Texte intégral
Madame la présidente,
Mesdames et messieurs les députés,
Je veux tout dabord saluer le travail de fond considérable réalisé, depuis près de deux ans, par Alain GEST et Philippe TOURTELIER, auteurs de cette proposition de résolution. On peut dire quils sont tous deux devenus déminents spécialistes dun concept relativement jeune dans notre corpus juridique, ce qui est peu commun.
Nous avions précisément besoin que ce jeune concept soit regardé, ausculté, travaillé par des parlementaires avisés et chevronnés qui sen emparent et se lapproprient pour linscrire plus nettement encore dans notre paysage normatif, mais aussi dans notre paysage mental en le mettant à lhorizon de nos débats dans de nombreux domaines. Vous avez fait, messieurs, oeuvre de pionniers, je vous en félicite et vous en remercie.
Voilà donc sept années que le principe de précaution est inscrit dans notre Constitution, avec la Charte de lenvironnement adoptée en 2005. Chacun connaît mon engagement personnel dans cette reconnaissance nécessaire, je ny reviens pas.
Toutefois, je ne me cache pas la réalité. Je sais que des voix sélèvent encore, ici ou là, pour contester le principe de précaution, pour le critiquer, pour continuer daffirmer quil constituerait un frein aux activités de recherche et même au développement économique.
Vous ne serez pas étonnés que je ne partage pas du tout ce point de vue. Le principe de précaution nest pas la négation du progrès, il nest pas la négation de la science.
Il est même tout le contraire, car le doute, quil soit méthodique ou hyperbolique, mais aussi léthique sont partie intégrante de la démarche scientifique : Philippe TOURTELIER nous a rappelé à ce propos la citation de Rabelais. Intégrer le doute et léthique, cest linverse du dogme et cest le contraire de lobscurantisme, cest tout simplement une science bien ordonnée. En fait, le principe de précaution est aujourdhui lune des conditions de possibilité et de crédibilité de la science moderne.
Il constitue à mon sens un exemple dune vision nouvelle de lécologie : non plus une écologie de lobjection et de lobstacle, mais une écologie « intégrée » aux processus tant politiques quéconomiques ou scientifiques, une écologie qui les accompagne, les fonde en légitimité et leur donne de la viabilité.
De la même manière, le principe de précaution constitue une assurance de long terme, tant pour le chercheur que pour lindustriel. Face à des risques toujours plus incertains, à des conséquences qui peuvent être toujours plus graves, à mesure que progressent la science et la portée de ses applications techniques, il serait inconséquent -plus inconséquent encore que par le passé- dattendre pour voir, pour connaître et pour éprouver la réalité du risque. En la matière, il ne faut pas confondre les expériences de la science, balisées et maîtrisées, avec les expérimentations, tentatives et tentations dapprentis sorciers pas toujours désintéressés.
Le résultat dun laisser-faire intégral en la matière serait, comme tout laisser-faire, exactement linverse de leffet recherché, de la même manière que la liberté excessive peut dégénérer en tyrannie.
Et puis, outre ses conséquences concrètes, le laisser-faire total aurait pour résultat de démultiplier la défiance du corps social vis-à-vis des travaux et des professions scientifiques, dont le prestige a pourtant besoin dêtre restauré si nous voulons construire une « société de la connaissance », capable de nous distinguer dans la mondialisation et que nous appelons de nos voeux.
Pour que la France reste un pays dinnovation, de progrès technique, de technologies de pointe, il faut quelle soit un pays dans lequel la science est crédible parce quelle sait anticiper. Les exemples sont multiples, certains en ont donné. Je nentrerai pas dans le détail car je sais que là se trouvent peut-être des sources de contentieux.
Mais je veux dire ici que je ne défends pas une vision figée du principe de précaution. Cest au contraire un principe profondément dynamique, parfaitement adaptable en fonction de létat des connaissances scientifiques. Ce nest pas un principe déconnecté du droit, cest avant tout un principe procédural. Cest pourquoi il est indispensable de clarifier les conditions de sa mise en oeuvre. Je partage sur ce point lanalyse extrêmement fine de la jurisprudence que vient de faire Jérôme BIGNON, rejoignant me semble-t-il, les propos de Christophe BOUILLON.
