Déclaration de M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture de l'agroalimentaire et de la forêt sur la place de la forêt dans le redressement économique de la France, Paris le 11 juin 2013.

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Circonstance : Assemblée générale de forestiers privés de France, à Paris le 11 juin 2013

Texte intégral

Monsieur le Président,
Madame, Monsieur,
Mesdames et Messieurs les différents représentants,
Il y a un an, il n’y avait pas encore le titre « forêt » sur le Ministère de l’Agriculture, de l’Agroalimentaire. C’était à quelques heures de la correction qui a vu le Ministre de l’Agriculture, de l’Agroalimentaire être aussi celui de la forêt. Il s’est passé en un an beaucoup de choses, même si on peut considérer que tout cela va trop lentement, vous l’avez dit Monsieur le Président, quand on parle de la forêt, on est sur des projets à long terme et en même temps quand on veut préparer une loi, c’est vrai qu’on est obligé d’engager des processus de discussion qui prennent un peu de temps.
Je reviens ici car je tiens à marquer l’attachement qui est le mien et la continuité qui doit être la mienne par rapport à la question de la forêt et puis par rapport à votre Fédération qui représente par une large majorité de la surface forestière en France. Il y a à la fois une continuité et le respect de l’engagement qui est le vôtre et on est à la veille de la discussion sur une loi d’avenir qui portera sur l’agriculture, l’outre mer et la forêt. Je pense qu’on pourra organiser les débats avec des rapporteurs qui auront chacun une responsabilité sur chacun des textes, même si tout cela fait partie d’un ensemble, je crois que vous êtes attaché à juste raison à ce que la forêt soit dans ce débat parfaitement identifiée. Je veillerai à trouver les moyens pour que dans ce débat il y ait un texte forêt qui soit porté et qui permette à chacun de se repérer dans le cadre général mais avec spécificité qui est la vôtre sur la forêt. Je le disais, on a engagé des discussions, deux rapports ont été présentés au Conseil Supérieur de la Forêt, l’un qui provenait du Conseil Général de l’agriculture de la ruralité et qui a porté sur les grandes questions forestières et le rapport de Jean Yves CAULLET que le Premier Ministre, la Ministre de l’Environnement et moi-même avons missionné pour «défricher » le terrain et offrir des pistes. Vous avez rappelé que dans ce Conseil Supérieur, j’avais moi-même essayé d’arrêter 7 grands objectifs que vous avez repris Monsieur le Président dans votre discours, pour essayer de donner aux rapports qui ont été présentés et avec des mesures qui étaient nombreuses à la fois fiscales, fonds, organisation, débouchés donnaient une structure qui a été reprise aujourd’hui. Un courrier a été envoyé à l’ensemble des participants au Conseil Supérieur de la forêt et des réponses commencent à arriver et vous avez noté dans votre discours que vous étiez force de proposition. On est dans un moment par rapport aux enjeux, on est au moment où on construit ce qui va être l’architecture de la loi et vous avez précisé aussi, et vous avez raison, que ce qui ne relèvera pas uniquement de la loi, il y a du règlementaire aussi. Il y a aussi toutes les questions fiscales qui vont relever du débat sur la loi sur la préparation de la loi de finances, cela va précéder la loi sur la forêt elle-même.
Après je ne vais pas revenir sur les 7 sujets. On essaye de voir les grands objectifs et des choses vont être précisées dans les semaines à venir. Compte tenu des débats qu’il y aura à l’automne et en particulier sur celui de la retraite le débat sur la loi d’avenir commencera au début 2014 ce qui nous laisse un peu plus de temps pour approfondir les sujets qui sont en débat. Un peu plus de temps c’est mieux pour le dialogue et la concertation et comme on est dans des sujets où c’est toujours pareil, on va aller plus haut et on peut dire aussi on va reporter de deux mois ce qui aurait peut être décidé à la fin de l’année.
Mais je pense que compte tenu de l’enjeu et compte tenu du fait que la nouvelle politique agricole commune ne rentrera en application qu’en 2015, on a la cohérence nécessaire pour permettre de gérer avec la volonté de concertation et d’aboutir rapidement dès le début de l’année pour permettre de mettre en place le processus.
