Déclaration de M. Philippe Martin, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, sur le développement de la filière du biogaz et des réseaux d'unités de méthanisation dans le cadre de la transition énergétique, à Toulouse le 8 novembre 2013.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Clôture des premières rencontres nationales pour le développement du biogaz, à Toulouse (Haute-Garonne) le 8 novembre 2013

Texte intégral

Monsieur le Ministre, Monsieur le Président de la Région Midi-Pyrénées, cher Martin Malvy,
Madame la députée (Emilienne Poumirol),
Monsieur le Président du conseil général, cher Pierre Izard,
Monsieur le Préfet de la Région Midi-Pyrénées,
Mesdames,
Messieurs,
Je suis très heureux de clore, ici à Toulouse, ces rencontres 2013 pour le développement du biogaz. De tels échanges sont essentiels pour faire avancer une filière qui va participer et participe déjà pleinement à la transition écologique et énergétique de la France.
La transition énergétique, c'est le cap réaffirmé par le Président de la République lors de la deuxième conférence environnementale et c'est la feuille de route qui m'a été confiée.
Les objectifs sont clairs : D'abord, la division de nos émissions de gaz à effet de serre par un facteur 4 d'ici à 2050. De ce point de vue, et si c'était encore nécessaire, le 1er volume du 5ème rapport du GIEC, publié il y a quelques semaines, nous a une fois de plus placés devant nos responsabilités. En matière climatique, même si l'horizon des résultats peut paraitre lointain, la mobilisation accrue de tous les pays en faveur de la lutte contre les dérèglements climatiques est plus que jamais urgente. La France accueillera, en 2015, le sommet international sur le climat.
Pour réussir ce moment important, pour parvenir à un accord à la fois universel et contraignant, notre pays doit lui-même être exemplaire. C'est la raison pour laquelle nos objectifs de réduction des gaz à effet de serre pour 2030, qu'ils soient nationaux ou européens, doivent être ambitieux.
Autres objectifs fixés par le Président de la République, ce sont ceux de la réduction de 50 % de la consommation finale d'énergie d'ici 2050 et dans un horizon plus proche, de la réduction de 30 % de notre consommation d'hydrocarbures d'ici 2030.
Ce cap, ces objectifs passent par la diversification de notre mix électrique, de nos sources d'approvisionnement, c'est une question de souveraineté nationale, c'est une condition du rétablissement de notre équilibre commercial, c'est également indispensable pour garantir dans la durée la sécurité d'approvisionnement de notre pays. Cette diversification nous conduira, entre autres, à développer massivement les énergies renouvelables et à ramener la part de l'électricité provenant du nucléaire à 50 % à l'horizon 2025.
Pour atteindre nos objectifs, il est évident nous devons changer progressivement notre manière de produire, d'aménager le territoire, de nous loger, de consommer, de nous déplacer, et même notre manière de gouverner.
Pour que ces changements soient acceptés, encore faut-il porter une vision positive de ces derniers, seule façon d'avancer avec les Français, avec les collectivités locales et avec les entreprises. Cette vision positive à laquelle je suis attaché, passe par des principes simples qui doivent irriguer notre pensée collective : priorité à la sécurité d'approvisionnement de la France, nécessité de protéger la compétitivité des entreprises françaises et de préserver le pouvoir d'achat des français, ambition d'une cohésion sociale et territoriale qui commande d'assurer l'accès de tous et partout à l'énergie, enfin, ne jamais oublier les enjeux climatiques et environnementaux.
Dans ce contexte, le développement du biogaz illustre parfaitement la nécessité d'une vision globale, sans laquelle il n'y aura pas de réussite de la transition énergétique. Cette technique est en effet à la croisée de plusieurs politiques :
- Une politique énergétique, avec le nécessaire développement des énergies renouvelables.
- Une politique de valorisation des déchets et donc de réduction de la mise en décharge de la matière organique.
- Une politique agricole enfin avec le traitement des effluents et des déchets agricoles. Le biogaz va nous permettre de mieux gérer les questions d'épandage au regard en particulier des problématiques liées à l'azote, nous permettre de susciter un complément de revenus pour les agriculteurs concernés, enfin d'offrir la possibilité d'une valorisation par revente sur les réseaux du biogaz produit ou de l'utilisation sur place en lieu et place des énergies fossiles traditionnelles.
Comme vous le savez, l'usage de sous-produits animaux est soumis à des règles strictes, c'est important ensuite pour, entre autre, l'utilisation des digestats en tant que fertilisants.
Ces règles relèvent du Ministère de l'Agriculture comme toutes les règles, elles doivent être protectrices et proportionnées.
Pour ma part, je n'ai pas connaissance d'évolutions récentes ou à venir sur le sujet. Je vais donc me rapprocher de mon collègue Stéphane LE FOLL pour savoir ce qu'il en est, et relayer vos interrogations. Naturellement rien ne se fera sans concertation.
L'Etat soutient par conséquent la méthanisation de déchets et la valorisation du biogaz produit, que ce soit au travers de la réglementation et de la planification de la gestion des déchets, ou que ce soit par des soutiens financiers, principalement par le biais de politiques énergétiques et de gestion des déchets.
Ces soutiens se traduisent notamment :
- dans les objectifs de valorisation matière et organique des déchets ménagers et assimilés, nous voulons passer de 24% en 2004 à 45% en 2015 ;
- dans la possibilité d'injecter le biogaz produit dans les réseaux de gaz : des textes sont pris ou vont l'être pour diverses catégories de déchets, après le biogaz de méthanisation « classique » cela va aussi être possible pour la méthanisation à partir de boues de stations d'épuration ;
- dans les dispositifs de soutien financiers : avec un tarif d'injection du biogaz dans les réseaux et un tarif de rachat de l'électricité produite à partir de cogénération fonctionnant au biogaz ;
- dans le plan Energie -Méthanisation- Autonomie Azote (EMAA) qui vise à faire émerger et soutenir le développement de 1000 méthanisations à la ferme d'ici 2020. A ce titre, je tiens à rappeler la convention Etat-Région pour le développement de la méthanisation signée le 30 juillet 2013 par le Préfet de région et le Président de la Région Midi-Pyrénées en ma présence et celle de mon collègue Stéphane LE FOLL, signature intervenue à Saint-Mont, dans le Gers.