Il faut battre en brèche lidée encore trop répandue que le flou, voire larbitraire présiderait à lapplication du principe de précaution : tel nest pas le cas ! Ce principe est tout sauf dénué de rationalité. Toute sa difficulté réside dans le fait que, par définition, le champ de la précaution suppose un très fort niveau dincertitude.
Jindique au passage que je partage le point de vue dAlain GEST quant à la nécessité de bien distinguer le régime de la précaution -où nous ne savons pas quantifier le niveau de risque- du régime de la prévention, dans lequel le risque est assez bien connu et où il sagit de prendre des mesures qui permettent de le maintenir à un niveau jugé acceptable par la société. Cest une démarche que lon connaît bien par exemple dans les installations Seveso ou dans les phénomènes naturels comme les inondations. Les outils de la prévention des risques sont fondamentalement différents et vous avez raison dinsister, les uns et les autres, sur le fait quil ne faut pas les confondre avec ceux de la précaution. Cest trop souvent le cas, et pourtant ils nont rien à voir.
Pour toutes ces raisons, je juge particulièrement stimulant le travail qui vous est présenté aujourdhui dans le cadre de cette proposition de résolution.
Je trouve en particulier intéressante lidée de mettre en place un processus clair, ce nest pas André CHASSAIGNE, après son intervention, qui me contredira, au moins sur ce point.
Il est dabord intéressant de sappuyer sur des processus pluridisciplinaires, donc sur de nouvelles expertises. Pour renforcer lacceptabilité sociale des décisions, je crois à la nécessité de compléter lexpertise scientifique par une expertise socioéconomique, pour faire clairement le bilan coût-avantage dont Jean-Paul CHANTEGUET a souligné la nécessité de chaque décision. Vous le savez, cest ce que nous nous efforçons de réaliser, par exemple dans le domaine des biotechnologies.
Il faut aussi mettre en place, lorsque cela est nécessaire, une coordination précise. On rejoint là lidée de réfèrent qui est développée dans le projet de résolution et à laquelle tiennent particulièrement Alain GEST et Philippe TOURTELIER.
À ce propos, je ne partage pas la sévérité dAndré CHASSAIGNE sur le Haut conseil des biotechnologies. Les avis des deux comités du Haut conseil ont leur importance. Sur un sujet comme les OGM, on ne peut pas sattendre à ce quil y ait facilement consensus, mais des travaux de qualité ont été menés par ces deux comités. Leurs éclairages respectifs sont utiles, en particulier pour le Gouvernement. Je citerai à ce propos un décret dactualité, puisque cest hier, 31 janvier, qua été publié au Journal officiel le décret sur létiquetage des produits sans OGM. Il sappuie très fortement sur lavis du HCB, quelle que soit par ailleurs la diversité des opinions qui ont pu sexprimer. Les structures grenelliennes nous ont permis davancer.
Comme vous lavez souligné, madame FIORASO, nous avons aussi besoin dassocier le public aux étapes successives de la mise en oeuvre du principe de précaution, selon des modalités qui restent à préciser. Cest lintuition fondamentale du Grenelle de lEnvironnement, et ce mode de gouvernance semble absolument nécessaire pour assurer lacceptabilité sociale de la décision qui devra être prise in fine.
Enfin, il faut distinguer très nettement ce qui relève de lexpertise et ce qui appartient à la décision publique sur les suites à donner.
Vous laurez compris, jadhère à lessentiel du projet de résolution. Jaurai, en revanche, des nuances à exprimer sur deux points dorganisation.
Sagissant dabord du rôle que vous proposez de confier au référent, je partage avec vous lidée quil est nécessaire davoir un point focal unique pour coordonner les différentes expertises à mettre en oeuvre, mais je suis plus réservée quant à lidée de confier à ce référent lorganisation des autres phases, celle par exemple du dialogue avec le public.
Je pense en effet quil faut clairement distinguer dans le processus ce qui relève strictement de lexpertise et nécessite un pilote technique, et ce qui est du domaine du débat et de la décision, qui devrait rester dans le champ de responsabilité des autorités publiques où le Parlement peut avoir un rôle important à jouer. Je marque donc une réserve sur ce point de la proposition de résolution.
Le second sujet qui me semble devoir être nuancé concerne linitialisation de la démarche. Vous proposez que le Gouvernement, le Parlement et le Conseil économique, social et environnemental puissent lancer le processus. Ne faut-il pas prendre dabord le temps dapprendre et dévaluer ce processus de mise en oeuvre du principe de précaution ? Ne faut-il pas, a minima, mettre en place des garde-fous - règles de majorité, voeux adressés au Gouvernement chargé de la saisine- pour éviter que le nombre de saisines ne discrédite le processus ?
