Texte intégral
Monsieur le Président,
Monsieur le Président de la Commission des Lois,
Monsieur le rapporteur,
Mesdames et Messieurs les députés,
Le projet de loi que jai lhonneur de présenter aujourdhui devant votre assemblée est le prolongement dun accord syndical qui vise à lutter contre la précarité dans la Fonction publique.
Une forme de précarité qui est souvent méconnue de nos concitoyens mais qui est dautant plus inacceptable quelle prend racine au coeur même de la République, cest-à-dire dans nos services publics, dans nos administrations, dans nos collectivités et dans nos hôpitaux.
Cette précarité frappe aujourdhui plusieurs dizaines de milliers dagents de la Fonction publique. Des agents employés avec des CDD renouvelés depuis des années, parfois près de 10 ans, sur des emplois correspondant pourtant à un besoin permanent du service public, et le plus souvent sans aucune garantie pour leur avenir.
Cette situation nest pas nouvelle, mais elle nest acceptable. Depuis 1946, ce sont ainsi 16 plans de titularisations qui se sont succédés avec au final toujours la même incapacité à endiguer, sur le long terme, la multiplication des emplois précaires dans la Fonction publique.
Avec ce projet de loi, il sagit, pour la première fois, de mettre un terme durable à ce phénomène, en répondant à la précarité daujourdhui tout en posant des règles pour empêcher quelle ne fasse demain son retour dans nos services publics.
Avant dentrer dans le détail des mesures je veux cependant préciser très clairement que tous les agents contractuels de la Fonction publique ne sont pas confrontés à des situations de précarité.
A lheure actuelle, les agents non-titulaires sont près de 900 000, soit un peu moins de 17 % de lensemble des effectifs de la Fonction publique. Pour une large part, ces emplois correspondent à des emplois temporaires de ladministration, des remplacements, de surcroits de travail, de missions ponctuelles et nous avons besoin de ces contrats à durée déterminée.
Je veux être clair, il ne sagit pas, avec ce texte, de remettre en cause la place du contrat dans la Fonction publique. Nous devrons, demain comme hier, avoir la possibilité de recourir à des agents contractuels pour répondre à des besoins temporaires, des surcharges de travail ponctuelles, des vacances demplois, des remplacements dagents absents ou encore à des besoins spécifiques. Ce que nous ne pouvons cependant plus accepter, cest un système qui a conduit sur des emplois permanents des dizaines de milliers de personnes à rester en CDD, depuis parfois plus dune dizaine dannées.
Cest le sens, Mesdames et Messieurs les députés, des engagements pris en janvier 2010, par le Président de la République, des engagements réaffirmés il y a quelques jours à Lille lors de ses voeux à la Fonction publique. LEtat ne peut sexonérer, lorsquil est employeur, des règles quil veut faire respecter à dautres. LEtat se doit dêtre exemplaire, et dans une période de crise telle que celle que nous traversons, il lui appartient en réalité de montrer la voie.
Dès 2010, le Gouvernement a engagé, sur cette question des emplois précaires, une négociation avec les partenaires sociaux.
Au cours de ces négociations, nous avons recherché avec les organisations syndicales une ligne de partage pour faire coïncider respect du statut de la Fonction publique et lutte contre la précarité.
Ce nétait pas un exercice facile mais le souci du compromis et la volonté davancer nous ont permis de conduire une négociation que je veux qualifier dexemplaire, qui sest inscrite pleinement dans le nouveau cadre du dialogue social dans la Fonction publique depuis lentrée en vigueur de la loi du 5 juillet 2010 portant rénovation du dialogue social dans la Fonction publique.
Ce cycle de négociation sest conclu par un protocole daccord le 31 mars 2011. Ce texte a été signé par 6 organisations syndicales représentatives sur 8 et je voudrai, devant vous, Mesdames et Messieurs les députés, saluer une nouvelle fois lesprit de responsabilité dont ces organisations ont fait preuve tout au long de ces discussions.
Il nous appartient désormais de traduire cet accord dans la loi de la République.
En clair, les employeurs publics seront tenus daccorder un CDI aux agents en CDD, dès lors quils auront exercé pendant une durée minimale de 6 ans sur les 8 dernières années sur des emplois permanents.
Cette mesure pourrait concerner 100 000 personnes. Et cest là la nouveauté, il ne sagit pas dun plan de titularisation mais bien dun plan de lutte contre la précarité. Ce sera un passage automatique et cela règlera durablement la situation.