Je tiens aussi à rappeler l'effort de simplification que le Gouvernement a engagé dans le cadre des états généraux de la modernisation du droit de l'environnement.
Une expérimentation de permis unique, rassemblant les procédures environnementales (ICPE, espèces protégées), d'urbanisme (permis de construire), de défrichement, et enfin des autorisations liées au code de l'énergie, sera d'ailleurs conduite pour les installations de méthanisation et de valorisation du biogaz (il y a aussi l'éolien terrestre) dans plusieurs régions. Je tenais d'ailleurs à vous annoncer ici à Toulouse, que j'avais décidé que la région Midi-Pyrénées ferait partie des régions où se déroulera l'expérimentation de simplification des procédures.
C'est bien normal, tant il est vrai que la région Midi-Pyrénées est en en pointe dans le domaine de la méthanisation : 17 unités de méthanisation sont en fonctionnement sur ce territoire dont 4 sont des projets à la ferme et 8 des projets agro-industriel. Le potentiel de développement est plus important encore puisque plus de 80 projets sont à l'étude. Il était donc logique de profiter de ce dynamisme pour expérimenter des améliorations juridiques qui bénéficieront à l'ensemble de la filière et aux autres régions.
Ces différents soutiens de l'Etat ont permis et vont permettre un développement important de l'utilisation du biogaz et du nombre d'installation de gestion des dchets. Je souhaite que ce mouvement s'amplifie car on parle ici d'un potentiel significatif. Peut-être plus de 200 terrawatts-heure à l'horizon 2050 ! Avec des efforts parallèles en matière d'efficacité énergétique, on peut imaginer qu'un jour le gaz consommé en France sera 100 % renouvelable et 100 % made in France.
Aux côtés de l'Etat, les collectivités locales sont aussi présentes et indispensables avec des soutiens à l'investissement, en particulier les fonds FEADER et du FEDER gérés désormais par les régions. Mais ce sont aussi les acteurs économiques et les agriculteurs qui portent les projets et les mettent en oeuvre. On compte ainsi 10 projets par mois en moyenne : depuis 2011, 242 projets ont ainsi été développés dont 140 à la ferme.
Je veux dire un mot du développement de la filière d'injection de biométhane, avec le soutien de GrDF qui participe à de études pour plus de 360 projets. Cette dynamique est très encourageante et montre que la complémentarité des actions nationales et locales, publiques et privés permet de faire avancer la France dans la voie de la transition énergétique.
Pour poursuivre le développement du biogaz, plusieurs travaux et études ont été réalisées ou sont actuellement en cours (ADEME en particulier, mais aussi INERIS...). Ces travaux vont nous permettre :
- d'utiliser le retour d'expérience des pays européens qui sont en avance sur nous, sans reproduire leurs erreurs et d'optimiser le bilan énergétique des installations ;
- de qualifier les pertes en biogaz aux différentes étapes du procédé, de manière à les réduire (ce sont les études INERIS) pour augmenter le rendement de production du biogaz ;
- de qualifier les caractéristiques du digestat (en cours de normalisation au niveau européen, par ailleurs) aux différents stades du processus, et donc d'améliorer la technique pour chacun de ces stades ;
- de travailler sur la qualité environnementale de la fraction liquide du digestat et sur ses utilisations (de l'eau chargée en azote, valorisable).
Il faut également que nous poursuivions le travail d'innovation dans le domaine de la méthanisation et dans les usages du biométhane. Cela nous permettra, et j'insiste sur ce point, d'accroître nos efforts collectifs pour rendre toujours plus acceptables, socialement et environnementalement, ces projets.
Vous l'avez compris, le développement des énergies renouvelables est pour moi une priorité absolue et j'entends que le biogaz prenne toute sa place dans le bouquet d'ENR.
C'est pourquoi, la loi sur la transition énergétique que je présenterai au printemps prochain comportera un pilier relatif aux énergies renouvelables.
Cette nouvelle législation, issue du DNTE (Toulouse), est destinée, en outre, à offrir un cadre stable et durable aux opérateurs. Je souhaite qu'elle soit l'occasion d'un élan nouveau et coordonné pour ces énergies, un élan qui s'inscrive dans le temps, un élan qui soit à la hauteur de nos ambitions sur le climat, à la hauteur des enjeux de sécurité d'approvisionnement, à la hauteur des défis de la France et des besoins des Français. Cet élan national, qui devra être relayé par une indispensable dimension européenne, s'appuiera sur les collectivités locales, dont les responsabilités devront être accrues dans le respect de la cohésion et de la cohérence nationale. Je le dis ici, la loi portera des dispositions décentralisatrices ambitieuses qui garantiront la réussite de sa mise en oeuvre.
Merci à vous, Monsieur le Président, et cher Martin Malvy,
Merci à vous, mesdames et messieurs, de m'avoir permis de m'exprimer sur ce grand chantier de la transition énergétique qui se traduira par l'une des lois les plus importantes du quinquennat.
Merci surtout de m'avoir donné l'occasion de vérifier qu'une fois encore, pour relever un défi, je pouvais compter sur cette belle région de Midi-Pyrénées.
Http://www.developpement-durable.gouv.fr, le 15 novembre 2013