Déclaration de M. François Fillon, Premier ministre, sur le rôle des PME dans la réindustrialisation, les différents dispositifs en faveur du développement des PME et des entreprises de taille intermédiaire et le développement de l'alternance et de la sécurisation des parcours professionnels, à Raon-l'Etape le 24 février 2012

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Circonstance : Déplacement à Raon-l'Etape (Vosges) le 24 février 2012, sur le thème des "PME au service du développement des territoires"

Texte intégral

Je voudrais d’abord, Monsieur le maire, vous remercier de votre accueil, vous remercier de me permettre de découvrir Raon-l’Étape et vous remercier de l’accueil républicain que vous m’avez réservé, qui était à la fois républicain et chaleureux !
Je crois que notre pays a besoin comme ça de plus de sérénité parfois et plus de capacité pour les uns et pour les autres à se parler. En venant jusqu’à cette salle, nous évoquions que Raon-l’Étape était la commune d’origine d’Alain Devaquet. Donc je suis heureux de saluer Alain Devaquet ici. On se souvient d’Alain Devaquet parce qu’il a vécu des moments difficiles à l’occasion d’une réforme de l’université qui d’ailleurs a fini par voir le jour, mais beaucoup de gens ignorent que c’est surtout un grand scientifique et qui, notamment, a joué un rôle très important dans le développement du programme spatial français et qui m’avait aidé en 1995, après l’accident d’Ariane 5, à sauver ce programme qui était à l’époque compromis.
Je voudrais remercier Gérard Cherpion qui eu la bonne idée de me proposer ce déplacement autour de cette question des PME et de leur développement. Je connais Gérard Cherpion depuis bien longtemps, je sais la solidité, la loyauté et la générosité de son engagement politique.
Je veux saluer les parlementaires ici présents avec lesquels j’ai eu l’honneur de servir notre pays durant cinq années. Cinq années dont quatre années de crise durant lesquelles nous avons dû à la fois – ce qui est rare dans l’histoire de notre pays – réformer et, en même temps, protéger nos concitoyens.
Michel Heinrich, François Vannson, Jean-Jacques Gaultier, Jackie Pierre, sans oublier Christian Poncelet qui préside votre département : tous ont fait preuve de courage, de sang-froid face aux coups de boutoir sans précédent dans notre Histoire récente de cette double crise financière que nous avons dû affronter.
En venant vers vous tout à l'heure, j’avais évidemment une pensée pour Philippe Séguin. Son exigence intellectuelle et morale, son caractère manquent aujourd'hui à notre pays, comme sa présence me manque à moi-même et sûrement à beaucoup d’entre nous.
En cette période électorale, chacun développe son idée de la France, et, le moment venu, il appartiendra aux électeurs de faire leur choix. Mais quel que soit ce choix, je veux vous convaincre que l’avenir ne se décide pas seulement au sommet de l’État.
Beaucoup dépend d’abord de la force d’âme de notre pays.
Beaucoup dépend de sa créativité, de sa combativité, c’est-à-dire de la créativité et de la combativité de chacun de nos concitoyens.
Beaucoup dépend de sa capacité à assumer les réalités d’un monde difficile au sein duquel il est impossible d’exiger toujours plus pour tous et à n’importe quel prix.
Beaucoup dépend de son civisme, c'est-à-dire de cette aptitude qui doit être la nôtre à user de nos droits sans jamais oublier les devoirs que nous avons à l’égard de notre patrie.
Tout ceci nous ramène vers la République. Comment, dans les Vosges, sur cette terre lorraine, ne pas parler de la République ? La République, ce n’est pas seulement un régime politique.
La République, c’est d’abord un état d’esprit. La République fait de chacun de nous des citoyens et la citoyenneté commande d’offrir à la France autant que l’on reçoit d’elle.
Dans un monde qui compte aujourd'hui plus de sept milliards d’habitants, bientôt neuf, des habitants du monde qui sont – et comment pourrait-on le leur reprocher ? – assoiffés de progrès, assoiffés de conquêtes économiques.