Par ailleurs, laccord prévoit une possibilité de valorisation des acquis de lexpérience en ouvrant aux agents contractuels, en CDD ou en CDI, des voies daccès spécifiques à lemploi titulaire. Ce sera un dispositif limité dans le temps, pendant une durée de quatre ans à compter de la publication de la loi. Ces voies spécifiques pourront être ouvertes aux contractuels en CDI et aux agents en CDD ayant eu une durée de service totale de quatre ans sur une période de six années consécutives sur un emploi répondant à un besoin permanent. Je précise que cest une possibilité. Jajouterai pour être complet que sur ma proposition le Sénat a étendu les effets de cette disposition aux agents qui sont recrutés par contrats à durée déterminée de 10 mois sur 12 consécutifs, à linstar des professeurs contractuels de lEducation nationale. Même dispositif, au-delà de six ans, passage en CDI.
Mais, je vous lai dit, la grande nouveauté du texte, cest que le passage du CDI règlera la situation des personnes actuellement en CDD, mais aussi de ceux qui se trouveront à lavenir dans cette situation.
Parallèlement, le Gouvernement a souhaité aussi harmoniser les conditions de recours à des agents contractuels. Les procédures de recrutement seront davantage formalisées et la durée maximale des contrats pour besoin temporaire sera précisée.
Enfin, le Gouvernement entend, par voie règlementaire, améliorer également la situation de lensemble des agents contractuels. Ils auront désormais accès aux dispositifs de formation professionnelle. Ceux qui sont recrutés sur des besoins permanents puissent bénéficier dun entretien professionnel annuel. Enfin, et conformément à lesprit de la loi du 5 juillet 2010, les agents contractuels bénéficieront désormais dune garantie de représentation au sein de nos différentes instances de concertation.
Jajouterai que cette garantie a dailleurs été mise en pratique lors des élections professionnelles du 20 octobre dernier, où, pour la première fois, les agents non-titulaires ont participé à la désignation de leurs instances. Le Sénat a souhaité quà linstar de la fonction publique de lEtat, la fonction publique territoriale se dote de commissions consultatives paritaires, distinctes des commissions administratives paritaires, pour examiner les situations individuelles des contractuels. Cest une avancée importante.
Telles sont, Mesdames et Messieurs les députés, les grandes lignes de cet accord. Conformément aux engagements que le Gouvernement a pris en direction des organisations signataires, je souhaite que nos débats ne conduisent pas à dénaturer le contenu de cet accord.
Jen viens à présent aux autres questions traitées par ce projet de loi et dabord à celle de la lutte contre les discriminations. Ma conviction, Mesdames et Messieurs les députés, cest que pour que son action soit comprise et respect??e de tous, la Fonction publique se doit dêtre à limage de la population quelle sert.
Ma conviction, cest que dans la lutte contre les discriminations, la Fonction publique se doit dêtre exemplaire.
Au cours des dernières années, nous avons ouvert les portes de nos administrations à la diversité tant sociale que géographique de la population française en créant dans la plupart des écoles du service public, des classes préparatoires intégrées. Jai eu loccasion de saluer voici quelques semaines le premier élève dune CPI à avoir réussi le concours de lEcole nationale dAdministration. Cest à mes yeux une parfaite illustration du succès qui est aujourdhui celui de lensemble des classes préparatoires intégrées.
Conformément aux engagements pris par le Président de la République voici 3 ans à Palaiseau, la diversité est à présent en marche dans la Fonction publique, de même que la place des travailleurs handicapés avec un taux demploi à léchelle de lensemble de la Fonction publique passé je veux le rappeler de 3,99 % en 2009 à 4,21 % en 2010.
Cest, Mesdames et Messieurs les députés, à laune de ces succès quil nous appartient désormais de répondre à une autre forme de discrimination tout aussi choquante, je veux parler cette fois du rôle et de la place faite aux femmes dans nos administrations.
Sur ce point le constat est aujourdhui sans appel, si les femmes représentent 60 % des effectifs de la Fonction publique, elles restent encore extrêmement minoritaires, de lordre de 10 %, en ce qui concerne les emplois de direction.
Face à ces chiffres, nous avons un cap, cest parvenir à légal accès des femmes et des hommes aux postes à responsabilité dans la Fonction publique. Cette égalité, cest une égalité qui nest pas simplement théorique mais bien une égalité à la fois concrète et active, qui se vérifie tant sur les organigrammes que sur les fiches de paie.