Enfin, je voudrais revenir sur votre proposition détendre le processus aux domaines de la santé et de la sécurité alimentaire.
Nous avons eu ce débat, déjà très vif, à loccasion de lexamen du texte relatif à la Charte de lenvironnement. Le choix fait à lépoque a été de définir le principe de précaution dans le champ environnemental.
Il est vrai que, si lon adopte un instant le point de vue dun non-spécialiste, on peut être tenté, dans la vie courante, de faire référence à ce principe pour dautres sujets que lenvironnement. Je veux le dire très clairement : dans les domaines de la santé et de la sécurité alimentaire comme dans lenvironnement, des situations de grande incertitude scientifique peuvent se produire et nous conduire à craindre des conséquences graves. Il est vrai aussi quil existe des liens entre les différents domaines. Anny POURSINOFF, notamment, a évoqué les liens existant entre la santé et lenvironnement. Cest pourquoi je comprends parfaitement les raisons qui vous ont conduits à poser la question de lextension du processus à ces champs.
Cela étant, il ne faut pas méconnaître les implications juridiques et singulièrement constitutionnelles quentraînerait une telle évolution.
Il sera sans doute nécessaire douvrir ce débat, mais il sagira dun débat constitutionnel. Il serait à lévidence prématuré de prétendre le trancher aujourdhui, dans le cadre de la discussion de cette proposition de résolution, et ce avant même quil nait lieu ! Je doute que le moment comme le texte soient adéquats.
Je vois, en tout cas, dans cette volonté dextension du principe de précaution le signe indubitable quun pas essentiel a été franchi dans lappropriation de ce principe par la représentation nationale, et je tenais à vous dire à quel point je men réjouis. Cest avec émotion que je me souviens des débats très vifs qui ont accompagné lentrée du principe de précaution dans la Constitution.
Je donnerai donc, au nom du Gouvernement, un avis favorable à cette proposition de résolution.Source http://www.developpement-durable.gouv.fr, le 7 février 2012
Mesdames et messieurs les députés,
Je veux tout dabord saluer le travail de fond considérable réalisé, depuis près de deux ans, par Alain GEST et Philippe TOURTELIER, auteurs de cette proposition de résolution. On peut dire quils sont tous deux devenus déminents spécialistes dun concept relativement jeune dans notre corpus juridique, ce qui est peu commun.
Nous avions précisément besoin que ce jeune concept soit regardé, ausculté, travaillé par des parlementaires avisés et chevronnés qui sen emparent et se lapproprient pour linscrire plus nettement encore dans notre paysage normatif, mais aussi dans notre paysage mental en le mettant à lhorizon de nos débats dans de nombreux domaines. Vous avez fait, messieurs, oeuvre de pionniers, je vous en félicite et vous en remercie.
Voilà donc sept années que le principe de précaution est inscrit dans notre Constitution, avec la Charte de lenvironnement adoptée en 2005. Chacun connaît mon engagement personnel dans cette reconnaissance nécessaire, je ny reviens pas.
Toutefois, je ne me cache pas la réalité. Je sais que des voix sélèvent encore, ici ou là, pour contester le principe de précaution, pour le critiquer, pour continuer daffirmer quil constituerait un frein aux activités de recherche et même au développement économique.
Vous ne serez pas étonnés que je ne partage pas du tout ce point de vue. Le principe de précaution nest pas la négation du progrès, il nest pas la négation de la science.
Il est même tout le contraire, car le doute, quil soit méthodique ou hyperbolique, mais aussi léthique sont partie intégrante de la démarche scientifique : Philippe TOURTELIER nous a rappelé à ce propos la citation de Rabelais. Intégrer le doute et léthique, cest linverse du dogme et cest le contraire de lobscurantisme, cest tout simplement une science bien ordonnée. En fait, le principe de précaution est aujourdhui lune des conditions de possibilité et de crédibilité de la science moderne.
Il constitue à mon sens un exemple dune vision nouvelle de lécologie : non plus une écologie de lobjection et de lobstacle, mais une écologie « intégrée » aux processus tant politiques quéconomiques ou scientifiques, une écologie qui les accompagne, les fonde en légitimité et leur donne de la viabilité.
