Déclaration de Mme Fleur Pellerin, ministre des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique, sur l'importance des PME dans le paysage économique et industriel français, Paris le 27 septembre 2012.

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Circonstance : Forum "Pérennité et compétitivité des ETI", à Paris le 27 septembre 2012

Texte intégral

Mesdames et Messieurs les Présidents et dirigeants d’ETI,
Mesdames et Messieurs,
Je me réjouis de clôturer ce jour votre forum consacré opportunément à la « pérennité et à la compétitivité des ETI ». La situation des entreprises françaises est une préoccupation majeure du Gouvernement. Dans quelques semaines, Louis GALLOIS remettra au Premier Ministre de nouvelles propositions pour redresser la compétitivité de l’économie française.
Dès la rentrée, le Président de la République a ouvert la voie: les annonces qu’il a faites le 20 septembre dernier à l’occasion de la remise du Prix de l’Audace Créatrice marquent le point de départ d’une mobilisation nationale en faveur des PME, qui sont la clé de la croissance de notre pays.
Les PME françaises, qui souffrent aujourd’hui d’un accès insuffisant aux fonds pourront bientôt accéder à de nouvelles ressources d’épargne, à partir d’un nouveau dispositif de type PEA (plan d’épargne par action), qui leur sera entièrement dédié.
François HOLLANDE l’a également clairement dit : les différents dispositifs fiscaux en faveur de l’investissement dans les PME (ISF-PME et réduction d’impôt sur le revenu) seront maintenus tout au long du quinquennat. C’est une bonne nouvelle pour les PME. C’est aussi un signal fort pour l’ensemble des entreprises, qui ont besoin de stabilité pour se consacrer pleinement à leur activité économique.
Enfin, le chef de l’Etat le sait bien : investir aujourd’hui dans l’innovation, c’est créer les conditions de la croissance de demain. Sa décision de renforcer le statut des Jeunes Entreprises Innovantes (JEI) et d’étendre le Crédit d’Impôt Recherche (CIR) aux dépenses d’innovation va enfin donner la possibilité aux PME françaises de combler leur retard en matière d’innovation par rapport à leurs homologues allemands et nordiques.
Pourquoi insister auprès de vous sur ces annonces ? Pour une raison simple : en tant que dirigeants d’entreprise de taille intermédiaire (ETI), vous mesurez mieux que quiconque à quel point l’itinéraire qui vous a conduit de la création d’entreprise il y a plusieurs années pour vous amener aujourd’hui à la tête d’une ETI, est un itinéraire délicat, voire périlleux. Tout ce qui pourra demain alléger les contraintes des PME servira aussi la cause des ETI.
Faire grandir son entreprise, la faire prospérer malgré la crise et la hisser jusqu’à la catégorie désormais reconnue par la loi, depuis 2008, d’entreprise de taille intermédiaire (ETI), c’est l’espoir d’un grand nombre de dirigeants de PME.
C’est aussi l’espérance du Gouvernement qui sait bien que l’ambition de faire émerger un plus grand nombre d’ETI trouve des justifications économiques irréfutables pour amorcer le redressement productif que nous attendons tous. Nul besoin d’être grand clerc pour s’en rendre compte : les ETI françaises sont en grande partie industrielles ; elles sont aussi très dynamiques en matière de R&D (26,5% des dépenses privées de R&D des entreprises françaises). Enfin, elles sont, le plus souvent, très actives à l’export.
Pour le dire plus nettement encore : à mes yeux, les ETI françaises incarnent à bien des égards un capitalisme vertueux, appuyé sur une logique de croissance à la fois patiente, équilibrée et riche en emplois. Un capitalisme qui doit beaucoup au goût d’entreprendre et à la prise de risque. Une prise de risque que vous assumez chaque jour avec ténacité, courage et dignité, mesdames et messieurs les chefs d’entreprise.
Ténacité. Courage. Dignité. Il vous en faut en cette année 2012 où les perspectives d’évolution des carnets de commandes, je le reconnais, se sont un peu assombries sous l’effet du ralentissement de la conjoncture en Europe.
Malgré un resserrement des conditions d’accès au crédit et des tensions au niveau de leur trésorerie, j’observe avec satisfaction que les ETI, sous votre direction, continuent d’aller de l’avant : les prévisions d’investissement et de création d’emplois restent positives, même si elles marquent une inflexion par rapport à 2011.