A limage de ce qui a été réalisé ces dernières années en matière dégalité professionnelle dans le secteur privé, avec notamment ladoption de la loi dite COPE-ZIMMERMANN, lheure doit désormais être aux actes dans la Fonction publique.
Lenjeu de ce débat, cest bien, Mesdames et Messieurs les députés, de briser ce fameux plafond de verre qui empêche encore des femmes daccéder aux plus hautes responsabilités. Depuis plusieurs mois, jai souhaité ouvrir sur cette question une négociation avec les organisations syndicales et les représentants des employeurs, et lheure me semble désormais venue pour des mesures fortes.
Nos débats en Commission ont été loccasion dadopter une première série de dispositions ambitieuses, et je veux saluer ici le travail réalisé notamment par Marie-Jo ZIMMERMANN dans sa fonction de Présidente de la Délégation aux droits des Femmes de votre assemblée, ainsi que par Françoise GUEGOT, dans le prolongement du rapport sur légalité professionnelle dans la Fonction publique quelle avait, en mars dernier, remis au Président de la République.
Ces dispositions permettront daccroître la présence des femmes dans toutes les instances de dialogue social de la fonction publique et dans les jurys de concours, mais aussi dans les conseils dadministration des établissements publics.
Comme je my étais engagé devant la Commission des Lois, je présenterai devant votre assemblée un amendement visant à instituer des quotas de femmes dans les flux de nominations aux plus hautes fonctions du service public. Conformément à la logique qui avait été retenue par le législateur pour le secteur privé dans le cadre de la loi COPE-ZIMMERMANN, ces quotas interviendraient dans un cadre permettant une certaine souplesse, puisquils sélèveront progressivement dans le temps, soit dici 2018, jusquà parvenir à un taux dau moins 40 % de chaque sexe sur les flux de nominations.
Jentends bien les réserves que peut susciter une telle mesure, mais si les quotas ne constituent pas la panacée ils demeurent à ce jour le seul moyen de faire réellement changer les choses. Cest de cela que nous avons besoin aujourdhui et notre débat sera loccasion dy revenir plus en détails.
Je veux à présent évoquer plusieurs questions soulevées par ce projet de loi.
Jaborderai tout dabord une question qui ne figure pas dans ce projet de loi mais sur laquelle je connais vos attentes, celle du classement de sortie de lEcole nationale dAdministration. Sur ce point, le Gouvernement a fait le choix dune solution concertée. Jai réuni une Commission de réflexion et chacun a convenu que nous ne pouvions pas en rester au statu quo c'est-à-dire au système transitoire que nous connaissons aujourdhui. Nous interviendrons par décret. Lidée cest que le classement de sortie, dont beaucoup ne veulent pas la suppression, ne soit pas le préalable à laffectation mais quil intervienne après un entretien professionnalisé entre élève et futurs employeurs, qui vaudra pour lensemble des élèves et pas simplement pour les administrateurs civils comme cest le cas aujourdhui. Cela concernera donc les grand corps comme les ministères. Enfin, le rôle de la Commission de suivi sera conforté.
Il y aura donc bien une évolution, et cest ce que je souhaitais.
Le deuxième sujet que je souhaite évoquer touche aux modifications que ce texte apporte à la loi du 3 août 2009, relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la Fonction publique. Cest là un sujet qui me tient particulièrement à coeur car il importe à mes yeux que nous donnions à chaque agent de la Fonction publique la possibilité de construire un parcours professionnel, sur la base de ses compétences, et quil puisse bénéficier dune carrière conforme à ses attentes et à celles aussi du service public. Les dispositions introduites par ce texte permettront ainsi de faciliter les mobilités au sein de chaque Fonction publique mais aussi entre elles.
Sujet très important également, celui des droits et moyens syndicaux. Jai souhaité que nous puissions régler la question des moyens mis à disposition du dialogue social sur la base du résultat des élections professionnelles, cest à dire sur la base de la représentativité. Aucun gouvernement ne sétait attaqué à ce problème depuis 30 ans. Nous sommes parvenus à un relevé de conclusions avec les organisations syndicales le 29 septembre dernier.
Il fixe le principe « à périmètre constant, moyens constants », il fixe également le principe dune véritable transparence sur la mise à disposition et lutilisation de ces moyens, dès le premier équivalent temps plein.
