Déclaration de M. François Lamy, ministre délégué à la ville, sur la poursuite de la concertation pour la réforme de la politique de la ville et la priorité donnée par le gouvernement à la jeunesse, à Clichy-sous-Bois le 8 janvier 2013.

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Circonstance : Cérémonie de voeux de la ville de Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis) à l'Espace 93 le 8 janvier 2013

Texte intégral

Monsieur le Préfet,
Monsieur le Sénateur,
Monsieur le Député,
Monsieur le Vice-président du Conseil régional
Monsieur le Président du Conseil général,
Monsieur le Maire,
Mesdames, Messieurs les élus,
Mesdames et Messieurs les représentants des associations,
Mesdames, Messieurs,
Avant tout, Monsieur le Maire, cher Olivier, je vous présente mes meilleurs vœux pour 2013, ainsi qu’à votre équipe municipale, dont je connais la mobilisation et la disponibilité au service des Clichois. C’est avec un grand plaisir que j’ai accepté l’invitation d’Olivier Klein - et même, que je ai sollicité la permission de venir - pour ce moment toujours particulier qu’est la cérémonie des vœux d’une commune à ses habitants.
C’est un événement, en ce qui me concerne, que j’ai toujours aimé, lorsque j’étais maire de Palaiseau ; un moment de convivialité, d’échanges, de partage, où l’on sent que la nouvelle année nous donne un regain d’énergie, d’espérances et de courage.
A tous les habitants de Clichy-sous-Bois, je veux souhaiter une belle et heureuse année 2013. Qu’elle soit pour vous l’occasion de passer de bons moments avec vos proches, avec vos amis, de réaliser vos projets collectifs, individuels ou familiaux. Et surtout de garder ou de retrouver la santé et l’énergie pour surmonter les grandes difficultés, comme les petits tracas du quotidien.
Je fais le vœu que les actions déjà en cours pour Clichy-sous Bois, pour le Chêne-Pointu, pour l’Etoile du Chêne-Pointu, continuent d’avancer, grâce au travail conjoint engagé entre l’Etat, la Région Île-de-France et la Ville, travail que nous avons mis en place en septembre dernier. Je souhaite, et je te prie de le croire Olivier, je travaille dans ce sens, que le chantier du désenclavement de la Ville par les transports en commun, je pense au Grand-Paris Express - j’ai bien reçu les messages - et à la ligne T4 du Tramway, continue de progresser et se réalise dans des délais crédibles. Il est capital en effet que des moyens soient donnés aux habitants actuellement exclus des transports collectifs. C’est pourquoi je continuerai, soyez-en assurés, de porter la voix de l’intérêt général dans le domaine des transports publics, pour Clichy-sous-Bois bien entendu et pour tous les quartiers populaires actuellement encore enclavés.
Je souhaite enfin à votre ville une année sans violence. Je veux à cet instant avoir une pensée pour la victime du drame qui a frappé votre ville à la fin de l’année dernière. Mais je pense aussi à ces violences du quotidien, les violences intolérables faites aux femmes ou celles qui frappent les plus faibles. C’est une bataille de tous les instants que nous devons mener pour les faire reculer.
Tu l’as souligné cher Olivier, c’est la première année que j’ai l’occasion de présenter mes vœux en tant que Ministre, et je suis touché que ce soit précisément à Clichy-sous-Bois :
- Parce que, quand le Président de la République, François Hollande, m’a nommé ministre délégué à la Ville auprès de la Ministre de l’Egalité des Territoires et du Logement, Cécile Duflot, c’est dans votre commune que j’ai voulu faire ma première visite, et j’y ai rencontré certains d’entre vous, dans le Bas-Clichy.
- Ensuite, parce que c’est à Clichy, encore, comme tu l’as rappelé, que j’ai signé, en septembre dernier, ce protocole d’accord exceptionnel, pour mobiliser toutes les énergies publiques en faveur de quartiers qui avaient trop longtemps été délaissés par la République,
- La troisième raison, c’est parce que j’ai gardé un très bon souvenir lié à l’Espace 93, où je suis venu discrètement en novembre dernier écouter le concert de Zebda, rencontrer ses artistes et des acteurs associatifs,
- Enfin, parce que j’ai, à Clichy-sous-Bois, des interlocuteurs, des amis, dont l’exigence et la rigueur sont précieuses, je veux parler de son maire Olivier Klein, et de Claude Dilain dont je dis souvent qu’il est tellement attaché à la politique de la Ville qu’il pourrait y avoir pour lui un bureau dans mon Ministère.
Et puis, il m’a paru plus normal en tant que Ministre de la Ville de vous souhaiter la bonne année ici à Clichy plutôt que depuis le Ministère, rue du Bac, dans le 7ème arrondissement de Paris…
Ce que je veux pour Clichy-sous Bois, j’y travaille avec la même énergie pour les 8 millions d’habitants de notre pays qui habitent dans les quartiers populaires. Je sais que dans ces quartiers, encore plus qu’ailleurs, la crise frappe très durement les plus modestes.
