Texte intégral
Mes chers concitoyens,
Je suis venu vous parler de la chose la plus importante dans la vie, particulièrement dans la vie de notre pays. Je suis venu vous parler despoir.
Un pays, ce nest pas rien dans la vie dune femme, dun homme, dun enfant. On peut être heureux ou malheureux de son pays. On peut être aidé par son pays, ou on peut soi-même laider. Un pays, ce nest pas rien dans une vie.
Ce nest pas rien, permettez-moi de vous le dire cet après-midi, ce nest pas rien dans ma vie.
Je dois beaucoup à mon pays. Jai été ce quon appelait un boursier de la République. Je suis né dans un milieu, et jen suis très fier, où lon trimait de six heures du matin, réellement, à huit ou neuf heures du soir, réellement. Les vacances étaient inconnues, évidemment. Et cela pour ne rien gagner que le juste, très juste, nécessaire. Le premier argent conséquent que mon père mit de côté, ce fut le montant de son assurance vie, le jour où il fut fauché dans un accident du travail. Ce qui prouve que si on avait du mal à vivre de son travail, on arrivait assez bien à en mourir. En tout cas pour lui. Et pour ceux qui vivaient, comme ma mère, au bout dune vie de travail, avant quelle aussi ne sen aille, une retraite de 668 euros.
Cest dire que quand jentends les retraités agricoles, les retraités de lartisanat et du commerce, pour moi, ce ne sont pas des dossiers, ce sont des visages. Cest dire aussi que jentends, dès le redressement engagé, que la mise à niveau des petites retraites soit la première à bénéficier des conditions nouvelles du pays.
La République a pris par la main le petit garçon ardent que jétais. Comme à tant dautres, elle ma permis de faire le chemin des boursiers, le latin, le grec, suffisamment de mathématiques et dhistoire, la belle langue française, dont je fus amoureux dès les premières pages des premiers livres. Elle ma proposé de passer lagrégation, daccéder, par le concours national, à cette forme de reconnaissance et de liberté.
Et puis la République ma fait un deuxième fantastique cadeau : elle ma permis de lui consacrer ma vie.
Je lai servie comme professeur. Je lai servie comme élu local. Je lai servie comme élu national. Je lai servie comme député. Je lai servie comme ministre. Je lai servie comme militant. Je lai servie comme amoureux, car on peut être amoureux dun idéal. Je lai servie comme rebelle parfois, assez souvent, car on peut servir en refusant de se ranger, en combattant parfois seul contre tous, dans tous les combats où se jouait une certaine idée de lÉtat républicain, en combattant la privatisation des autoroutes, en combattant les dérives dans laffaire Tapie, en prévenant du mur de la dette, en défendant le pluralisme chaque fois quon a voulu le faire disparaître.
En tenant bon, au long de ces années, je me suis fait un serment. Ni aux miens, ni à notre peuple, je ne mentirai, quelle que soit la démagogie ambiante. Car cest la démagogie qui détruit la démocratie et la liberté !
Partir de la vérité pour gouverner un peuple, cela a si rarement été fait !
Gouverner à partir de la vérité, Pierre Mendès-France, la voulu. Valéry Giscard dEstaing la voulu. Raymond Barre la voulu. Michel Rocard la voulu. Jacques Delors la voulu pour la France aussi bien que pour lEurope.
Mais il y a une différence entre leur temps et le nôtre : cette fois, pour la République, cest une obligation vitale.
Je dis la République. Jaurais pu dire la France. Jaurais pu dire la nation. Car pour moi, France et République, République et nation, cest la même chose.
La République, cest lidéal qui fait la France, qui fait notre nation, depuis 220 ans.
Aujourdhui, la République, lidéal qui nous fait vivre ensemble, liberté égalité fraternité, est ébranlée.
Chez chaque jeune fille ou jeune garçon qui en est à sa centième lettre de candidature, diplôme ou pas diplôme, et qui chaque fois reçoit la même formule de refus toute faite, cest la République qui est en souffrance.
Quand saccroît sans cesse le nombre des familles dont les fins de mois commencent le 15 du mois, parce que le pays sappauvrit, cest la République qui est malmenée.
Quand les jeunes Français comprennent brusquement que la dette de leurs aînés, finalement ce sera leur dette, quils recevront en héritage le passif le plus lourd de notre histoire, cest la République qui est maltraitée.
Quand dune génération à lautre, on transmet non plus un patrimoine intact mais un patrimoine grevé de dettes et menacé, quand tout particulièrement notre patrimoine naturel de terre, dair et deau, notre patrimoine despèces vivantes, est menacé par lactivité humaine qui ne sait pas se réguler, la République ne se reconnaît plus.
Et quand lécole ne peut plus transmettre, quand les enfants sont en échec, quand il nest plus de chance pour un enfant de pauvres de forcer la porte de lascenseur social, cest la République qui est trahie.
Et quand à Toulouse un assassin désaxé, dont on apprend quil était repéré par tous les services, identifié et sur la liste noire des services de renseignement américains, peut se constituer un arsenal darmes de guerre, sentraîner, commettre ces meurtres, les plus horribles de ces dernières années, sans que nul ne soit en alerte, alors la République a des questions à se poser.
Et quand sans aller jusquau terrorisme la violence et lintolérance montent dans toutes les couches de la société, que les appels à la haine tournent sur internet, alors la République, si elle ne se pose pas de questions, ne fait pas son devoir.
Et lorsque, devant le chômage, devant les déficits, devant lappauvrissement du pays, devant lintégration manquée, la vie politique refuse de regarder en face les questions les plus graves de son temps, ruse avec les demi- mensonges et les demi-vérités, multiplie les promesses fallacieuses et les polémiques partisanes, alors la République est désertée par ceux qui devraient la défendre.
Et lorsque devant toutes ces questions, tout le monde croit que cest une fatalité, et quil ny a rien à faire, et plus personne en qui croire, et que chacun baisse les bras, se résigne à ne plus agir, alors cest la République qui est abandonnée.
Je ne laisserai pas continuer cette dégradation.
Aujourdhui, en ce printemps 2012, un choix décisif, un choix au sens propre du mot vital, est en suspens dans notre pays.
Je suis venu vous parler de ce choix et de lespoir quil porte. Je suis venu vous parler de cet espoir-là. Dun espoir en dur, dun espoir solide, pas dun espoir qui ment.
Depuis 15, 20 et 30 ans les deux mêmes partis, lUMP et le PS dominent le pouvoir. Depuis 15, 20 et 30 ans, cest eux qui nous ont conduits là où nous sommes. Il ny a pas despoir du côté de chez eux.
Depuis 15, 20 et 30 ans, ils ont endormi le peuple français en refusant de regarder en face la réalité de notre situation. Il ny a pas despoir du côté de chez eux.
Depuis 15, 20 et 30 ans, ils nous ont conduits, un pas en avant un pas en arrière, sur le chemin du déclin toujours plus rapide, faute dy voir clair, faute de prévoir avant de gouverner, faute de définir dun trait sûr la route à suivre.
Il ny a pas despoir chez eux.
Mais il y a un espoir si nous prenons tous ensemble, comme peuple souverain, la décision de nous redresser, la décision de regarder les yeux dans les yeux les défis qui sont devant nous, la décision de les relever.
Là est le vrai espoir.
Cest le choix de la lucidité, le choix du combat, le choix du courage. Et ceci est nouveau. Cest cet espoir, lucide, réaliste, courageux, offensif, que je propose à notre pays.
Les habitués du pouvoir en ont peur. Mais pour garantir lavenir de ses enfants, le peuple nen a pas peur. Le peuple, en vérité, attend quon lui montre ce chemin.
Je propose à la France, à notre pays, à notre peuple, le seul chemin qui lui permette de se reconstruire. De se reconstruire dans loptimisme, dans lenvie de vivre, dans le sens du travail bien fait après des années de travail bâclé, de renoncements déguisés en fatalité, derreurs et de facilités.
Je connais bien, devant la situation de la France, les excuses des gouvernants successifs ! Ils nous disent, nous ne sommes pas responsables, ils nous disent la « crise » vient dailleurs...
Pour eux, elle vient des banques, du capitalisme international, de la finance sans visage. Ou de lEurope, ou de leuro. Ou de limmigration.
Toutes ces explications, tous ces faux-semblants, je les récuse. Je viens devant vous avec un message franc, rude peut-être, mais le plus grand message doptimisme que lon puisse proposer au peuple français : la crise, pour lessentiel, ne vient pas dailleurs !
La crise, ce qui la nourrie, cest une série de mauvaises décisions, de mauvaises orientations, suivant toutes la même pente, celle de la facilité, celle du renoncement.
Rien dans la situation de notre école nest venu dailleurs !
Rien dans notre dette na été signé par dautres !
Rien dans nos blocages sociaux ne nous a été imposé !
Cest nous-mêmes qui avons décidé librement, et si dangereusement, de soumettre uniformément tous les salariés aux 35 heures !
Ce ne sont pas dautres que nous-mêmes qui avons décidé de notre urbanisme aberrant, de nos banlieues, de nos quartiers !