Cette réforme, à laquelle je tenais tout particulièrement, sera appliquée par voie réglementaire dans la Fonction publique dEtat et dans la Fonction publique hospitalière mais elle nécessite une intervention législative en ce qui concerne la Fonction publique territoriale, laquelle figure désormais dans le texte adopté par le Sénat.
Cest une étape très importante de la rénovation du dialogue social qui a été engagée en application des Accords de Bercy de juin 2008 et de la loi du 5 juillet 2010.
Sagissant du chapitre sur les juridictions administratives et financières, jai noté au Sénat, une vraie inflation de cette partie, passée de 6 à 17 articles. Votre Commission des Lois a souhaité ajouter dautres dispositions.
Comme je lai déjà indiqué, bien évidemment, ces juridictions doivent évoluer, et nombre des dispositions déjà adoptées ont sans doute leur utilité, mais ne perdons pas de vue la finalité première du projet de loi. Je resterai toutefois ouvert aux propositions de votre Commission des Lois.
Par ailleurs, ce texte contient également plusieurs dispositions concernant la réforme de lencadrement supérieur de la Fonction publique territoriale, des dispositions qui sont là encore très attendues puisquelles répondent à des propositions formulées voici déjà plus de deux ans par le Conseil supérieur de la Fonction publique territoriale, à linitiative de son nouveau président, M. Philippe LAURENT.
Sur ce dossier, notre objectif a été double :
- Assurer une transposition harmonieuse de la réforme de lencadrement supérieur de la fonction publique territoriale telle quelle a été mise en oeuvre dans la fonction publique de lEtat. Cest une attente forte, y compris des employeurs.
- Et dautre part, garantir la cohérence densemble des carrières et des emplois dans la fonction publique territoriale.
Une modernisation similaire est également en cours et interviendra par voie réglementaire dans la Fonction publique hospitalière.
Enfin, en ce qui concerne les centres de gestion, jai réuni ce matin, comme je my étais engagé au Sénat, un groupe de travail destiné à rechercher les voies de la convergence sur la question notamment de la possibilité dune adhésion volontaire des collectivités non affiliées à un bloc indivisible de compétences. Grace aux apports de chacun, je veux spécialement remercier MM. Jacques-Alain BENISTI et Bernard DEROSIER, un consensus a pu être trouvé à partir des propositions qui avaient été formulées au Sénat tant par le groupe UMP que par le groupe PS et je vous présenterai donc plusieurs amendements qui permettront à lAssemblée nationale dacter les termes de cet accord.
Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi, constitue une réelle avancée, au service de la modernisation de la Fonction publique. La société change, les besoins évoluent, la recherche de lefficience sera inscrite durablement dans le management et donc la Fonction publique doit changer, doit évoluer pour répondre aux nouvelles attentes et garantir la cohésion sociale et territoriale.
Rarement autant daccords auront été conclus quau cours des 5 dernières années. Je veux rappeler le relevé de conclusions de février 2008 sur la politique salariale, les accords de Bercy de juin 2008 sur le dialogue social et laccord sur la santé et la sécurité au travail de novembre 2009. 4 accords en 5 ans, cest la preuve dun dialogue social à la fois volontariste et responsable, celle aussi dune démocratie sociale vivante et moderne.
Lannée 2011 restera marquée par les élections professionnelles du 20 octobre dernier dans la Fonction publique dEtat et la Fonction publique hospitalière, élections qui fondent désormais la représentativité.
Le dialogue social sappuie désormais sur la légitimité démocratique issue de ces élections. Il sappuie désormais sur une véritable transparence en ce qui concerne les moyens alloués aux organisations syndicales. Il sappuie aussi sur une nouvelle architecture institutionnelle avec dorénavant trois conseils supérieurs Etat, territoriale et hospitalière, profondément rénovés, et sur un conseil commun, que jai installé le 31 janvier 2012 pour évoquer les problématiques transversales, je souhaite en faire un outil de modernisation de la Fonction publique.
Travailler avec les fonctionnaires, au service du public, cest le sens de ce projet de loi. Il sagit pour lEtat et lensemble des collectivités publiques de France, dassumer un devoir dexemplarité qui doit inspirer tous les employeurs publics. Cest donc un signal fort, de responsabilité et de justice sociale que le Gouvernement vous propose aujourdhui dadresser à tous ceux qui, fonctionnaires ou non, ont fait le choix de sengager au service de leurs concitoyens et de lintérêt général.
Je vous remercie.
