Texte intégral
Q - François Hollande demande une renégociation du futur traité européen. Que lui répondez-vous ?
R - Je lui réponds que notre accord est solide, quil pose les bases du gouvernement économique européen et dun bon équilibre entre discipline et solidarité. ( ) Sur les deux points essentiels quil veut renégocier, à savoir une plus grande implication de la BCE et la mise en place deuro-obligations, il se heurtera à un refus déterminé de lAllemagne. Et même dans lhypothèse dune victoire du SPD en 2013, rien ne dit que la position de Berlin changera. ( )
Q - Et sur le fond ?
R - Je reste convaincu que les euro-obligations sont aujourdhui un marché de dupes. Dans létat actuel des choses, elles seraient émises à des taux supérieurs à ceux des bons du Trésor français et il faudrait expliquer aux Français quils doivent se porter garants de la dette italienne ou grecque. Les euro-obligations peuvent être un point daboutissement, quand nous disposerons dune véritable union budgétaire et fiscale, mais en aucun cas un point de départ. Quant à lintervention de la BCE, la question nest pas ce qui est souhaitable, mais ce qui est possible. Déjà la BCE a adressé un signal fort en sengageant de son propre chef à refinancer les banques de façon illimitée à 1 % sur une période de trois ans. Et un lien a été établi entre la BCE et le futur MES.
Q - La possible perte du triple A vous inquiète-t-elle ?
R - Ce ne serait pas une bonne nouvelle bien sûr, mais ce ne serait pas non plus un cataclysme. Les États-Unis qui ont perdu leur triple A continuent demprunter sur les marchés à de bonnes conditions.
( )
Q - Faut-il revoir le rôle des agences de notation ?
R - Ce nest pas en cassant le thermomètre quon fait retomber la fièvre. Mais il peut être utile de sassurer que le thermomètre nest pas déréglé. Introduire davantage de transparence dans les critères quelles utilisent serait un progrès. Elles sont parfois dans lappréciation subjective et politique. Sans doute faut-il aussi leur accorder moins dimportance dans le débat politique.
Q - Comment empêcher la montée de leuroscepticisme en France ?
R - En allant au débat avec les Français. Je crois que ce sera lun des enjeux majeurs de la prochaine présidentielle. Il y aura les Européens et les souverainistes. Ces derniers devront expliquer aux Français les conséquences dune sortie de leuro. Nous devrons convaincre les Français que la zone euro peut redevenir un facteur de stabilité et quils sen tireront mieux si nous sauvons la monnaie unique. Nous devrons aussi montrer que lEurope sest rapprochée des peuples. En plaçant le Conseil des chefs dÉtat et de gouvernement au sommet de larchitecture institutionnelle, lEurope confie son pilotage à des responsables élus, légitimes démocratiquement. Nous ne sommes pas loin du concept «delorien» de fédération dÉtats-nations.
Q - «Produire en France» est devenu le slogan de la plupart des candidats à la présidentielle. Est-il compatible avec lidéal européen ?
R - Bien sûr ! Produire en France, produire en Europe, avoir une vraie politique industrielle, cesser dêtre naïf, tout cela est complémentaire. Si acheter en France cest revenir au protectionnisme, cela na pas de sens : les mesures de rétorsion seraient immédiates. Si cela veut dire quil faut être moins idéologue dans la politique commerciale européenne, alors oui, je crois quil y a une marge extrêmement importante. Nous navons pas les moyens de nous défendre contre certaines pratiques contraires au libre-commerce et nous avons laissé filer des industries que nous aurions pu garder. La commission de Bruxelles en est restée trop longtemps au Traité de Rome et à la concurrence pure et parfaite. Avant de démanteler des groupes européens, posons-nous la question de leur taille critique sur le marché mondial. Sans tomber dans le protectionnisme, il faut avoir une vision un peu plus combative en faveur de normes sociales et environnementales mondiales. Au G20 de Cannes, la France a fait adopter le principe dun «socle social» à respecter par tous.
Q - La TVA sociale peut-elle aider ?
R - Faire aimer la TVA aux Français est un grand défi ! Je suis bien placé pour le savoir... Il y a un gros travail pédagogique à faire pour montrer que la TVA est un bon impôt, moderne, favorable à la compétitivité et à lemploi qui est, ne loublions pas, la première préoccupation des Français. La TVA ne taxe pas linvestissement et lexportation mais taxe limportation. Un pays comme le Danemark, parfois présenté comme un modèle dÉtat providence, très compétitif à lexportation, a un taux moyen de TVA beaucoup plus élevé que la France. Et ce nest pas un pays arriéré sur le plan social... ( ).source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 16 décembre 2011
R - Je lui réponds que notre accord est solide, quil pose les bases du gouvernement économique européen et dun bon équilibre entre discipline et solidarité. ( ) Sur les deux points essentiels quil veut renégocier, à savoir une plus grande implication de la BCE et la mise en place deuro-obligations, il se heurtera à un refus déterminé de lAllemagne. Et même dans lhypothèse dune victoire du SPD en 2013, rien ne dit que la position de Berlin changera. ( )
Q - Et sur le fond ?