Ce nest pas dautres que nous-mêmes qui avons renoncé à lessentiel des productions qui sont nécessaires pour notre marché intérieur et pour lexportation !
Et regarder tout cela en face, affirmer que ce nest pas la faute des autres, mais notre responsabilité, ce nest pas un constat sévère: cest une formidable nouvelle, cest la matière même de lespoir ! Parce que si les fautes et les erreurs sont bien les nôtres, celles des politiques qui se sont succédé au pouvoir depuis deux décennies, alors cest que nous pouvons les corriger !
Je dis aux Français : ça dépend de nous ! De notre volonté, de notre courage, de notre décision de citoyens !
Voilà ce que je vous propose dans ce choix despoir : ce qui dépend de notre volonté, nous allons le faire, seuls, sans attendre, parce que nous sommes un grand peuple !
Mes engagements, ils sont précis. Ils sont volontaires. Ils sont solides. Ils répondent précisément à la définition du Général de Gaulle : « Ce sont des choix clairs. Ce sont des choix cohérents. Ce sont des choix qui obéissent à lintérêt national, et non à la dernière pression subie, à la dernière mode qui court dans les journaux. Ce nest pas du sable entre les doigts. »
Tout ce quil faut faire, nous allons le faire !
Reconstruire la République, cest dabord reconstruire son indépendance, sa capacité à agir, ses marges de manuvre.
Je commence par le plus urgent! Nous allons sortir la France du surendettement !
Jai déposé entre vos mains un plan réaliste et ambitieux de retour à léquilibre en trois ans. Ce plan, son idée directrice est exactement la même que celle du récent rapport de la Cour des Comptes : pas de progression de la dépense publique pendant les deux ans qui viennent et 50 milliards de prélèvements raisonnés, niches fiscales, point de TVA, nouvelles tranches dimpôt sur le revenu. Ainsi, en trois années budgétaires, pour la première fois depuis 35 ans, la France ne sera plus en déficit budgétaire. Et cela en prévoyant une croissance réaliste, et non pas une croissance fantaisiste, de vraies prévisions, pas les fausses.
Réforme fiscale limitée à 50 %, pas à 85 %, parce que je ne veux pas quon affiche à la porte de la France « interdit de réussir ».
Entendez-moi bien : je ne suis pas de ceux qui croient que la réussite est nécessairement matérielle. Je ne suis même pas de ceux qui croient que la réussite soit principalement matérielle.
Mais nous avons besoin dans notre pays de ceux qui le croient, qui ont en eux la volonté acharnée de réussir, des entrepreneurs, des chercheurs, des artistes, des sportifs, des créateurs de toute nature qui ont à lesprit quau terme de leur travail, de leur audace, ils pourront entrer dans le club fermé du succès.
Jai toujours pensé que cétait un des principaux atouts de la société américaine que cette idée que la réussite soffre à tous, que personne nest barré.
Avec les 85 % de François Hollande, cest simple : on sait qui seront les riches de demain, ce seront les fils de riches daujourdhui. Et personne, cest affiché, ne pourra entrer dans le club, aucun créateur de start-up, aucun découvreur de vaccins, aucun chanteur français.
Sortir du surendettement, cest exigeant, mais cest possible, et donc comme tous les grands pays qui ont relevé ce défi, par exemple comme le Canada, ou la Suède, nous le ferons, comme cela aurait dû être fait depuis longtemps.
Et je veux reconstruire le « produire en France ». Pour cela, je ferai de la production dans notre pays une obsession nationale.
Parce que la production cest lemploi, cest lenrichissement du pays. La production, cest les salaires.
Pour moi, la feuille de paie nest pas lennemie de lemploi ! Les salaires allemands restent plus élevés que les salaires français, les salaires suisses sont bien plus élevés que les salaires français, et cela parce que nos voisins produisent, exportent, créent de lemploi ! Ce que font nos voisins, nous allons le faire chez nous.
Et les salaires, ce nest pas seulement la ressource des familles, les salaires, par lintermédiaire des charges sociales, par la CSG, par les impôts, par la consommation, cest la totalité du financement de la santé, des retraites, des allocations familiales, des services publics, de léducation et de luniversité, de la sécurité, de la justice dans notre pays !
Et cest moi lEuropéen, qui dis : « il faut produire en France » ! Parce que je sais, que chaque euro dépensé en social ou en services publics, dune manière ou dune autre, vient des salaires ou des revenus versés en France ! Laisser partir la production, cest leffondrement du modèle social.
Je veux sauver le modèle social : je serai donc obsédé de production, toutes les productions, industrielle, agricole, artisanale, culturelle, artistique, numérique, touristique. Et je soutiendrai ceux qui seront obsédés de vendre, à lintérieur et à lextérieur, de comprendre le marché, dinnover pour le saisir, de soutenir limage de marque de nos produits.
Je porterai la mobilisation des entreprises bien sûr, mais aussi des salariés, et cest pourquoi jouvrirai la voie à une rénovation profonde du dialogue social.
Le dialogue social le plus ouvert cest lintérêt de lentreprise. Cest lintérêt de la France.
Jimposerai lidée que lentreprise nappartient pas seulement à ses actionnaires. Elle appartient aussi à ses salariés, à ceux qui lui donnent leur force de travail. Je ferai voter une loi nouvelle qui fera entrer les représentants des salariés, avec droit de vote, au conseil dadministration des entreprises de plus de 500 salariés et au comité de rémunération des dirigeants pour mettre fin à la folie des salaires indécents. Quand un dirigeant sera augmenté, cest quil le méritera aussi aux yeux des salariés. Et je veux que les salariés profitent aussi de la croissance des entreprises.
Je défendrai cette haute idée du dialogue social.
Ma conception de la République, ce nest pas la guerre aux corps intermédiaires, cest le contraire, cest la défense et la promotion des corps intermédiaires dans notre pays ! Ceux qui combattent les corps intermédiaires, ce sont ceux qui redoutent le peuple et le veulent divisé en une myriade dindividus pour mieux régner.
Jaime le peuple libre, qui sait se réunir et sorganiser, entreprendre, sans avoir besoin de la permission du pouvoir politique, et sans être sous son contrôle.
Jaime le peuple libre. Je rends hommage à tous ceux qui font vivre la loi de 1901 sur les associations, qui est pour moi une des plus grandes lois de la République.
Jaffirme que la diversité est non pas une faiblesse mais une force !
Je défendrai les cultures et les traditions régionales et locales. Je ferai adopter par la France la charte des langues et cultures régionales, qui sont pour notre pays une partie de son trésor national.
Je protègerai le droit local issu de lhistoire, dune longue et douloureuse histoire en Alsace et Moselle.
Je ferai respecter la diversité dans notre pays, sous toutes ses formes, en particulier en défendant le pluralisme en politique. Et cest pourquoi je proposerai quune loi électorale juste permette à lAssemblée nationale la représentation de toutes les minorités.
Je serai le président qui portera la confiance et lexigence pour lécole.
Je conduirai comme président de la République la réflexion sur la refondation de lécole. Je la conduirai dès le mois de juillet en un Grenelle de léducation, pour une fois justement nommé, car la rue de Grenelle, cest le ministère de léducation nationale.
Je défendrai les principes suivants :
Je demanderai de concentrer sur la langue française, sur la lecture, lécriture et le calcul, la moitié du temps scolaire à lécole primaire.
Je demanderai que tout élève entrant en sixième soit assuré de la lecture. Sil ne létait pas, il recevrait une formation adaptée en vue du retour le plus rapide possible dans le cursus normal.
Je demanderai de simplifier les programmes, dans un délai dune année, en liaison avec les enseignants.
Je demanderai que la chronologie soit consacrée en histoire à tous les degrés de lécole et que lhistoire retrouve sa place en terminale scientifique.
Je demanderai que le niveau du baccalauréat ne soit plus défini en fonction de pourcentages de résultats, mais en fonction des connaissances nécessaires à la fin détudes secondaires et à lentrée dans lenseignement supérieur. Ces connaissances devront être simples, mais maîtrisées.
Je garantirai la protection effective des moyens de léducation nationale. Je ne crois pas une minute aux sornettes sur les 60 000 postes annoncés par le PS. Mais un effort continu doit garantir les moyens actuels sur le long terme.
Je fixerai comme objectif devant les Français que lécole française se retrouve en cinq ans dans les dix premières écoles du monde par ses résultats en compréhension de lécrit, en calcul, en lutte contre les inégalités scolaires.
Je demanderai que pas un emploi du temps délève ne dépasse 28 heures par semaine au collège et au lycée. Les heures ainsi dégagées pourront être réutilisées pour le plus grand profit des élèves.
Je considèrerai le monde de léducation, de la maternelle au Collège de France comme la chance la plus importante pour lavenir de notre pays et je le traiterai comme tel, en partenaire estimé.
Et comme président de la République, je prendrai la défense de la profession la plus attaquée, la plus décriée, la plus injustement ciblée, je prendrai la défense du monde enseignant. Je rappellerai, que pas un de ceux qui se livrent à ces perpétuelles insinuations sur le temps de travail des enseignants ne tiendrait quatre heures sans être exténué devant une classe de 4e. Et pas un de ceux-là ne pourrait supporter sans récriminer laddition des préparations, des corrections, des conseils, des carnets dévaluation, des réunions parents profs, des réunions de concertation de toute nature.
