Déclaration de Mme Fleur Pellerin, ministre des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique, sur le soutien à la création et au développement des entreprises, Paris le 16 octobre 2012.

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Circonstance : Lancement du 20ème anbniversaire du Salon des entrepreneurs, à Paris le 16 octobre 2012

Texte intégral

Monsieur le Président Directeur Général du Groupe Les Echos,
Mesdames et Messieurs les dirigeants d’entreprises,
Mesdames et Messieurs les acteurs de l’accompagnement des PME,
Mesdames et Messieurs,
C’est avec un très grand plaisir que je me joins à vous à l’occasion du lancement de la 20ème édition du Salon des Entrepreneurs qui se tiendra à Paris, Lyon et Nantes les 6 et 7 février prochains.
Avec plus d’un million d’entrepreneurs accueillis en vingt ans, le Salon des Entrepreneurs est indéniablement devenu au fil des ans un événement de référence, si ce n’est d’ailleurs l’événement de référence en France comme en Europe, pour tous les créateurs et dirigeants d’entreprise.
Parce qu’il réunit près de 350 partenaires, tous les réseaux et professionnels de l’accompagnement des petites et moyennes entreprises, qu’ils soient publics, parapublics ou privés, je vois dans ce Salon une formidable plate-forme d’action, de réflexion mais aussi de communication pour promouvoir les PME françaises et, plus globalement, l’esprit d’entreprise dans notre pays.
Cette soirée de lancement du Salon des Entrepreneurs est un moment important à mes yeux car, même si j’ai eu l’occasion de les recevoir ou de venir à leur rencontre tout récemment encore à l’occasion de la visite du Salon des micro-entreprises, je veux dire mon plaisir ce soir de m’adresser aux représentants des réseaux d’appui à la création et au développement des entreprises. Je mesure bien qu’avec plus de 500 000 créateurs d’entreprise supplémentaires chaque année, leur travail d’accompagnement représente une tâche immense, une responsabilité considérable.
Je veux ici les saluer et leur dire à quel point j’attache une importance particulière à leur mission de repérage précoce, d’information et de conseil aux nouveaux talents grâce à l’émergence desquels notre économie bâtit jour après jour son avenir, c'est-à-dire la croissance et nos emplois de demain.
Mesdames et Messieurs, je le dis sans arrière-pensées mais plutôt animée par la passion d’une femme sensibilisée depuis son plus jeune d’âge à l’esprit d’entreprendre : le rassemblement de ce soir illustre bien notre volonté commune, j’en suis persuadée, de faire progresser notre pays en s’appuyant sur ses entrepreneurs.
Ceux qui seraient tentés d’opposer prospérité de nos entreprises et bien-être social de leurs salariés se tromperaient lourdement. Ceux qui feindraient de tourner le dos aux entrepreneurs ou de les stigmatiser sous de mauvais prétextes feraient un bien mauvais calcul : le redressement productif et le progrès social dans notre pays sont deux objectifs aussi impérieux qu’indissociables.
Ce rassemblement, cette foi dans l’esprit d’entreprendre dont nous témoignons ce soir par notre présence, ici, ensemble, doit aussi beaucoup à la mobilisation du Groupe Les Echos. Je veux rendre ici hommage à ses dirigeants, à leurs salariés qui ont organisé cette soirée à un moment charnière de leur histoire.
Chacun connaît la place, monsieur le Président, qu’occupe déjà votre quotidien auprès des décideurs de l’entreprise, qu’ils appartiennent à un grand groupe ou bien à une PME. Je souhaite de tout coeur que le virage numérique que vous êtes en train d’accomplir à travers le lancement cette semaine de la nouvelle formule Les Echos.fr, rassemblant déjà aujourd’hui 3,5 millions de visiteurs uniques par mois, remporte les succès économiques escomptés et contribue encore à développer auprès des dirigeants des petites et moyennes entreprises l’information économique qui leur est si utile.
C’est en se jetant ainsi à l’eau, comme vous le faites, qu’on apprend à nager... et non en restant à distance du bassin ! Laissez-moi vous dire que le Gouvernement auquel j’appartiens prend de son côté toutes les responsabilités qui sont les siennes pour s’adapter à son tour à la crise et tracer un chemin de croissance vertueux.
Alors, n’en déplaise à ceux qui en douteraient encore, avec le projet de Budget pour 2013, la France, à l’initiative du Chef de l’Etat et du Premier ministre, s’engage pleinement et à raison dans un effort de redressement des comptes publics sans précédent. Il le fallait : devait-on se résigner à ce que la dette publique qui a déjà augmenté de 600 milliards d’euros en cinq ans, devienne le fardeau qui demain devra être porté par nos enfants ?