Comme l’ont rappelé le Président de la République et le Premier Ministre la semaine passée, l’ensemble du gouvernement est sur le pont pour mener avec ardeur et conviction la bataille indispensable du redressement du pays, pour retrouver de la croissance et bien sûr de l’emploi. Vous le savez, ce sera long et c’est pour cela qu’il ne faut pas changer de cap. La politique de redressement des comptes publics est engagée et elle porte ses fruits. Elle est indispensable car vous le savez bien, comme dans vos familles, on ne vit pas bien longtemps à crédit. Mais la maîtrise des comptes publics n’est pas un objectif en soi. C’est un outil pour redonner à notre pays des marges de manœuvre et des capacités d’agir. Ce redressement nécessite des efforts qui doivent être très justement répartis. Et la polémique ouverte il y a quelques semaines par un acteur célèbre démontre s’il en était besoin que le gouvernement a fait le choix de faire porter l’effort par les plus favorisés.
Tous nos efforts, tous, sont tournés vers l’inversion de la courbe du chômage. Les outils que nous avons mis en place comme la Banque publique d’investissement qui va être opérationnelle dans les prochains jours, la réforme bancaire qui va être votée dans quelques semaines, le contrat de génération qui vient poursuivre l’action que nous avons menée avec les emplois d’avenir, sont autant d’armes à notre disposition. J’ai souhaité ajouter une arme supplémentaire qui sera expérimentée rapidement à Clichy comme dans quatre villes de France, les emplois francs, destinés aux jeunes des quartiers populaires qui sont victimes d’une sorte de double peine, victimes de la crise et victimes d’une stigmatisation liée à leur origine territoriale. Soyez-en certain, notre travail au quotidien est acharné, déterminé, résolu, il vise à mobiliser tous les acteurs de la société pour changer de réalité.
En me nommant ministre délégué chargé de la Ville, le Président de la République, François Hollande, m’a confié une mission passionnante. Celle de rétablir l’égalité républicaine dans les territoires urbains en mobilisant tous les moyens de la République pour améliorer concrètement votre vie quotidienne, pour l’emploi, l’éducation, la culture, la santé ou la sécurité et plus précisément pour préparer l’avenir de toute une génération qui a souvent été oubliée et même parfois humiliée.
L’attente est forte, j’en suis conscient, et dans de nombreux domaines. Ici, en plus de l’action pour l’emploi, il faut modifier l’habitat, il faut transformer la Ville. Et il faut le faire avec les habitants. Chaque maire le sait, chaque élu, et le vôtre tout particulièrement : les politiques locales ne peuvent se construire sans l’adhésion des citoyens. De tous les citoyens. De tous ceux qui contribuent d’abord par leur impôt au bon fonctionnement de la commune.
Et la première de leur expression, c’est la possibilité, bien entendu, de voter. Oui, cher Olivier, tu as raison, il faut poursuivre dans les prochaines semaines le combat pour persuader les 30 parlementaires qui nous manquent actuellement pour que le droit de vote des étrangers non communautaires aux élections locales soit une réalité avant les élections municipales de 2014. Sachez qu’aux côtés de vos parlementaires, j’y travaille également. C’était l’une des revendications de ceux qui, il y a trente ans, sont partis de Marseille vers Paris lors de cette fantastique marche pour l’égalité. Je crois effectivement qu’il est maintenant grand temps de tout faire pour la mettre en œuvre.
En matière de politique de la ville, qu’il s’agisse de la rénovation urbaine ou des politiques publiques, le droit de vote ne suffit pas. Dans ce domaine, je crois en effet à l’action individuelle et collective des citoyens et de leurs associations. Qui sont les mieux placés, sinon les habitants eux-mêmes, pour imaginer et construire avec l’Etat et les élus le devenir de leur Ville et de leur quartier ? C’est pourquoi, à l’intérieur de la grande concertation pour la réforme de la politique de la Ville, j’ai voulu une large participation des habitants et de leurs représentants associatifs. Après plusieurs initiatives, je la poursuivrai demain sous une autre forme dans ce département, à Bobigny. C’est aussi dans cette logique que j’ai confié une mission à Mohamed Mechmache – et Clichy m’inspire, encore - et Marie-Hélène Bacqué pour qu’ils me fassent dans les prochaines semaines des propositions sur les moyens à mettre en œuvre dans la durée pour faire entendre et faire respecter la parole des habitants des quartiers populaires.
Je suis chaque jour impressionné par la richesse des initiatives et des projets qui se développent dans nos quartiers. Je suis persuadé, parce que j’ai déjà pu le constater dans de nombreuses villes, que ce sont vos initiatives, collectives, associatives, qui avec notre soutien, font renaitre l’espoir, participent au développement de l’économie locale, qui redessinent une autre image de nos villes et de nos quartiers et ouvrent un autre avenir pour les enfants et la jeunesse de nos territoires urbains.