Lavenir de nos enfants, cest aussi lexigence environnementale et le devoir absolu des responsables daujourdhui de protéger notre Terre, le sol, lair et leau.
Là aussi, nous avons perdu vingt précieuses années, des années où nos dirigeants ont alterné indifférence affairée, et négligences coupables.
Vous aurez remarqué comme ce sujet a disparu, ou pour être exact nest jamais apparu dans cette campagne électorale. Le développement durable a été sacrifié sur lautel de la crise, des intérêts économiques et des enjeux de court terme.
Je serai le président qui tiendra la promesse écologique. Je noublie pas que jai signé, il y a cinq ans, le pacte de Nicolas Hulot. Quand je signe quelque chose, je suis engagé.
Je veillerai à la protection de la biodiversité comme un bien précieux davenir pour lhumanité.
Je fixerai au gouvernement une feuille de route à lhorizon 2030, une triple exigence dassurer la production électrique nécessaire, en respectant à la lettre les injonctions de lAutorité de sûreté nucléaire renforcée dans son indépendance, de réduire continuellement le recours aux énergies carbonées et de développer au maximum les énergies renouvelables. Et sur ces sujets jorganiserai un débat national.
Lavenir de nos enfants, cest enfin la réalisation du grand dessein européen.
Je veux vous parler de lEurope, de notre Europe.
Je naime rien tant que la souveraineté. Je laime dans ma vie personnelle, je naime pas me faire dicter des choix. Je laime dans ma vie de citoyen: jattends dexercer ma part de peuple souverain. Je laime passionnément pour mon pays que je veux indépendant chaque fois que possible.
Mais jaime la souveraineté réelle, pas la souveraineté apparente qui est en réalité une absence de souveraineté, une dépendance.
Cest pourquoi je suis européen. LEurope nest pas une construction artificielle. Elle vient des profondeurs de lhistoire. Nous étions Européens bien avant dêtre Français, ou allemands, ou italiens. Les nations sont venues après. Et nous partageons lhéritage de la civilisation du respect de la personne humaine, des langues proches, des valeurs communes, des intérêts croisés.
Mais dans le monde où nous vivons, la souveraineté, si nous souhaitons lexercer réellement, nous ne pouvons lexercer quensemble.
Voilà lidée de lUnion. Cest une grande idée, simple, efficace, davant-garde.
Or cette idée a été dévoyée sur un point précis, mais décisif. Cest labsence de démocratie au sommet. Il y a un parlement européen pour représenter les peuples. Mais les institutions sont trop compliquées, et leurs dirigeants pas identifiés.
Je défendrai trois nouvelles étapes pour lEurope : une étape politique, une étape financière et une étape économique.
Je défendrai la démocratisation de lUnion Européenne. Je défendrai la création dun président pour lEurope, résultat de la fusion entre président du Conseil et président de la Commission. Ainsi une autorité stable et connue de tous sera mise en place, dont les citoyens entendront la voix et à qui, sil le faut, ils pourront demander des comptes.
Je défendrai lidée que ce président soit élu au suffrage universel des citoyens européens.
Deuxième étape, je défendrai lobligation déquilibre des comptes publics, linscription de la règle dor dans nos constitutions, et une discipline collective dans la gestion des finances.
Cest pourquoi je soutiendrai lidée de Jean Arthuis dune « cour des comptes européenne », par extension des pouvoirs dEurostat par exemple, chargée de faire la lumière sur la situation respective des partenaires européens. Et la création dune commission des finances regroupant des représentants des parlements nationaux.
Troisième étape, je défendrai lidée que lEurope doit porter une stratégie économique au service de la croissance et de lemploi.
Une stratégie dinvestissement. Une stratégie de recherche et dinnovation, par la mobilisation de lépargne européenne.
Je proposerai une stratégie de lEurope face aux grands émergents, notamment la Chine.
Il ny a pas de concurrence qui vaille si cette concurrence nest pas loyale. Je proposerai que lEurope sorte de la naïveté, ait enfin une stratégie et parle dune seule voix.
Je défendrai la loyauté et la réciprocité dans les échanges, en matière monétaire, en matière écologique par exemple. Si nous interdisons des molécules, des pesticides ou des herbicides, à nos producteurs, pour protéger la santé des consommateurs, il est obligatoire que nous vérifiions que les produits que nous importons nen sont pas chargés. Autrement, cest totalement illogique.
Mais je ne parlerai pas de lEurope seulement comme dune institution économique ou financière. Comme président de la République française, jen parlerai comme dune des plus grandes entreprises de lhistoire, qui concerne des centaines de millions de femmes et dhommes, des dizaines de peuples et dans laquelle ils peuvent mettre, pour eux et pour leurs enfants, leur foi et leur espérance.
Prenant ces engagements devant vous, je propose au peuple français une stratégie pour sortir de limpasse. Mais la stratégie ne vaut que si elle sinscrit dans un horizon plus large, dans un projet de société.
Car le programme nest rien sans vision, sans horizon, sans projet de société. Je propose à la France un projet de société : celui de la France solidaire.
La France solidaire, cest dabord une société apaisée.
Il est une montée des périls dans la société française. Montée de lintolérance, montée des violences, montée des trafics de toute nature.
Au cur de la société française, particulièrement dans sa partie la plus fragile, sur les questions de religion, sur les questions dorigine, sur la couleur de la peau, les tensions montent.
Les guerres de religion ne sont jamais finies. Elles ne demandent quà se rallumer. Chaque fois quun pays va mal, les tensions montent au sein de ce pays et au sein de son peuple. Quand les gens ne vont pas bien, ils se mettent à regarder la différence dun regard soupçonneux.
Il faut plus de courage pour résister à ces passions que pour y succomber.
Au XVIe siècle, dans les guerres de religion, il y avait les ligueurs dun côté, du côté de laffrontement, et Henri de Navarre de lautre qui plaidait pour quon vive ensemble. Vous connaissez mon choix, mon choix dhomme, et mon choix de président : je suis et je serai du côté dHenri IV, de celui qui force la réconciliation, la tolérance, la compréhension réciproque.
Comme votre président, comme président de la République française, je prends cet engagement : je ne ménagerai aucun effort, aucun effort de sécurité, aucun effort de justice, aucun effort de compréhension et dexplication, aucun effort de calme, de refus de lexcitation, pour que reculent la violence et lintolérance.
Sans trêve je défendrai cette idée : nous allons vivre ensemble ! Tous, tous nos enfants, si différents, chrétiens, juifs, musulmans, ou autre chose, ou rien du tout, Français en tout cas, tous Français, ils sont sur les bancs de la même école. Ils forment le même pays. Et si le pays va bien, ils iront bien, tous. Et si le pays va mal, ils iront mal, tous. Pour que le pays aille bien, il convient quils sentendent et se respectent.
Et je noublierai pas de montrer aussi limmense force quil y a dans cette diversité, lesprit dentreprise, le renouvellement, la jeunesse, lenvie de vivre, dès linstant quon aura renoué les liens rompus, dès linstant quon aura retrouvé le travail et quon aura rendu le goût du travail à ceux qui souvent ne le connaissent plus.
Cet espoir là exige de la compréhension mais exige tout autant de fermeté et dintransigeance.
Pour que la peur cède du terrain, !a sécurité doit devenir proche au lieu dêtre inaccessible.
Cest pourquoi, dans ce domaine de la sécurité, avec le gouvernement, jengagerai trois mesures nouvelles :
Réimplanter les forces de police dans les quartiers devenus zones de non droit.
Restaurer lÉtat, dans sa défense du droit et ses services publics: je nommerai dans chacun de ces quartiers, un sous-préfet chargé de coordonner tous les services de lÉtat, qui sera linterlocuteur des habitants et de leurs élus, avec obligation de résidence dans le quartier, pour quil vive la réalité de tous les jours des habitants et quil soit pour eux un interlocuteur quotidien.
Enfin, je définirai pour le public le plus sensible, les jeunes, parfois les très jeunes mineurs, la réponse la plus rapide, la plus immédiate, par exemple sous forme de réparations. Je ne veux plus entendre des enfants utilisés par des bandes dire à des policiers débordés : « de toutes façons, tu ne peux rien me faire, jai la loi pour moi ! »
Je demanderai que soit mis en oeuvre un plan efficace de lutte contre les trafics darmes.
Tout le monde dit que les armes de guerre circulent librement, depuis des années, en France et particulièrement dans les quartiers. Apparemment, tout le monde sen accommode. Or ceci nest pas acceptable. Là se croisent les organisations du grand banditisme et les trafics de toute nature. Là aussi sarme la folie. La lutte contre le trafic darmes sera définie comme une priorité de laction publique.
Mais le plus grand enjeu du redressement, cest de retrouver la confiance. La confiance, clé du redressement, qui doit unir le peuple des citoyens et les dirigeants à qui il confie pour un moment la charge de le conduire.
En France, la confiance sest affaiblie. Le « tous pareils » est devenu, avec le haussement dépaules qui laccompagne, la réponse type aux déclarations politiques.