Source http://www.fonction-publique.gouv.fr, le 13 février 2012
Monsieur le Président de la Commission des Lois,
Monsieur le rapporteur,
Mesdames et Messieurs les députés,
Le projet de loi que jai lhonneur de présenter aujourdhui devant votre assemblée est le prolongement dun accord syndical qui vise à lutter contre la précarité dans la Fonction publique.
Une forme de précarité qui est souvent méconnue de nos concitoyens mais qui est dautant plus inacceptable quelle prend racine au coeur même de la République, cest-à-dire dans nos services publics, dans nos administrations, dans nos collectivités et dans nos hôpitaux.
Cette précarité frappe aujourdhui plusieurs dizaines de milliers dagents de la Fonction publique. Des agents employés avec des CDD renouvelés depuis des années, parfois près de 10 ans, sur des emplois correspondant pourtant à un besoin permanent du service public, et le plus souvent sans aucune garantie pour leur avenir.
Cette situation nest pas nouvelle, mais elle nest acceptable. Depuis 1946, ce sont ainsi 16 plans de titularisations qui se sont succédés avec au final toujours la même incapacité à endiguer, sur le long terme, la multiplication des emplois précaires dans la Fonction publique.
Avec ce projet de loi, il sagit, pour la première fois, de mettre un terme durable à ce phénomène, en répondant à la précarité daujourdhui tout en posant des règles pour empêcher quelle ne fasse demain son retour dans nos services publics.
Avant dentrer dans le détail des mesures je veux cependant préciser très clairement que tous les agents contractuels de la Fonction publique ne sont pas confrontés à des situations de précarité.
A lheure actuelle, les agents non-titulaires sont près de 900 000, soit un peu moins de 17 % de lensemble des effectifs de la Fonction publique. Pour une large part, ces emplois correspondent à des emplois temporaires de ladministration, des remplacements, de surcroits de travail, de missions ponctuelles et nous avons besoin de ces contrats à durée déterminée.
Je veux être clair, il ne sagit pas, avec ce texte, de remettre en cause la place du contrat dans la Fonction publique. Nous devrons, demain comme hier, avoir la possibilité de recourir à des agents contractuels pour répondre à des besoins temporaires, des surcharges de travail ponctuelles, des vacances demplois, des remplacements dagents absents ou encore à des besoins spécifiques. Ce que nous ne pouvons cependant plus accepter, cest un système qui a conduit sur des emplois permanents des dizaines de milliers de personnes à rester en CDD, depuis parfois plus dune dizaine dannées.
Cest le sens, Mesdames et Messieurs les députés, des engagements pris en janvier 2010, par le Président de la République, des engagements réaffirmés il y a quelques jours à Lille lors de ses voeux à la Fonction publique. LEtat ne peut sexonérer, lorsquil est employeur, des règles quil veut faire respecter à dautres. LEtat se doit dêtre exemplaire, et dans une période de crise telle que celle que nous traversons, il lui appartient en réalité de montrer la voie.
Dès 2010, le Gouvernement a engagé, sur cette question des emplois précaires, une négociation avec les partenaires sociaux.
Au cours de ces négociations, nous avons recherché avec les organisations syndicales une ligne de partage pour faire coïncider respect du statut de la Fonction publique et lutte contre la précarité.
Ce nétait pas un exercice facile mais le souci du compromis et la volonté davancer nous ont permis de conduire une négociation que je veux qualifier dexemplaire, qui sest inscrite pleinement dans le nouveau cadre du dialogue social dans la Fonction publique depuis lentrée en vigueur de la loi du 5 juillet 2010 portant rénovation du dialogue social dans la Fonction publique.
Ce cycle de négociation sest conclu par un protocole daccord le 31 mars 2011. Ce texte a été signé par 6 organisations syndicales représentatives sur 8 et je voudrai, devant vous, Mesdames et Messieurs les députés, saluer une nouvelle fois lesprit de responsabilité dont ces organisations ont fait preuve tout au long de ces discussions.
Il nous appartient désormais de traduire cet accord dans la loi de la République.
En clair, les employeurs publics seront tenus daccorder un CDI aux agents en CDD, dès lors quils auront exercé pendant une durée minimale de 6 ans sur les 8 dernières années sur des emplois permanents.
Cette mesure pourrait concerner 100 000 personnes. Et cest là la nouveauté, il ne sagit pas dun plan de titularisation mais bien dun plan de lutte contre la précarité. Ce sera un passage automatique et cela règlera durablement la situation.