R - Je reste convaincu que les euro-obligations sont aujourdhui un marché de dupes. Dans létat actuel des choses, elles seraient émises à des taux supérieurs à ceux des bons du Trésor français et il faudrait expliquer aux Français quils doivent se porter garants de la dette italienne ou grecque. Les euro-obligations peuvent être un point daboutissement, quand nous disposerons dune véritable union budgétaire et fiscale, mais en aucun cas un point de départ. Quant à lintervention de la BCE, la question nest pas ce qui est souhaitable, mais ce qui est possible. Déjà la BCE a adressé un signal fort en sengageant de son propre chef à refinancer les banques de façon illimitée à 1 % sur une période de trois ans. Et un lien a été établi entre la BCE et le futur MES.
Q - La possible perte du triple A vous inquiète-t-elle ?
R - Ce ne serait pas une bonne nouvelle bien sûr, mais ce ne serait pas non plus un cataclysme. Les États-Unis qui ont perdu leur triple A continuent demprunter sur les marchés à de bonnes conditions.
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Q - Faut-il revoir le rôle des agences de notation ?
R - Ce nest pas en cassant le thermomètre quon fait retomber la fièvre. Mais il peut être utile de sassurer que le thermomètre nest pas déréglé. Introduire davantage de transparence dans les critères quelles utilisent serait un progrès. Elles sont parfois dans lappréciation subjective et politique. Sans doute faut-il aussi leur accorder moins dimportance dans le débat politique.
Q - Comment empêcher la montée de leuroscepticisme en France ?
R - En allant au débat avec les Français. Je crois que ce sera lun des enjeux majeurs de la prochaine présidentielle. Il y aura les Européens et les souverainistes. Ces derniers devront expliquer aux Français les conséquences dune sortie de leuro. Nous devrons convaincre les Français que la zone euro peut redevenir un facteur de stabilité et quils sen tireront mieux si nous sauvons la monnaie unique. Nous devrons aussi montrer que lEurope sest rapprochée des peuples. En plaçant le Conseil des chefs dÉtat et de gouvernement au sommet de larchitecture institutionnelle, lEurope confie son pilotage à des responsables élus, légitimes démocratiquement. Nous ne sommes pas loin du concept «delorien» de fédération dÉtats-nations.
Q - «Produire en France» est devenu le slogan de la plupart des candidats à la présidentielle. Est-il compatible avec lidéal européen ?
R - Bien sûr ! Produire en France, produire en Europe, avoir une vraie politique industrielle, cesser dêtre naïf, tout cela est complémentaire. Si acheter en France cest revenir au protectionnisme, cela na pas de sens : les mesures de rétorsion seraient immédiates. Si cela veut dire quil faut être moins idéologue dans la politique commerciale européenne, alors oui, je crois quil y a une marge extrêmement importante. Nous navons pas les moyens de nous défendre contre certaines pratiques contraires au libre-commerce et nous avons laissé filer des industries que nous aurions pu garder. La commission de Bruxelles en est restée trop longtemps au Traité de Rome et à la concurrence pure et parfaite. Avant de démanteler des groupes européens, posons-nous la question de leur taille critique sur le marché mondial. Sans tomber dans le protectionnisme, il faut avoir une vision un peu plus combative en faveur de normes sociales et environnementales mondiales. Au G20 de Cannes, la France a fait adopter le principe dun «socle social» à respecter par tous.
Q - La TVA sociale peut-elle aider ?
R - Faire aimer la TVA aux Français est un grand défi ! Je suis bien placé pour le savoir... Il y a un gros travail pédagogique à faire pour montrer que la TVA est un bon impôt, moderne, favorable à la compétitivité et à lemploi qui est, ne loublions pas, la première préoccupation des Français. La TVA ne taxe pas linvestissement et lexportation mais taxe limportation. Un pays comme le Danemark, parfois présenté comme un modèle dÉtat providence, très compétitif à lexportation, a un taux moyen de TVA beaucoup plus élevé que la France. Et ce nest pas un pays arriéré sur le plan social... ( ).source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 16 décembre 2011