Je veux le dire ici avec force : les ETI sont le modèle de croissance gagnant pour l’économie française ! Mais ce modèle reste –hélas- encore largement l’exception aujourd’hui tant notre tissu productif hexagonal est éclaté !
Les grandes PME en France (50-249 salariés) représentent seulement 1% des entreprises non financières contre 1,5% aux Pays-Bas et 2,3% en Allemagne. Quant aux ETI, à proprement parler (250-4999 salariés) : elles sont encore très rares puisqu’on en dénombre à peine 4 600 aujourd’hui, soit trois fois moins qu’en Allemagne et deux fois moins qu’en Grande Bretagne.
Il y a plusieurs raisons à cela. Pour aller droit au but, je considère que nos PME naissent en France « petites » (en nombre de salariés mais aussi en capitaux propres) et peinent à combler par la suite ce retard de croissance. Elles y parviennent d’autant plus péniblement qu’un « plafond de verre » fragilise encore leur croissance aux différentes étapes de leur développement. Un chiffre résume cette spirale négative : la moitié des entreprises créées dans notre pays disparaît au bout de cinq ans !
Lorsqu’une PME et, a fortiori, une ETI parvient à échapper à cet engrenage parfois fatal et à se développer malgré tout, encore lui faut-elle résister à une autre menace : l’aspiration par un groupe, qu’il soit français ou étranger. Je rappelle que ce sont tout de même 14% des PME de 100 à 249 salariés qui sont absorbées chaque année par un grand groupe ! Pour les ETI, cette tendance est encore plus marquée puisque 16,5% des entreprises de 250 à 499 salariés sont rachetées annuellement par une grande entreprise…
Alors, comment inverser progressivement cette spirale et travailler dans la durée à faire croître nos entreprises pour leur permettre de gagner la bataille de la compétitivité et de l’innovation ?
Je veux insister ici sur trois axes de travail actuellement privilégiés par le Gouvernement. Ils sont autant de repères qui guident chaque jour mon travail de ministre, chargée des PME, de l’innovation et de l’économie numérique :
- il nous faut d’abord sans tarder briser le plafond de verre qui pénalise la croissance aussi bien des PME que des ETI tant les unes et les autres demeurent encore victimes, dans leur accès au financement, des défaillances de marché : la mise en place prochaine de la Banque publique d’investissement (BPI) dont les ressources seront principalement dirigées vers les PME et les ETI autant que les annonces faites par le Président de la République le 20 septembre dernier et que j’ai rappelées tout à l’heure, vont dans le bon sens ;
- nous devons aussi simplifier et faciliter encore la vie des entreprises, et ce, à chaque étape de leur développement : je crois indispensable d’alléger les contraintes réglementaires qui pèsent sur les entreprises, notamment dans les domaines techniques : songez qu’aujourd’hui un grand nombre de réglementations françaises sont beaucoup plus exigeantes que ce qu’imposent les directives européennes. On ne peut tout de même pas demander aux chefs d’entreprise français de systématiquement courir avec un boulet aux pieds tout en leur demandant d’atteindre des objectifs ambitieux de croissance et d’emplois ! ;
- je veux, enfin, encourager l’esprit d’initiative et faire sauter les différentes barrières à la création et au développement des entreprises dans notre pays. J’ai demandé à Philippe HAYAT, un entrepreneur de renom, de me faire des propositions pour valoriser l’esprit d’entreprise en France, chez les jeunes, chez les femmes, chez toutes celles et ceux qui ont envie de créer mais qui ne le font pas toujours de peur d’échouer, de peur qu’on ne les aide pas. Je crois qu’il faut changer le logiciel culturel français pour qu’enfin on puisse donner ses lettres de noblesse à la prise de risque…et à son corollaire, l’échec. Je veux valoriser l’échec utile. Aux Etats-Unis, un échec, c’est une expérience ; en France c’est une porte qui se ferme. Notre pays a évolué ces dernières années, mais il reste un immense travail à faire sur les mentalités.
Pour tous ces chantiers – briser le plafond de verre, simplifier la vie des entreprises, encourager l’esprit d’initiative - je veux pouvoir compter sur vous, mesdames et messieurs les dirigeants d’ETI.
Grâce à votre mobilisation et votre détermination aux côtés de la mienne, nous bousculerons les habitudes et ferons émerger ensemble une culture plus propice à la conquête économique !
Je vous remercie pour votre attention.
Source http://www.asmep-eti.fr, le 15 octobre 2012