Par ailleurs, laccord prévoit une possibilité de valorisation des acquis de lexpérience en ouvrant aux agents contractuels, en CDD ou en CDI, des voies daccès spécifiques à lemploi titulaire. Ce sera un dispositif limité dans le temps, pendant une durée de quatre ans à compter de la publication de la loi. Ces voies spécifiques pourront être ouvertes aux contractuels en CDI et aux agents en CDD ayant eu une durée de service totale de quatre ans sur une période de six années consécutives sur un emploi répondant à un besoin permanent. Je précise que cest une possibilité. Jajouterai pour être complet que sur ma proposition le Sénat a étendu les effets de cette disposition aux agents qui sont recrutés par contrats à durée déterminée de 10 mois sur 12 consécutifs, à linstar des professeurs contractuels de lEducation nationale. Même dispositif, au-delà de six ans, passage en CDI.
Mais, je vous lai dit, la grande nouveauté du texte, cest que le passage du CDI règlera la situation des personnes actuellement en CDD, mais aussi de ceux qui se trouveront à lavenir dans cette situation.
Parallèlement, le Gouvernement a souhaité aussi harmoniser les conditions de recours à des agents contractuels. Les procédures de recrutement seront davantage formalisées et la durée maximale des contrats pour besoin temporaire sera précisée.
Enfin, le Gouvernement entend, par voie règlementaire, améliorer également la situation de lensemble des agents contractuels. Ils auront désormais accès aux dispositifs de formation professionnelle. Ceux qui sont recrutés sur des besoins permanents puissent bénéficier dun entretien professionnel annuel. Enfin, et conformément à lesprit de la loi du 5 juillet 2010, les agents contractuels bénéficieront désormais dune garantie de représentation au sein de nos différentes instances de concertation.
Jajouterai que cette garantie a dailleurs été mise en pratique lors des élections professionnelles du 20 octobre dernier, où, pour la première fois, les agents non-titulaires ont participé à la désignation de leurs instances. Le Sénat a souhaité quà linstar de la fonction publique de lEtat, la fonction publique territoriale se dote de commissions consultatives paritaires, distinctes des commissions administratives paritaires, pour examiner les situations individuelles des contractuels. Cest une avancée importante.
Telles sont, Mesdames et Messieurs les députés, les grandes lignes de cet accord. Conformément aux engagements que le Gouvernement a pris en direction des organisations signataires, je souhaite que nos débats ne conduisent pas à dénaturer le contenu de cet accord.
Jen viens à présent aux autres questions traitées par ce projet de loi et dabord à celle de la lutte contre les discriminations. Ma conviction, Mesdames et Messieurs les députés, cest que pour que son action soit comprise et respect??e de tous, la Fonction publique se doit dêtre à limage de la population quelle sert.
Ma conviction, cest que dans la lutte contre les discriminations, la Fonction publique se doit dêtre exemplaire.
Au cours des dernières années, nous avons ouvert les portes de nos administrations à la diversité tant sociale que géographique de la population française en créant dans la plupart des écoles du service public, des classes préparatoires intégrées. Jai eu loccasion de saluer voici quelques semaines le premier élève dune CPI à avoir réussi le concours de lEcole nationale dAdministration. Cest à mes yeux une parfaite illustration du succès qui est aujourdhui celui de lensemble des classes préparatoires intégrées.
Conformément aux engagements pris par le Président de la République voici 3 ans à Palaiseau, la diversité est à présent en marche dans la Fonction publique, de même que la place des travailleurs handicapés avec un taux demploi à léchelle de lensemble de la Fonction publique passé je veux le rappeler de 3,99 % en 2009 à 4,21 % en 2010.
Cest, Mesdames et Messieurs les députés, à laune de ces succès quil nous appartient désormais de répondre à une autre forme de discrimination tout aussi choquante, je veux parler cette fois du rôle et de la place faite aux femmes dans nos administrations.
Sur ce point le constat est aujourdhui sans appel, si les femmes représentent 60 % des effectifs de la Fonction publique, elles restent encore extrêmement minoritaires, de lordre de 10 %, en ce qui concerne les emplois de direction.
Face à ces chiffres, nous avons un cap, cest parvenir à légal accès des femmes et des hommes aux postes à responsabilité dans la Fonction publique. Cette égalité, cest une égalité qui nest pas simplement théorique mais bien une égalité à la fois concrète et active, qui se vérifie tant sur les organigrammes que sur les fiches de paie.