Nous sommes soixante-cinq millions. Soixante-cinq millions de Français qui doivent faire bloc et qui doivent se retrousser les manches pour permettre de défendre leur valeur, leur mode de vie, cette liberté si chèrement acquise au cours des siècles par nos ancêtres.
Par-delà de nos différences, nous ne devons jamais oublier le prix du rassemblement ; nous ne devons jamais oublier que la prospérité est un combat, ce n’est pas un dû ; nous ne devons jamais oublier que les réalités ne sont ni de droite ni de gauche.
La France est une grande nation mais nous devons tous savoir que le fil de la grandeur est fragile. Après la crise, il n’y aura pas de retour d’une sorte d’âge d’or comme nous en avons connu parce que nous avons changé de monde.
Le chemin de la croissance sera toujours étroit, le chemin du désendettement sera toujours difficile, et notre lutte pour tirer notre épingle du jeu dans cette mondialisation devra sans cesse s’amplifier.
Il y a quelques jours, l’Insee a publié les chiffres de la croissance pour 2011.
Dans un environnement international très difficile, elle s’établit, dans notre pays, à + 1,7 %, c’est à dire qu’elle est au-dessus de la moyenne de la zone euro mais elle est inférieure à celle de notre grand voisin allemand qui a connu, en 2011, une croissance de plus de 3 %.
Les dernières enquêtes de conjoncture montrent que le moral des chefs d'entreprise, après un creux terrible cet été et cet automne, commence à se redresser. Cela permet d'entrevoir une accélération de l'activité dans les prochains mois. D'autant que l'accord sur le nouveau plan d'aide à la Grèce et l'action déterminée de la Banque Centrale Européenne ont permis, depuis la mi-janvier, un apaisement des tensions sur les marchés financiers.
Dans ce climat relativement favorable, chaque acteur doit prendre ses responsabilités.
Ça veut dire que l’État, de son côté, doit continuer à maîtriser très rigoureusement ses dépenses publiques parce que l’une des causes des crises que nous avons connues, c’est l’endettement des États.
C’est ce que nous faisons sans faiblir avec des résultats encourageants puisque nous aurons, en 2011, un déficit moindre que celui qui avait été prévu lors du vote du budget. Et de l’autre côté, il faut donner à tous ceux qui créent de la richesse – et en particulier aux petites et moyennes entreprises – toutes les chances de déployer leurs forces dans la bataille internationale.
Je viens de visiter deux entreprises : la papeterie de Raon et Numalliance. L’industrie papetière, chacun le sait, est confrontée à des problèmes structurels depuis le début des années 2000. Sa rentabilité s’est fortement dégradée. La production se déplace vers l’Amérique latine, vers l’Asie, vers l’Europe de l’Est et donc ce secteur fait face à des restructurations très importantes. Mais l’exemple de cette papeterie démontre qu’il y a toujours des créneaux porteurs à condition qu’on sache les identifier et à condition qu’on sache faire, au bon moment, les bons choix. Cette PME est aujourd’hui un des leaders européens de l'emballage papier recyclé. Quant à Numalliance, c’est un groupe qui est leader mondial dans son domaine mais qui n’emploie que cent cinquante salariés. Bref, c’est une PME mais c’est une PME d’envergure internationale.
Et ces deux entreprises montrent qu’il n’y a pas de fatalité à ce que l’industrie française disparaisse, qu’il n’y a pas de fatalité en particulier à ce que cette industrie soit sans cesse combattue sur les marchés internationaux. Nous avons la capacité de développer nos exportations. Encore faut-il avoir les hommes, les compétences, les moyens financiers réunis pour y parvenir.
Le potentiel de croissance de notre pays réside, finalement, dans ces entreprises et en particulier dans ces PME qui vitalisent notre territoire.
Il faut donc savoir les écouter et il faut savoir les encourager.
Je voudrais dire, à ce sujet, qu’il ne faut pas opposer, comme on le fait trop souvent, dans un discours, finalement, assez démagogique, les grandes entreprises et les petites entreprises.