Le Gouvernement revendique et assume totalement la nouvelle discipline budgétaire qu’il propose aux Français. Pour investir dans la recherche, dans l’innovation ou encore dans le capital humain qui, bien plus encore que les autres dépenses, conditionnent le redressement productif et la compétitivité, il n’est, à vrai dire, pas d’autre voie.
Bien sûr, l’effort est important : à la hauteur de l’objectif indispensable de ramener le déficit au niveau de 3% du PIB. Mais il est équitablement réparti : un tiers pour l’Etat, en diminuant la dépense, un tiers pour les grandes entreprises - tout en protégeant les PME -, un tiers enfin pour les ménages - mais en protégeant les classes moyennes et les classes populaires.
S’agissant des entreprises, qui pourrait d’ailleurs s’offusquer de ce rééquilibrage alors que chacun sait aujourd'hui que, grâce à des mécanismes d'optimisation fiscale, telle que la déductibilité des intérêts d’emprunt, les grands groupes paient jusqu’à 14 points de moins de taux d'imposition effectif sur les bénéfices que les PME ? Notre intention n'est pas de pénaliser les grandes entreprises, vous l’aurez compris, mais de demander à chacun un effort proportionné à la richesse qu’il dégage.
L’exemplarité et l’équité sont à ce prix. L’efficacité économique aussi. Car plus les entreprises françaises sont petites et plus elles sont vulnérables, surtout lorsqu’elles nourrissent une ambition de croissance rapide. Songez qu’après cinq ans, seules 1,8% des entreprises nouvelles créées franchissent le cap des 10 salariés !
C’est ce phénomène que les experts appellent pudiquement le "plafond de verre". On doit tout faire pour le briser. C’est tout le sens des engagements déjà pris par le Président de la République et dont la mise en oeuvre prochaine garantira le développement des petites entreprises malgré la crise.
Il y a bien sûr la Banque publique d’investissement (BPI) dont le projet de loi sera présenté demain en Conseil des ministres. C’est une réforme majeure pour simplifier l’offre publique de financement et pour mieux soutenir les entreprises dont nous voulons garantir le développement dans ce contexte de crise : les PME bien sûr mais aussi les Entreprises de Taille Intermédiaire (ETI).
Nous voulons donner aussi un véritable élan à l’innovation dans notre pays. Avec l’ensemble du Gouvernement, je ne me résous pas à ce qu’à peine un tiers de nos entreprises aient recours, faute de moyens, à l’innovation alors que plus de la moitié des entreprises allemandes et nordiques y accèdent. Pour combler ce retard, dès 2013, le crédit d’impôt recherche (CIR) sera étendu aux dépenses d’innovation et le dispositif de soutien aux Jeunes Entreprises Innovantes (JEI) sera renforcé.
Des inquiétudes se sont néanmoins exprimées. J’ai tenu personnellement à y répondre. A mon initiative, nous avons reçu, jeudi 4 octobre, avec Pierre MOSCOVICI et Jérôme CAHUZAC, des représentants de PME, notamment issues des secteurs à haute technologie, pour débattre de la fiscalité des plus-values mobilières, que le PLF propose de réformer.
A l’issue de la discussion, le Gouvernement a décidé d’amender son dispositif dans le cadre du débat parlementaire. Il proposera des ajustements pour concilier justice fiscale et efficacité économique. Ce que nous voulons encourager, c’est l’investissement productif, la prise de risque, la création, la transmission d’entreprise, tout ce qui peut favoriser la compétitivité.
Le principe général de justice, qui veut que les revenus du capital et ceux du travail soient traités à égalité, doit prévaloir. Le Gouvernement ne revient pas sur ce point. En revanche, les plus-values réalisées par un entrepreneur qui cède son entreprise après l’avoir lui-même développée méritent un traitement spécifique. Loin d’être une rente, cette plus-value rémunère la prise de risque du chef d’entreprise.
Au-delà de ce débat, je le redis comme je le pense, à la fois très circonstancié et non dépourvu d’arrière-pensées partisanes, de quelles attentes plus profondes les entrepreneurs me font-ils part inlassablement depuis mon arrivée au Gouvernement ? Elles se résument, à vrai dire, en une phrase simple: "Simplifiez-nous la vie et permettez-nous d'évoluer dans un environnement plus propice à l'esprit d'initiative et de conquête économique !".