Cest pourquoi je règlerai de manière définitive la question de la moralisation de la vie publique.
Elu Président de la République le 6 mai, j'organiserai le 10 juin, jour du premier tour de l'élection législative et en même temps que celle-ci, un référendum de moralisation de la vie publique en France. Je soumettrai aux Français directement les questions irrésolues depuis tant dannées :
Je mettrai fin au cumul des mandats pour les députés et je les limiterai pour les sénateurs.
Jobligerai les parlementaires à siéger effectivement dans leur assemblée et ils ne pourront voter que sils sont présents.
Je modifierai le mode de scrutin des députés pour quenfin tous les courants dopinion puissent être représentés au Parlement.
Je réduirai le nombre de députés à 400, et je réduirai aussi le nombre de sénateurs.
Je reconnaîtrai le vote blanc comme un suffrage exprimé à toutes les élections.
Je renforcerai lobligation de parité pour que l'on sorte enfin de cette anomalie qui met la France à la 61ème place parmi les pays du monde pour la place des femmes dans la vie publique.
Je mettrai fin aux dérives du financement de la vie publique en supprimant la myriade de micro-partis individuels ou de complaisance.
Le référendum définira le conflit d'intérêt, obligera à la déclaration publique des intérêts privés avant l'entrée dans la fonction et lors de toute modification. Il fixera les incompatibilités, il traitera aussi bien des responsables politiques que des hauts fonctionnaires.
Il instituera une autorité de déontologie de la vie publique qui pourra être saisie directement par les citoyens et il empêchera le retour dans la vie publique avant une période de dix ans des élus condamnés pour corruption.
Le référendum rendra intangible et protégera pour l'avenir l'indépendance de la justice. Cette indépendance sera garantie par un nouveau statut pour le Garde des Sceaux, dont la nomination devra être approuvée par une majorité renforcée du Parlement.
Je protégerai et serai le garant de lindépendance des médias, et mettrai un terme à la procédure scandaleuse qui fait de la nomination des présidents de l'audiovisuel public l'apanage personnel du chef de l'État.
Voilà comment, en quatre semaines et un dimanche, la démocratie française prendra un nouveau visage.
Lespoir, cest le renouveau.
Ce que je propose à notre pays, cest de se redresser.
Cela passera par un profond changement des esprits que je porterai et de la volonté politique de la nation.
Tout ceci, vous le voyez bien, ne peut se faire par les voies classiques, traditionnelles, usées jusquà la corde.
La réussite de ce changement serait impossible avec une réélection du président sortant et de la majorité en place. Ils ont heurté les Français, au cours de ces années, par linjustice et lesprit de clan. Ils ont opposé les Français les uns aux autres. Ils nobtiendront pas le soutien nécessaire au redressement.
La réussite de ce changement est impossible avec lélection de François Hollande et dune majorité de gauche. Le programme insoutenable adopté par le parti socialiste et son candidat, la surenchère déboussolée de ses partenaires, les attentes démesurées quils ont fait naître, tout cela rend impossible luvre de redressement. Ils perdront en quelques semaines le soutien nécessaire.
Vous vous souvenez de 2007 : jai dit aux Français, sans précautions, où les conduisait la course effrénée vers le déficit et la dette. Je nai pas mis des peut-être et des conditionnels. Jai dit avec gravité, et tout au long de la campagne, ce que je ressentais comme grave. Le monde politique a ignoré ces avertissements et a poursuivi son chemin.
Aujourdhui je vous dis avec la même certitude ceci : aucun des programmes, aucune des attitudes des deux candidats favoris, aucune de leurs majorités ne peut permettre au pays de sen sortir. Lun ignore les risques en prétendant que « les économies, cest fini », lautre les aggrave de plusieurs dizaines de milliards annuellement. Tous les deux truquent leurs chiffres en parfaite connaissance de cause en présentant des prévisions de croissance quils savent, tous deux, absolument fallacieuses.
Quand on doit affronter la situation que la France va devoir affronter, il nest quune chose à faire, une seule, celle quelle a toujours choisi dans son histoire. Quand les circonstances sont exceptionnelles, il faut une démarche politique exceptionnelle !
Devant un défi national, il faut une union nationale.
Lorsque le Général de Gaulle fut investi de la même charge, dans des circonstances de même gravité, il navait pas de force parlementaire. Il convia donc à participer au redressement les quatre forces principales du pays, les gaullistes, le centre, la droite et la gauche, hors extrêmes.
Je ne suis pas le Général de Gaulle, dieu sait ! Mais la France est dans le même état. La guerre dAlgérie mise à part, peut-être même est-elle dans un état plus inquiétant.
Le redressement va demander un effort soutenu, de rigueur, de sérieux, de persévérance, denthousiasme, de compréhension des enjeux du monde, de force de conviction européenne.
Cet effort impose un gouvernement qui dépasse la droite et la gauche.
Cest ce gouvernement que je composerai. Il sera peu nombreux. Il sera fondé sur la compétence et le désintéressement: compétence éprouvée et désintéressement absolu. Ses membres devront prendre lengagement dêtre et de demeurer ensemble pour redresser le pays. Lexpérience de la société civile y tiendra autant de place que la politique. Cest le choix qua fait Mario Monti, dont les premiers mois donnent à espérer à tous ceux qui aiment lItalie.
Le 10 juin, jour du premier tour des élections législatives, les Français voteront par référendum la loi de moralisation de notre démocratie.
Le 17 juin, les Français donneront une majorité à loeuvre de redressement et dunité nationale.
Avant le 14 juillet, le gouvernement préparera une loi de finances rectificative qui portera en particulier sur des économies dans le fonctionnement de lÉtat, la création dun point de TVA et labaissement des niches fiscales.
Avant le 14 juillet, il créera la possibilité dun emploi sans charges pour toutes les entreprises de moins de 50 salariés.
Avant le 14 juillet, je mettrai en place le Commissariat aux stratégies de production et je lancerai la réflexion, filière par filière, avec les entreprises, les représentants des salariés et tous les acteurs du financement de léconomie.
Exceptionnellement, il ny aura pas de vacances parlementaires et le Parlement siègera pendant tout lété.
Le Parlement, pendant la session extraordinaire, préparera une loi-cadre sur le « produire en France » et se prononcera sur un texte portant diverses mesures durgence : en particulier, la suppression de la caution pour les locataires et la création dune mutuelle obligatoire pour les risques locatifs et, dans le domaine de la santé, lautorité indépendante chargée de lalerte.
Durant lété, je lancerai le Grenelle de léducation dont les conclusions me seront rendues avant la fin de lannée 2012.
À lautomne, après discussion approfondie avec les partenaires sociaux, un grand projet de loi sociale sera débattu au Parlement, en même temps que le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il permettra entre autres la participation des salariés aux conseils dadministration et aux comités de rémunération des entreprises. La loi visera à limiter le recours aux CDD et au temps partiel abusif et à supprimer les freins à la création demploi. Je proposerai que soit soumis aux partenaires sociaux lidée dun contrat de travail unique fondé sur une consolidation progressive des droits.
Branche par branche, je demanderai aux partenaires sociaux que soient examinées des propositions adaptées et nouvelles afin daugmenter le pouvoir dachat des salariés.
Durant cette session parlementaire, le gouvernement soumettra également au Parlement une loi sur la presse qui traitera de lindépendance des médias, particulièrement des médias publics, de la protection des sources, des droits et devoirs des journalistes...
Pour soutenir les associations et reconnaitre leur rôle irremplaçable dans la société, jouvrirai la possibilité de bourses dengagement, offertes en contrepartie dun engagement de jeunes ou de seniors, la validation des acquis de lexpérience et je définirai un cadre juridique de lemploi bénévole.
Je ferai enfin voter avant la fin de lannée 2012 une loi sur légalité hommes- femmes, qui traitera de la parité politique, de légalité salariale, des violences conjugales.
Dès la fin de 2012, le paysage de la France aura changé. Les conditions du redressement seront réunies.
Voilà le seul espoir pour notre pays, voilà le renouveau.
Cela est mon combat.
Pour cela, on aura besoin de tous les Français qui partageront la même lucidité et la même volonté. Des Français de droite, des Français de gauche, et des Français du centre, et de tous ceux qui ne sont pas étiquetés. On aura besoin des valeurs des uns et des valeurs des autres.
Il est des valeurs de gauche que jaime et dont la France aura besoin : le partage, lattention au plus faible, la générosité. Il est des valeurs de droite que jaime et dont la France aura besoin : lesprit dentreprise, le sens de leffort, la fierté nationale. Et le centre a ses valeurs, dont on aura besoin : la solidarité, lesprit de justice, lidéal européen.
Ces valeurs sont compatibles, elles se rejoignent par le haut. Cest le sectarisme qui les a rendues incompatibles.
Le temps nest plus au sectarisme.
Luvre historique qui nous attend exige que les forces du peuple français soient réunies, au moins pendant cinq ans, pour éteindre lincendie et rebâtir la maison.
Je serai le président de ce courage. Je serai le président de ce rassemblement. Je serai, pour vous et avec vous, pour les Français rassemblés, le président de cet espoir.Source : http://www.bayrou.fr, le 26 mars 2012
Je suis venu vous parler de la chose la plus importante dans la vie, particulièrement dans la vie de notre pays. Je suis venu vous parler despoir.