Sur les grands objectifs : le premier il y a ce que vous avez évoqué sur la filière et le comité stratégique. Je l’ai dit, je le réaffirme, le Ministre du redressement productif a un peu hésité, aujourd’hui je considérerais qu’on a un accord commun avec Arnaud MONTEBOURG pour que la filière bois soit clairement identifiée dans l’ensemble des filières qui vont participer au redressement productif de notre pays. Il y a derrière de l’économie, de l’écologie, de la dimension sociale de la forêt mais il y a une dimension économique. La forêt doit participer au redressement économique sachant qu’on a fait le constat maintenant on perd de la valeur ajoutée en exportant des billes mais il faut qu’on puisse produire et transformer notre bois en France car c’est à travers de cette transformation qu’on a de l’emploi et de la richesse et ce qui me parait important c’est tout ce qui va être les éléments liés à la transformation. Transformer les billes cela fait de la scierie, ça peut faire de la cogénération et on est en train de travailler dessus, on travaille dessus avec le Ministère de l’Ecologie « comment accompagner tout cela de manière structurée et structurelle ? » pour faire en sorte qu’on bénéficie de tout ce qui est lié à la transformation de ce bois et à tout ce qui est induit de ces scieries et profiter des éléments pour faire de l’énergie, pour faire d’autres produits.
Il y aura bien un comité de filière et la proposition à faire, demande faite du Ministre, « dans quel cadre ? » Il faudra qu’on organise et articule le Conseil Supérieur de la Forêt qui doit rester un élément de définition stratégique, de planification, de lien, de discussion globale sur les enjeux de la forêt et le comité de filière va prendre la dimension beaucoup plus économique, car on est là dans le productif. La différence elle est là, il faut qu’on s’organise avec ces principes là et sur ces deux principes dans le débat qui est engagé, il faut faire des propositions pour qu’on puisse harmoniser et donner de la cohérence au comité de filière mais il est très important de bien indiquer, souligner que la filière bois doit être un élément du redressement productif. Il y a ensuite la question du fonds stratégique élément majeur qu’il faut qu’on construise. J’ai bien entendu Monsieur le Président sur ce que peuvent être les ressources et en particulier la taxe carbone. On a eu ce débat, ce débat est porté à l’Assemblée Nationale et au Sénat par un certain nombre de parlementaires qu’on a mobilisés et sur lequel il faudra continuer à se mobiliser. Le marché du carbone est dans une situation que je ne vais pas décrire mais vous connaissez la faiblesse de ce marché, mais ça n’empêche que dans le projet de loi, il faut que la forêt soit définitivement un élément qu’il soit accroché à ce marché du carbone, c’est indispensable mais dans le rapport qui avait été fait, ce fonds il faut qu’on essaye de le construire en essayant de regrouper tout ce qui peut concourir au financement de la forêt au-delà de la taxe carbone, il est intéressant de leur donner une cohérence dans un même fonds pour avoir ensuite une capacité d’agir plus efficacement, notamment dans le domaine de l’amont. La dispersion des sources de financement n’est pas la meilleure garantie de la capacité qu’on a de structurer les investissements.
Le fonds de stratégie devra regrouper un certain nombre d’autres éléments de financement et là aussi vous avez répondu et vous continuez à travailler sur le principe, on est d’accord « faut il qu’on fixe ensemble des limites pour que tout cela soit efficace et opérationnel » ? Comité de filière, fonds stratégique, vous avez évoqué la question du regroupement de l’offre forestière, je sais de tous les débats qu’on a sur la forêt, c’est l’éclatement de la forêt, des propriétaires forestiers, on n’a pas de structuration de l’offre donc ça rejaillit sur la capacité à développer des outils industriels et puis il y a les propriétaires forestiers qui existent et si il n’y avait pas de propriétaires forestiers, il n’y aurait pas de forêt non plus. On est bien obligé de concilier ces deux impératifs. La proposition que vous faites et moi j’attends les propositions sur le plan de gestion concerté sur plusieurs hectares, plusieurs propriétaires et groupements d’intérêts économiques environnementaux et forestiers. Au bout l’idée est la même, ce qu’il faut que l’on arrive à faire c’est de mobiliser le bois et qu’on s’organise de telle manière à ne pas laisser un propriétaire dans l’idée d’une gestion patrimoniale sans le domaine économique et je vais le faire en agriculture. La dimension collective de la gestion ce n’est pas la remise en cause de la capacité de chacun à être responsable, à être celui qui pilote son patrimoine. Dans l’agriculture les GIEE s’appuieront sur des chefs d’exploitation qui se donnent des objectifs collectifs et il n’y a pas de construction fondamentale d’autant plus que ces GIEEF resteront des groupements volontaires mais on peut avoir une double stratégie. En terme technique et un seul