Déclaration de Mme Nicole Bricq, ministre du commerce extérieur, sur ses priorités pour faire face à la situation éocnomique difficile et sur le rôle de l'agence Ubifrance, Paris le 17 septembre 2012.

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Circonstance : Journée UBIFRANCE, à Paris le 17 septembre 2012

Texte intégral

Monsieur le Directeur Général,
Mesdames, Messieurs,
Cette rencontre est une urgence autant qu’un plaisir pour moi. Je vais vous parler de manière directe et franche. Cela facilitera le dialogue.
UBIFRANCE, c’est le bras armé de mon Ministère, des moyens, des implantations, des hommes et des femmes mobilisés pour la réussite commerciale de la France à l’export. Je m’y implique totalement. Je l’ai fait au moment des négociations budgétaires dans le contexte délicat de nos finances.
Je l’ai fait car nous avons besoin de vous pour redresser l’économie. Le Premier Ministre a fixé un objectif – l’équilibre du commerce extérieur hors énergie en cinq ans - son atteinte m’engage personnellement mais je n’y arriverai pas seule, l’effort doit être collectif. Pour cela vous avez besoin non seulement de connaître le cap mais de comprendre l’action que j’entends conduire.
La situation économique est grave. Nous traversons une crise sans précédents. Un ordre ancien du monde s’est effondré que rien n’est encore venu remplacer. Comme toute période historique de transition, la nôtre est faite de collapsus et de conflits, de tensions et de déséquilibres.
La France n’a pas trouvé sa place dans la mondialisation. Elle doit et peut la trouver. Le commerce extérieur prend toute sa place dans la bataille économique conduite par le gouvernement.
L’objectif que m’a fixé le Premier Ministre est clair. C’est un objectif ambitieux et volontariste. Nous devons l’atteindre.
L’objectif fixé par le Premier Ministre nous oblige à regarder à la fois les grands contrats mais aussi le commerce courant, en volume la part la plus importante. Il représente 400 milliards sur les 430 milliards de commerce extérieur en 2011.
Je n’oppose pas, ce faisant, grands groupes et PME ou ETI. Tous ont leur place. Mais c’est dans ce commerce courant que nos PME et nos ETI trouveront à s’internationaliser. C’est là aussi que votre métier, l’accompagnement des entreprises à l’international, est vital pour les y aider.
I. La stratégie
Je veux donc agir dans quatre directions :
1. Définir des filières prioritaires pour les inciter à structurer une démarche internationale de filière qui favorise l’intervention collective sur les marchés étrangers et permette un renouvellement du portage entre les grands groupes à l’égard des PME ; mais le portage doit aussi les concerner au-delà de leur filière.
2. Améliorer le financement de l’export. Nos grands groupes ne disposent pas, aujourd’hui, des mêmes conditions de garantie à l’export que celles pratiquées dans d’autres pays. C’est un désavantage majeur. Nous travaillons à trouver une réponse pertinente qui nécessitera des modifications législatives avant la fin d’année 2012. Pour ce qui concerne les PME, J’ai obtenu, mais j’y reviendrai, que le volet export de la Banque Publique d’Investissement soit concomitant à sa création ;
3. Nous devons mieux repérer, sélectionner et préparer les entreprises capables d’aller vers l’international. Je compte m’appuyer fortement sur les Régions. Maintenant que le cap est fixé entre Etat et Régions au sujet de la Banque Publique d’Investissement, je peux aller de l’avant avec elles. Je les verrai demain. Elles organiseront, comme le prévoit la déclaration commune publiée la semaine dernière entre le Président de la République et les Régions, le dispositif d’appui au développement international des PME et des ETI. Votre démarche devra être plus sélective (toutes les entreprises qui viennent sur les salons ne sont pas forcément toutes aptes à l’international). Elles le feront avec d’autres opérateurs, et notamment les pôles de compétitivité et les CCI, en lien aussi avec les centres régionaux de la BPI. Elles animeront les déclinaisons régionales de mon plan d’action. Pilotes ou chefs de file, la dénomination importe moins que leur rôle, majeur, central.
4. Réussir le pari de l’implantation durable des entreprises. Nous aurons besoin d’une approche spécifique pour les entreprises à fort potentiel et les ETI afin de développer leurs exportations et d’assurer leur présence sur les marchés étrangers. Dans ce cadre, la diplomatie économique que je mets en oeuvre avec Laurent Fabius est une mission nécessaire mais pas suffisante. Vous aurez à conduire une action de terrain que vous êtes les seuls, aujourd’hui, à pouvoir mener. Vous êtes des acteurs de la diplomatie économique.
Je ne crois guère à une action sans stratégie de produits ni priorités géographiques. Aussi, je mettrai en oeuvre, très prochainement, des couples pays-produits qui nous permettront d’agir sélectivement et de coupler l’offre commerciale de nos ETI avec les besoins pays, voilà votre tâche.