Un pays, ce nest pas rien dans la vie dune femme, dun homme, dun enfant. On peut être heureux ou malheureux de son pays. On peut être aidé par son pays, ou on peut soi-même laider. Un pays, ce nest pas rien dans une vie.
Ce nest pas rien, permettez-moi de vous le dire cet après-midi, ce nest pas rien dans ma vie.
Je dois beaucoup à mon pays. Jai été ce quon appelait un boursier de la République. Je suis né dans un milieu, et jen suis très fier, où lon trimait de six heures du matin, réellement, à huit ou neuf heures du soir, réellement. Les vacances étaient inconnues, évidemment. Et cela pour ne rien gagner que le juste, très juste, nécessaire. Le premier argent conséquent que mon père mit de côté, ce fut le montant de son assurance vie, le jour où il fut fauché dans un accident du travail. Ce qui prouve que si on avait du mal à vivre de son travail, on arrivait assez bien à en mourir. En tout cas pour lui. Et pour ceux qui vivaient, comme ma mère, au bout dune vie de travail, avant quelle aussi ne sen aille, une retraite de 668 euros.
Cest dire que quand jentends les retraités agricoles, les retraités de lartisanat et du commerce, pour moi, ce ne sont pas des dossiers, ce sont des visages. Cest dire aussi que jentends, dès le redressement engagé, que la mise à niveau des petites retraites soit la première à bénéficier des conditions nouvelles du pays.
La République a pris par la main le petit garçon ardent que jétais. Comme à tant dautres, elle ma permis de faire le chemin des boursiers, le latin, le grec, suffisamment de mathématiques et dhistoire, la belle langue française, dont je fus amoureux dès les premières pages des premiers livres. Elle ma proposé de passer lagrégation, daccéder, par le concours national, à cette forme de reconnaissance et de liberté.
Et puis la République ma fait un deuxième fantastique cadeau : elle ma permis de lui consacrer ma vie.
Je lai servie comme professeur. Je lai servie comme élu local. Je lai servie comme élu national. Je lai servie comme député. Je lai servie comme ministre. Je lai servie comme militant. Je lai servie comme amoureux, car on peut être amoureux dun idéal. Je lai servie comme rebelle parfois, assez souvent, car on peut servir en refusant de se ranger, en combattant parfois seul contre tous, dans tous les combats où se jouait une certaine idée de lÉtat républicain, en combattant la privatisation des autoroutes, en combattant les dérives dans laffaire Tapie, en prévenant du mur de la dette, en défendant le pluralisme chaque fois quon a voulu le faire disparaître.
En tenant bon, au long de ces années, je me suis fait un serment. Ni aux miens, ni à notre peuple, je ne mentirai, quelle que soit la démagogie ambiante. Car cest la démagogie qui détruit la démocratie et la liberté !
Partir de la vérité pour gouverner un peuple, cela a si rarement été fait !
Gouverner à partir de la vérité, Pierre Mendès-France, la voulu. Valéry Giscard dEstaing la voulu. Raymond Barre la voulu. Michel Rocard la voulu. Jacques Delors la voulu pour la France aussi bien que pour lEurope.
Mais il y a une différence entre leur temps et le nôtre : cette fois, pour la République, cest une obligation vitale.
Je dis la République. Jaurais pu dire la France. Jaurais pu dire la nation. Car pour moi, France et République, République et nation, cest la même chose.
La République, cest lidéal qui fait la France, qui fait notre nation, depuis 220 ans.
Aujourdhui, la République, lidéal qui nous fait vivre ensemble, liberté égalité fraternité, est ébranlée.
Chez chaque jeune fille ou jeune garçon qui en est à sa centième lettre de candidature, diplôme ou pas diplôme, et qui chaque fois reçoit la même formule de refus toute faite, cest la République qui est en souffrance.
Quand saccroît sans cesse le nombre des familles dont les fins de mois commencent le 15 du mois, parce que le pays sappauvrit, cest la République qui est malmenée.
Quand les jeunes Français comprennent brusquement que la dette de leurs aînés, finalement ce sera leur dette, quils recevront en héritage le passif le plus lourd de notre histoire, cest la République qui est maltraitée.
Quand dune génération à lautre, on transmet non plus un patrimoine intact mais un patrimoine grevé de dettes et menacé, quand tout particulièrement notre patrimoine naturel de terre, dair et deau, notre patrimoine despèces vivantes, est menacé par lactivité humaine qui ne sait pas se réguler, la République ne se reconnaît plus.
Et quand lécole ne peut plus transmettre, quand les enfants sont en échec, quand il nest plus de chance pour un enfant de pauvres de forcer la porte de lascenseur social, cest la République qui est trahie.
Et quand à Toulouse un assassin désaxé, dont on apprend quil était repéré par tous les services, identifié et sur la liste noire des services de renseignement américains, peut se constituer un arsenal darmes de guerre, sentraîner, commettre ces meurtres, les plus horribles de ces dernières années, sans que nul ne soit en alerte, alors la République a des questions à se poser.
Et quand sans aller jusquau terrorisme la violence et lintolérance montent dans toutes les couches de la société, que les appels à la haine tournent sur internet, alors la République, si elle ne se pose pas de questions, ne fait pas son devoir.
Et lorsque, devant le chômage, devant les déficits, devant lappauvrissement du pays, devant lintégration manquée, la vie politique refuse de regarder en face les questions les plus graves de son temps, ruse avec les demi- mensonges et les demi-vérités, multiplie les promesses fallacieuses et les polémiques partisanes, alors la République est désertée par ceux qui devraient la défendre.
Et lorsque devant toutes ces questions, tout le monde croit que cest une fatalité, et quil ny a rien à faire, et plus personne en qui croire, et que chacun baisse les bras, se résigne à ne plus agir, alors cest la République qui est abandonnée.
Je ne laisserai pas continuer cette dégradation.
Aujourdhui, en ce printemps 2012, un choix décisif, un choix au sens propre du mot vital, est en suspens dans notre pays.
Je suis venu vous parler de ce choix et de lespoir quil porte. Je suis venu vous parler de cet espoir-là. Dun espoir en dur, dun espoir solide, pas dun espoir qui ment.
Depuis 15, 20 et 30 ans les deux mêmes partis, lUMP et le PS dominent le pouvoir. Depuis 15, 20 et 30 ans, cest eux qui nous ont conduits là où nous sommes. Il ny a pas despoir du côté de chez eux.
Depuis 15, 20 et 30 ans, ils ont endormi le peuple français en refusant de regarder en face la réalité de notre situation. Il ny a pas despoir du côté de chez eux.
Depuis 15, 20 et 30 ans, ils nous ont conduits, un pas en avant un pas en arrière, sur le chemin du déclin toujours plus rapide, faute dy voir clair, faute de prévoir avant de gouverner, faute de définir dun trait sûr la route à suivre.
Il ny a pas despoir chez eux.
Mais il y a un espoir si nous prenons tous ensemble, comme peuple souverain, la décision de nous redresser, la décision de regarder les yeux dans les yeux les défis qui sont devant nous, la décision de les relever.
Là est le vrai espoir.
Cest le choix de la lucidité, le choix du combat, le choix du courage. Et ceci est nouveau. Cest cet espoir, lucide, réaliste, courageux, offensif, que je propose à notre pays.
Les habitués du pouvoir en ont peur. Mais pour garantir lavenir de ses enfants, le peuple nen a pas peur. Le peuple, en vérité, attend quon lui montre ce chemin.
Je propose à la France, à notre pays, à notre peuple, le seul chemin qui lui permette de se reconstruire. De se reconstruire dans loptimisme, dans lenvie de vivre, dans le sens du travail bien fait après des années de travail bâclé, de renoncements déguisés en fatalité, derreurs et de facilités.
Je connais bien, devant la situation de la France, les excuses des gouvernants successifs ! Ils nous disent, nous ne sommes pas responsables, ils nous disent la « crise » vient dailleurs...
Pour eux, elle vient des banques, du capitalisme international, de la finance sans visage. Ou de lEurope, ou de leuro. Ou de limmigration.
Toutes ces explications, tous ces faux-semblants, je les récuse. Je viens devant vous avec un message franc, rude peut-être, mais le plus grand message doptimisme que lon puisse proposer au peuple français : la crise, pour lessentiel, ne vient pas dailleurs !
La crise, ce qui la nourrie, cest une série de mauvaises décisions, de mauvaises orientations, suivant toutes la même pente, celle de la facilité, celle du renoncement.
Rien dans la situation de notre école nest venu dailleurs !
Rien dans notre dette na été signé par dautres !
Rien dans nos blocages sociaux ne nous a été imposé !
Cest nous-mêmes qui avons décidé librement, et si dangereusement, de soumettre uniformément tous les salariés aux 35 heures !
Ce ne sont pas dautres que nous-mêmes qui avons décidé de notre urbanisme aberrant, de nos banlieues, de nos quartiers !
Ce nest pas dautres que nous-mêmes qui avons renoncé à lessentiel des productions qui sont nécessaires pour notre marché intérieur et pour lexportation !