Si la France n’avait pas de grandes entreprises, elle n’aurait aucune chance de réussir cette bataille de la réindustrialisation. Les grandes entreprises sont des locomotives de l’activité industrielle française. Et on voit d’ailleurs autour de nous en Europe que les pays qui ont abandonné à des propriétés étrangères leurs grandes entreprises sont aujourd'hui en difficulté sur le plan de la croissance et sur le plan du développement de l’emploi.
Mais il faut que ces grandes entreprises travaillent avec les petites entreprises. Il faut que les relations entre ces grandes entreprises internationales, souvent un peu inhumaines dans leur manière de traiter leurs sous-traitants, de traiter les relations humaines, il faut que cette relation entre les grandes entreprises et les PME soit sans cesse harmonisée.
Il y a d’abord, pour les PME, une première préoccupation que tu as évoquée à l’instant, c’est la complexité administrative.
Je sais que pour 90 % des entrepreneurs, c’est le sujet n° 1. Nous avons organisé des Assises de la simplification. À l’issue de ces Assises de la simplification, cent quarante-cinq mesures ont été décidées. Ce sont des mesures qui sont en train d’être mises en œuvre. Rien qu’en supprimant des règlements, rien qu’en assouplissant des règles, elles vont permettre de restituer plus d’un milliard d’euros aux entrepreneurs.
Nous avons ensuite mis en place – parfois dans un climat de contestation – le régime de l’auto-entrepreneur. Je veux dire que c’est une véritable révolution culturelle. Depuis 2009, la simplification drastique apportée par le régime de l’auto-entrepreneur est son principe. Son principe de base, c’est : pas de chiffre d’affaires, pas de charges.
Cette simplification a permis de tripler la création d’entreprise en un an dans notre pays.
Alors, bien sûr, toutes ces entreprises ne survivent pas mais on sait bien que c’est en semant beaucoup de petites entreprises, c’est avec beaucoup d’auto-entrepreneurs qu’on peut progressivement développer des PME puis, peut-être demain, des grandes entreprises.
Nous avons aussi voulu limiter les risques auxquels sont exposés les entrepreneurs indépendants. Les entrepreneurs sont souvent critiqués mais peu de Français savent les risques personnels qu’ils prennent, surtout les patrons de petites entreprises. Nous avons voulu, avec le statut de l’entreprise individuelle à responsabilité limitée, que les chefs d’entreprise qui se lancent dans l’aventure de l’entreprise ne soient pas obligés d’engager leurs biens propres, c’est-à-dire, au fond, la survie même de leur famille. C’est une innovation majeure, une innovation qu’attendaient depuis très longtemps les artisans, les commerçants, les professions libérales.
Et déjà, à peine ce régime créé, six mille petites entreprises ont adopté ce régime. Ces mesures de simplification du droit ont permis la création de plus de deux millions d’entreprises en cinq ans.
Nous avons essayé également de dynamiser l’innovation des PME. Une fois qu’elles sont créées, il faut qu’elles se développent. Et pour qu’elles se développent sur un marché compétitif, il faut qu’elles arrivent avec des nouveaux produits ou avec des nouveaux process de fabrication. Depuis cinq ans, nous nous sommes engagés à augmenter la capacité d’innovation des PME et nous y avons consacré chaque année plus de deux milliards et demi d’euros.
Depuis la réforme de 2008, la réforme du crédit impôt recherche – donc c’est cette mécanique qui permet aux entrepreneurs de déduire de leurs résultats les dépenses qui sont réalisées pour la recherche et pour l’innovation et donc de ne pas payer d’impôts sur ces dépenses –, le nombre d’entreprises qui se sont déclarées au crédit impôt recherche s’est élevé à seize mille et 80 % de ces nouveaux entrants sont des PME.
Contrairement à une idée reçue, le crédit impôt recherche profite très largement aux petites et moyennes entreprises.
Enfin, nous avons créé le statut fiscal de la jeune entreprise innovante qui permet aux PME de moins de huit ans consacrant 15 % de leurs charges à la recherche et au développement de bénéficier d’un régime social et d’un régime fiscal allégés.
Pour que les PME jouent un rôle essentiel, il faut évidemment qu’elles soient financées.
