie courtes.
Ainsi, nous parvenons à maîtriser les dépenses de santé, et cela tout en maintenant un haut niveau de prise en charge. Cest ce qua bien montré la commission des comptes de la santé.
Le reste à charge des ménages a diminué en 2010 pour la troisième année consécutive et représente 9,4% de la consommation de soins et de biens médicaux. La France se trouve ainsi à la deuxième place derrière les Pays-Bas. En outre, pour répondre structurellement à la problématique des dépassements dhonoraires, qui peuvent entraîner des renoncements aux soins, jai présenté un amendement pour encadrer, dans les meilleurs délais, les dépassements pour les trois spécialités de chirurgie, danesthésie-réanimation et de gynécologie obstétrique.
Plus précisément :
* au moins 30% de lactivité devrait se faire à tarif opposable ;
* les dépassements supérieurs à 50% du tarif remboursable ne seraient pas facturés ;
* et il sagit davoir un nombre dacte suffisant pour garantir la qualité des soins.
Il y aura une prise en charge obligatoire du secteur optionnel dans les contrats responsables, à hauteur de 150%.
La proposition votée par lAssemblée nationale garde ouverte la porte du dialogue : les partenaires conventionnels disposent dun mois à compter de la promulgation du PLFSS pour se mettre daccord. En labsence dun accord avec lUNOCAM, le gouvernement instaurera cet encadrement par voie réglementaire. Je précise que cet encadrement des tarifs ne sera ouvert quau secteur 2, afin de ne pas ouvrir de nouvelles possibilités de dépassement.
Je note que vous proposez une suppression de cet article. Il y a manifestement un manque de cohérence entre les objectifs affichés et le projet que vous proposez de mettre en oeuvre. Je note également que rien nest proposé en remplacement de la proposition du gouvernement pour satteler au problème des dépassements dhonoraires.
Pour améliorer la couverture des plus modestes, après lélargissement de lACS, jai proposé à lAssemblée nationale un nouveau relèvement du plafond de ressources ouvrant droit à lACS à +35% du plafond CMUC au 1er janvier 2012 : cela permettra ainsi de passer de 532 000 bénéficiaires à plus dun million de bénéficiaires.
En outre, le Gouvernement a proposé au vote de lAssemblée un amendement permettant de régulariser la validité de lexercice des médecins étrangers au regard de leur exercice. Ces médecins jouent un rôle important dans le contexte de la démographie médicale actuelle, voilà pourquoi nous avons décidé de mieux reconnaître leur rôle et de garantir leur exercice.
Ainsi, comme vous le voyez, nous progressons sur la maîtrise des dépenses de santé. En même temps, nous agissons pour préserver le caractère solidaire de notre système de santé et laccès aux soins.
2. Cette exigence de responsabilité vaut également pour la branche vieillesse, dans la continuité de la réforme de 2010.
Vous le savez, notre système de retraite est lun des piliers de notre système de protection sociale. Face au vieillissement de la population, la réforme des retraites votée en novembre 2010 assure la pérennité et léquité de notre système par répartition à travers plusieurs piliers, dont les mesures dâge.
A cet égard, permettez-moi de revenir sur la mesure importante que le Premier ministre a annoncée aujourdhui.
Cette mesure, qui sera présentée dans un PLFSSR pour 2012, consiste à avancer dun an la phase transitoire de la réforme des retraites, et en conséquence latteinte de la cible de 62 ans en 2017 au lieu de 2018.
Dans le contexte actuel de la crise des dettes souveraines, cette accélération permet de réduire plus rapidement le déficit des régimes dassurance vieillesse et de mettre plus rapidement les pensions de retraite à labri des tensions sur les marchés financiers.
Elle se traduit ainsi par une diminution des déficits cumulés des régimes de retraite à hauteur de 4,4 Mds entre 2012 et 2016. Cette mesure ne revient pas sur les paramètres arrêtés dans la réforme des retraites de 2010 ; elle ne fait que raccourcir la phase transitoire de montée en charge.
En particulier, lâge légal de départ à 62 ans et lâge du taux plein à 67 ans, après phase transitoire, ainsi que le départ anticipé à 60 ans, pour les bénéficiaires des dispositifs carrières longues et pénibilité, demeurent inchangés.