Et regarder tout cela en face, affirmer que ce nest pas la faute des autres, mais notre responsabilité, ce nest pas un constat sévère: cest une formidable nouvelle, cest la matière même de lespoir ! Parce que si les fautes et les erreurs sont bien les nôtres, celles des politiques qui se sont succédé au pouvoir depuis deux décennies, alors cest que nous pouvons les corriger !
Je dis aux Français : ça dépend de nous ! De notre volonté, de notre courage, de notre décision de citoyens !
Voilà ce que je vous propose dans ce choix despoir : ce qui dépend de notre volonté, nous allons le faire, seuls, sans attendre, parce que nous sommes un grand peuple !
Mes engagements, ils sont précis. Ils sont volontaires. Ils sont solides. Ils répondent précisément à la définition du Général de Gaulle : « Ce sont des choix clairs. Ce sont des choix cohérents. Ce sont des choix qui obéissent à lintérêt national, et non à la dernière pression subie, à la dernière mode qui court dans les journaux. Ce nest pas du sable entre les doigts. »
Tout ce quil faut faire, nous allons le faire !
Reconstruire la République, cest dabord reconstruire son indépendance, sa capacité à agir, ses marges de manuvre.
Je commence par le plus urgent! Nous allons sortir la France du surendettement !
Jai déposé entre vos mains un plan réaliste et ambitieux de retour à léquilibre en trois ans. Ce plan, son idée directrice est exactement la même que celle du récent rapport de la Cour des Comptes : pas de progression de la dépense publique pendant les deux ans qui viennent et 50 milliards de prélèvements raisonnés, niches fiscales, point de TVA, nouvelles tranches dimpôt sur le revenu. Ainsi, en trois années budgétaires, pour la première fois depuis 35 ans, la France ne sera plus en déficit budgétaire. Et cela en prévoyant une croissance réaliste, et non pas une croissance fantaisiste, de vraies prévisions, pas les fausses.
Réforme fiscale limitée à 50 %, pas à 85 %, parce que je ne veux pas quon affiche à la porte de la France « interdit de réussir ».
Entendez-moi bien : je ne suis pas de ceux qui croient que la réussite est nécessairement matérielle. Je ne suis même pas de ceux qui croient que la réussite soit principalement matérielle.
Mais nous avons besoin dans notre pays de ceux qui le croient, qui ont en eux la volonté acharnée de réussir, des entrepreneurs, des chercheurs, des artistes, des sportifs, des créateurs de toute nature qui ont à lesprit quau terme de leur travail, de leur audace, ils pourront entrer dans le club fermé du succès.
Jai toujours pensé que cétait un des principaux atouts de la société américaine que cette idée que la réussite soffre à tous, que personne nest barré.
Avec les 85 % de François Hollande, cest simple : on sait qui seront les riches de demain, ce seront les fils de riches daujourdhui. Et personne, cest affiché, ne pourra entrer dans le club, aucun créateur de start-up, aucun découvreur de vaccins, aucun chanteur français.
Sortir du surendettement, cest exigeant, mais cest possible, et donc comme tous les grands pays qui ont relevé ce défi, par exemple comme le Canada, ou la Suède, nous le ferons, comme cela aurait dû être fait depuis longtemps.
Et je veux reconstruire le « produire en France ». Pour cela, je ferai de la production dans notre pays une obsession nationale.
Parce que la production cest lemploi, cest lenrichissement du pays. La production, cest les salaires.
Pour moi, la feuille de paie nest pas lennemie de lemploi ! Les salaires allemands restent plus élevés que les salaires français, les salaires suisses sont bien plus élevés que les salaires français, et cela parce que nos voisins produisent, exportent, créent de lemploi ! Ce que font nos voisins, nous allons le faire chez nous.
Et les salaires, ce nest pas seulement la ressource des familles, les salaires, par lintermédiaire des charges sociales, par la CSG, par les impôts, par la consommation, cest la totalité du financement de la santé, des retraites, des allocations familiales, des services publics, de léducation et de luniversité, de la sécurité, de la justice dans notre pays !
Et cest moi lEuropéen, qui dis : « il faut produire en France » ! Parce que je sais, que chaque euro dépensé en social ou en services publics, dune manière ou dune autre, vient des salaires ou des revenus versés en France ! Laisser partir la production, cest leffondrement du modèle social.
Je veux sauver le modèle social : je serai donc obsédé de production, toutes les productions, industrielle, agricole, artisanale, culturelle, artistique, numérique, touristique. Et je soutiendrai ceux qui seront obsédés de vendre, à lintérieur et à lextérieur, de comprendre le marché, dinnover pour le saisir, de soutenir limage de marque de nos produits.
Je porterai la mobilisation des entreprises bien sûr, mais aussi des salariés, et cest pourquoi jouvrirai la voie à une rénovation profonde du dialogue social.
Le dialogue social le plus ouvert cest lintérêt de lentreprise. Cest lintérêt de la France.
Jimposerai lidée que lentreprise nappartient pas seulement à ses actionnaires. Elle appartient aussi à ses salariés, à ceux qui lui donnent leur force de travail. Je ferai voter une loi nouvelle qui fera entrer les représentants des salariés, avec droit de vote, au conseil dadministration des entreprises de plus de 500 salariés et au comité de rémunération des dirigeants pour mettre fin à la folie des salaires indécents. Quand un dirigeant sera augmenté, cest quil le méritera aussi aux yeux des salariés. Et je veux que les salariés profitent aussi de la croissance des entreprises.
Je défendrai cette haute idée du dialogue social.
Ma conception de la République, ce nest pas la guerre aux corps intermédiaires, cest le contraire, cest la défense et la promotion des corps intermédiaires dans notre pays ! Ceux qui combattent les corps intermédiaires, ce sont ceux qui redoutent le peuple et le veulent divisé en une myriade dindividus pour mieux régner.
Jaime le peuple libre, qui sait se réunir et sorganiser, entreprendre, sans avoir besoin de la permission du pouvoir politique, et sans être sous son contrôle.
Jaime le peuple libre. Je rends hommage à tous ceux qui font vivre la loi de 1901 sur les associations, qui est pour moi une des plus grandes lois de la République.
Jaffirme que la diversité est non pas une faiblesse mais une force !
Je défendrai les cultures et les traditions régionales et locales. Je ferai adopter par la France la charte des langues et cultures régionales, qui sont pour notre pays une partie de son trésor national.
Je protègerai le droit local issu de lhistoire, dune longue et douloureuse histoire en Alsace et Moselle.
Je ferai respecter la diversité dans notre pays, sous toutes ses formes, en particulier en défendant le pluralisme en politique. Et cest pourquoi je proposerai quune loi électorale juste permette à lAssemblée nationale la représentation de toutes les minorités.
Je serai le président qui portera la confiance et lexigence pour lécole.
Je conduirai comme président de la République la réflexion sur la refondation de lécole. Je la conduirai dès le mois de juillet en un Grenelle de léducation, pour une fois justement nommé, car la rue de Grenelle, cest le ministère de léducation nationale.
Je défendrai les principes suivants :
Je demanderai de concentrer sur la langue française, sur la lecture, lécriture et le calcul, la moitié du temps scolaire à lécole primaire.
Je demanderai que tout élève entrant en sixième soit assuré de la lecture. Sil ne létait pas, il recevrait une formation adaptée en vue du retour le plus rapide possible dans le cursus normal.
Je demanderai de simplifier les programmes, dans un délai dune année, en liaison avec les enseignants.
Je demanderai que la chronologie soit consacrée en histoire à tous les degrés de lécole et que lhistoire retrouve sa place en terminale scientifique.
Je demanderai que le niveau du baccalauréat ne soit plus défini en fonction de pourcentages de résultats, mais en fonction des connaissances nécessaires à la fin détudes secondaires et à lentrée dans lenseignement supérieur. Ces connaissances devront être simples, mais maîtrisées.
Je garantirai la protection effective des moyens de léducation nationale. Je ne crois pas une minute aux sornettes sur les 60 000 postes annoncés par le PS. Mais un effort continu doit garantir les moyens actuels sur le long terme.
Je fixerai comme objectif devant les Français que lécole française se retrouve en cinq ans dans les dix premières écoles du monde par ses résultats en compréhension de lécrit, en calcul, en lutte contre les inégalités scolaires.
Je demanderai que pas un emploi du temps délève ne dépasse 28 heures par semaine au collège et au lycée. Les heures ainsi dégagées pourront être réutilisées pour le plus grand profit des élèves.
Je considèrerai le monde de léducation, de la maternelle au Collège de France comme la chance la plus importante pour lavenir de notre pays et je le traiterai comme tel, en partenaire estimé.
Et comme président de la République, je prendrai la défense de la profession la plus attaquée, la plus décriée, la plus injustement ciblée, je prendrai la défense du monde enseignant. Je rappellerai, que pas un de ceux qui se livrent à ces perpétuelles insinuations sur le temps de travail des enseignants ne tiendrait quatre heures sans être exténué devant une classe de 4e. Et pas un de ceux-là ne pourrait supporter sans récriminer laddition des préparations, des corrections, des conseils, des carnets dévaluation, des réunions parents profs, des réunions de concertation de toute nature.