De la même manière, le principe de précaution constitue une assurance de long terme, tant pour le chercheur que pour lindustriel. Face à des risques toujours plus incertains, à des conséquences qui peuvent être toujours plus graves, à mesure que progressent la science et la portée de ses applications techniques, il serait inconséquent -plus inconséquent encore que par le passé- dattendre pour voir, pour connaître et pour éprouver la réalité du risque. En la matière, il ne faut pas confondre les expériences de la science, balisées et maîtrisées, avec les expérimentations, tentatives et tentations dapprentis sorciers pas toujours désintéressés.
Le résultat dun laisser-faire intégral en la matière serait, comme tout laisser-faire, exactement linverse de leffet recherché, de la même manière que la liberté excessive peut dégénérer en tyrannie.
Et puis, outre ses conséquences concrètes, le laisser-faire total aurait pour résultat de démultiplier la défiance du corps social vis-à-vis des travaux et des professions scientifiques, dont le prestige a pourtant besoin dêtre restauré si nous voulons construire une « société de la connaissance », capable de nous distinguer dans la mondialisation et que nous appelons de nos voeux.
Pour que la France reste un pays dinnovation, de progrès technique, de technologies de pointe, il faut quelle soit un pays dans lequel la science est crédible parce quelle sait anticiper. Les exemples sont multiples, certains en ont donné. Je nentrerai pas dans le détail car je sais que là se trouvent peut-être des sources de contentieux.
Mais je veux dire ici que je ne défends pas une vision figée du principe de précaution. Cest au contraire un principe profondément dynamique, parfaitement adaptable en fonction de létat des connaissances scientifiques. Ce nest pas un principe déconnecté du droit, cest avant tout un principe procédural. Cest pourquoi il est indispensable de clarifier les conditions de sa mise en oeuvre. Je partage sur ce point lanalyse extrêmement fine de la jurisprudence que vient de faire Jérôme BIGNON, rejoignant me semble-t-il, les propos de Christophe BOUILLON.
Il faut battre en brèche lidée encore trop répandue que le flou, voire larbitraire présiderait à lapplication du principe de précaution : tel nest pas le cas ! Ce principe est tout sauf dénué de rationalité. Toute sa difficulté réside dans le fait que, par définition, le champ de la précaution suppose un très fort niveau dincertitude.
Jindique au passage que je partage le point de vue dAlain GEST quant à la nécessité de bien distinguer le régime de la précaution -où nous ne savons pas quantifier le niveau de risque- du régime de la prévention, dans lequel le risque est assez bien connu et où il sagit de prendre des mesures qui permettent de le maintenir à un niveau jugé acceptable par la société. Cest une démarche que lon connaît bien par exemple dans les installations Seveso ou dans les phénomènes naturels comme les inondations. Les outils de la prévention des risques sont fondamentalement différents et vous avez raison dinsister, les uns et les autres, sur le fait quil ne faut pas les confondre avec ceux de la précaution. Cest trop souvent le cas, et pourtant ils nont rien à voir.
Pour toutes ces raisons, je juge particulièrement stimulant le travail qui vous est présenté aujourdhui dans le cadre de cette proposition de résolution.
Je trouve en particulier intéressante lidée de mettre en place un processus clair, ce nest pas André CHASSAIGNE, après son intervention, qui me contredira, au moins sur ce point.
Il est dabord intéressant de sappuyer sur des processus pluridisciplinaires, donc sur de nouvelles expertises. Pour renforcer lacceptabilité sociale des décisions, je crois à la nécessité de compléter lexpertise scientifique par une expertise socioéconomique, pour faire clairement le bilan coût-avantage dont Jean-Paul CHANTEGUET a souligné la nécessité de chaque décision. Vous le savez, cest ce que nous nous efforçons de réaliser, par exemple dans le domaine des biotechnologies.
Il faut aussi mettre en place, lorsque cela est nécessaire, une coordination précise. On rejoint là lidée de réfèrent qui est développée dans le projet de résolution et à laquelle tiennent particulièrement Alain GEST et Philippe TOURTELIER.