Nous avons décuplé les moyens de financement de l’industrie et en particulier des petites et moyennes entreprises dans notre pays. D’abord avec Oséo qui est, au fond, la banque publique des PME et qui est un succès incontestable. Je crois que tous ceux qui ont affaire à Oséo reconnaissent la réussite de cet organisme qui a été créé en fusionnant plusieurs organismes qui s’occupaient soit de l’innovation, soit du financement des petites et moyennes entreprises. Et c’est dans le cadre d’Oséo – puisque Oséo est une réussite – que nous avons de créer une filiale qui sera plus spécifiquement chargée de soutenir la filière industrielle, dotée pour commencer d’un milliard d’euros de fonds propres, ce qui lui permettra d’accorder près de douze milliards de prêts pour les entreprises industrielles.
L’État s’implique également très fortement pour aider les PME à trouver les fonds propres nécessaires à leur développement.
Il y a un débat dans notre pays, à juste titre, sur ce qu’on appelle les niches fiscales. Et, comme souvent, les débats dans notre pays deviennent assez vite caricaturaux.
Donc, pendant des années, les parlementaires se sont ingéniés, toutes tendances confondues, à créer des niches fiscales pour répondre à des questions, pour répondre à des problèmes qui étaient posés dans tel ou tel secteur de l’activité. Et maintenant, on a l’impression que ces niches fiscales, c’est une horreur absolue et qu’il faut toutes les supprimer. Évidemment, tout ça mérite d’être regardé avec un peu plus de sérieux. Il y a des niches fiscales qui étaient inutiles, il y a des niches fiscales qui n’étaient pas efficaces, il y a des niches fiscales qui, dans un contexte économique et financier difficile comme le nôtre, n’ont pas de raison d’être parce que ce sont, au fond, des niches fiscales de confort. Mais en revanche, il y a des niches fiscales qui sont très utiles, en particulier celles qui permettent de défiscaliser des dépenses de développement, des dépenses d’innovation des entreprises.
Nous avons notamment une niche fiscale très utile qui permet de rediriger vers l’investissement dans les PME près d’un milliard d’euros qui permettent d’alimenter les fonds propres des entreprises. Et donc j’appelle tous ceux qui demandent la suppression de toutes les niches fiscales à se calmer parfois un peu et à réfléchir pour qu’on ne garde que celles qui sont utiles à notre pays.
Nous avons également créé le dispositif France Investissement qui a eu un impact très positif sur la croissance des PME en soutenant leurs fonds propres et pour décliner ce dispositif sur le terrain, puisqu’il était centralisé à Paris, nous avons décidé de mettre en place FSI Régions qui a pour mission d’orienter les PME vers le bon outil financier pour accompagner et pour soutenir leur développement, au plus près des territoires.
Il s’agit bien d’aider les PME là où elles sont, au sein des grandes métropoles comme dans les territoires plus ruraux, pour lesquels naturellement la vitalité du tissu industriel est un enjeu absolument essentiel.
Le programme FSI France Investissement 2020 que nous sommes en train de mettre en place est une nouvelle étape. Il a été lancé avant-hier. Il va bénéficier de moyens accrus : cinq milliards d’euros, soit un doublement des montants par rapport au précédent programme.
Et à travers ce programme, l’Etat se fixe trois priorités : financer les entreprises innovantes, toutes ces entreprises qui ont inventé un process de fabrication innovant, qui ont inventé des produits qui sont des produits qui peuvent, demain, conquérir des marchés nouveaux et qui ont des difficultés à financer leur développement, le FSI sera là pour les accompagner.
Ensuite la croissance des PME indépendantes – on sait que beaucoup de petites et moyennes entreprises rencontrent des difficultés lorsqu’elles se développent, lorsque tout va bien, lorsqu’elles ont des marchés parce que souvent, le financement ne suit pas. Les banquiers hésitent à prendre des risques, parfois ces entreprises sont des entreprises familiales, il est difficile de trouver les fonds propres nécessaires ; là encore, l’Etat peut appuyer cette croissance des PME indépendantes.