A cet égard, trois grandes zones géographiques me paraissent évidentes, l’Europe, les grands émergents, et ceux que j’appelle les émergents de Taille Intermédiaire, la Turquie, la Colombie, le Maroc… et les nouvelles terres de croissance en Afrique.
J’ai commandé à la Direction Générale du Trésor une étude des zones de croissance et des marchés porteurs en leur sein. Ce travail nous permettra de faire porter notre effort sur des couples pays/produits performants tout en effectuant une veille vigilante sur les autres.
II. Le rôle d’UBIFRANCE
UBIFRANCE est désormais une agence reconnue pour son professionnalisme. La réussite de l’intégration du réseau commercial de la DG Trésor, l’augmentation du nombre d’entreprises accompagnées, la croissance forte du nombre de prestations sont autant de succès à votre actif. Mais, comme disait Camus « tout accomplissement est une servitude, il oblige à un accomplissement plus haut. » Le temps est venu, pour UBIFRANCE, d’une deuxième étape, beaucoup plus qualitative.
Vous mettrez désormais en oeuvre des prestations de service sélectives et approfondies destinées à accompagner l’entreprise avec un projet individualisé, personnalisé et inscrit dans la durée.
Votre coeur de cible, ce sont les ETI et les PME qui peuvent s’internationaliser durablement. Le FSI a identifié plus de 800 ETI stratégiques. Vous proposerez à chacune d’entre elles un programme de prospection et d’accompagnement personnalisé triennal et contractualisé.
L’agence doit prolonger ses séquences d’accompagnement au-delà de la phase de prospection, en développement commercial.
Enfin, il vous faut identifier à l’étranger le potentiel clients de nos entreprises, en précisant ses besoins et en lui proposant de rencontrer des entreprises sélectionnées que vous aurez préparées à cette rencontre.
Le rôle d’UBIFRANCE en Région doit lui aussi évoluer.
Je souhaite que vous accompagniez la future BPI dans ce qui constituera le volet conseil de sa mission. Sur le modèle de vos ingénieurs d’affaires, des agents d’UBIFRANCE pourraient prendre leur place aux côtés des collaborateurs de la BPI en charge des financements, des fonds propres, des prêts et de l’innovation, dans ce qui constituerait la porte d’entrée pour l’international. Ces nouveaux développeurs à l’international d’UBIFRANCE seraient ainsi en mesure d’accompagner les ETI et de jeunes entreprises innovantes en conseil à l’export dans la durée.
L’expertise internationale d’UBIFRANCE sera essentielle à la réussite de la BPI. Je souhaite qu’UBIFRANCE soit pleinement associée à la BPI. Cette participation n’implique pas de réforme organique. Je ne veux pas de réforme « mécano » perturbant les personnels et l’outil qu’est UBI. L’agence ne sera pas intégrée à la BPI dans cette première étape.
Je l’ai dit, j’entends renforcer le rôle des Régions. Dans la mesure où il leur appartiendra de repérer les entreprises à plus fort potentiel export et de définir leurs priorités en termes de soutien, votre agence doit devenir un opérateur connu et reconnu par les Régions.
Je souhaite que les Régions élaborent des plans régionaux pour l’internationalisation des entreprises. L’agence pourra être impliquée dans leur mise en oeuvre et dans l’identification et l’accompagnement des entreprises. Vous avez déjà des conventions avec certaines Régions. Vous aurez à répondre, dans ce cadre ou un autre et si les Régions le décident, aux besoins spécifiques identifiés dans les plans régionaux.
L’agence, en partenariat avec d’autres acteurs le cas échéant, doit être le partenaire opérationnel des Régions. J’entends d’ailleurs qu’elles trouvent rapidement une plus juste place dans la gouvernance d’UBIFRANCE.
Je discuterai, enfin, avec les Régions, de leur présence à l’étranger et de la nécessité d’optimiser l’action française à l’international.
Mes orientations devront se retrouver dans le nouveau cadre stratégique de l’agence. Aussi, je souhaite que soit révisé, avant la fin du premier trimestre 2013, le Contrat d’Objectifs et de Performances (COP) qui vous lie à l’Etat. Il fixera à l’agence des objectifs qui porteront sur l’accompagnement dans la durée des entreprises et leur réussite à l’international, ainsi que sur la démarche client. Il proposera des actions définies en fonction de la taille et des besoins des entreprises et devra dire, avec clarté, ce que sont nos priorités en termes de types d’entreprises, de filières et de marchés.
Ces propositions d’action, vous les attendiez. Elles ne sont pas fermées. Avec le directeur général, nous les préciserons.
Nous avons tous l’envie de réussir. Nous avons tous la fierté d’être français. Nous sommes bons mais la mondialisation appelle l’excellence. Nous allons ensemble y accéder. Cela demande de la volonté et un peu de temps, nous avons un quinquennat.
Je vous remercie.
Source http://www.commerce-exterieur.gouv.fr, le 18 septembre 2012