A limage de ce qui a été réalisé ces dernières années en matière dégalité professionnelle dans le secteur privé, avec notamment ladoption de la loi dite COPE-ZIMMERMANN, lheure doit désormais être aux actes dans la Fonction publique.
Lenjeu de ce débat, cest bien, Mesdames et Messieurs les députés, de briser ce fameux plafond de verre qui empêche encore des femmes daccéder aux plus hautes responsabilités. Depuis plusieurs mois, jai souhaité ouvrir sur cette question une négociation avec les organisations syndicales et les représentants des employeurs, et lheure me semble désormais venue pour des mesures fortes.
Nos débats en Commission ont été loccasion dadopter une première série de dispositions ambitieuses, et je veux saluer ici le travail réalisé notamment par Marie-Jo ZIMMERMANN dans sa fonction de Présidente de la Délégation aux droits des Femmes de votre assemblée, ainsi que par Françoise GUEGOT, dans le prolongement du rapport sur légalité professionnelle dans la Fonction publique quelle avait, en mars dernier, remis au Président de la République.
Ces dispositions permettront daccroître la présence des femmes dans toutes les instances de dialogue social de la fonction publique et dans les jurys de concours, mais aussi dans les conseils dadministration des établissements publics.
Comme je my étais engagé devant la Commission des Lois, je présenterai devant votre assemblée un amendement visant à instituer des quotas de femmes dans les flux de nominations aux plus hautes fonctions du service public. Conformément à la logique qui avait été retenue par le législateur pour le secteur privé dans le cadre de la loi COPE-ZIMMERMANN, ces quotas interviendraient dans un cadre permettant une certaine souplesse, puisquils sélèveront progressivement dans le temps, soit dici 2018, jusquà parvenir à un taux dau moins 40 % de chaque sexe sur les flux de nominations.
Jentends bien les réserves que peut susciter une telle mesure, mais si les quotas ne constituent pas la panacée ils demeurent à ce jour le seul moyen de faire réellement changer les choses. Cest de cela que nous avons besoin aujourdhui et notre débat sera loccasion dy revenir plus en détails.
Je veux à présent évoquer plusieurs questions soulevées par ce projet de loi.
Jaborderai tout dabord une question qui ne figure pas dans ce projet de loi mais sur laquelle je connais vos attentes, celle du classement de sortie de lEcole nationale dAdministration. Sur ce point, le Gouvernement a fait le choix dune solution concertée. Jai réuni une Commission de réflexion et chacun a convenu que nous ne pouvions pas en rester au statu quo c'est-à-dire au système transitoire que nous connaissons aujourdhui. Nous interviendrons par décret. Lidée cest que le classement de sortie, dont beaucoup ne veulent pas la suppression, ne soit pas le préalable à laffectation mais quil intervienne après un entretien professionnalisé entre élève et futurs employeurs, qui vaudra pour lensemble des élèves et pas simplement pour les administrateurs civils comme cest le cas aujourdhui. Cela concernera donc les grand corps comme les ministères. Enfin, le rôle de la Commission de suivi sera conforté.
Il y aura donc bien une évolution, et cest ce que je souhaitais.
Le deuxième sujet que je souhaite évoquer touche aux modifications que ce texte apporte à la loi du 3 août 2009, relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la Fonction publique. Cest là un sujet qui me tient particulièrement à coeur car il importe à mes yeux que nous donnions à chaque agent de la Fonction publique la possibilité de construire un parcours professionnel, sur la base de ses compétences, et quil puisse bénéficier dune carrière conforme à ses attentes et à celles aussi du service public. Les dispositions introduites par ce texte permettront ainsi de faciliter les mobilités au sein de chaque Fonction publique mais aussi entre elles.
Sujet très important également, celui des droits et moyens syndicaux. Jai souhaité que nous puissions régler la question des moyens mis à disposition du dialogue social sur la base du résultat des élections professionnelles, cest à dire sur la base de la représentativité. Aucun gouvernement ne sétait attaqué à ce problème depuis 30 ans. Nous sommes parvenus à un relevé de conclusions avec les organisations syndicales le 29 septembre dernier.
Il fixe le principe « à périmètre constant, moyens constants », il fixe également le principe dune véritable transparence sur la mise à disposition et lutilisation de ces moyens, dès le premier équivalent temps plein.