Et puis enfin le troisième objectif, c’est la constitution d’un tissu d’entreprises de taille intermédiaire qui soient plus nombreuses et plus performantes. Nous savons bien qu’il manque, dans notre pays, un maillon dans la chaîne économique que sont les entreprises de taille intermédiaire ; on a beaucoup de PME, on a de très belles grandes entreprises et pas assez d’entreprises de taille intermédiaire qui font la force, notamment, de notre voisin allemand.
Notre soutien aux PME serait incomplet si nous n’avions pas engagé plusieurs efforts pour améliorer leur compétitivité. C’est un objectif fondamental. Je veux citer la réforme de la taxe professionnelle qui a fait couler beaucoup d’encre, mais qui constitue une étape majeure dans l’évolution de la fiscalité française. Vous le savez, cette réforme a consisté à supprimer un impôt qui était basé sur l’investissement, qui venait pénaliser les investissements des entreprises et à le remplacer par une taxe foncière. Dans ce cadre-là, les entreprises industrielles ont eu un avantage considérable qui leur a permis de réduire leurs coûts de production. C’est une réforme qui était absolument nécessaire.
Nous sommes en train de poursuivre cet effort de compétitivité avec la mesure d’allègement du coût du travail.
A l’instant même, dans la papeterie de Raon, je posais la question au directeur de savoir, au fond, quand l’entreprise de Raon est en compétition avec d’autres entreprises européennes.
Je lui demandais quel est le niveau de cette compétition. Est-ce que vous êtes plus cher de 25 %, auquel cas naturellement, c’est difficile de trouver des mesures pour améliorer la compétitivité ; ou est-ce que c’est plus bas et il me disait « quand on est en compétition avec des entreprises allemandes, avec des entreprises italiennes, avec de entreprises hollandaises qui sont les principaux concurrents de cette papeterie. La différence au bout du compte sur les marchés, c’est 5 ou 6 % ! C’est à 5 ou 6 % que se joue la prise du marché ».
Et donc quand on dit qu’en diminuant de 5,4 % le coût du travail, c’est-à-dire les charges patronales, sur les emplois industriels, on améliore de façon très sensible la compétitivité de l’économie française, c’est une réalité.
Et tous ceux qui disent « de toute façon, ça ne sera jamais assez pour faire la compétition avec les Chinois », bien sûr !
Mais la question n’est pas la compétition avec les Chinois !
La question aujourd’hui, c’est la compétition avec les Allemands. C’est la compétition avec les Hollandais, c’est la compétition avec les Italiens. Et puis dans notre pays, souvent, à force de rechercher la réforme idéale, la réforme fantastique qui va tout changer, on ne fait rien du tout. En attendant, on ne fait rien du tout.
Aujourd’hui, il faut, à chaque fois que c’est possible, prendre des mesures pour améliorer la compétitivité des entreprises et la compétitivité des entreprises, c’est le coût du travail – pas les salaires naturellement, le coût du travail, les charges qui pèsent sur ces salaires – c’est la qualité de la formation de la main d’œuvre, je vais y venir, et puis ce sont les conditions du soutien à l’innovation. Nous allons alléger de plus de treize milliards les charges qui pèsent sur le coût du travail pour les emplois industriels. Et ça veut dire que 93 % des salariés des très petites entreprises, 88% des effectifs des PME vont être concernés par la mesure qui vient d’être votée par l’Assemblée nationale.
Enfin, Mesdames et Messieurs, soutenir les PME dans leur développement, c’est tout mettre en œuvre pour avoir une main d’œuvre de qualité, et naturellement en misant à fond sur la formation des jeunes. Je veux dire à ce titre que la formation en alternance constitue vraiment un outil incontournable, et un outil qu’il faut que nous soyons capables de mobiliser beaucoup plus que nous l’avons fait dans le passé.
C’est système extrêmement efficace puisque 80 % des jeunes en alternance trouvent un emploi dans l’année qui suit leur formation. Avec Nadine Morano – que je veux remercier pour son engagement total au service de cette cause qui est absolument stratégique pour l’économie française et qui a obtenu des résultats excellents, puisque nous avons déjà eu une augmentation de 7 % du nombre des jeunes en alternance en une seule année – nous avons mis en place un système simple et un système très attractif : "zéro charge".