Revenons au texte qui nous préoccupe aujourdhui. Je voudrais revenir sur quatre mesures très favorables adoptées à lAssemblée nationale :
1/ lélargissement du dispositif de retraite anticipée des travailleurs handicapés au régime social des indépendants ;
2/ lextension de lâge dadhésion à lassurance vieillesse volontaire des non salariés agricoles au-delà de 60 ans : cela permettra à ceux qui nont plus dactivité professionnelle de continuer à cotiser jusquau taux plein ;
3/ lassouplissement du cumul emploi-retraite des conjoints collaborateurs et aides familiaux non salariés agricoles ;
4/ lextension de la majoration des pensions des exploitants agricoles aux retraites anticipées pour pénibilité.
Ces quatre mesures sont des mesures déquité, qui sinscrivent parfaitement dans le prolongement de la réforme des retraites de 2010.
3) La branche AT-MP reste à léquilibre.
Comme vous le savez, la branche accidents du travail et maladies professionnelles doit être structurellement équilibrée. Voilà pourquoi nous avons relevé le taux de cotisation de 0,1% à partir de 2011.
Cette branche assure le financement des dépenses des fonds spécialisés pour lindemnisation des victimes de lamiante. Leur montant est reconduit à leur niveau des années précédentes.
Par ailleurs, cette branche contribue à la branche maladie au titre de la sous déclaration des accidents du travail et maladies professionnelles. Cette dernière contribution sera légèrement revalorisée dans la LFSS 2012, pour tenir compte du dernier rapport de la commission présidée par Noël Diricq.
Ma priorité est de renforcer la prévention des risques professionnels et de prévenir la pénibilité. Cest un volet essentiel de la réforme des retraites, car pour travailler plus longtemps, nous devons travailler mieux.
Je voudrais revenir sur deux amendements du Gouvernement qui ont été adopté à lAssemblée nationale :
1/ Lun consiste à harmoniser les droits et obligations entre conjoints et pacsés en matière dattribution des rentes dayant droit consécutives aux accidents du travail ;
2/ Lautre porte sur la coordination des régimes de cessation anticipée dactivité des travailleurs de lamiante.
Il fait suite aux propositions du rapport de Patrick Roy de novembre 2009 sur lindemnisation des victimes de lamiante. Mon prédécesseur Eric Woerth sy était engagé, à loccasion dune question posée au Sénat par le sénateur Godefroy. Cette amélioration de la coordination des régimes était très attendue et nous y répondons.
Par ailleurs, nous allons modifier en profondeur la législation sur lamiante afin que la France continue à être parmi les pays qui ont la réglementation la plus protectrice dans le monde.
4) Enfin pérenniser notre système de protection sociale, cest aussi lutter contre la fraude aux prestations sociales.
Je souhaiterais rappeler le montant estimé des fraudes : 4 milliards deuros. Autant dargent prélevé sur le financement solidaire de la sécurité sociale.
Dans le contexte actuel, vous percevez donc bien notre impératif de renforcer la lutte contre les fraudes.
Nous proposons par exemple de redéfinir la notion disolement pour le RSA et lui donner un sens économique, pour être plus près de la réalité du terrain. Un tiers des fraudes au RSA utilisent cette notion disolement, or celle-ci était trop vague lorsquelle ne faisait référence quà labsence de vie en couple.
Par ailleurs, nous proposons que le répertoire national commun de protection sociale, le RNCPS, soit enrichi des montants des prestations sociales versées.
Cela permettra didentifier des doublons ou des incompatibilités, de repérer des assurés touchant des montants de prestations anormalement élevés ou de cibler les actions les plus urgentes à mener en fonction des montants en jeu.
Il est normal que la lutte contre les fraudes sintensifie à lheure où lon demande un effort à tous. Cest une exigence de justice et cela contribue aussi à renforcer lefficience de notre système de protection sociale.
Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs les Sénateurs,
Nos concitoyens sont conscients des risques que les déficits et le ralentissement de la croissance mondiale font peser sur lavenir de notre protection sociale. Avec ce PLFSS, le Gouvernement apporte des réponses à la hauteur de lenjeu : nous tenons compte des conséquences de la crise sur léquilibre financier de la sécurité sociale, pour préserver lavenir de notre système solidaire. Je souhaite que chacun dentre vous, au sein de cette haute Assemblée, ait à cur dexaminer ce texte dans le même esprit de responsabilité.
Je vous remercie.
Source http://www.sante.gouv.fr, le 16 novembre 2011