Pour les jeunes de Clichy-sous-Bois bien sûr mais également pour tous ces jeunes que je croise dans mes déplacements au cœur de ces quartiers. L’un d’entre eux samedi dernier l’exprimait fortement au Président de la République que j’avais l’honneur d’accompagner en Normandie. Cet adolescent criait fièrement au milieu de la foule : « Je suis citoyen de France ». Cet adolescent, héritier de l’immigration, avait tout dit. Loin des poncifs, des stigmatisations ou des formules faciles et démagogiques, il ne demandait pas à être intégré, il l’était. Et il le revendiquait fortement, comme la très grande majorité de ces jeunes des quartiers, ceux dont on ne parle jamais. Il revendiquait son appartenance à notre communauté nationale et à ses valeurs. Il connaissait ses devoirs, il proclamait simplement, fortement, son identité.
Cette jeunesse c’est la priorité du gouvernement, c’est ma priorité. Elle a le droit à un avenir. C’est la responsabilité du gouvernement, c’est aussi ma responsabilité. C’est pour cela que je me félicite que 30% des emplois d’avenir soient réservés aux jeunes issus des quartiers prioritaires de la politique de la Ville. Et je veillerai dans les prochains mois à ce que cet objectif se traduise réellement dans les faits.
Cette jeunesse, comme tous les habitants des quartiers, elle a aussi le droit de ne plus être montrée du doigt à cause de son origine, sociale ou territoriale. Elle a également le droit au respect que le service public doit à chaque citoyen. C’est le sens de l’engagement numéro 30 du Président de la République lors de la campagne électorale. Je le cite : « Je lutterai contre le délit de faciès dans les contrôles d’identité par une procédure respectueuse des citoyens, et contre toute discrimination à l’embauche et au logement ». Je travaille sur des propositions que je ferai prochainement pour lutter contre ces discriminations. Quant à ce qu’on appelle le délit de faciès, je crois, comme le Ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, au retour d’une police proche des citoyens, je crois à une police qui, pour être respectée, doit forcer le respect et être irréprochable. Et c’est pour cela que je persiste à penser que, sans donner aucun signe positif à la délinquance, et dans l’intérêt même des fonctionnaires de police qui font un travail difficile, il faut poursuivre la réflexion sur l’expérimentation du récépissé lors des contrôles comme l’un des outils possibles de lutte contre les contrôles d’identité à répétition et au faciès.
« Tous différents mais 100% République », c’est le thème, j’allais dire le slogan, de la carte de vœux du Ministère de la Ville. 100% République, cela signifie que dans chacune de nos villes, là où les habitants sont des citoyens actifs pour la vie collective, alors la République, au même titre que partout ailleurs, a le devoir de mettre en œuvre tous ses moyens, au service des habitants, à la hauteur de leurs besoins.
C’est le sens des conventions que je vais signer avec l’ensemble des Ministères dans les semaines qui viennent pour que chacun d’entre eux se fixe des objectifs précis et quantifiables d’actions et de moyens à mettre en œuvre dans les quartiers populaires. Et à ce propos, je conventionnerai avec le Ministre du travail le fait que chaque quartier en politique de la Ville dispose d’une présence de Pôle Emploi.
Cela veut dire également que la solidarité envers les communes les plus pauvres doit s’amplifier. Cela a commencé avec l’augmentation des différentes dotations de solidarité de l’Etat dès cette année 2013. Cela devra se poursuivre dans les prochains mois avec la mise en œuvre des mesures que va me proposer prochainement François Pupponi, le député-maire de Sarcelles.
100% République cela veut dire enfin, et j’en terminerai là, que je souhaite cette année une fantastique mobilisation pour qu’on en finisse avec la stigmatisation des quartiers populaires. Je faisais référence tout à l’heure à la Marche pour l’égalité et contre le racisme de 1983. Ce fut un formidable moment de dignité et de solidarité. Aujourd’hui, loin des médias, ce mouvement se poursuit sur le terrain. Chaque jour, je rencontre des citoyens mobilisés dans le monde associatif de proximité, un monde qui, je le sais, a beaucoup souffert ces dernières années et dont j’ai souhaité qu’il soit une priorité dans les financements de la politique de la Ville de cette année 2013.
Mais je vois aussi des habitants extraordinaires qui loin des clichés faciles se battent pour l’avenir de leurs enfants, qui montent leur entreprise, qui avec ténacité se battent pour l’amélioration des conditions de vie de leur quartier. Cette solidarité qu’exprime magnifiquement la municipalité de Clichy-sous-Bois avec ce message « Il y a des moments où l’on ressent le besoin d’avancer ensemble ». Monsieur le Maire, j’adopte la proposition en souhaitant qu’en 2013, vous ici sur le terrain, moi votre relais au sein du gouvernement, nous avancions ensemble pour que dans nos quartiers, dans nos villes populaires, malgré la crise, on vive mieux qu’avant.
Je vous remercie.
Source http://www.territoires.gouv.fr, le 10 janvier 2013