objectif, favoriser le regroupement parce que c’est ce qui nous est posé comme question depuis longtemps et là je compte sur vous et vu depuis les débats depuis que je suis arrivé vu ce que je vois et ce que j’entends, on est d’accord pour considérer qu’il y a un enjeu majeur après les incitations pouvant être mises à cela et là on aura à discuter de la manière on peut inciter à l’organisation et au regroupement de la production, ça c’est la question qui va être posée en terme d’exonération fiscale, en terme de réflexion menée sur l’utilisation de fonds possiblement européens dans le cadre des régions car on va avoir un deuxième pilier qui sera sans doute l’autorité de gestion des régions, ce qui ne remet pas du tout en cause la cohérence nationale qu’on doit donner à l’ensemble des politiques. Mais là on peut et on doit trouver l’accord entre nous. Je ne suis pas la pour la confrontation mais pour que comme dans le domaine de l’agriculture on trouve des solutions pour mobiliser la ressource sachant que le constat qui a été fait au niveau des industriels, ils ont une difficulté à sécuriser l’approvisionnement même d’ailleurs sur les coupes liées à l’ONF et aux forêts publiques qui sont structurées historiquement comme on le sait. Il faut qu’on ait une démarche de structuration de l’offre pour que l’on puisse derrière après avoir une démarche d’industrialisation et de transformation, les deux vont de pair. Ces outils, vous avez fait une proposition sur ces plans de gestion concertée, nous avons fait une proposition GIEEF. L’objectif est le même, on a à trouver les voies et les moyens de mettre en oeuvre des dispositifs qui soient cohérents et qui nous permettent d’atteindre l’objectif qui est souhaité c’est celui du regroupement de l’offre. J’y tiens personnellement, pas seulement pour l’harmonisation avec l’agriculture des GIEE mais pour la nécessité du regroupement de l’offre. Vous avez aussi évoqué la question sur, à la fois le fonds stratégique qui doit être pour l’amont la BPI étant celle qui viendra aider l’aval sur l’investissement industriel on a le problème lié à la régionalisation de notre forêt, à la plantation, à l’organisation de cette production de la ressource en bois, c’est très important. Cette coordination « communes forestières-forestiers privés » est absolument nécessaire et ce fonds stratégique devra être là pour permettre et aider à la définition des objectifs stratégiques, mais il y a aura aussi à développer l’investissement dans la transformation, c’est ce qui va remonter sur l’ensemble des réunions décentralisées sur le bois, pour voir quels sont les niveaux de l’investissement déjà repérés et pour mobiliser la BPI pour venir en aide et ce qu’ils veulent investir dans ce domaine et puis il y a ce que vous avez déploré comme moi sur le Conseil Constitutionnel qui a consisté à remettre en cause la possibilité de laisser à chacun de pouvoir faire les choix librement comme si obliger à utiliser une partie d’un matériau qui est produit ici dans notre pays, cela serait une atteinte à la liberté de choix dans la construction il faut qu’on y revienne et regarde et là ça sera du législatif.
Comment on fait pour permettre d’offrir des débouchés au bois en particulier aux feuillus, on a aussi à trouver les moyens de développer des filières, ce qui me peine le plus c’est dans des pays voisins qu’on cite souvent en exemple pour plein de choses, ils ont trouvé des solutions pour favoriser l’utilisation, la réglementation pour les feuillus en particulier et qu’en France on est encore là dessus en retard, il va falloir qu’on le comble, cela va être un axe très important du travail qu’on va devoir conduire pour trouver des débouchés à nos bois en particulier à nos feuillus. Voilà ce que je voulais dire sur les grands sujets essentiels.
Après vous avez évoqué longuement la question liée à l’assurance, sujet qui a été posé pour la forêt et aussi pour l’agriculture. Dans ce domaine, il est nécessaire d’avoir des outils assurantiel mais compte tenu des enjeux qui sont ceux liés aux aléas climatique et aux conséquences économiques qu’ils ont. Si je prends les grandes tempêtes, dans l’agriculture les inondations, les grandes sécheresses, l’assurance individuelle ne peut pas assurer la capacité à couvrir les pertes qui sont liées à ces gros aléas climatiques dont la forêt comme l’agriculture sont les premières confrontations et là on va être obligés sur les pistes que vous évoquez, à la fois, d’avoir la possibilité de faciliter l’assurance avec les comptes assurance bien sur mais il faut que l’on organise aussi des systèmes de solidarité sinon ça ne va pas fonctionner, ou des systèmes mutualisés. Je reste convaincu que les trois niveaux restent nécessaires : assurance individuelle, la mutualisation et la solidarité.
Ce qu’on va mettre en place et on a mis un groupe de travail là sur les questions agricoles, je veux le faire aussi pour la forêt car on est dans les mêmes contraintes et on doit trouver la même structure d’outils et de réponses, vous l’avez évoqué et vous avez raison.