Lavenir de nos enfants, cest aussi lexigence environnementale et le devoir absolu des responsables daujourdhui de protéger notre Terre, le sol, lair et leau.
Là aussi, nous avons perdu vingt précieuses années, des années où nos dirigeants ont alterné indifférence affairée, et négligences coupables.
Vous aurez remarqué comme ce sujet a disparu, ou pour être exact nest jamais apparu dans cette campagne électorale. Le développement durable a été sacrifié sur lautel de la crise, des intérêts économiques et des enjeux de court terme.
Je serai le président qui tiendra la promesse écologique. Je noublie pas que jai signé, il y a cinq ans, le pacte de Nicolas Hulot. Quand je signe quelque chose, je suis engagé.
Je veillerai à la protection de la biodiversité comme un bien précieux davenir pour lhumanité.
Je fixerai au gouvernement une feuille de route à lhorizon 2030, une triple exigence dassurer la production électrique nécessaire, en respectant à la lettre les injonctions de lAutorité de sûreté nucléaire renforcée dans son indépendance, de réduire continuellement le recours aux énergies carbonées et de développer au maximum les énergies renouvelables. Et sur ces sujets jorganiserai un débat national.
Lavenir de nos enfants, cest enfin la réalisation du grand dessein européen.
Je veux vous parler de lEurope, de notre Europe.
Je naime rien tant que la souveraineté. Je laime dans ma vie personnelle, je naime pas me faire dicter des choix. Je laime dans ma vie de citoyen: jattends dexercer ma part de peuple souverain. Je laime passionnément pour mon pays que je veux indépendant chaque fois que possible.
Mais jaime la souveraineté réelle, pas la souveraineté apparente qui est en réalité une absence de souveraineté, une dépendance.
Cest pourquoi je suis européen. LEurope nest pas une construction artificielle. Elle vient des profondeurs de lhistoire. Nous étions Européens bien avant dêtre Français, ou allemands, ou italiens. Les nations sont venues après. Et nous partageons lhéritage de la civilisation du respect de la personne humaine, des langues proches, des valeurs communes, des intérêts croisés.
Mais dans le monde où nous vivons, la souveraineté, si nous souhaitons lexercer réellement, nous ne pouvons lexercer quensemble.
Voilà lidée de lUnion. Cest une grande idée, simple, efficace, davant-garde.
Or cette idée a été dévoyée sur un point précis, mais décisif. Cest labsence de démocratie au sommet. Il y a un parlement européen pour représenter les peuples. Mais les institutions sont trop compliquées, et leurs dirigeants pas identifiés.
Je défendrai trois nouvelles étapes pour lEurope : une étape politique, une étape financière et une étape économique.
Je défendrai la démocratisation de lUnion Européenne. Je défendrai la création dun président pour lEurope, résultat de la fusion entre président du Conseil et président de la Commission. Ainsi une autorité stable et connue de tous sera mise en place, dont les citoyens entendront la voix et à qui, sil le faut, ils pourront demander des comptes.
Je défendrai lidée que ce président soit élu au suffrage universel des citoyens européens.
Deuxième étape, je défendrai lobligation déquilibre des comptes publics, linscription de la règle dor dans nos constitutions, et une discipline collective dans la gestion des finances.
Cest pourquoi je soutiendrai lidée de Jean Arthuis dune « cour des comptes européenne », par extension des pouvoirs dEurostat par exemple, chargée de faire la lumière sur la situation respective des partenaires européens. Et la création dune commission des finances regroupant des représentants des parlements nationaux.
Troisième étape, je défendrai lidée que lEurope doit porter une stratégie économique au service de la croissance et de lemploi.
Une stratégie dinvestissement. Une stratégie de recherche et dinnovation, par la mobilisation de lépargne européenne.
Je proposerai une stratégie de lEurope face aux grands émergents, notamment la Chine.
Il ny a pas de concurrence qui vaille si cette concurrence nest pas loyale. Je proposerai que lEurope sorte de la naïveté, ait enfin une stratégie et parle dune seule voix.
Je défendrai la loyauté et la réciprocité dans les échanges, en matière monétaire, en matière écologique par exemple. Si nous interdisons des molécules, des pesticides ou des herbicides, à nos producteurs, pour protéger la santé des consommateurs, il est obligatoire que nous vérifiions que les produits que nous importons nen sont pas chargés. Autrement, cest totalement illogique.
Mais je ne parlerai pas de lEurope seulement comme dune institution économique ou financière. Comme président de la République française, jen parlerai comme dune des plus grandes entreprises de lhistoire, qui concerne des centaines de millions de femmes et dhommes, des dizaines de peuples et dans laquelle ils peuvent mettre, pour eux et pour leurs enfants, leur foi et leur espérance.
Prenant ces engagements devant vous, je propose au peuple français une stratégie pour sortir de limpasse. Mais la stratégie ne vaut que si elle sinscrit dans un horizon plus large, dans un projet de société.
Car le programme nest rien sans vision, sans horizon, sans projet de société. Je propose à la France un projet de société : celui de la France solidaire.
La France solidaire, cest dabord une société apaisée.
Il est une montée des périls dans la société française. Montée de lintolérance, montée des violences, montée des trafics de toute nature.
Au cur de la société française, particulièrement dans sa partie la plus fragile, sur les questions de religion, sur les questions dorigine, sur la couleur de la peau, les tensions montent.
Les guerres de religion ne sont jamais finies. Elles ne demandent quà se rallumer. Chaque fois quun pays va mal, les tensions montent au sein de ce pays et au sein de son peuple. Quand les gens ne vont pas bien, ils se mettent à regarder la différence dun regard soupçonneux.
Il faut plus de courage pour résister à ces passions que pour y succomber.
Au XVIe siècle, dans les guerres de religion, il y avait les ligueurs dun côté, du côté de laffrontement, et Henri de Navarre de lautre qui plaidait pour quon vive ensemble. Vous connaissez mon choix, mon choix dhomme, et mon choix de président : je suis et je serai du côté dHenri IV, de celui qui force la réconciliation, la tolérance, la compréhension réciproque.
Comme votre président, comme président de la République française, je prends cet engagement : je ne ménagerai aucun effort, aucun effort de sécurité, aucun effort de justice, aucun effort de compréhension et dexplication, aucun effort de calme, de refus de lexcitation, pour que reculent la violence et lintolérance.
Sans trêve je défendrai cette idée : nous allons vivre ensemble ! Tous, tous nos enfants, si différents, chrétiens, juifs, musulmans, ou autre chose, ou rien du tout, Français en tout cas, tous Français, ils sont sur les bancs de la même école. Ils forment le même pays. Et si le pays va bien, ils iront bien, tous. Et si le pays va mal, ils iront mal, tous. Pour que le pays aille bien, il convient quils sentendent et se respectent.
Et je noublierai pas de montrer aussi limmense force quil y a dans cette diversité, lesprit dentreprise, le renouvellement, la jeunesse, lenvie de vivre, dès linstant quon aura renoué les liens rompus, dès linstant quon aura retrouvé le travail et quon aura rendu le goût du travail à ceux qui souvent ne le connaissent plus.
Cet espoir là exige de la compréhension mais exige tout autant de fermeté et dintransigeance.
Pour que la peur cède du terrain, !a sécurité doit devenir proche au lieu dêtre inaccessible.
Cest pourquoi, dans ce domaine de la sécurité, avec le gouvernement, jengagerai trois mesures nouvelles :
Réimplanter les forces de police dans les quartiers devenus zones de non droit.
Restaurer lÉtat, dans sa défense du droit et ses services publics: je nommerai dans chacun de ces quartiers, un sous-préfet chargé de coordonner tous les services de lÉtat, qui sera linterlocuteur des habitants et de leurs élus, avec obligation de résidence dans le quartier, pour quil vive la réalité de tous les jours des habitants et quil soit pour eux un interlocuteur quotidien.
Enfin, je définirai pour le public le plus sensible, les jeunes, parfois les très jeunes mineurs, la réponse la plus rapide, la plus immédiate, par exemple sous forme de réparations. Je ne veux plus entendre des enfants utilisés par des bandes dire à des policiers débordés : « de toutes façons, tu ne peux rien me faire, jai la loi pour moi ! »
Je demanderai que soit mis en oeuvre un plan efficace de lutte contre les trafics darmes.
Tout le monde dit que les armes de guerre circulent librement, depuis des années, en France et particulièrement dans les quartiers. Apparemment, tout le monde sen accommode. Or ceci nest pas acceptable. Là se croisent les organisations du grand banditisme et les trafics de toute nature. Là aussi sarme la folie. La lutte contre le trafic darmes sera définie comme une priorité de laction publique.
Mais le plus grand enjeu du redressement, cest de retrouver la confiance. La confiance, clé du redressement, qui doit unir le peuple des citoyens et les dirigeants à qui il confie pour un moment la charge de le conduire.
En France, la confiance sest affaiblie. Le « tous pareils » est devenu, avec le haussement dépaules qui laccompagne, la réponse type aux déclarations politiques.
