Déclaration de M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre, en réponse à une question sur l'augmentation de la TVA au 1er janvier 2014 et la politique fiscale du Gouvernement, au Sénat le 14 novembre 2013.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Question au gouvernement posée par M. Pierre Laurent, sénateur (de Paris) du groupe communiste républicain et citoyen, au Sénat le 14 novembre 2013

Texte intégral

Monsieur le président,
Mesdames et Messieurs les sénateurs,
Monsieur le sénateur Pierre Laurent,

Je connais votre discours. J'aimerais, de temps en temps, que vous preniez un peu de recul et que vous puissiez voir dans quelle situation nous avons trouvé le pays en 2012. Mais cela, si vous ne voulez pas l'admettre, alors évidemment vous pouvez continuer à construire un discours qui n'a pas une cohérence convaincante, et c'est cela votre problème. Mais je voudrais vous répondre avec respect et sincérité.
Oui, nous avons demandé un effort aux Français depuis 2012. Mais si nous n'avions pas demandé cet effort -et nous l'avons toujours dit, y compris pendant la campagne des présidentielles-, si nous n'avions pas demandé au début de ce quinquennat un effort pour redresser nos comptes publics, aujourd'hui où en serions-nous ? Je préfère vous poser la question à vous-même : le déficit budgétaire de la France atteindrait aujourd'hui 6%. Et il serait payé par qui ? Par les classes populaires et les classes moyennes ! Parce qu'avec un tel déficit si nous n'avions pas réagi immédiatement, en 2012 et 2013, alors nous serions dans les mains des marchés financiers.
J'aurais aimé, monsieur le sénateur Pierre Laurent, que vous reconnaissiez cette réalité qui demande effectivement un effort de redressement. Si nous l'avons fait, c'est parce que nous considérons qu'il est important que notre pays retrouve sa souveraineté pleine et entière, qu'il ne dépende pas des marchés financiers et de leur loi. Aujourd'hui, parce qu'un effort a été fait, nous pouvons dire que, même si Standard & Poor's donne une note négative à la France, eh bien, cela n'a pas d'influence sur les marchés financiers parce que la signature de la France est bonne, elle est sérieuse et qu'aujourd'hui nous empruntons aux taux les plus bas. Et qui emprunte à des taux des plus bas ? Pas seulement l'Etat mais aussi les entreprises, mais aussi les ménages. Et cela, c'est parce que, grâce à l'effort des Français, nous avons entrepris cet effort de redressement.
Mais est-ce que pour autant nous avons attendu pour tenir compte de vos attentes en matière de justice fiscale ? Non. Je ne comprends pas pourquoi vous ne l'avez pas rappelé vous-même. Il me semble même que certaines mesures, vous les aviez votées au début de ce quinquennat. Je voudrais les rappeler.
C'est nous qui avons mis en place une tranche à 45% de l'impôt sur le revenu pour, effectivement, que les revenus les plus élevés contribuent à cet effort que je viens de rappeler. J'ai également noté qu'à l'époque vous aviez voté -à l'époque c'est-à-dire dans cette législature- le rétablissement de l'impôt sur la fortune pour lutter contre la rente. J'ai vu que vous aviez vous-même voté les mesures que nous avions prises en matière de fiscalité du capital et du travail. On nous le reproche assez. On nous dit que nous avons trop prélevé sur le capital. Qui a mis sur le même plan la fiscalité du travail et du capital ? C'est notre gouvernement. Vous avez même voté pour cette mesure à l'époque.
Nous avons aussi pris un certain nombre de dispositions qui ont été combattues par la droite, c'est vrai je le reconnais, concernant les niches fiscales. Ce travail, nous l'avons engagé.
Vous avez évoqué la TVA. Mais, pour 2014, c'est notre gouvernement qui a proposé que la TVA sur les travaux à domicile et en particulier les travaux de rénovation thermique passent au taux le plus bas, c'est-à-dire à 5,5%. Cette décision vient s'inscrire dans un chantier de rénovation thermique qui est créateur d'emplois. Elle va s'additionner à la subvention pour les ménages qui vont investir pour leur logement, au prêt à taux 0 et au prêt environnement, qui va s'additionner au crédit d'impôt, qui permet effectivement de bénéficier d'une aide pour l'investissement. D'un côté, une facture de chauffage qui diminue, de l'autre de l'investissement, créateur d'emplois en particulier pour l'artisanat et les petites entreprises. C'est cela que nous avons fait et que nous avons entrepris.
Alors, moi, je voudrais vous poser une question à mon tour, puisqu'en réalité, vous, votre politique elle est simple, celle qui va vous faire manifester dans quelques jours : c'est déficit, déficit, toujours plus de déficit. Mais qui paie le déficit ? Qui paie le déficit, sinon les classes populaires et les classes moyennes ? Et le déficit de la France, c'est quoi concrètement ? C'est le remboursement, chaque année, des intérêts de l'emprunt ! Et c'est combien le remboursement des intérêts de l'emprunt dont vous nous avez laissé la facture, mesdames et messieurs les sénateurs de la droite ? 50 milliards d'euros par an, c'est plus que le budget de l'Education nationale.
Alors, si nous faisons des efforts de redressement des comptes publics qui, effectivement, mobilisent les Français avec des mesures de justice fiscale, c'est pour redonner à la France des marges de manœuvre pour investir dans l'éducation, investir dans l'innovation, investir dans la préparation de l'avenir.
C'est avec vous, c'est avec vous que nous pourrions faire cela, c'est à vous de décider si c'est ça que vous voulez. Si vous voulez sincèrement le redressement de la France, alors je vous invite à choisir et à ne pas mêler systématiquement vos voix à ceux qui courent derrière la droite et l'extrême-droite, c'est-à-dire qui ne se battent pas pour redresser le pays. Je vous invite à nous rejoindre pour l'avenir de la France dans la cohésion sociale et la solidarité nationale !

Source http://www.gouvernement.fr, le 19 novembre 2013