"Zéro charge" pendant un an pour toute embauche supplémentaire d’un jeune sous contrat d’apprentissage ou de professionnalisation. Et puis nous allons poursuivre cet effort en augmentant les objectifs de recrutement de jeunes en alternance dans les entreprises, et là aussi, je crois qu’il faut que le monde industriel accepte l’idée que, d’un côté l’Etat doit faire des efforts pour améliorer la compétitivité, baisser les charges, essayer de réduire le montant des impôts qui pèsent sur le travail, mais de l’autre côté, il y a une contrepartie, et la contrepartie c’est que les entreprises doivent faire des efforts pour participer à la formation des jeunes.
Ce n’est pas à sens unique. Ca ne peut pas être toujours à sens unique, ça ne peut pas être toujours la collectivité qui fait des efforts et puis l’entreprise qui, au fond, ne participe d’une certaine manière, à l’effort de formation qui est au cœur de la citoyenneté.
Il y a, dans l’entreprise, des capacités en matière de formation qui n’existent nulle part ailleurs ! Que jamais aucune école ne pourra inventer, que jamais aucune école ne pourra apporter. Et c’est l’articulation entre l’école d’un côté avec les connaissances théoriques, avec la capacité de nos enseignants, et de l’autre l’entreprise avec son savoir-faire, avec ses machines, avec sa culture, avec sa tradition, c’est en mêlant les deux qu’on peut arriver à régler une grande partie du chômage que nous connaissons, qui est souvent dû à une inadaptation de la main d’œuvre aux besoins de notre économie.
Et puis il y a la loi du 28 juillet 2011, la loi Cherpion comme on l’appelle, pour le développement de l’alternance et la sécurisation des parcours professionnels.
Cette loi a créé le contrat de sécurisation professionnelle qui offre un accès privilégié à la formation et qui donne à tous les salariés licenciés pour motif économique une allocation renforcée. Là aussi, l’idée que nous essayons de défendre, c’est l’idée qu’il y a un énorme gâchis avec toutes les personnes qui sont sans emploi et qui, au fond, ne mettent pas à profit, parce qu’on ne leur propose pas de solution, ne mettent pas à profit ce temps de chômage pour améliorer leurs compétences, pour améliorer leur savoir-faire, pour améliorer leur compétitivité.
Et ce que nous voudrions, c’est qu’à l’avenir, chaque demandeur d’emploi, en tout cas chaque demandeur d’emploi qui est au chômage depuis quelques mois, et qui a des difficultés à retrouver un emploi, chaque demandeur d’emploi se voit proposer une vraie formation. Une formation qu’il choisit, naturellement ! Une formation à laquelle il adhère, il ne s’agit pas de lui imposer une formation dans un domaine qui ne l’intéresse pas, une formation à laquelle il adhère, mais une formation qui soit une formation professionnalisante ! Une formation qui débouche vraiment sur un emploi ! Parce que nous avons tous ici en mémoire ces exemples de formation, je ne sais pas comment dire, je ne veux pas être désobligeant, mais enfin qui sont là juste pour permettre d’occuper les personnes mais qui ne débouchent en rien sur un véritable métier.
Mesdames et Messieurs,
Pendant trop longtemps, pour des raisons historiques, pour des raisons culturelles, la France a entretenu avec ses entreprises et avec ses entrepreneurs une relation sans passion. Cela, alors même que ces entreprises étaient au cœur de nos emplois, au cœur de notre prospérité, au cœur de notre croissance !
Alors même qu’elles donnaient à tant de travailleurs et à tant de salariés une dignité par le travail. Ceux qui pensent que c’est en sur-réglementant notre économie ou en surtaxant les entreprises que nous sortirons de la crise, font fausse route.
Il ne faut pas se tromper de combat.
Il faut choisir l’esprit d’entreprendre !
Il faut choisir le risque !
Il faut choisir le goût pour la conquête qui anime tous ceux qui se lancent dans la création de l’entreprise.
Il faut nous donner les moyens de produire en France en allégeant le coût du travail et en cherchant à harmoniser les conditions de production dans la zone euro, avec les principaux pays, en particulier les principaux pays d’Europe du Nord qui sont nos concurrents.