S’agissant de la simplification, le chantier est assurément immense. Certains économistes, sans doute de bonne foi, me disent qu’une majorité d’entreprises de petite taille adoptent trop souvent un comportement "défensif" dans notre pays. Qu’elles ont une propension naturelle à se rétracter plutôt qu’à s’ouvrir à de nouveaux débouchés, m’expliquant par exemple que 90% d’entre elles concentrent leur clientèle à moins de 20 kilomètres de leur siège social. C’est sans doute vrai. Mais s’est-on seulement posé la question des freins à leur dynamique d’expansion ?
Ce n’est pas le repli sur soi, la rétractation qui est le mouvement naturel de l’être humain en général ou de l’entrepreneur en particulier.
Qu’on ne se méprenne pas sur les enjeux réels : lorsqu’à l’occasion de la réponse à un appel d’offres, l’on exige d’une PME une multiplicité de pièces qui lui avaient déjà été demandées lors d’une précédente consultation, ne pousse-t-on pas ses dirigeants à adopter une posture "défensive" et à limiter, de facto, leur désir d’expansion ?
Autre exemple de contrainte qui peut pousser au malthusianisme économique : lorsqu’un entrepreneur souhaite - pour se développer, investir, innover ou encore exporter - identifier un point de conseil, d’accompagnement financier ou stratégique et qu’il est placé face à un "maquis d’aides publiques aux entreprises" - il n’y a pas d’autre mot pour désigner ce foisonnement - s’étonnera-t-on du malaise qu’il ressent, de la difficulté qu’il éprouve à se repérer parmi ces dispositifs qui n’ont pas toujours été pensés pour répondre à ses besoins spécifiques ?
Je veux vous donner cette assurance pour l’avenir : je suis bien résolue à faire évoluer ces réglementations et pratiques d’un autre âge qui fragilisent la croissance voire, dans certains cas, la survie de vos entreprises.
Pour s’attaquer à ces blocages, il est souhaitable d’alléger les contraintes réglementaires qui pèsent sur les entreprises, notamment dans les domaines techniques : aujourd’hui un grand nombre de réglementations françaises sont beaucoup plus exigeantes que ce qu’imposent les directives européennes.
Le redressement productif commence ainsi par le retour à l’équilibre des finances publiques. Il se poursuit avec un engagement tout aussi résolu en faveur de la simplification administrative en direction des entreprises.
Enfin, redressement productif et compétitivité - je ne vous apprends rien - sont intimement liés. L’esprit de conquête économique, qui anime chacun et chacune d’entre vous, Mesdames et Messieurs, n’a jamais cessé de souffler dans notre pays. Loin s’en faut. Mais avec des marges qui se sont érodées pour atteindre cette année leur point bas depuis 1985 et une dynamique d’investissement qui s’est ralentie, nos entreprises industrielles, en particulier celles de moins de 250 salariés, affrontent plus difficilement la concurrence internationale.
Le 5 novembre prochain, Louis GALLOIS remettra au Gouvernement son rapport sur les leviers d’action prioritaires à mobiliser pour redresser la compétitivité de l’économie française. Le Président de la République l’a dit à plusieurs reprises : il n’y a - et il n’y aura pas - de question "taboue".
Il n’y aura pas davantage de compromis sur la méthode : qu’il s’agisse de la négociation déjà engagée sur la sécurisation de l’emploi ou de celle sur le coût du travail, rien ne se fera sans le précieux concours des organisations syndicales et des chefs d’entreprise. Plus qu’une simple question de méthode ou même de respect des parties, c’est une garantie d’efficacité !
Mesdames et messieurs, je veux le dire une dernière fois ce soir : à une époque où il est possible de basculer dans la tentation aussi impuissante que vaine de tenir un discours résigné, je voudrais vous dire - au contraire - tout l'espoir que j'ai quant à vos succès à venir. Nos succès à venir. Ceux des entreprises françaises, à l’intérieur et à l’extérieur de nos frontières. Car le "génie français", hier comme aujourd’hui, ne demande qu'à être encouragé pour s'exprimer.
Pour la 20ème édition du Salon des Entrepreneurs qui mettra à l’honneur deux thématiques qui me tiennent à coeur, "les Jeunes et l’Entrepreneuriat" d’une part, et les "Solutions & Usages numériques" pour le développement des jeunes entreprises d’autre part, vous pourrez compter sur ma présence à vos côtés.
Que vous soyez vous-même créateur d’entreprise, dirigeant déjà expérimenté ou à la tête d’un réseau d’accompagnement de PME, je suis convaincue que c’est grâce à votre mobilisation, à votre détermination aux côtés de la mienne, que nous bousculerons les habitudes et ferons émerger ensemble une culture plus propice à la conquête économique !
Je vous remercie pour votre attention.
Source http://www.redressement-productif.gouv.fr, le 23 octobre 2012