Cest pourquoi je règlerai de manière définitive la question de la moralisation de la vie publique.
Elu Président de la République le 6 mai, j'organiserai le 10 juin, jour du premier tour de l'élection législative et en même temps que celle-ci, un référendum de moralisation de la vie publique en France. Je soumettrai aux Français directement les questions irrésolues depuis tant dannées :
Je mettrai fin au cumul des mandats pour les députés et je les limiterai pour les sénateurs.
Jobligerai les parlementaires à siéger effectivement dans leur assemblée et ils ne pourront voter que sils sont présents.
Je modifierai le mode de scrutin des députés pour quenfin tous les courants dopinion puissent être représentés au Parlement.
Je réduirai le nombre de députés à 400, et je réduirai aussi le nombre de sénateurs.
Je reconnaîtrai le vote blanc comme un suffrage exprimé à toutes les élections.
Je renforcerai lobligation de parité pour que l'on sorte enfin de cette anomalie qui met la France à la 61ème place parmi les pays du monde pour la place des femmes dans la vie publique.
Je mettrai fin aux dérives du financement de la vie publique en supprimant la myriade de micro-partis individuels ou de complaisance.
Le référendum définira le conflit d'intérêt, obligera à la déclaration publique des intérêts privés avant l'entrée dans la fonction et lors de toute modification. Il fixera les incompatibilités, il traitera aussi bien des responsables politiques que des hauts fonctionnaires.
Il instituera une autorité de déontologie de la vie publique qui pourra être saisie directement par les citoyens et il empêchera le retour dans la vie publique avant une période de dix ans des élus condamnés pour corruption.
Le référendum rendra intangible et protégera pour l'avenir l'indépendance de la justice. Cette indépendance sera garantie par un nouveau statut pour le Garde des Sceaux, dont la nomination devra être approuvée par une majorité renforcée du Parlement.
Je protégerai et serai le garant de lindépendance des médias, et mettrai un terme à la procédure scandaleuse qui fait de la nomination des présidents de l'audiovisuel public l'apanage personnel du chef de l'État.
Voilà comment, en quatre semaines et un dimanche, la démocratie française prendra un nouveau visage.
Lespoir, cest le renouveau.
Ce que je propose à notre pays, cest de se redresser.
Cela passera par un profond changement des esprits que je porterai et de la volonté politique de la nation.
Tout ceci, vous le voyez bien, ne peut se faire par les voies classiques, traditionnelles, usées jusquà la corde.
La réussite de ce changement serait impossible avec une réélection du président sortant et de la majorité en place. Ils ont heurté les Français, au cours de ces années, par linjustice et lesprit de clan. Ils ont opposé les Français les uns aux autres. Ils nobtiendront pas le soutien nécessaire au redressement.
La réussite de ce changement est impossible avec lélection de François Hollande et dune majorité de gauche. Le programme insoutenable adopté par le parti socialiste et son candidat, la surenchère déboussolée de ses partenaires, les attentes démesurées quils ont fait naître, tout cela rend impossible luvre de redressement. Ils perdront en quelques semaines le soutien nécessaire.
Vous vous souvenez de 2007 : jai dit aux Français, sans précautions, où les conduisait la course effrénée vers le déficit et la dette. Je nai pas mis des peut-être et des conditionnels. Jai dit avec gravité, et tout au long de la campagne, ce que je ressentais comme grave. Le monde politique a ignoré ces avertissements et a poursuivi son chemin.
Aujourdhui je vous dis avec la même certitude ceci : aucun des programmes, aucune des attitudes des deux candidats favoris, aucune de leurs majorités ne peut permettre au pays de sen sortir. Lun ignore les risques en prétendant que « les économies, cest fini », lautre les aggrave de plusieurs dizaines de milliards annuellement. Tous les deux truquent leurs chiffres en parfaite connaissance de cause en présentant des prévisions de croissance quils savent, tous deux, absolument fallacieuses.
Quand on doit affronter la situation que la France va devoir affronter, il nest quune chose à faire, une seule, celle quelle a toujours choisi dans son histoire. Quand les circonstances sont exceptionnelles, il faut une démarche politique exceptionnelle !
Devant un défi national, il faut une union nationale.
Lorsque le Général de Gaulle fut investi de la même charge, dans des circonstances de même gravité, il navait pas de force parlementaire. Il convia donc à participer au redressement les quatre forces principales du pays, les gaullistes, le centre, la droite et la gauche, hors extrêmes.
Je ne suis pas le Général de Gaulle, dieu sait ! Mais la France est dans le même état. La guerre dAlgérie mise à part, peut-être même est-elle dans un état plus inquiétant.
Le redressement va demander un effort soutenu, de rigueur, de sérieux, de persévérance, denthousiasme, de compréhension des enjeux du monde, de force de conviction européenne.
Cet effort impose un gouvernement qui dépasse la droite et la gauche.
Cest ce gouvernement que je composerai. Il sera peu nombreux. Il sera fondé sur la compétence et le désintéressement: compétence éprouvée et désintéressement absolu. Ses membres devront prendre lengagement dêtre et de demeurer ensemble pour redresser le pays. Lexpérience de la société civile y tiendra autant de place que la politique. Cest le choix qua fait Mario Monti, dont les premiers mois donnent à espérer à tous ceux qui aiment lItalie.
Le 10 juin, jour du premier tour des élections législatives, les Français voteront par référendum la loi de moralisation de notre démocratie.
Le 17 juin, les Français donneront une majorité à loeuvre de redressement et dunité nationale.
Avant le 14 juillet, le gouvernement préparera une loi de finances rectificative qui portera en particulier sur des économies dans le fonctionnement de lÉtat, la création dun point de TVA et labaissement des niches fiscales.
Avant le 14 juillet, il créera la possibilité dun emploi sans charges pour toutes les entreprises de moins de 50 salariés.
Avant le 14 juillet, je mettrai en place le Commissariat aux stratégies de production et je lancerai la réflexion, filière par filière, avec les entreprises, les représentants des salariés et tous les acteurs du financement de léconomie.
Exceptionnellement, il ny aura pas de vacances parlementaires et le Parlement siègera pendant tout lété.
Le Parlement, pendant la session extraordinaire, préparera une loi-cadre sur le « produire en France » et se prononcera sur un texte portant diverses mesures durgence : en particulier, la suppression de la caution pour les locataires et la création dune mutuelle obligatoire pour les risques locatifs et, dans le domaine de la santé, lautorité indépendante chargée de lalerte.
Durant lété, je lancerai le Grenelle de léducation dont les conclusions me seront rendues avant la fin de lannée 2012.
À lautomne, après discussion approfondie avec les partenaires sociaux, un grand projet de loi sociale sera débattu au Parlement, en même temps que le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il permettra entre autres la participation des salariés aux conseils dadministration et aux comités de rémunération des entreprises. La loi visera à limiter le recours aux CDD et au temps partiel abusif et à supprimer les freins à la création demploi. Je proposerai que soit soumis aux partenaires sociaux lidée dun contrat de travail unique fondé sur une consolidation progressive des droits.
Branche par branche, je demanderai aux partenaires sociaux que soient examinées des propositions adaptées et nouvelles afin daugmenter le pouvoir dachat des salariés.
Durant cette session parlementaire, le gouvernement soumettra également au Parlement une loi sur la presse qui traitera de lindépendance des médias, particulièrement des médias publics, de la protection des sources, des droits et devoirs des journalistes...
Pour soutenir les associations et reconnaitre leur rôle irremplaçable dans la société, jouvrirai la possibilité de bourses dengagement, offertes en contrepartie dun engagement de jeunes ou de seniors, la validation des acquis de lexpérience et je définirai un cadre juridique de lemploi bénévole.
Je ferai enfin voter avant la fin de lannée 2012 une loi sur légalité hommes- femmes, qui traitera de la parité politique, de légalité salariale, des violences conjugales.
Dès la fin de 2012, le paysage de la France aura changé. Les conditions du redressement seront réunies.
Voilà le seul espoir pour notre pays, voilà le renouveau.
Cela est mon combat.
Pour cela, on aura besoin de tous les Français qui partageront la même lucidité et la même volonté. Des Français de droite, des Français de gauche, et des Français du centre, et de tous ceux qui ne sont pas étiquetés. On aura besoin des valeurs des uns et des valeurs des autres.
Il est des valeurs de gauche que jaime et dont la France aura besoin : le partage, lattention au plus faible, la générosité. Il est des valeurs de droite que jaime et dont la France aura besoin : lesprit dentreprise, le sens de leffort, la fierté nationale. Et le centre a ses valeurs, dont on aura besoin : la solidarité, lesprit de justice, lidéal européen.
Ces valeurs sont compatibles, elles se rejoignent par le haut. Cest le sectarisme qui les a rendues incompatibles.
Le temps nest plus au sectarisme.
Luvre historique qui nous attend exige que les forces du peuple français soient réunies, au moins pendant cinq ans, pour éteindre lincendie et rebâtir la maison.
Je serai le président de ce courage. Je serai le président de ce rassemblement. Je serai, pour vous et avec vous, pour les Français rassemblés, le président de cet espoir.Source : http://www.bayrou.fr, le 26 mars 2012