Cette réforme, à laquelle je tenais tout particulièrement, sera appliquée par voie réglementaire dans la Fonction publique dEtat et dans la Fonction publique hospitalière mais elle nécessite une intervention législative en ce qui concerne la Fonction publique territoriale, laquelle figure désormais dans le texte adopté par le Sénat.
Cest une étape très importante de la rénovation du dialogue social qui a été engagée en application des Accords de Bercy de juin 2008 et de la loi du 5 juillet 2010.
Sagissant du chapitre sur les juridictions administratives et financières, jai noté au Sénat, une vraie inflation de cette partie, passée de 6 à 17 articles. Votre Commission des Lois a souhaité ajouter dautres dispositions.
Comme je lai déjà indiqué, bien évidemment, ces juridictions doivent évoluer, et nombre des dispositions déjà adoptées ont sans doute leur utilité, mais ne perdons pas de vue la finalité première du projet de loi. Je resterai toutefois ouvert aux propositions de votre Commission des Lois.
Par ailleurs, ce texte contient également plusieurs dispositions concernant la réforme de lencadrement supérieur de la Fonction publique territoriale, des dispositions qui sont là encore très attendues puisquelles répondent à des propositions formulées voici déjà plus de deux ans par le Conseil supérieur de la Fonction publique territoriale, à linitiative de son nouveau président, M. Philippe LAURENT.
Sur ce dossier, notre objectif a été double :
- Assurer une transposition harmonieuse de la réforme de lencadrement supérieur de la fonction publique territoriale telle quelle a été mise en oeuvre dans la fonction publique de lEtat. Cest une attente forte, y compris des employeurs.
- Et dautre part, garantir la cohérence densemble des carrières et des emplois dans la fonction publique territoriale.
Une modernisation similaire est également en cours et interviendra par voie réglementaire dans la Fonction publique hospitalière.
Enfin, en ce qui concerne les centres de gestion, jai réuni ce matin, comme je my étais engagé au Sénat, un groupe de travail destiné à rechercher les voies de la convergence sur la question notamment de la possibilité dune adhésion volontaire des collectivités non affiliées à un bloc indivisible de compétences. Grace aux apports de chacun, je veux spécialement remercier MM. Jacques-Alain BENISTI et Bernard DEROSIER, un consensus a pu être trouvé à partir des propositions qui avaient été formulées au Sénat tant par le groupe UMP que par le groupe PS et je vous présenterai donc plusieurs amendements qui permettront à lAssemblée nationale dacter les termes de cet accord.
Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi, constitue une réelle avancée, au service de la modernisation de la Fonction publique. La société change, les besoins évoluent, la recherche de lefficience sera inscrite durablement dans le management et donc la Fonction publique doit changer, doit évoluer pour répondre aux nouvelles attentes et garantir la cohésion sociale et territoriale.
Rarement autant daccords auront été conclus quau cours des 5 dernières années. Je veux rappeler le relevé de conclusions de février 2008 sur la politique salariale, les accords de Bercy de juin 2008 sur le dialogue social et laccord sur la santé et la sécurité au travail de novembre 2009. 4 accords en 5 ans, cest la preuve dun dialogue social à la fois volontariste et responsable, celle aussi dune démocratie sociale vivante et moderne.
Lannée 2011 restera marquée par les élections professionnelles du 20 octobre dernier dans la Fonction publique dEtat et la Fonction publique hospitalière, élections qui fondent désormais la représentativité.
Le dialogue social sappuie désormais sur la légitimité démocratique issue de ces élections. Il sappuie désormais sur une véritable transparence en ce qui concerne les moyens alloués aux organisations syndicales. Il sappuie aussi sur une nouvelle architecture institutionnelle avec dorénavant trois conseils supérieurs Etat, territoriale et hospitalière, profondément rénovés, et sur un conseil commun, que jai installé le 31 janvier 2012 pour évoquer les problématiques transversales, je souhaite en faire un outil de modernisation de la Fonction publique.
Travailler avec les fonctionnaires, au service du public, cest le sens de ce projet de loi. Il sagit pour lEtat et lensemble des collectivités publiques de France, dassumer un devoir dexemplarité qui doit inspirer tous les employeurs publics. Cest donc un signal fort, de responsabilité et de justice sociale que le Gouvernement vous propose aujourdhui dadresser à tous ceux qui, fonctionnaires ou non, ont fait le choix de sengager au service de leurs concitoyens et de lintérêt général.
Je vous remercie.
Source http://www.fonction-publique.gouv.fr, le 13 février 2012