Il faut nous donner les moyens de décentraliser réellement le dialogue social dans les entreprises afin d’adapter leur productivité. Il faut que dans les entreprises, il y ait un vrai dialogue social.
Pendant très longtemps, ce dialogue social a été inexistant ou bien il fonctionnait parce que les personnes fonctionnaient ensemble ! Ou bien il n’y en avait pas. Nous avons essayé d’institutionnaliser le dialogue social dans les entreprises, en particulier en modifiant deux choses fondamentales : les règles de représentativité syndicale – désormais les syndicats existent en fonction de leurs scores aux élections professionnelles, donc c’est démocratique – et deuxièmement en supprimant la possibilité qu’il y avait dans le passé de négocier des accords sans la majorité des salariés ; c’est-à-dire des accords minoritaires.
C’était la caractéristique du système français : on avait d’un côté des syndicats, dont la liste avait été fixée une fois pour toutes au lendemain de la Seconde Guerre mondiale et dont la représentativité n’était jamais remise en question ; quel que soit le nombre d’adhérents, c’était toujours les mêmes organisations syndicales, et elles avaient toujours le droit de signer un accord avec le patronat, même si elles étaient minoritaires.
Et donc on pouvait imaginer, dans une entreprise ou dans une branche professionnelle, des règles nouvelles qui s’appliquent, alors que ces règles ont été décidées par une organisation syndicale qui représente 2 %, 1 %, 0,2 % des salariés de l’entreprise ou de la branche.
C’était des règles qui expliquaient, pour une large part, l’absence de dialogue social dans notre pays, la crispation, le recours immédiat au conflit social. Nous avons modifié tout cela.
Désormais pour négocier des accords, il faut des syndicats représentatifs et il faut qu’ils soient majoritaires, il faut qu’ils représentent la majorité des salariés. Eh bien je pense que les patrons n’ont rien à craindre de ce dialogue social !
Au contraire. Et quand on regarde ce qui se passe dans tous les grands pays qui réussissent, notamment en Europe du Nord, on s’aperçoit que ce sont des pays où le dialogue est permanent, où l’on trouve des compromis, où les organisations syndicales et les patrons des entreprises cherchent en permanence comment négocier des accords gagnant/gagnant. Quand l’activité de l’entreprise est moins bonne, on essaie de trouver des moyens pour passer sans licencier personne !
Et puis quand l’entreprise réussit bien, on fait en sorte que les salariés puissent pleinement bénéficier des résultats de l’entreprise. C’est ce dialogue social, c’est cette tradition qui n’existe pas dans notre pays qui est à construire, ou qui est en tout cas à développer, qui doit constituer une priorité pour les pouvoirs publics.
La croissance doit être notre priorité absolue. Nous n’obtiendrons pas cette croissance par des dépenses publiques supplémentaires parce que nous avons un niveau de nos déficits qui nous l’interdit. Nous ne l’obtiendrons pas sans avoir le courage de nous attaquer à nos handicaps en matière de compétitivité et de formation.
Mesdames et Messieurs,
Aucune des réformes à venir, aucun des combats à mener pour redresser notre pays ne sont hors de notre portée. Et d’ailleurs dans notre Histoire – et vous en êtes le témoignage – la France a traversé bien des épreuves, et souvent des épreuves bien plus graves que celles que nous connaissons aujourd’hui.
Mais à chaque fois, notre Nation a su rebondir et elle a su se ressaisir.
Le courage d’une nation, ça n’est pas quelque chose qui se décrète, parce que la France vit dans le cœur de chacun d’entre nous.
Durant cinq années, j’ai eu l’occasion de rencontrer beaucoup de Français qui ont du cran, beaucoup de Français qui ont manifesté beaucoup de courage dans des conditions rendues très difficiles par la crise économique et financière, et cet après-midi encore, dans les Vosges, ici monsieur le maire, dans votre commune, parmi vous, j’ai vu une France qui est fière, une France qui se tient debout, malgré les difficultés qu’elle rencontre. Eh bien je veux dire que cette France-là constitue pour chacun d’entre nous notre plus belle espérance.
Source http://www.gouvernement.fr, le 27 février 2012