On le sait en particulier et si c’est répété le réchauffement climatique a des conséquences il a d’abord des conséquences en matière de risques d’aléas climatiques fort que ça soit d’un côté la sécheresse et avec les écarts de température les risques de tempête et d’inondation, c’est bien cela l’enjeu. Il faut qu’on se structure pour faire face à cet aléa car la forêt comme l’agriculture sont directement concernées dans leur production économique par ces aléas. Il faut qu’on aboutisse à mettre en place un certain nombre de dispositifs à la fois assurantiel et de mutualisation et de solidarité. Il faudra qu’on voit comment on mobilise au niveau de l’ensemble des budgets européens agricole et FEADER, si il n’y a pas des moyens d’alimenter des fonds qui pourront être abondés et permettre d’assurer une meilleure couverture du risque par rapport à ce que vous indiquez, le fait que la forêt lorsqu’on est confronté à une tempête ou aléa climatique majeur c’est une perte sèche, une perte énorme introduite par tout cela, il faut qu’on s’organise je vais faire des propositions.
Vous avez aussi indiqué un sujet que j’ai commencé à traiter : les fameux centimes forestiers avec nos amis de l’agriculture et des chambres d’agriculture, j’ai eu l’occasion de rencontrer le Président des Chambres d’Agriculture pour commencer à discuter sur cette question, pas facile comme sujet, chacun étant dans son bon droit… Dans les discussions que j’ai eues il y a quelque chose qui a progressé, c’est ce qui concerne la forêt, elle doit être de la responsabilité des forestiers, personne n’imagine que les forestiers viennent donner quelques objectifs ou conseils aux agriculteurs. Il y a une forme de gouvernance qui va être à mettre en oeuvre et je vais moi-même par rapport à cette demande forte de ces forestiers, regarder comment dans le nouveau plan qu’on va appeler « plan d’avenir » avec les chambres comment il y aura des propositions qui vous seront faites afin de gérer de manière plus directe et associer la forêt par rapport aux enjeux de l’agriculture. Tout ce qui est fiscal, a engagé avec Patrick FALCONE, en particulier sur les propositions qu’on pouvait faire sur les comptes d’épargne et transférables pour mobiliser le bois, des discussions avec ceux qu’on à a toujours beaucoup de plaisir à rencontrer c'est-à-dire les fonctionnaires de Bercy, essayant de leur expliquer que même si on créé des comptes qui peuvent être transférables ou qui gardent la fiscalité de transmission ça a comme objectif de mobiliser de la valeur et que pour l’Etat, ce n’est pas négatif, plus on sort le bois, plus il est travaillé et plus derrière il y a de la fiscalité qui rentre c’est un objectif qui est vendu par le Ministre de l’Agriculture, objectif positif dans ce système là on mobilise le bois on garde pour le propriétaire sa capacité à transmettre mais une fois que le bois est mobilisé c’est de l’activité économique qui a été générée et sur cette activité économique il doit y avoir des rentrées fiscales, on devrait pouvoir regarder cela avec beaucoup d’indigence.
On est dans cette Assemblée Générale un peu juste à l’entre-deux, on a fait des propositions en tant qu’objectif, on vous les a envoyées, les réponses commencent à arriver et maintenant on va passer à la phase des arbitrages et donc de la discussion et comme je vous ai dit qu’on avait un peu de temps, vous voyez que ce sont les sujets les plus importants que j’ai évoqué. Il y a encore moyen de trouver des voies d’accord entre nous, je le dis. Pour réussir pour la forêt, j’ai pris cette image de la forêt et du houppier, il faut un tronc solide et si le tronc est tout le temps divisé, si chacun dit « les communes veulent autre chose, l’ONF, les propriétaires forestiers… » et si chacun veut garder un pré carré on n’aura pas de tronc solide et de bel houppier, donc il faut qu’on soit capable de garder cette cohérence et au contraire qu’on construise. Le Ministre que je suis veut réussir à construire cette cohérence et pour ce faire, vous avez parlé des coopératives mais les propriétaires forestiers c’est un élément essentiel quand on a affaire à un élément structurant, on fait en sorte de trouver des accords pour qu’on avance ensemble l’objectif étant le même, on redonne à notre forêt sa capacité, sa beauté, ses dimensions économiques, écologiques, sociologique.
Je n’ai pas parlé de la chasse mais je l’avais indiqué lors du Conseil Supérieur, je n’ai pas oublié des problèmes cela vaut dans d’autres domaines. Les chasseurs n’auto gèrent pas seuls, ces enjeux concernent aussi d’autres acteurs économiques pour réussir, cet objectif nous devons garder cette cohérence. On a réussi aujourd’hui depuis quelques jours à se fixer de grands objectifs globaux maintenant il faut que l’on réussisse à mettre en oeuvre, mais j’ai confiance dans la capacité de tous à réussir ce grand et beau pari celui du bois et de la forêt française.
Merci.
Source http://www.foretpriveefrancaise.com, le 30 juillet 2013