À ce propos, je ne partage pas la sévérité dAndré CHASSAIGNE sur le Haut conseil des biotechnologies. Les avis des deux comités du Haut conseil ont leur importance. Sur un sujet comme les OGM, on ne peut pas sattendre à ce quil y ait facilement consensus, mais des travaux de qualité ont été menés par ces deux comités. Leurs éclairages respectifs sont utiles, en particulier pour le Gouvernement. Je citerai à ce propos un décret dactualité, puisque cest hier, 31 janvier, qua été publié au Journal officiel le décret sur létiquetage des produits sans OGM. Il sappuie très fortement sur lavis du HCB, quelle que soit par ailleurs la diversité des opinions qui ont pu sexprimer. Les structures grenelliennes nous ont permis davancer.
Comme vous lavez souligné, madame FIORASO, nous avons aussi besoin dassocier le public aux étapes successives de la mise en oeuvre du principe de précaution, selon des modalités qui restent à préciser. Cest lintuition fondamentale du Grenelle de lEnvironnement, et ce mode de gouvernance semble absolument nécessaire pour assurer lacceptabilité sociale de la décision qui devra être prise in fine.
Enfin, il faut distinguer très nettement ce qui relève de lexpertise et ce qui appartient à la décision publique sur les suites à donner.
Vous laurez compris, jadhère à lessentiel du projet de résolution. Jaurai, en revanche, des nuances à exprimer sur deux points dorganisation.
Sagissant dabord du rôle que vous proposez de confier au référent, je partage avec vous lidée quil est nécessaire davoir un point focal unique pour coordonner les différentes expertises à mettre en oeuvre, mais je suis plus réservée quant à lidée de confier à ce référent lorganisation des autres phases, celle par exemple du dialogue avec le public.
Je pense en effet quil faut clairement distinguer dans le processus ce qui relève strictement de lexpertise et nécessite un pilote technique, et ce qui est du domaine du débat et de la décision, qui devrait rester dans le champ de responsabilité des autorités publiques où le Parlement peut avoir un rôle important à jouer. Je marque donc une réserve sur ce point de la proposition de résolution.
Le second sujet qui me semble devoir être nuancé concerne linitialisation de la démarche. Vous proposez que le Gouvernement, le Parlement et le Conseil économique, social et environnemental puissent lancer le processus. Ne faut-il pas prendre dabord le temps dapprendre et dévaluer ce processus de mise en oeuvre du principe de précaution ? Ne faut-il pas, a minima, mettre en place des garde-fous - règles de majorité, voeux adressés au Gouvernement chargé de la saisine- pour éviter que le nombre de saisines ne discrédite le processus ?
Enfin, je voudrais revenir sur votre proposition détendre le processus aux domaines de la santé et de la sécurité alimentaire.
Nous avons eu ce débat, déjà très vif, à loccasion de lexamen du texte relatif à la Charte de lenvironnement. Le choix fait à lépoque a été de définir le principe de précaution dans le champ environnemental.
Il est vrai que, si lon adopte un instant le point de vue dun non-spécialiste, on peut être tenté, dans la vie courante, de faire référence à ce principe pour dautres sujets que lenvironnement. Je veux le dire très clairement : dans les domaines de la santé et de la sécurité alimentaire comme dans lenvironnement, des situations de grande incertitude scientifique peuvent se produire et nous conduire à craindre des conséquences graves. Il est vrai aussi quil existe des liens entre les différents domaines. Anny POURSINOFF, notamment, a évoqué les liens existant entre la santé et lenvironnement. Cest pourquoi je comprends parfaitement les raisons qui vous ont conduits à poser la question de lextension du processus à ces champs.
Cela étant, il ne faut pas méconnaître les implications juridiques et singulièrement constitutionnelles quentraînerait une telle évolution.
Il sera sans doute nécessaire douvrir ce débat, mais il sagira dun débat constitutionnel. Il serait à lévidence prématuré de prétendre le trancher aujourdhui, dans le cadre de la discussion de cette proposition de résolution, et ce avant même quil nait lieu ! Je doute que le moment comme le texte soient adéquats.
Je vois, en tout cas, dans cette volonté dextension du principe de précaution le signe indubitable quun pas essentiel a été franchi dans lappropriation de ce principe par la représentation nationale, et je tenais à vous dire à quel point je men réjouis. Cest avec émotion que je me souviens des débats très vifs qui ont accompagné lentrée du principe de précaution dans la Constitution.
Je donnerai donc, au nom du Gouvernement, un avis favorable à cette proposition de résolution.Source http://www.developpement-durable.gouv.fr, le 7 février 2012